Cour d’appel de Toulouse, 31 janvier 2025, RG n° 23/00494
Cour d’appel de Toulouse, 31 janvier 2025, RG n° 23/00494

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Toulouse

Thématique : Rupture conventionnelle contestée : consentement vicié et travail dissimulé en question.

Résumé

Embauche et demande de rupture

M. [I] [Z] a été embauché le 26 février 2020 par l’EURL [2] en tant que second de cuisine, sous un contrat de travail à durée indéterminée. Le 13 avril 2021, il a demandé une rupture conventionnelle de son contrat. L’employeur a convoqué M. [Z] à un entretien préparatoire le 20 mars 2021, et la rupture a été signée lors de cet entretien, prenant effet le 8 juin 2021.

Actions en justice

Le 1er octobre 2021, M. [Z] a saisi le conseil de prud’hommes de Foix, alléguant travail dissimulé, violation de la législation du temps de travail, et demandant la nullité de la rupture conventionnelle en raison de manquements graves de l’employeur. Le conseil a rendu un jugement le 20 janvier 2023, déboutant M. [Z] de toutes ses demandes.

Appel et communication de pièces

M. [Z] a interjeté appel du jugement le 10 février 2023. Par la suite, une ordonnance du 10 octobre 2023 a constaté que l’employeur avait communiqué les pièces demandées par M. [Z], rendant sa requête sans objet.

Prétentions de M. [Z]

Dans ses conclusions du 26 septembre 2023, M. [Z] a demandé l’infirmation du jugement, arguant que ses demandes étaient recevables et fondées. Il a allégué des manquements de l’employeur concernant la durée du travail, le non-paiement d’heures supplémentaires, et a demandé des indemnités pour divers préjudices.

Prétentions de l’EURL [2]

L’EURL [2] a demandé la confirmation du jugement en toutes ses dispositions, rejetant les demandes de M. [Z] relatives à la rupture conventionnelle, aux heures supplémentaires, et à d’autres indemnités. Elle a également demandé la condamnation de M. [Z] à lui verser une somme au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Contexte de travail

Le restaurant employait trois personnes à la date du litige. M. [Z] a soutenu avoir effectué de nombreuses heures supplémentaires non rémunérées, produisant des tableaux de temps et des attestations d’autres salariés pour étayer ses dires. L’employeur a contesté ces allégations, affirmant que M. [Z] travaillait sous les directives du chef de cuisine.

Heures supplémentaires et repos compensateur

Le tribunal a examiné les heures supplémentaires revendiquées par M. [Z] et a conclu qu’il n’avait pas prouvé l’existence d’heures supplémentaires au-delà de la durée contractuelle. Les demandes de repos compensateur et de dommages pour non-respect des temps de repos ont également été rejetées.

Travail dissimulé

M. [Z] a allégué avoir travaillé pendant des périodes d’activité partielle, demandant une indemnité pour travail dissimulé. Le tribunal a constaté que l’employeur avait omis de déclarer certaines heures travaillées, ce qui a été jugé comme une dissimulation intentionnelle.

Obligation de sécurité

M. [Z] a également invoqué un manquement à l’obligation de sécurité de l’employeur, mais le tribunal a estimé qu’il n’avait pas prouvé un préjudice lié à ce manquement.

Rupture conventionnelle

Concernant la rupture conventionnelle, M. [Z] a soutenu que son consentement avait été vicié par les manquements de l’employeur. Cependant, le tribunal a confirmé la validité de la rupture, considérant que M. [Z] n’avait pas apporté de preuves suffisantes pour établir un vice de consentement.

Décision finale

La cour a infirmé le jugement en ce qui concerne le travail dissimulé et le non-respect du repos hebdomadaire, condamnant l’EURL [2] à verser des indemnités à M. [Z]. Elle a également débouté M. [Z] de ses autres demandes et a condamné l’EURL aux dépens.

