L’Essentiel : Par un contrat de bail signé le 26 décembre 1994, un bailleur a loué un appartement à une locataire pour un loyer mensuel de 1192,91 euros, avec effet au 1er avril 1995. Après le décès du bailleur, ses héritiers ont pris la relève. En raison de loyers impayés, un créancier a émis un commandement de payer le 15 janvier 2024, réclamant 7 946,25 euros. Le 20 mars 2024, le créancier a assigné la locataire devant le juge, demandant l’expulsion et le paiement des arriérés. Le tribunal a jugé l’action recevable, confirmant l’expulsion et condamnant la locataire à verser 16 179,68 euros.
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Contexte du BailPar un contrat de bail signé le 26 décembre 1994, Monsieur [Z] [K] a loué un appartement à Madame [T] [M] pour un loyer mensuel de 1192,91 euros, avec effet au 1er avril 1995. Après le décès de Monsieur [Z] [K], ses héritiers ont pris la relève. Commandement de PayerEn raison de loyers impayés, Monsieur [L] [K] a émis un commandement de payer le 15 janvier 2024, réclamant 7 946,25 euros pour l’arriéré locatif, en se basant sur la clause résolutoire du contrat de bail. Assignation en JusticeLe 20 mars 2024, Monsieur [L] [K] a assigné Madame [T] [M] devant le juge des contentieux de la protection, demandant la constatation de la clause résolutoire, l’expulsion de la locataire, et le paiement d’une provision pour loyers impayés. Arguments de Monsieur [L] [K]Monsieur [L] [K] a soutenu que plusieurs loyers étaient restés impayés malgré le commandement de payer. Il a demandé la confirmation de la clause résolutoire et l’expulsion de Madame [T] [M], ainsi que le paiement d’une somme de 8 408,07 euros pour les loyers et charges impayés. Réponse de Madame [T] [M]Madame [T] [M] a reconnu sa dette mais a demandé des délais de paiement, invoquant des difficultés financières dues à sa retraite. Elle a contesté la validité du commandement de payer et a demandé la suspension des effets de la clause résolutoire. Décision du TribunalLe tribunal a jugé que l’action de Monsieur [L] [K] était recevable et que le commandement de payer était valide. Il a constaté que la clause résolutoire avait été acquise, permettant l’expulsion de Madame [T] [M]. Indemnités et PaiementsLe tribunal a condamné Madame [T] [M] à verser 16 179,68 euros pour loyers impayés et à payer une indemnité d’occupation mensuelle jusqu’à la libération des lieux. Sa demande de délais de paiement a été rejetée. Frais et DépensMadame [T] [M] a été condamnée à payer les dépens de la procédure, ainsi qu’une somme de 300 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour couvrir les frais engagés par Monsieur [L] [K]. Exécution de la DécisionLa décision a été déclarée exécutoire à titre provisoire, ordonnant à Madame [T] [M] de libérer les lieux dans un délai de quinze jours, sous peine d’expulsion avec l’assistance de la force publique. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions de validité du commandement de payer dans le cadre d’un bail d’habitation ?Le commandement de payer est un acte juridique essentiel dans le cadre d’un bail d’habitation, notamment pour activer la clause résolutoire en cas de loyers impayés. Selon l’article 24 I de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, modifié par la loi 2023-668 du 27 juillet 2023, toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges ne produit effet que six semaines après un commandement de payer demeuré infructueux. En l’espèce, le commandement de payer a été signifié le 15 janvier 2024, pour un montant de 7 946,25 euros. Ce commandement mentionnait que le locataire disposait d’un délai de six semaines pour s’acquitter de sa dette, ce qui est conforme aux exigences légales. De plus, le commandement devait comporter un décompte de la dette et un avertissement sur les conséquences d’un non-paiement, ce qui a également été respecté. Ainsi, le commandement de payer est valide et a été correctement notifié, permettant l’activation de la clause résolutoire. Quelles sont les conséquences de l’acquisition de la clause résolutoire dans un contrat de bail ?L’acquisition de la clause résolutoire entraîne des conséquences significatives pour le locataire. L’article 1224 du code civil stipule que la résolution d’un contrat peut résulter de l’application d’une clause résolutoire. En matière de bail, l’article 24 I de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 précise que la clause résolutoire pour défaut de paiement ne produit effet que six semaines après un commandement de payer demeuré infructueux. Dans le cas présent, le commandement de payer a été signifié le 15 janvier 