Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Nantes
Thématique : Reconnaissance de la nationalité française d’un enfant adopté par des parents français
→ RésuméContexte de l’AffaireMonsieur [P] [D] et Madame [L] [Y], en tant que représentants légaux de leur enfant [B] [D], ont assigné le procureur de la République près le tribunal judiciaire de Nantes le 29 juin 2022. Ils demandent la reconnaissance de la nationalité française de leur enfant, né le 18 mai 2016 à Meknès, au Maroc, en vertu de l’article 21-12 du code civil. Procédure d’AdoptionLes demandeurs, mariés, ont opté pour la procédure marocaine de « [N] » pour adopter un enfant abandonné. Ils ont été autorisés par le tribunal de première instance de Meknès à emmener l’enfant à l’étranger et ont obtenu un passeport pour lui. Un changement de nom patronymique a été effectué, remplaçant le nom [F] par [D] en 2017. Déclaration de NationalitéLe 7 février 2022, les demandeurs ont soumis une déclaration de nationalité pour l’enfant, mais celle-ci a été rejetée par la directrice des services de greffe judiciaires du tribunal de Rennes le 14 mars 2022. Le rejet était fondé sur l’absence de copies certifiées conformes des décisions de justice et de traductions effectuées par un expert assermenté. Arguments des DemandeursLes demandeurs soutiennent que toutes les décisions de justice et pièces de procédure sont présentées en originaux ou copies certifiées conformes, et que les traductions ont été réalisées par un traducteur assermenté. Ils contestent donc le rejet de leur déclaration de nationalité. Position du Ministère PublicDans ses conclusions du 9 juin 2023, le ministère public a demandé au tribunal de déclarer que l’enfant n’est pas français et de rejeter les autres demandes des demandeurs. Cependant, il a reconnu que certaines conditions pour la nationalité française étaient remplies, notamment la résidence de l’enfant en France et le recueil par décision de justice. État Civil de l’EnfantLe tribunal a constaté que les actes produits par les demandeurs, y compris le jugement de déclaration d’abandon et l’ordonnance de kafala, étaient conformes et attestent de l’état civil certain de l’enfant. Le ministère public n’a plus contesté la validité de ces documents. Décision du TribunalLe tribunal a jugé que les formalités de l’article 1043 du code de procédure civile avaient été respectées et a ordonné l’enregistrement de la déclaration de nationalité française de l’enfant [B] [D]. La demande d’exécution provisoire a été rejetée, et les dépens ont été mis à la charge du trésor public. |
C.L
M-C P
LE 30 JANVIER 2025
Minute n°
N° RG 22/03002 – N° Portalis DBYS-W-B7G-LVCG
Madame [L] [Y] agissant en son nom et es qualité de représentante légale de son enfant [B] [D]
[P] [D] agissant en son nom et es qualité de représentant légal de son enfant [B] [D]
C/
M. LE PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE DE NANTES
NATIO 22-71
30/01/2025
copie exécutoire
copie certifiée conforme
délivrée à
Me S. MARAL
30/01/2025
copie certifiée conforme
délivrée à
PR
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE NANTES
———————————————-
HUITIEME CHAMBRE
Jugement du TRENTE JANVIER DEUX MIL VINGT CINQ
Composition du Tribunal lors des débats et du délibéré :
Président : Florence CROIZE, Vice-présidente,
Assesseur : Géraldine BERHAULT, Première Vice-Présidente,
Assesseur : Marie-Caroline PASQUIER, Vice-Présidente,
GREFFIER : Caroline LAUNAY
Débats à l’audience publique du 22 NOVEMBRE 2024 devant Florence CROIZE, vice-présidente, siégeant en juge rapporteur, sans opposition des avocats, qui a rendu compte au Tribunal dans son délibéré.
Prononcé du jugement fixé au 30 JANVIER 2025, date indiquée à l’issue des débats.
Jugement prononcé par mise à disposition au greffe.
—————
ENTRE :
Madame Madame [L] [Y] agissant en son nom et es qualité de représentante légale de son enfant [B] [D]
, demeurant [Adresse 1]
Rep/assistant : Me Sophie MARAL, avocat au barreau de RENNES, avocat plaidant
Monsieur [P] [D] agissant en son nom et es qualité de représentant légal de son enfant [B] [D]
, demeurant [Adresse 1]
Rep/assistant : Me Sophie MARAL, avocat au barreau de RENNES, avocat plaidant
DEMANDEURS.
D’UNE PART
ET :
M. LE PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE DE NANTES
représenté par Céline MATHIEU-VARENNES, procureur adjoint
DEFENDEUR.
D’AUTRE PART
EXPOSÉ DU LITIGE ET DES DEMANDES
Par acte d’huissier du 29 juin 2022, monsieur [P] [D] et madame [L] [Y], agissant es qualité de représentants légaux de [B] [D], né le 18 mai 2016 à Meknès (Maroc), ont assigné devant le tribunal judiciaire de Nantes le procureur de la République près cette juridiction. Au visa de l’article 21-12 du code civil, ils demandent au tribunal de :
-DIRE ET JUGER que Monsieur [B] [D] est de nationalité française et que le jugement à intervenir vaudra enregistrement de sa nationalité française ;
-ORDONNER les mentions prévues par l’article 28 du code civil ;
-LAISSER les dépens à la charge du Trésor Public.