31/01/2025

ARRÊT N°2025/27

N° RG 23/00494 – N° Portalis DBVI-V-B7H-PH7M

MD/CD

Décision déférée du 20 Janvier 2023 – Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de FOIX ( 21/00076)

O. HEBERT

Section Commerce

[I] [Z]

C/

E.U.R.L. [2]

INFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

4eme Chambre Section 1

***

ARRÊT DU TRENTE ET UN JANVIER DEUX MILLE VINGT CINQ

***

APPELANT

Monsieur [I] [Z]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Christine CASTEX de la SAS CABINET CASTEX, avocat au barreau D’ARIEGE

INTIM »E

E.U.R.L. [2]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par Me Philippe ISOUX de la SELARL CABINET PH. ISOUX, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 06 Novembre 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant , M. DARIES, conseillère, chargée du rapport. Cette magistrate a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

C.GILLOIS-GHERA, présidente

M. DARIES, conseillère

N. BERGOUNIOU, magistrate honoraire exerçant des fonction juridictionnelles

Greffière, lors des débats : C. DELVER

ARRET :

– CONTRADICTOIRE

– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

– signé par C.GILLOIS-GHERA, présidente, et par C. DELVER, greffière de chambre

FAITS ET PROCÉDURE

M. [I] [Z] a été embauché le 26 février 2020 par l’EURL [2], comportant un hôtel quatre étoildes et un restaurant gastronomique, en qualité de second de cuisine suivant contrat de travail à durée indéterminée régi par la convention collective nationale des hôtels, cafés, restaurants.

Par courrier du 13 avril 2021, M. [Z] a sollicité une rupture conventionnelle de son contrat de travail.

Par courrier du 20 mars 2021, l’EURL [2] a convoqué M. [Z] à un entretien préparatoire fixé au 27 avril 2021.

La rupture conventionnelle a été signée entre les parties lors de cet entretien, avec une prise d’effet fixée au 8 juin 2021.

M. [Z] a dénoncé son reçu pour solde de tout compte suivant courrier du 16 août 2021.

M. [Z] a saisi le conseil de prud’hommes de Foix le 1er octobre 2021 pour demander la condamnation de son employeur au titre de travail dissimulé et violation à la législation du temps de travail, ainsi que la nullité de la rupture conventionnelle signée en raison de graves manquements de l’employeur. Il demandait enfin le versement de diverses sommes.

Le conseil de prud’hommes de Foix, section commerce, par jugement du 20 janvier 2023, a :

– débouté M. [Z] de sa demande au titre du vice de consentement au moment de la signature de la rupture conventionnelle,

– débouté M. [Z] de sa demande au titre de la nullité de la convention de rupture conventionnelle,

– débouté M. [Z] de sa demande au titre des dommages et intérêts pour la nullité de la convention de rupture conventionnelle,

– débouté M. [Z] de sa demande au titre de la requalification de la rupture conventionnelle en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– débouté M. [Z] de sa demande au titre du paiement des heures supplémentaires,

– débouté M. [Z] de sa demande au titre de l’indemnité forfaitaire découlant du délit de travail dissimulé,

– débouté M. [Z] de sa demande au titre de l’indemnité de licenciement,

– débouté M. [Z] de sa demande au titre de l’indemnité de préavis,

– débouté M. [Z] de sa demande au titre des congés payés sur préavis,

– débouté M. [Z] de sa demande au titre de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité,

– débouté M. [Z] de sa demande au titre du non-respect de l’amplitude journalière et hebdomadaire de travail, du repos hebdomadaire du temps de repos entre deux journées de travail,

– débouté M. [Z] de sa demande au titre de la reprise des salaires,

– débouté M. [Z] de sa demande d’indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

– débouté la société [2] de sa demande d’indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

– condamné chaque partie pour moitié aux dépens de l’instance,

– débouté M. [Z] de sa demande au titre de l’exécution provisoire.

Par déclaration du 10 février 2023, M. [I] [Z] a interjeté appel de ce jugement.

Suite à requête déposée par M. [Z] pour obtenir communication de pièces, par ordonnance du 10 octobre 2023, le conseiller de la mise en état a jugé qu’il n’était plus saisi d’une demande, l’employeur ayant communiqué à l’appelant le récapitulatif du chiffre d’affaires hebdomadaire sur la période de juin 2020 à juin 2021.

PRETENTIONS DES PARTIES

Par ses dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique le 26 septembre 2023, M. [I] [Z] demande à la cour de :

– infirmer et réformer le jugement en toutes ses dispositions.