2024, et le locataire n’a pas régularisé sa situation dans le délai imparti. Par conséquent, les conditions d’acquisition de la clause résolutoire étaient réunies à la date du 15 mars 2024, permettant ainsi au bailleur d’initier une procédure d’expulsion. L’expulsion du locataire peut être ordonnée avec le concours de la force publique, conformément à l’article L.412-1 du code des procédures civiles d’exécution, si le locataire ne libère pas les lieux dans le délai imparti. Quels sont les droits du bailleur en cas de loyers impayés et de maintien dans les lieux ?En cas de loyers impayés, le bailleur dispose de plusieurs droits pour protéger ses intérêts. L’article 1103 du code civil stipule que les contrats doivent être exécutés de bonne foi, et l’article 1217 précise que le créancier peut demander l’exécution forcée de l’obligation, en l’occurrence, le paiement des loyers dus. De plus, le maintien dans les lieux après la résiliation du bail constitue une faute civile, ouvrant droit à réparation pour le bailleur, qui peut demander une indemnité d’occupation. En l’espèce, le bailleur a produit un décompte des loyers impayés, s’élevant à 16 179,68 euros, et a demandé une indemnité d’occupation pour la période postérieure à la résiliation du bail. Cette indemnité est calculée sur la base du montant des loyers qui auraient été dus si le bail s’était poursuivi, conformément aux articles 1231-6 et 1342-10 du code civil. Ainsi, le bailleur a le droit de réclamer le paiement des loyers dus ainsi qu’une indemnité d’occupation pour la période de maintien dans les lieux. Quelles sont les conditions pour obtenir des délais de paiement dans le cadre d’un litige locatif ?Les délais de paiement peuvent être accordés par le juge dans le cadre d’un litige locatif, sous certaines conditions. L’article 24 V et VII de la loi du 6 juillet 1989 permet au juge d’accorder des délais de paiement, mais cela est conditionné à la reprise du versement intégral du loyer courant par le locataire avant la date de l’audience. Dans le cas présent, le locataire n’a pas effectué de versement depuis mai 2024, ce qui empêche le juge d’accorder des délais de paiement. De plus, la demande de suspension des effets de la clause résolutoire ne peut être acceptée si le locataire n’a pas régularisé sa situation financière avant l’audience. Ainsi, en l’absence de reprise des paiements, la demande de délais de paiement formulée par le locataire a été rejetée. Les conditions pour obtenir des délais de paiement sont donc strictes et nécessitent une bonne foi dans l’exécution des obligations locatives. |
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1] Copie conforme délivrée
le :
à : Me Bénédicte LAVILLE
Copie exécutoire délivrée
le :
à : Maître Eva CHOURAQUI
Pôle civil de proximité
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PCP JCP ACR référé
N° RG 24/03642 – N° Portalis 352J-W-B7I-C4PSD
N° MINUTE :
1
ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 06 février 2025
DEMANDEUR
Monsieur [L] [K], demeurant [Adresse 3]
représenté par Maître Eva CHOURAQUI, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : #X1
DÉFENDERESSE
Madame [T] [M], demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Bénédicte LAVILLE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #B1141 (bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro C75056202415878 du 24/06/2024 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Paris)
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Karine METAYER, Juge des contentieux de la protection assistée de Lisa BOUCHEMMA, Greffier,
DATE DES DÉBATS
Audience publique du 25 novembre 2024
ORDONNANCE
contradictoire et en premier ressort prononcée par mise à disposition le 06 février 2025 par Karine METAYER, Juge, assistée de Lisa BOUCHEMMA, Greffier
Décision du 06 février 2025
PCP JCP ACR référé – N° RG 24/03642 – N° Portalis 352J-W-B7I-C4PSD
Par contrat sous seing privé en date du 26 décembre 1994 avec prise d’effet au 1er avril 1995, Monsieur [Z] [K] a donné à bail à Madame [T] [M] un appartement à usage d’habitation situé au [Adresse 1], pour un loyer mensuel de 1192,91 euros, outre des provisions sur charges.
Suite au décès de Monsieur [Z] [K], Monsieur [L] [K], Monsieur [S] [K], Madame [U] [D], Madame [E] [D] et Madame [R] [D] sont venus aux droits du défunt.
Des loyers étant demeurés impayés, Monsieur [L] [K] a fait signifier par acte de commissaire de justice un commandement de payer la somme de 7 946,25 euros, à titre principal, correspondant à l’arriéré locatif, terme de décembre 2023 inclus et visant la clause résolutoire contractuelle, le 15 janvier 2024.
