Cour d’appel de Paris, 29 janvier 2025, RG n° 21/01842
Cour d’appel de Paris, 29 janvier 2025, RG n° 21/01842

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Paris

Thématique : Conflit autour d’un licenciement et de demandes de compensation financière

Résumé

Engagement et Révocation de M. [S] [O]

La SAS Robeco France a embauché M. [S] [O] en tant que ‘country manager’ à partir du 15 octobre 2015, et il a été nommé président à compter du 2 novembre 2015. Les relations de travail étaient régies par la convention collective nationale des sociétés financières. Au moment de la rupture des relations contractuelles, la société comptait au moins onze salariés.

Licenciement et Demandes de M. [S] [O]

Le mandat de M. [S] [O] a été révoqué le 7 mars 2019, et il a saisi le conseil de prud’hommes de Paris le 22 août 2019, alléguant harcèlement et discrimination. Après une convocation à un entretien préalable le 5 novembre 2019, il a été licencié pour faute grave, avec une ancienneté de quatre ans. M. [S] [O] a formulé plusieurs demandes devant le conseil de prud’hommes, incluant la nullité de son licenciement et des indemnités pour préjudices subis.

Jugement du Conseil de Prud’hommes

Le 8 janvier 2021, le conseil de prud’hommes a rejeté l’exception d’incompétence, jugé le licenciement fondé, et débouté M. [S] [O] de ses demandes de harcèlement et de discrimination. La société Robeco France a été condamnée à verser des sommes pour rappel de prime et congés payés, tandis que M. [S] [O] a été débouté du surplus de ses demandes.

Appel de M. [S] [O]

M. [S] [O] a interjeté appel le 11 février 2021, contestando toutes les dispositions du jugement sauf le rejet de l’exception d’incompétence. L’affaire a été appelée à l’audience du 10 décembre 2024, avec des conclusions échangées entre les parties.

Demandes des Parties en Appel

M. [S] [O] a demandé à la cour de juger son appel recevable et fondé, de rejeter l’exception d’incompétence, et d’infirmer le jugement en toutes ses dispositions. Il a également demandé des sommes pour rappel de primes et dommages-intérêts. De son côté, la SAS Robeco France a demandé la confirmation du jugement initial, le rejet des demandes de M. [S] [O] pour harcèlement et discrimination, et a contesté certaines condamnations financières.

Décision de la Cour

La cour a rejeté la demande d’irrecevabilité des pièces et a infirmé le jugement du 8 janvier 2021 concernant les demandes de discrimination. Elle a condamné la SAS Robeco France à verser 10 000 euros à M. [S] [O] pour préjudices liés à la discrimination, tout en confirmant le surplus du jugement. La cour a également fixé le salaire mensuel brut de M. [S] [O] à 52 167,16 euros et a laissé chaque partie responsable de ses dépens.

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 3

ARRET DU 29 JANVIER 2025

(n° , 17 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/01842 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDHAD

Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Janvier 2021 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG n° 19/07644

APPELANT

Monsieur [S] [O]

Né le 08 Janvier 1971 à [Localité 7]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Sylvie KONG THONG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0069, avocat postulant et Me Thibaut DE SAINT SERNIN, avocat au barreau de PARIS, toque : P0525, avocat plaidant

INTIMEE

S.A.S. ROBECO FRANCE, prise en la personne de son représentant légal

N° SIRET : 354 080 558 00043

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Philippe DURAND, avocat au barreau de PARIS, toque : P0438

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 10 Décembre 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Lisette SAUTRON, Présidente

Mme Véronique MARMORAT, Présidente

M. Christophe BACONNIER, Président

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Madame Marie-Lisette SAUTRON dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Madame Laetitia PRADIGNAC

ARRET :

– Contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Marie-Lisette SAUTRON, Présidente et par Laetitia PRADIGNAC, Greffière, présent lors de la mise à disposition.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

La SAS Robeco France a engagé M. [S] [O] par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 15 octobre 2015 en qualité de ‘country manager’.

A compter du 2 novembre 2015 il occupera les fonctions de président.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des sociétés financières.

La société Robeco France occupait à titre habituel au moins onze salariés lors de la rupture des relations contractuelles.

Le 7 mars 2019, son mandat de président a été révoqué.

Le 22 août 2019, M. [O] a saisi le conseil de prud’hommes de Paris de demandes tendant à faire reconnaître qu’il a été victime de harcèlement et de discrimination.

Par lettre notifiée le 23 octobre 2019, M. [O] a été convoqué à un entretien préalable fixé au 5 novembre 2019.

M. [O] a ensuite été licencié pour faute grave par lettre notifiée le 12 novembre 2019.

A la date de présentation de la lettre recommandée notifiant le licenciement, M. [O] avait une ancienneté de 4 ans.

En dernier lieu, devant le conseil de prud’hommes, il a formé les demandes suivantes :

– dire et juger recevables et bien fondées ses demandes ;

– juger mal fondée l’exception d’incompétence qui lui est opposée par l’employeur et la rejeter ;

– fixer sa rémunération mensuelle moyenne à titre principal, à la somme de 56 929 euros, et à tout le moins à la somme de 31 929 euros ;

A titre principal et subsidiaire,

– juger nul le licenciement ;

– ordonner sa réintégration à son poste dans un délai maximum de deux mois suivant la notification de la décision ;

– condamner l’employeur à lui verser une indemnité correspondant aux salaires échus entre sa date de sortie des effectifs et sa date de réintégration effective ;

En tout état de cause ;

– condamner l’employeur à lui payer, avec intérêts à capitaliser, les sommes suivantes :

. 170 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis du fait du harcèlement moral ;

. 170 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices nés de la discrimination,

– 300 000 euros à titre de rappel de bonus de l’exercice 2018,

– 30 000 euros au titre des congés payés afférents,

– 194 224 euros au titre du rappel de primes de performance à long terme (à parfaire en fonction de la valeur à la date à laquelle la décisions de réintégration sera rendue).

