Renouvellement de bail et exercice du droit d’option : conséquences financières et extinction de l’instance

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Renouvellement de bail et exercice du droit d’option : conséquences financières et extinction de l’instance

L’Essentiel : La société civile immobilière (SCI) ASSURECUREUIL PIERRE a conclu un bail commercial avec la société par actions simplifiée (SAS) PROMOD le 18 octobre 2007 pour des locaux dans un centre commercial. En septembre 2019, la SAS PROMOD a demandé le renouvellement du bail, proposant un loyer réduit, ce qui a été accepté par la SCI ASSURECUREUIL PIERRE. En mai 2021, la SCI ANIMA a acquis les locaux. En février 2022, la SAS PROMOD a assigné les deux SCI pour fixer le loyer. Le juge a constaté le renouvellement du bail et a ordonné une expertise pour déterminer la valeur locative.

Contexte de l’affaire

La SCI ASSURECUREUIL PIERRE a conclu un bail commercial avec la SAS PROMOD le 18 octobre 2007 pour des locaux situés dans le centre commercial CANTO PERDRIX. Ce bail, d’une durée de douze ans, stipulait un loyer minimum garanti de 68.000 euros par an. En septembre 2019, la SAS PROMOD a demandé le renouvellement du bail, proposant un loyer réduit à 50.000 euros, ce que la SCI ASSURECUREUIL PIERRE a accepté sous certaines conditions.

Acquisition et litiges

Le 27 mai 2021, la SCI ANIMA a acquis la propriété de l’ensemble immobilier, y compris les locaux loués. En février 2022, la SAS PROMOD a assigné la SCI ANIMA et la SCI ASSURECUREUIL PIERRE devant le juge des loyers commerciaux pour fixer le loyer du bail renouvelé à 50.000 euros. Les deux procédures ont été jointes sous un seul numéro d’enregistrement.

Jugement du 10 juillet 2023

Le juge des loyers commerciaux a constaté le principe du renouvellement du bail à compter du 26 septembre 2019 et a ordonné une expertise pour déterminer la valeur locative des lieux. Il a également fixé une provision pour l’expert et réservé les dépens. Une ordonnance de remplacement d’expert a été émise en juillet 2023.

Développements récents

En novembre 2024, la SAS PROMOD a exercé son droit d’option, signifiant la fin du bail au 30 avril 2024. Elle a également demandé le désistement de l’instance contre la SCI ANIMA et la SCI ASSURECUREUIL PIERRE. La SCI ANIMA a accepté ce désistement, tandis que la SCI ASSURECUREUIL PIERRE a contesté la demande de la SAS PROMOD de laisser les frais à la charge de chaque partie.

Décisions du juge

Le juge a constaté que l’exercice du droit d’option par la SAS PROMOD a entraîné l’extinction rétroactive du bail renouvelé. Il a condamné la SAS PROMOD à payer des sommes à la SCI ASSURECUREUIL PIERRE et à la SCI ANIMA, ainsi qu’aux dépens. L’instance a été déclarée sans objet en raison de l’extinction du bail.

Conclusion

Le jugement a été rendu publiquement le 6 février 2025, confirmant l’extinction du bail et les obligations financières de la SAS PROMOD envers les autres parties.

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le principe du renouvellement du bail commercial selon le Code de commerce ?

Le principe du renouvellement du bail commercial est établi par l’article L. 145-57 du Code de commerce. Cet article stipule que :

« Dans le délai d’un mois qui suit la signification de la décision définitive, les parties dressent un nouveau bail dans les conditions fixées judiciairement, à moins que le locataire renonce au renouvellement ou que le bailleur refuse celui-ci, à charge de celle des parties qui a manifesté son désaccord de supporter tous les frais. »

Ainsi, le renouvellement du bail est une procédure qui doit être respectée par les deux parties, et en cas de désaccord, la partie qui s’y oppose doit assumer les frais.

Quels sont les effets de l’exercice du droit d’option par le preneur ?

L’exercice du droit d’option par le preneur a des conséquences importantes sur le bail. Selon la jurisprudence, le droit d’option ne peut être exercé qu’en l’absence d’accord sur le prix du bail renouvelé.

Il est également précisé que l’exercice de ce droit n’est soumis à aucune condition de forme. En l’espèce, la SAS PROMOD a notifié l’exercice de son droit d’option par acte extrajudiciaire.

Cela a pour effet d’éteindre rétroactivement le bail renouvelé à la date de son renouvellement, soit le 26 septembre 2019.

