Restitution du dépôt de garantie et dégradations locatives : enjeux d’état des lieux.

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Restitution du dépôt de garantie et dégradations locatives : enjeux d’état des lieux.

L’Essentiel : Un propriétaire d’appartement a conclu un bail avec un locataire le 26 février 2021, suivi d’un état des lieux d’entrée. Le locataire a restitué les clés le 21 octobre 2021, moment où un état des lieux de sortie a été réalisé. Suite à cela, le locataire a assigné le propriétaire pour obtenir la restitution de son dépôt de garantie, tandis que le propriétaire a réclamé des paiements pour des dégradations. Le tribunal a constaté que les photographies prises lors de l’état des lieux de sortie démontraient des dégradations, rejetant ainsi la demande du locataire.

Contexte de la location

M. [P], propriétaire d’un appartement, a conclu un bail avec M. [Y] le 26 février 2021. Un état des lieux d’entrée a été réalisé de manière contradictoire et amiable entre les deux parties.

Restitution des clés et état des lieux de sortie

Le locataire a restitué les clés de l’appartement le 21 octobre 2021, date à laquelle un état des lieux de sortie a également été établi de manière contradictoire et amiable.

Litige sur le dépôt de garantie

Suite à la restitution des clés, M. [Y] a assigné M. [P] pour obtenir la restitution de son dépôt de garantie. En réponse, M. [P] a demandé le paiement d’une somme pour des dégradations locatives.

Arguments du locataire

Le locataire conteste le jugement qui rejette sa demande de restitution du dépôt de garantie et le condamne à payer des dégradations. Il soutient que l’état des lieux de sortie ne mentionnait aucune dégradation, ce qui contredirait les conclusions du tribunal.

Réponse du tribunal

Le juge a noté que les parties avaient convenu d’utiliser des photographies pour documenter l’état du logement lors de l’état des lieux de sortie, ce qui a été consigné dans le document. Il a conclu que, bien que les photographies aient été utilisées, l’état des lieux avait été établi de manière contradictoire et que le recours à un commissaire de justice n’était pas nécessaire.

Conclusion du tribunal

Le tribunal a jugé que les photographies fournies permettaient de comparer l’état du logement à l’entrée et à la sortie, prouvant ainsi l’existence de dégradations imputables au locataire. Par conséquent, le moyen soulevé par le locataire a été déclaré non fondé.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la valeur juridique de l’état des lieux établi contradictoirement lors de la remise et de la restitution des clés ?

L’article 3-2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 stipule que l’état des lieux établi contradictoirement par les parties lors de la remise et de la restitution des clés est joint au contrat de location.

Cet article précise que cet état des lieux doit être réalisé à l’initiative de la partie la plus diligente et à frais partagés par moitié.

Dans cette affaire, le tribunal a constaté que l’état des lieux de sortie ne comportait aucune indication sur l’état du logement.

Il a donc été jugé que, malgré l’absence de détails dans l’état des lieux de sortie, le document avait été établi de manière contradictoire et amiable, ce qui lui confère une valeur juridique.

Ainsi, le tribunal a pu se fonder sur les éléments de preuve fournis, tels que les photographies, pour établir l’existence de dégradations imputables au locataire.

Quelles sont les conséquences de l’absence d’un état des lieux de sortie établi par un commissaire de justice ?

L’article 3-2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 prévoit que, en cas de difficulté, l’état des lieux doit être dressé par un commissaire de justice.

Cependant, dans cette affaire, les parties ont convenu d’un commun accord de consigner l’état du logement sur le même document que celui dressé lors de l’entrée dans les lieux, en utilisant des photographies.

Le tribunal a relevé que cet accord était mentionné dans la rubrique « autres observations » de l’état des lieux de sortie, ce qui a permis de valider la procédure suivie.

Ainsi, bien que le recours à un commissaire de justice n’ait pas été effectué, le tribunal a jugé que l’état des lieux de sortie avait été établi contradictoirement et amiablement.

Cela a permis de prouver l’existence de dégradations imputables au locataire, malgré l’absence d’un état des lieux de sortie formellement dressé par un commissaire de justice.

