Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Versailles
Thématique : Expertise judiciaire ordonnée pour évaluer des désordres structurels liés à des mouvements de terrain.
→ RésuméContexte de l’affaireLa SCI CASA DE PIATRA a assigné la société PACIFICA ASSURANCES en référé devant le Tribunal judiciaire de Versailles le 6 août 2024, demandant une expertise concernant des dommages sur un bien immobilier qu’elle possède depuis le 8 octobre 2020. Ce bien, construit en 1992, a subi des extensions en 1993 et est situé sur un terrain argileux. La SCI est assurée auprès de PACIFICA ASSURANCES. Apparition des fissuresEn septembre 2022, la SCI a constaté une fissure importante à la jonction entre la maison principale et le garage, entraînant un écartement des deux structures. Pour remédier à ce problème, elle a fait appel à la société GEOSEC pour réaliser une injection de résine dans le sol, recommandée après une étude de sol effectuée par la société 1G SOLUTIONS. Malgré ces travaux, la fissure est restée visible et n’a pas été résolue. Reconnaissance de la catastrophe naturelleLe 25 avril 2023, un arrêté ministériel a reconnu l’état de catastrophe naturelle sur la commune des [Localité 3] en raison de mouvements de terrain consécutifs à la sécheresse. En conséquence, la SCI a déclaré le sinistre à PACIFICA ASSURANCES le 16 juin 2023. L’expert mandaté par l’assurance, le Cabinet POLYEXPERT, a conclu le 2 octobre 2023 qu’il n’était pas possible de déterminer un lien direct entre les dommages et l’événement de sécheresse. Constatations contradictoiresLa SCI a ensuite mandaté le Cabinet Global Expertises, qui a confirmé l’existence de la fissure et a attribué les désordres à l’argile. Ce constat s’est opposé aux conclusions de POLYEXPERT, qui n’avait pas pu constater les dommages lors de ses visites. La SCI a donc décidé de demander une expertise judiciaire pour établir les causes des désordres. Arguments de la défenderessePACIFICA ASSURANCES a contesté la demande d’expertise, arguant que les travaux d’injection de résine réalisés par la SCI rendaient impossible la constatation des fissures. L’assurance a également souligné que l’expert n’avait pas pu observer de fissures lors de ses visites, ce qui justifiait son refus de dédommager la SCI. Décision du tribunalLe tribunal a jugé que la demande d’expertise était légitimée par des éléments probants, tels que le constat de commissaire de justice et les rapports d’expertise. Il a ordonné une expertise judiciaire pour évaluer les désordres affectant l’immeuble, déterminer leurs causes et chiffrer les travaux nécessaires. Les dépens ont été mis à la charge de la demanderesse. |
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
DU 28 JANVIER 2025
N° RG 24/01240 – N° Portalis DB22-W-B7I-SIEM
Code NAC : 54G
AFFAIRE : S.C.I. CASA DE PIATRA C/ S.A. PACIFICA
DEMANDERESSE
S.C.I. CASA DE PIATRA
Société civile immobilière au capital social de 1.400 euros, immatriculée au RCS de VERSAILLES sous le numéro 799 076 799, dont le siège social est sis [Adresse 1], représentée par Monsieur [E], domicilié audit siège;
représentée par Me Camille JOLY, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 385
DEFENDERESSE
SOCIETE PACIFICA
Société anonyme immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 352 358 865, dont le siège social est [Adresse 2] prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,
représentée par Me Anne-laure WIART, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 437, Me Nathanaël ROCHARD, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0169
Débats tenus à l’audience du : 17 Décembre 2024
Nous, Gaële FRANÇOIS-HARY, Première Vice-Présidente au Tribunal Judiciaire de Versailles, assistée de Virginie DUMINY, Greffier,
Après avoir entendu les parties comparantes ou leur conseil, à l’audience du 17 Décembre 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 28 Janvier 2025, date à laquelle l’ordonnance suivante a été rendue :
EXPOSE DU LITIGE
Par acte de Commissaire de Justice en date du 6 août 2024, la SCI CASA DE PIATRA a assigné la société PACIFICA ASSURANCES en référé devant le Tribunal judiciaire de Versailles aux fins de voir ordonner une expertise.