Comment sont répartis les frais d’instance en cas d’exercice du droit d’option ?

Les frais d’instance sont régis par l’article L. 145-57 du Code de commerce, qui indique que le preneur qui exerce son droit d’option doit prendre en charge l’ensemble des frais des parties, y compris ceux qui ne sont pas limités aux frais taxables.

Dans cette affaire, la SCI ASSURECUREUIL PIERRE a justifié sa demande de paiement de frais par des factures d’honoraires d’avocat.

Ainsi, la SAS PROMOD a été condamnée à payer à la SCI ASSURECUREUIL PIERRE la somme de 5.800 euros sur ce fondement.

Quelles sont les implications de l’extinction de l’instance suite à l’exercice du droit d’option ?

L’extinction de l’instance est une conséquence directe de l’exercice du droit d’option. En effet, lorsque le preneur exerce ce droit, il n’y a plus d’objet litigieux, ce qui entraîne la fin de l’instance.

Le juge a constaté que l’action en fixation des loyers était éteinte par le seul constat de l’exercice valide du droit d’option.

Ainsi, le désistement d’instance et d’action de la SAS PROMOD est devenu sans objet, car l’instance n’avait plus lieu d’être.

Comment sont déterminés les dépens et les frais au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ?

Les dépens sont régis par l’article 696 du Code de procédure civile, qui prévoit que la partie perdante est condamnée aux dépens, sauf décision motivée du juge.

Dans cette affaire, la SAS PROMOD a été condamnée aux dépens, car elle a perdu son procès.

De plus, l’article 700 du même code permet au juge de condamner la partie perdante à payer une somme destinée à compenser les frais exposés pour le procès.

Le juge a ainsi condamné la SAS PROMOD à verser 2.500 euros à la SCI ANIMA au titre de l’article 700, tenant compte de l’équité et de la situation économique des parties.

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

Loyers commerciaux

N° RG 22/02292 –
N° Portalis 352J-W-B7G-CWGWN

N° MINUTE : 1

Assignation du :
15 Février 2022

Jugement en fixation
[1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :

JUGEMENT
rendu le 06 Février 2025

DEMANDERESSE

S.A.S. PROMOD
[Adresse 6]
[Localité 3]

représentée par Maître Olivier ROUX de la SELEURL AGAPÊ, avocats au barreau de PARIS, avocats plaidant, vestiaire #C0210

DEFENDERESSES

S.C. ASSURECUREUIL PIERRE
[Adresse 2]
[Localité 5] / FRANCE

représentée par Maître Dominique COHEN TRUMER de la SELASU CABINET COHEN-TRUMER, avocats au barreau de PARIS, avocats plaidant, vestiaire #A0009

S.C.I. ANIMA
[Adresse 4]
[Localité 1]

représentée par Maître Henri NAJJAR de l’AARPI RICHEMONT DELVISO, avocats au barreau de PARIS, avocats plaidant, vestiaire #C0806

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Jean-Christophe DUTON, Vice-président, Juge des loyers commerciaux
Siégeant en remplacement de Monsieur le Président du Tribunal judiciaire de Paris, conformément aux dispositions de l’article R.145-23 du code de commerce ;

assisté de Camille BERGER, Greffière lors des débats et de Manon PLURIEL, Greffière lors de la mise à disposition

DEBATS

A l’audience du 06 Novembre 2024 tenue publiquement

JUGEMENT

Rendu publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
en premier ressort

Par acte sous seing privé du 18 octobre 2007, la SCI ASSURECUREUIL PIERRE, a donné à bail à la SAS PROMOD des locaux désignés « local n°23/24 » à usage commercial ayant pour destination l’activité de « prêt-à-porter femme et à titre accessoire, les accessoires s’y rapportant », dépendant du centre commercial CANTO PERDRIX situé [Adresse 8] à [Localité 7], pour une durée de douze ans à compter du 26 septembre 2007, moyennant un loyer minimum garanti de 68.000 euros par an, hors taxes, hors charges.

Par acte extrajudiciaire du  5 septembre 2019, la SAS PROMOD a signifié à la SCI ASSURECUREUIL PIERRE une demande de renouvellement du bail à compter du 26 septembre 2019, proposant la fixation du prix du bail renouvelé à la somme de 50.000 euros hors taxes et hors charges.

Par acte extrajudiciaire du 25 septembre 2019, la SCI ASSURECUREUIL PIERRE a accepté le principe du renouvellement du bail à compter du 26 septembre 2019, tout en proposant la fixation du loyer à compter de cette date à hauteur du dernier loyer indexé.