Par acte de commissaire de justice en date du 20 mars 2024, Monsieur [L] [K] a fait assigner Madame [T] [M] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris statuant en référé aux fins de voir, sous le bénéfice de l’exécution provisoire :
– constater le jeu de la clause résolutoire insérée au contrat de bail liant les parties sur le fondement de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989 ;
– ordonner l’expulsion du preneur et de tout occupant de son chef avec le concours de la force publique et d’un serrurier si besoin est ;
– ordonner le transport et la séquestration des meubles en tel lieu qu’il lui plaira, aux frais et aux risques du défendeur ;
– dire et juger que le sort des meubles se trouvant dans les lieux sera soumis aux dispositions des articles L433-1 et L433-2, R433-1 à R433-7 du code des procédures civiles d’exécution,
– condamner Madame [T] [M] à lui payer une provision au titre des loyers et charges impayés au 1er mars 2024, soit la somme de 8 408,07 euros, sous réserve des loyers à échoir, avec intérêts légaux à compter du commandement de payer, ainsi qu’une indemnité d’occupation provisionnelle jusqu’à libération effective des lieux d’un montant mensuel égal au montant du loyer et des charges si le bail s’était poursuivi ;
– condamner Madame [T] [M] à lui payer la somme de 2000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens en ce compris le coût du commandement de payer, de l’assignation et de sa notification à la préfecture.
Au soutien de ses prétentions, Monsieur [L] [K] expose que plusieurs échéances de loyers sont demeurées impayées malgré un commandement de payer visant la clause résolutoire insérée au contrat de bail délivré le 15 janvier 2024.
A l’audience du 25 novembre 2024, Monsieur [L] [K], représenté par son conseil,
par conclusions écrites en réponse soutenues oralement sollicite de :
Débouter Madame [M] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;Dire et juger que le commandement de payer en date du 15 janvier 2024 est valable ;
En conséquence
Constater l’acquisition de la clause résolutoire figurant dans le bail ; ordonner l’expulsion du preneur et de tout occupant de son chef avec le concours de la force publique et d’un serrurier si besoin est ;ordonner le transport et la séquestration des meubles en tel lieu qu’il lui plaira, aux frais et aux risques du défendeur ;dire et juger que le sort des meubles se trouvant dans les lieux sera soumis aux dispositions des articles L433-1 et L433-2, R433-1 à R433-7 du code des procédures civiles d’exécution,condamner Madame [T] [M] à lui payer une provision au titre des loyers et charges impayés, soit la somme de 16 179,68 euros (mois d’octobre 2024 inclus), sous réserve des loyers à échoir, avec intérêts légaux à compter du commandement de payer, ainsi qu’une indemnité d’occupation provisionnelle jusqu’à libération effective des lieux d’un montant mensuel égal au montant du loyer et des charges si le bail s’était poursuivi ; condamner Madame [T] [M] à lui payer la somme de 2000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens en ce compris le coût du commandement de payer, de l’assignation et de sa notification à la préfecture. Rappeler que l’exécution provisoire est de droit.
Il a rappelé que le règlement des loyers n’est pas régulier et que le dernier règlement date de mai 2024. Il s’est opposé à l’octroi de délais de paiement qui pourraient être accordés ainsi qu’à la demande de suspension des effets de la clause résolutoire, précisant que le paiement intégral du loyer courant n’a pas été repris par la défenderesse avant l’audience. Il précise enfin que la locataire a été déclaré recevable à une procédure de surendettement.
Madame [T] [M], représentée par son conseil, par conclusions écrites soutenues oralement, sollicite de :
A titre principal
Constater l’existence d’une contestation sérieuse quant aux demandes présentées par Monsieur [L] [K] ; Renvoyer Monsieur [L] [K] à mieux se pouvoir ;
A titre subsidiaire
Accorder des délais de paiement à Madame [T] [M] suspendant les effets de la clause résolutoire, conformément à la commission de surendettement en date du 8 novembre 2024.
Elle a reconnu la dette et expliqué qu’elle a rencontré des difficultés financières suite à son départ à la retraite en tant que coiffeuse indépendante, et à une baisse substantielle de ses ressources, avec une pension de retraite de coiffeuse s’élevant à 950 euros par mois.
Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir une contestation sérieuse concernant le commandement de payer mentionnant le règlement de la dette dans un délai de 6 semaines, la locataire considérant que la règlementation applicable au contrat de bail objet du présent litige est celui contenu dans le contrat, à savoir deux mois, suivant l’avis de la Cour de Cassation du 13 juin 2024. La locataire met en cause la régularité du commandement de payer.
A titre subsidiaire, elle fait valoir qu’elle a déposé un dossier auprès de la commission de surendettement des particuliers de [Localité 2] et qu’elle a été déclarée recevable le 8 novembre 2024. La Banque de France a orienté le dossier vers un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire. Elle sollicite en conséquence des délais de paiement et la suspension de l’acquisition de la clause résolutoire.
La locataire précise enfin qu’elle n’a pas contracté d’autre dette et qu’elle envisage de quitter le logement.
La décision a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 6 février 2025.
Par note en délibéré, les parties ont été autorisées à produire tout éventuel recours contre la décision de recevabilité de la commission de surendettement ainsi que toute information sur une éventuelle libération des lieux par la locataire.
En application des dispositions des articles 834 et 835 du code de procédure civile, dans tous les cas d’urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.
Le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.
Sur la recevabilité de l’action
Une copie de l’assignation a été notifiée à la préfecture de [Localité 2] par la voie électronique le 21 mars 2024, soit plus de six semaines avant l’audience du 25 novembre 2024, conformément aux dispositions de l’article 24 III de la loi n°89-462 du 06 juillet 1989.
Par ailleurs, Monsieur [L] [K] justifie avoir saisi la commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives (CCAPEX) le 16 janvier 2024, soit deux mois au moins avant la délivrance de l’assignation du 20 mars 2024, conformément aux dispositions de l’article 24 II de la loi n°89-462 du 06 juillet 1989.
L’action est donc recevable.
Sur la validité du commandement de payer
Aux termes de l’article 1224 du code civil, la résolution d’un contrat résulte soit de l’application d’une clause résolutoire soit, en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur ou d’une décision de justice. L’article 1229 du même code précise que lorsque les prestations échangées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l’exécution réciproque du contrat, il n’y a pas lieu à restitution pour la période antérieure à la dernière prestation n’ayant pas reçu sa contrepartie et que, dans ce cas, la résolution est qualifiée de résiliation.
En matière de bail, l’article 24 I de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 modifié par la loi 2023-668 du 27 juillet 2023 dispose que toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non-versement du dépôt de garantie ne produit effet que 6 semaines après un commandement de payer demeuré infructueux.
En l’espèce, le bail conclu le 26 décembre 1994 avec prise d’effet au 1er avril 1995 contient une clause résolutoire et un commandement de payer visant cette clause a été signifié le 15 janvier 2024, pour la somme en principal de 7 946,25 euros. Ce commandement rappelle la mention que les locataires disposaient d’un délai de 6 semaines pour payer leur dette, comporte un décompte de la dette et l’avertissement qu’à défaut de paiement ou d’avoir sollicité des délais de paiement, les locataires s’exposent à une procédure judiciaire de résiliation de son bail et d’expulsion, outre la mention de la possibilité pour le locataire de saisir le fonds de solidarité pour le logement de son département aux fins de solliciter une aide financière et de saisir, à tout moment, la juridiction compétente aux fins de demander un délai de grâce sur le fondement de l’article 1343-5 du code civil.
Le délai de 2 mois s’applique en l’espèce au regard de la date initiale du contrat de bail (26 décembre 1994 avec prise d’effet au 1er avril 1995), de sa durée de 3 ans et de sa tacite reconduction, la dernière commençant le 1er avril 2022, de sorte qu’au moment de l’entrée en vigueur de la loi du 27 juillet 2023, le contrat était en cours de tacite reconduction, les dispositions de 2 mois contenues dans le contrat de bail initial s’appliquant.
Toutefois le caractère erroné du délai mentionné dans le commandement de payer est sans effet car les locataires étaient bien tenus d’une créance qu’ils n’ont honorée ni dans le délai de 6 semaines, ni dans le délai de deux mois s’appliquant au cas d’espèce (aucun versement n’ayant été effectué durant cette période).
Il s’ensuit que la contestation sérieuse soulevée à ce titre ne pourra prospérer et que la demande de [T] [M] sera rejetée.
Sur l’acquisition de la clause résolutoire valant résiliation du bail et la demande de suspension des effets de ladite clause
L’une des obligations essentielles du preneur d’un contrat de bail est celle du paiement des loyers aux termes convenus en application de l’article 7 de la loi n°89-462 du 06 juillet 1989.