Les demandeurs, mariés, exposent avoir effectué les démarches nécessaires pour adopter un enfant et avoir opté pour la procédure marocaine dite de “[N]” permettant le recueil d’un enfant mineur préalablement abandonné par voie judiciaire. Ils sont entrés en contact avec l’orphelinat au sein duquel vivait [B], né [F], et sont devenus parents de l’enfant [B], en vertu de l’ordonnance de “[N]” du tribunal de première instance de Meknès en date du le 23 décembre 2016. Le 27 décembre 2016, le Tribunal de Première Instance de MEKNES a autorisé Madame [Y] et Monsieur [D] à se faire accompagner de l’enfant [B] à l’étranger avec attribution d’un passeport. Suite à la procédure de [N], Madame [Y] et Monsieur [D] ont sollicité un changement de nom patronymique de l’enfant et selon décret de changement des noms patronymiques du 11 octobre 2017, le nom [F] était remplacé par [D].
Ils indiquent avoir souscrit, le 7 février 2022, en faveur de l’enfant ainsi recueilli, une déclaration de nationalité sur le fondement de l’article 21-12 du code civil.
Ils entendent contester la décision du 14 mars 2022 de la directrice des services de greffe judiciaires du tribunal judiciaire de Rennes, rejetant leur déclaration de nationalité au motif que les décisions de justice produites n’étaient pas des copies certifiées conformes par la juridiction qui les a rendues, tandis que leur traduction n’avait pas été effectuée par un expert assermenté près d’une cour d’appel en France.
Ils font valoir à titre liminaire que l’ensemble des décisions de justice et pièces de procédure du dossier de [N] sont produits en originaux et/ou copies certifiées conformes. De même, ces pièces ont toutes été traduites par un traducteur assermenté près la Cour d’appel de Rennes.
Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 9 juin 2023, le ministère public demande au tribunal de :
– DIRE la procédure régulière au sens de l’article 1040 du code de procédure civile ;
– JUGER que l’enfant [B] [D], qui serait né le 18 mai 2016 à [Localité 2] (Maroc), n’est pas Français ;
– REJETER le surplus des demandes de Monsieur [P] [D] et Madame [L] [Y] épouse [D], agissant en qualité de représentants légaux de l’enfant [B] [D] ;
– ORDONNER la mention prévue par l’article 28 du code civil ;
– STATUER ce que de droit quant aux dépens.
Le ministère public indique, pour l’essentiel, qu’au regard des explications et pièces finalement fournies par les demandeurs et notamment la copie du décret autorisant le changement de nom patronymique de l’enfant, accompagnée d’une traduction par un traducteur agréé, il entend sen rapporter à justice quant au caractère certain de l’état civil de l’enfant [B] [D].
S’agissant de la déclaration de nationalité française, il relève qu’une partie des conditions de l’article précité sont remplies, M. [B] [D] ayant été recueilli :
– sur décision de kafala judiciaire n°2016/207 rendue par le tribunal de première instance de Meknès (Maroc) le 23 décembre 2016, produite sous forme d’expédition certifiée conforme et accompagnée d’une traduction en langue française effectuée par un traducteur agréé près la cour d’appel, étant précisé qu’il est également produit un certificat de non-recours concernant cette décision ;
– à compter du 23 décembre 2016, date à laquelle a été dressé le procès-verbal d°exécution du jugement de kafala, soit depuis plus de trois années au jour de la souscription de la déclaration de nationalité ;
– de manière effective depuis cette date.
En outre, il constate qu’est justifié qu’au jour de la déclaration de nationalité française, l’enfant [B] [D] résidait en France.
Par ailleurs après avoir considéré que la preuve de la nationalité française des recueillants, qui se prévalent de la nationalité française par attribution, (c’est-à-dire par filiation ou double droit du sol) n’est pas suffisamment rapportée, le ministère public au regard des pièces finalement produites par les demandeurs et notamment les actes de naissance de leurs parents respectifs, permettant de vérifier que ceux-ci sont bien nés sur le territoire français, dont les mentions marginales permettent de vérifier l’existence de liens de filiation légitimes des demandeurs à l’égard de ces parents, le ministère public ne s’oppose plus à ce qu’il puisse être considéré que les demandeurs rapportent la preuve de leur nationalité française par attribution.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est référé, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs dernières écritures susvisées.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 15 octobre 2024.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal statuant par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,
CONSTATE que les formalités prévues par l’article 1043 du Code de procédure civile ont été accomplies ;
ORDONNE l’enregistrement de la déclaration de nationalité française souscrite le 7 février 2022 au titre de l’article 21-12 du code civil pour [B] [D], représenté par ses parents, Monsieur [P] [D] et Madame [L] [Y] épouse [D] ;
DIT que [B] [D], né le 18 mai 2016 à [Localité 2] (Maroc), a acquis la nationalité française le 7 février 2022 ;
REJETTE la demande d’exécution provisoire ;
ORDONNE la mention prévue par l’article 28 du code civil ;
CONDAMNE le trésor public aux dépens.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT
Caroline LAUNAY Florence CROIZE
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