Par acte authentique du 27 mai 2021, la SCI ANIMA a acquis de la SCI ASSURECUREUIL PIERRE la propriété de l’ensemble immobilier comprenant le centre commercial CANTO PERDRIX, dont dépendent les locaux loués.

Après avoir notifié un mémoire préalable le 24 septembre 2021, la SAS PROMOD a fait assigner par exploit d’huissier du 15 février 2022 la SCI ANIMA devant le juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire de Paris, aux fins de voir fixer le loyer du bail renouvelé à la somme de 50.000 euros hors taxes et hors charges. L’instance a été enregistrée sous le numéro 22/02292.

Par exploit d’huissier du 22 février 2022, la SAS PROMOD a fait assigner la SCI ASSURECUREUIL PIERRE devant le juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire de Paris, aux fins de voir fixer le loyer du bail renouvelé à la somme de 50.000 euros hors taxes et hors charges. L’instance a été enregistrée sous le numéro RG 22/02410.

Par ordonnance du 7 novembre 2022, les deux procédures ont été jointes et sont désormais appelées sous le seul numéro RG 22/2292.

Par jugement du 10 juillet 2023, le juge des loyers commerciaux a substantiellement :
constaté, par l’effet de la demande de renouvellement du 5 septembre 2019 et de la réponse de la bailleresse du 25 septembre 2019, le principe du renouvellement du bail liant les parties, concernant des locaux désignés « local n°23/24 » dépendant du centre commercial CANTO PERDRIX à [Localité 7], à compter du 26 septembre 2019;rejeté la demande de mise hors de cause formée par la SCI ASSURECUREUIL PIERRE ;avant dire droit pour le surplus, ordonné une mesure d’expertise et désigné, en qualité d’expert Monsieur [E] [G] aux fins substantielles de rechercher la valeur locative des lieux loués à la date du 26 septembre 2019 au regard des dispositions des articles L. 145-33, L. 145-34 et R. 145-3 à R. 145-8 du code de commerce ;fixé à la somme de 3.500 euros la provision à valoir sur la rémunération de l’expert, somme qui devra être consignée par la SAS PROMOD ;fixé le loyer provisionnel pour la durée de l’instance au montant du loyer contractuel en principal, outre les charges ; réservé les dépens et les demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile.Par ordonnance de remplacement d’expert du 20 juillet 2023, Madame [L] [Z] a été désignée, en remplacement de Monsieur [E] [G].
Par ordonnance de restitution du 1er juillet 2024, les fonds consignés ont été restitués à la SAS PROMOD.
Par mémoires notifiés respectivement les 6 et 8 novembre 2024 à la SCI ANIMA et à la SCI ASSURECUREUIL PIERRE, la SAS PROMOD sollicite du juge des loyers commerciaux de :
lui donner acte de ce qu’elle exerce son droit d’option, conformément aux dispositions de l’ alinéa 2 de l’article L.145-57 du code de commerce ;
constater que le bail a ainsi pris fin le 30 avril 2024 ;
lui donner acte de ce qu’elle se désiste de l’instance et de l’action engagée à l’encontre de la SCI ANIMA et de la SCI ASSURECUREUIL PIERRE par assignations signifiées les 15 et 22 février 2022, enregistrée sous le numéro RG 22/02292 ;
se déclarer dessaisi ;
juger que chacune des parties supportera ses frais, dépens et frais irrépétibles exposés.Par mémoires notifiés le 29 octobre 2024 à la SAS PROMOD et à SCI ASSURECUREUIL PIERRE, la SCI ANIMA sollicite du juge des loyers commerciaux de :
lui donner acte de ce qu’elle accepte le désistement d’instance et d’action formé par la SAS PROMOD ;
dire et juger que la SAS PROMOD doit supporter tous les frais relatifs à l’instance ;
condamner la SAS PROMOD à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
condamner la SAS PROMOD aux entiers dépens.
Par mémoires distincts notifiés le 4 novembre 2024 à la SCI ANIMA et à la SAS PROMOD, la SCI ASSURECUREUIL PIERRE sollicite du juge des loyers commerciaux de :
débouter la SAS PROMOD de sa demande visant à laisser à chacune des parties ses frais et dépens ;
condamner la SAS PROMOD à lui payer la somme de 5.880 euros au titre de l’intégralité des frais d’instance ;
condamner la SAS PROMOD aux dépens.
L’audience de plaidoirie a eu lieu le 6 novembre 2024. La date de délibéré a été fixée au 6 février 2025.