Aux termes de l’article 1224 du code civil, la résolution d’un contrat résulte soit de l’application d’une clause résolutoire soit, en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur ou d’une décision de justice. L’article 1229 du même code précise que lorsque les prestations échangées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l’exécution réciproque du contrat, il n’y a pas lieu à restitution pour la période antérieure à la dernière prestation n’ayant pas reçu sa contrepartie et que, dans ce cas, la résolution est qualifiée de résiliation.
En matière de bail, l’article 24 I de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 dispose que tout contrat de bail d’habitation contient une clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non-versement du dépôt de garantie et que cette clause ne produit effet que six semaines après un commandement de payer demeuré infructueux. L’article 7 g) de cette loi précise que toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut d’assurance du locataire ne produit effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux et que le commandement reproduit, à peine de nullité, les dispositions du présent alinéa.
En l’espèce, le bail conclu le 26 décembre 1994 contient une clause résolutoire et un commandement de payer visant cette clause a été signifié le 15 janvier 2024, pour la somme en principal de 7 946,25 euros. Ce commandement rappelle la mention que le locataire dispose d’un délai de six semaines pour payer sa dette, comporte le décompte de la dette et l’avertissement qu’à défaut de paiement ou d’avoir sollicité des délais de paiement, le locataire s’expose à une procédure judiciaire de résiliation de son bail et d’expulsion, outre la mention de la possibilité pour le locataire de saisir le fonds de solidarité pour le logement de son département aux fins de solliciter une aide financière et de saisir, à tout moment, la juridiction compétente aux fins de demander un délai de grâce sur le fondement de l’article 1343-5 du code civil. Il est ainsi régulier en sa forme.
Il correspond par ailleurs bien à une dette justifiée à hauteur du montant des loyers échus et impayés (voir ci-après au titre de la demande en paiement) et est ainsi valable.
S’il convient de rappeler que Madame [T] [M] a été déclarée recevable le 8 novembre 2024 en sa demande de traitement de sa situation de surendettement, elle est sans incidence sur l’acquisition de la clause résolutoire en ce que la décision de recevabilité est intervenue après l’expiration du délai de deux mois suivant la signification du commandement de payer du 15 janvier 2024.
Le commandement est enfin demeuré infructueux pendant plus de deux mois applicable en l’espèce, de sorte qu’il y a lieu de constater que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire contenue dans le bail étaient réunies à la date du 15 mars 2024.
Il convient donc de procéder à l’expulsion de Madame [T] [M], et de tout occupant de son chef, avec assistance de la force publique le cas échéant, sous réserve du délai pour quitter les lieux.
Le sort des meubles sera régi par les dispositions des articles L433-1 et L433-2 du Code des Procédures Civiles d’Exécution.
Sur la demande en paiement d’une provision au titre de l’arriéré locatif et de l’indemnité d’occupation
Madame [T] [M] est redevable des loyers impayés jusqu’à la date de résiliation du bail en application des articles 1103 et 1217 du code civil. Par ailleurs, le maintien dans les lieux postérieurement à la date d’expiration du bail constitue une faute civile ouvrant droit à réparation en ce qu’elle cause un préjudice certain pour le propriétaire dont l’occupation indue de son bien l’a privé de sa jouissance. Au-delà de cet aspect indemnitaire, l’indemnité d’occupation, qui est également de nature compensatoire, constitue une dette de jouissance correspondant à la valeur équitable des locaux.
En l’espèce, Monsieur [L] [K] produit un décompte actualisé à l’audience démontrant que Madame [T] [M] reste lui devoir la somme de 16 179,68 euros à la date du 10 octobre 2024, cette somme correspondant à l’arriéré des loyers impayés et aux indemnités d’occupation échues à cette date.
Pour la somme au principal, Madame [T] [M] n’apporte aucun élément de nature à contester le principe ni le montant de la dette qu’elle reconnaît d’ailleurs à l’audience.
Dans l’attente de la décision de la commission de surendettement des particuliers de [Localité 2] et sous réserve d’une décision de rétablissement personnel sans liquidation personnelle apurant toute ou partie de la dette, elle sera donc condamnée au paiement à titre de provision de la somme non sérieusement contestable de 16 179,68 euros, avec les intérêts au taux légal sur la somme de 7 946,25 euros à compter de la délivrance du commandement de payer, et à compter de la présente décision pour le surplus conformément aux dispositions de l’article 1231-6 du code civil,
Madame [T] [M] sera aussi condamnée au paiement d’une indemnité mensuelle d’occupation provisionnelle pour la période courant du 10 octobre 2024 à la date de la libération effective et définitive des lieux, égale au montant des loyers et charges qui auraient été dus si le bail s’était poursuivi.