Statuer à nouveau,

– dire et juger que ses demandes formulées sont recevables et bien fondées,

– ordonner que l’employeur le [2] a manqué gravement aux obligations en matière de durée du travail, au titre du non-paiement d’heures supplémentaires, au titre de l’absence d’affichage de l’horaire collectif, au titre de l’amplitude des journées, et de l’amplitude hebdomadaire de travail, du repos hebdomadaire, du temps de repos entre deux journées de travail,

– ordonner que son consentement a été vicié en raison des manquements graves de l’employeur en s’imposant par son autorité en sa qualité d’employeur et par la charge et l’amplitude des horaires de travail, ayant entraîné un épuisement moral et une charge de travail insupportable (manquement au titre de la durée du travail),

– ordonner que son consentement n’a pas consenti de manière libre et éclairé et son consentement a été vicié entraînant ainsi la nullité de la convention de rupture conventionnelle.

En conséquence,

– condamner l’EURL [2] à lui verser la somme de 8 161,80 euros à titre de dommages et intérêts pour la nullité de la rupture conventionnelle, valant licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– condamner l’EURL [2] à lui payer les sommes suivantes :

11 116,32 euros au titre des heures supplémentaires et la somme de 11 116,32 euros au titre du repos compensateur, chaque heure supplémentaire donnant droit à une heure de repos compensateur,

16 324 euros au titre de l’indemnité forfaitaire découlant du délit de travail dissimulé

16 523,76 euros au titre du préjudice causé par la perte de salaire brut non soumis à cotisation sociale,

850,18 euros au titre de l’indemnité de licenciement,

2 720,60 euros au titre de l’indemnité de préavis et 272,06 euros au titre des congés payés,

7 000 euros au titre des dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité

9 000 euros pour manquement au titre du non-respect de l’amplitude journalière et hebdomadaire de travail, du repos hebdomadaire, du temps de repos entre deux journées de travail.

– condamner l’EURL [2] à lui payer :

la somme de 3000 euros pour la mauvaise foi en produisant des pièces incohérentes en application de l’article 1240 du code civil,

la somme de 4 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

– condamner l’EURL [2] aux entiers dépens.

Par ses dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique le 9 mai 2023, l’EURL [2] demande à la cour de :

– confirmer, en toutes ses dispositions, le jugement.

En conséquence :

– rejeter la demande de nullité de la rupture conventionnelle et l’ensemble des demandes relatives à la rupture du contrat de travail et, notamment, les demandes d’indemnité de préavis et de congés afférents, d’indemnité de licenciement et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– rejeter la demande de ‘reprise des salaires’ jusqu’à la décision à intervenir,

– rejeter la demande de rappel d’heures supplémentaires,

– rejeter la demande d’indemnité pour travail dissimulé,

– rejeter la demande de dommages et intérêts pour violation de l’obligation de sécurité,

– rejeter la demande de dommages et intérêts pour ‘non-respect de l’amplitude horaire et des temps de repos’,

– rejeter la demande relative à l’article 700 du code de procédure civile,

– débouter M. [Z] du surplus de ses demandes, fins et prétentions.

Et y ajoutant :

– condamner M. [Z] à lui payer la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.

La clôture de l’instruction a été prononcée par ordonnance en date du 25 octobre 2024.

Il est fait renvoi aux écritures pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens

et prétentions des parties, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire

Confirme le jugement déféré sauf en ce qu’il a débouté M. [Z] de ses demandes au titre du travail dissimulé, de dommages et intérêts pour non respect du repos hebdomadaire et a condamné chaque partie pour moitié aux dépens,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant:

Condamne la SAS [2] à payer à M. [I] [Z] les sommes de:

-1000,00 euros de dommages et intérêts pour non respect du repos hebdomadaire,

-16324,00 euros d’indemnité pour travail dissimulé,

Déboute M. [Z] de ses demandes de dommages et intérêts pour préjudice causé par la perte de salaire brut non soumis à cotisation sociale et sur le fondement de l’article 1240 du code civil,

Le déboute du surplus de ses demandes,

Condamne la SAS [2] aux dépens d’appel et à payer à M. [Z] la somme de 2000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute la SAS [2] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par C. GILLOIS-GHERA, présidente, et C. DELVER, greffière.

LA GREFFI’RE LA PR »SIDENTE

C. DELVER C.GILLOIS-GHERA

.

 


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