MOTIVATION
A titre liminaire, le juge des loyers commerciaux rappelle qu’en application de l’article 4 du code de procédure civile, les demandes tendant à “dire”, ”juger” et “constater” ne constituent pas des prétentions en ce qu’elles ne confèrent pas de droit à la partie qui les requiert hormis les cas prévus par la loi, ces demandes n’étant que le rappel des moyens invoqués.

Il résulte des dispositions de l’alinéa 2 de l’article L.145-57 du code de commerce que dans le délai d’un mois qui suit la signification de la décision définitive, les parties dressent un nouveau bail dans les conditions fixées judiciairement, à moins que le locataire renonce au renouvellement ou que le bailleur refuse celui-ci, à charge de celle des parties qui a manifesté son désaccord de supporter tous les frais.

Sur le constat de l’exercice du droit d’option par le preneur et ses effets sur le bail
Il est constant que le droit d’ option ne peut être exercé qu’à défaut d’accord des parties sur le prix du bail renouvelé.
Il est également constant que l’exercice du droit d’ option n’est soumis à aucune condition de forme.
En l’espèce, la SAS PROMOD a notifié l’exercice de son droit d’option par acte extrajudiciaire du 26 février 2024. Il est rapporté par la SCI ANIMA que SAS PROMOD a quitté les lieux le 30 avril 2024, sans que cela soit contesté par le preneur.
Aucune partie ne conteste la validité de l’exercice de ce droit, en conséquence de l’exercice du droit d’option, le bail renouvelé le 26 septembre 2019 s’éteint rétroactivement à cette même date.

Sur les autres effets de l’exercice du droit d’option
Sur les frais de l’instance
Le preneur qui a exercé son droit d’option s’expose à la prise en charge de l’ensemble des frais des parties qui ne sont pas limités aux frais taxables.
La SCI ANIMA ne sollicite aucun frais sur le fondement autonome de l’article L.145-57 du code de commerce, et se borne à solliciter des frais au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La SCI ASSURECUREUIL PIERRE sollicite le paiement de 5.800 euros sur le fondement autonome de l’article L.145-57 du code de commerce, et en justifient par des factures d’honoraires d’avocat sur la période du 7 novembre 2022 au 4 novembre 2024 qui se rattache à la période litigieuse.
En conséquence, il y a lieu de condamner la SAS PROMOD à payer à la SCI ASSURECUREUIL PIERRE la somme de 5.800 euros sur le fondement de l’article L.145-57 du code de commerce.
Sur l’extinction de l’instance
L’option exercée en cours d’instance va mettre fin à cette instance, puisqu’il n’y a plus d’objet litigieux.
En conséquence de l’exercice de cette option, il y a lieu de constater l’extinction de l’instance.
L’action en fixation des loyers étant éteinte par le seul constat de l’exercice valide du droit d’option, le désistement d’instance et d’action apparaît sans objet. Il en est de même de la demande d’acceptation d’untel désistement.
Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile
L’article 696 du code de procédure civile prévoit que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

En l’espèce, il y a lieu de condamner la SAS PROMOD aux dépens.

L’article 700 du code de procédure civile prévoit que la partie condamnée aux dépens ou qui perd son procès peut être condamnée à payer à l’autre partie au paiement d’une somme destinée à compenser les frais exposés pour le procès et non compris dans les dépens. Dans ce cadre, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique des parties.

En l’espèce, il y a lieu de condamner la SAS PROMOD à payer à la SCI ANIMA la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS
Le juge des loyers commerciaux statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort,
Constate que par l’exercice du droit d’option de la SAS PROMOD, le bail du 18 octobre 2007 l’ayant lié à la SCI ASSURECUREUIL PIERRE jusqu’au 26 mai 2021, puis à la SCI ANIMA, à compter du 27 mai 2021, renouvelé le 26 septembre 2019, s’éteint rétroactivement au 26 septembre 2019 ;
Condamne la SAS PROMOD à payer à la SCI ASSURECUREUIL PIERRE la somme de 5.800 euros sur le fondement de l’article L.145-57 du code de commerce ;
Condamne la SAS PROMOD à payer à la SCI ANIMA, la somme de 2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SAS PROMOD aux dépens ;
Constate l’extinction de l’action en fixation de loyer du fait de l’extinction rétroactive du bail renouvelé ;
Dit que les demandes de désistement d’instance et d’action et d’acceptation du désistement sont sans objet.

Fait et jugé à Paris le 06 Février 2025

La Greffière Le Président
M. PLURIEL J-C. DUTON


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