Sur la demande de délais de paiement
Si, en application de l’article 24 V et VII de la loi du 6 juillet 1989 le juge peut, même d’office, accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, à la locataire en situation de régler sa dette locative, c’est à la condition, notamment, que celle-ci ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l’audience.
Cependant, le bailleur déclare à l’audience que la locataire n’effectue plus de versement depuis mai 2024. Par ailleurs, l’absence de reprise du versement intégral du loyer courant avant la date de l’audience par Madame [T] [M] empêche le juge de lui octroyer de tels délais de paiement malgré sa demande.
Sa demande de délais de paiement ne peut qu’être rejetée.
Sur les demandes accessoires
Madame [T] [M], partie perdante, supportera la charge des dépens en application de l’article 696 du code de procédure civile, qui comprendront notamment le coût du commandement de payer, de l’assignation et de sa notification à la préfecture.
Il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur [L] [K] les frais exposés par lui/elle dans la présente instance et non compris dans les dépens. La somme de 300 euros lui sera donc allouée au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La présente décision est exécutoire à titre provisoire, conformément à l’article 514 du code de procédure civile.
Le juge des contentieux de la protection statuant en référé, publiquement, après débats en audience publique, par décision mise à disposition au greffe contradictoire et en premier ressort,
Constatons que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire figurant au bail conclu le 26 décembre 1994 entre Monsieur [Z] [K] et Madame [T] [M] concernant l’appartement à usage d’habitation, situé [Adresse 1], sont réunies à la date du 15 mars 2024;
Ordonnons en conséquence à Madame [T] [M] de libérer les lieux et de restituer les clés dans le délai de quinze jours à compter de la signification du présent jugement ;
Disons qu’à défaut pour Madame [T] [M] d’avoir volontairement libéré les lieux et restitué les clés dans ce délai, Monsieur [L] [K] pourra, deux mois après la signification d’un commandement de quitter les lieux, faire procéder à son expulsion ainsi qu’à celle de tous occupants de son chef, conformément à l’article L.412-1 du code des procédures civiles d’exécution, y compris le cas échéant avec le concours d’un serrurier et de la force publique ;
Disons n’y avoir lieu à ordonner l’enlèvement, le transport et la séquestration des meubles éventuellement laissés sur place et rappelons que le sort du mobilier garnissant le logement est prévu par les articles L.433-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution ;
Condamnons Madame [T] [M] à verser à Monsieur [L] [K] la somme provisionnelle de 16179,68 euros (décompte arrêté au 10 octobre 2024, incluant la mensualité d’octobre 2024), correspondant à l’arriéré de loyers, charges et indemnités d’occupation, avec les intérêts au taux légal à compter du 15 janvier 2024 sur la somme de 7 946,25 euros et à compter de la présente décision pour le surplus, dans l’attente de la décision de la commission de surendettement des particuliers de [Localité 2] et sous réserve d’une décision de rétablissement personnel sans liquidation personnelle apurant toute ou partie de la dette, cette dernière s’imputant sur la somme de la présente créance locative ;
Rappelons que les paiements intervenus postérieurement à l’assignation viennent s’imputer sur les sommes dues conformément à l’article 1342-10 du code civil et viennent ainsi en déduction des condamnations ci-dessus prononcées ;
Condamnons Madame [T] [M] à verser à Monsieur [L] [K] une indemnité mensuelle d’occupation provisionnelle d’un montant équivalent à celui du loyer et des charges, tel qu’il aurait été si le contrat s’était poursuivi, à compter du 10 octobre 2024 et jusqu’à la date de la libération effective et définitive des lieux (volontaire ou en suite de l’expulsion) ;
Rejetons les autres demandes plus amples ou contraires ;
Condamnons Madame [T] [M] à verser à Monsieur [L] [K] une somme de 300 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamnons Madame [T] [M] aux dépens, qui comprendront notamment le coût du commandement de payer, de l’assignation et de sa notification à la préfecture ;
Rappelons que la présente décision est exécutoire de plein droit à titre provisoire.
Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition le 6 février 2025 par la juge des contentieux de la protection et le greffier susnommés.
Le greffier, La juge des contentieux de la protection
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