Subsidiairement,

– 194 224 euros à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice lié à la perte de chance d’avoir pu exercer son droit au titre des primes de performance à long terme ;

– 5 654 euros en paiement de la facture de l’année 2019 du Golf de [5],

– lui réattribuer ses congés payés du 22 juillet au l6 août 2019 qui ont été pris de façon contrainte et forcée ;

– 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement contradictoire rendu le 8 janvier 2021 auquel la cour se réfère pour l’exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le conseil de prud’hommes de Paris a :

– rejeté l’exception d’incompétence ;

– jugé fondé le licenciement ;

– débouté M. [S] [O] de ses demandes au titre du harcèlement moral et de la discrimination ;

– condamné la société Robeco France à verser à M. [S] [O], avec intérêts, les sommes suivantes:

– 253 333 euros au titre de rappel de prime pour l’année 2018,

– 25 333 euros de congés payés afférents,

– 1 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– débouté M. [S] [O] du surplus de ses demandes.

– débouté la société Robeco France de ses demandes et l’a condamnée aux entiers dépens.

M. [S] [O] a relevé appel de ce jugement par déclaration transmise par voie électronique le 11 février 2021, en toutes ses dispositions sauf le rejet de l’exception d’incompétence.

L’ordonnance de clôture a été rendue à la date du 3 décembre 2024.

L’affaire a été appelée à l’audience du 10 décembre 2024.

EXPOSE DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par conclusions communiquées par voie électronique le 2 décembre 2024, auxquelles la cour se réfère expressément pour l’exposé des moyens, M. [O] demande à la cour :

– de le dire et juger recevable et bien fondé en son appel ;

Y faisant pleinement droit,

In limine litis, sur l’appel incident de l’intimée,

– de rejeter l’exception d’incompétence ;

– de dire recevables ses demandes ;

avant dire droit,

– de juger les pièces adverses n° 41 et 42 irrecevables et de les écarter des débats ;

Au fond,

– d’infirmer le jugement dans toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

– de faire droit à ses demandes initiales sauf modification de certaines demandes ;

– de confirmer à titre subsidiaire la somme de 253 333 euros pour le bonus 2018, outre 25.333,33 euros au titre des congés payés afférents.

– de condamner l’employeur à lui payer :

. 223 358 euros au titre du rappel de primes de performance à long terme (à parfaire en fonction de la valeur à la date à laquelle la décision de réintégration sera rendue).

Subsidiairement,

– 223 358 euros à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice lié à la perte de chance d’avoir pu exercer son droit au titre des primes de performance à long terme,

en tout état de cause,

– condamner l’employeur à lui payer 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions communiquées par voie électronique le 25 novembre 2024, auxquelles la cour se réfère expressément pour l’exposé des moyens, la SAS Robeco France demande à la cour :

– de confirmer le jugement en ce qu’il a jugé le licenciement fondé et débouté le salarié de certaines demandes ;

– de débouter l’appelant de ses demandes au titre du harcèlement moral et de la discrimination en raison de son état de santé ;

– de débouter l’appelant du surplus de ses demandes ;

– d’infirmer le jugement en ce qu’il :

* a rejeté l’exception d’incompétence ;

* a condamné la société Robeco France à verser au salarié avec intérêts les sommes suivantes :

.253 333 euros au titre de rappel de prime pour l’année 2018,

. 25 333 euros de congés payés y afférents ;

* a rappelé qu’en vertu de l’article R.1454-28 du Code du Travail, ces condamnations sont exécutoires de droit à titre provisoire, dans la limite maximum de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire ;

* l’a condamnée à verser à l’appelant la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

* l’a déboutée de ses demandes et l’a condamnée aux entiers dépens ;

– de se déclarer incompétente au profit du Tribunal de commerce de Paris, en ce qui concerne les prétentions suivantes ;

* Dommages et intérêts pour discrimination,

* Rappel de bonus de l’exercice 2018,

* Prime de performance à long terme,

* Dommages et intérêts en réparation du préjudice lié à la perte de chance d’avoir pu exercer son droit au titre des primes de performance à long terme et les congés payés afférents,

* Remboursement d’une facture de Golf pour l’année 2019 :

– de juger ces demandes irrecevables ;

– de débouter l’appelant de toutes ses demandes y compris d’indemnité de l’article 700 du code de procédure civile ;

– de condamner l’appelant à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– de le condamner aux entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

la cour statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Rejette la demande d’irrecevabilité des pièces ;

Infirme le jugement rendu le 8 janvier 2021 par le conseil de prud’hommes de Paris en ce qu’il :

– a débouté le salarié de ses demandes au titre de la discrimination,

– a condamné l’employeur aux dépens et au paiement d’une indemnité de l’article 700 du code de procédure civile ;

statuant à nouveau, dans la limite des chefs d’infirmation,

Condamne la SAS Robeco France à payer à M. [S] [O] la somme de 10 000 euros en réparation des préjudices nés de la discrimination ;

Dit n’y avoir lieu à condamnation au remboursement des frais irrépétibles de première instance ;

Laisse à chacune des parties la charge des dépens de première instance ;

Confirme le surplus du jugement déféré ;

y ajoutant,

Dit que les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produiront intérêts ;

Fixe à 52 167,16 euros le montant du salaire mensuel brut de M. [S] [O] ;

Dit n’y avoir lieu à condamnation au remboursement des frais irrépétibles d’appel ;

Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens d’appel.

Le greffier La présidente

 


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