CIV. 3

JL

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 février 2025

Rejet

Mme TEILLER, président

Arrêt n° 81 F-D

Pourvoi n° M 23-21.193

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 6 FÉVRIER 2025

M. [U] [Y], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° M 23-21.193 contre le jugement rendu le 7 juillet 2023 par le tribunal judiciaire de Strasbourg (11e chambre civile des contentieux de proximité et de la protection), dans le litige l’opposant à M. [K] [P], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.

Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Grall, conseiller, les observations de la SCP Doumic-Seiller, avocat de M. [Y], après débats en l’audience publique du 7 janvier 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Grall, conseiller rapporteur, Mme Proust, conseiller doyen, et Mme Maréville, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Strasbourg, 7 juillet 2023), rendu en dernier ressort, propriétaire d’un appartement, M. [P] (le bailleur) l’a donné à bail, le 26 février 2021, à M. [Y] (le locataire). Un état des lieux d’entrée a été établi contradictoirement et amiablement par les parties.

2. Le locataire a restitué les clés le 21 octobre 2021 et un état des lieux de sortie a été établi contradictoirement et amiablement par les parties le même jour.

3. Assigné par le locataire en restitution du dépôt de garantie, le bailleur a demandé, à titre reconventionnel, le paiement d’une certaine somme au titre de dégradations locatives.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. Le locataire fait grief au jugement de rejeter sa demande de restitution du dépôt de garantie, de le condamner à payer au bailleur une certaine somme au titre des dégradations locatives, déduction faite du montant de ce dépôt, ainsi qu’une somme au titre de la régularisation des charges locatives et d’ordonner la compensation, alors :

« 1°/ que l’état des lieux établi contradictoirement par les parties lors de la remise et de la restitution des clés ou, à défaut, par commissaire de justice, à l’initiative de la partie la plus diligente et à frais partagés par moitié, est joint au contrat ; qu’en l’espèce, après avoir constaté qu’il est constant que l’état des lieux de sortie du 21 octobre 2021 ne comportait aucune indication sur l’état du logement, le tribunal judiciaire s’est fondé sur l’attestation du nouveau locataire, les photographies transmises à M. [U] [Y] par M. [K] [P] ainsi que sur l’état d’entrée dans les lieux du nouveau locataire, pour retenir des dégradations imputables à M. [U] [Y] ; qu’en se déterminant de la sorte, le tribunal judiciaire n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, dont il résultait que l’état des lieux de sortie du 21 octobre 2021 ne mentionnait aucune dégradation, violant ainsi l’article 3-2 loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 ;

2°/ qu’en tout état de cause, en cas de difficulté, l’état des lieux doit être dressé par un commissaire de justice, sur l’initiative de la partie la plus diligente et à frais partagés par moitié ; qu’en l’espèce, le tribunal judiciaire s’est fondé sur les difficultés rencontrées par M. [K] [P] lors de l’établissement de l’état des lieux de sortie, pour retenir que l’attestation du nouveau locataire, les photographies transmises à M. [U] [Y] par M. [K] [P] ainsi que l’état d’entrée dans les lieux du nouveau locataire
établissaient l’existence de dégradations imputables à M. [U] [Y] ; qu’en statuant de la sorte, quand il incombait au bailleur de faire dresser l’état des lieux de sortie par un commissaire de justice, le tribunal judiciaire a derechef violé l’article 3-2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989. »

Réponse de la Cour

5. Le juge des contentieux de la protection a relevé que les parties étaient convenues, d’un commun accord, compte tenu des difficultés rencontrées pour décrire de façon littérale l’état du logement lors de l’établissement de l’état des lieux de sortie, de consigner cet état sur le même document que celui dressé lors de l’entrée dans les lieux par la prise de photographies, cet accord étant mentionné dans la rubrique « autres observations » de l’état des lieux de sortie suivie de leur signature.

6. Ayant ainsi fait ressortir que, nonobstant la décision prise par les parties de se référer à des photographies pour décrire l’état du logement dans l’état des lieux de sortie, ce document avait été établi contradictoirement et amiablement, en sorte que le recours à un commissaire de justice n’était pas obligatoire, il a pu, appréciant souverainement la valeur et la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis, en déduire que ces photographies
permettaient la comparaison de l’état du logement constaté à l’entrée et à la sortie des lieux et qu’elles prouvaient l’existence de dégradations imputables au locataire lors de la restitution des lieux.

7. Le moyen n’est donc pas fondé.


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