Aux termes de ses conclusions, la demanderesse maintient sa demande et expose que depuis le 8 octobre 2020, elle est propriétaire d’un bien immobilier à usage d’habitation, construit en 1992 et situé au [Adresse 1], sur un terrain argileux ; cette maison a fait l’objet d’une extension en 1993 avec la construction de deux garages et d’une buanderie au rez-de-chaussée, ainsi que l’ajout d’une salle d’eau, d’une salle de bain, d’une chambre au premier étage, et de combles aménagés. Les réseaux d’eau potable et usée, ainsi que l’électricité, sont entièrement raccordés à la maison principale ; la SCI est assurée auprès de PACIFICA ASSURANCES.
Elle indique qu’en septembre 2022, elle a constaté l’apparition d’une importante fissure au niveau de la jonction entre la maison principale et le garage entraînant un écartement des deux bâtiments ; elle a pris contact avec la société GEOSEC afin de stopper le phénomène d’écartement par l’injection d’une résine en sous-sol de la maison à 3 et 5 mètres du sol dans l’argile ; cette injection est imperceptible à l’œil nu, car réalisée sous l’extension le long des murs porteurs ; afin de réaliser cette injection de résine, la société GEOSEC a recommandé la réalisation d’une étude de sol ; la reconnaissance géotechnique a été confiée à la société 1G SOLUTIONS, et les résultats de l’étude de sol ont été diffusés le 27 avril 2023 ; la SCI a alors passé commande des travaux pour un montant de 20.680 euros TTC auprès de la société GEOSEC afin de réaliser l’injection de résine ; toutefois, cette injection réalisée dans le sol de l’extension, bien qu’elle ait été temporaire et urgente, n’a pas permis de remédier à l’importante fissure toujours présente et parfaitement visible ; il est précisé que cette mousse peut être retirée facilement si l’expert le juge nécessaire pour les besoins de l’expertise.
Elle précise que le 25 avril 2023, un arrêté ministériel a reconnu l’état de catastrophe naturelle due à la sécheresse sur la commune des [Localité 3] pour la période du 1er avril au 30 septembre 2022, mentionnant des « mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols » durant cette période.
La SCI a ainsi, le 16 juin 2023, déclaré le sinistre auprès de sa compagnie d’assurances PACIFICA ASSURANCES, qui a mandaté le Cabinet POLYEXPERT, lequel a communiqué ses conclusions (examen en visio) le 2 octobre 2023, aux termes desquelles il est indiqué que la matérialité des dommages n’a pu être constaté et qu’il ne peut être affirmé ni infirmé que les désordres déplorés au niveau du garage ont un lien direct et certain avec l’événement retrait/gonflement visé par l’arrêté sécheresse du 10 juin 2023 ; le 19 décembre 2023, POLYEXPERT s’est rendu sur place afin de constater les dommages, mais ses conclusions demeuraient inchangées (rapport du 27 septembre 2023).
La SCI indique avoir fait établir le 9 avril 2024, un constat de commissaire de justice et avoir mandaté le 25 avril 2024, le Cabinet Global Expertises, lequel, contrairement à l’expert mandaté par l’assurance, a effectivement pu constater, et ce sans aucune difficulté, l’existence et la réalité de la fissure entre la maison principale et son extension et indiqué que l’argile devait être considérée « comme le phénomène déterminant » des désordres litigieux (rapport technique du 25 avril 2024).
Elle relève que le refus de PACIFICA ASSURANCES de la dédommager justifier de recourir à la désignation d’un expert judiciaire, permettant de procéder à une analyse technique rigoureuse et de déterminer avec précision les causes de ces désordres, et soutient que l’injection de résine réalisée dans le sol par la société GEOSEC ne peut en aucun cas constituer un obstacle aux opérations d’expertise, s’agissant d’une mesure conservatoire temporaire et locale qui n’altère en rien la possibilité pour l’expert de réaliser son analyse de la fissure ainsi que du sol; la fissure présente dans le mur demeure parfaitement visible, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du bâtiment, et nécessite impérativement d’être réparée afin de rétablir l’intégrité structurelle de l’édifice.
Aux termes de ses conclusions, la défenderesse sollicite de voir juger malfondée la demande d’expertise judiciaire en l’état des réparations d’ores et déjà menées, et à titre subsidiaire, juger qu’elle formule protestations et réserves.
Elle fait valoir que la SCI CASA DI PIATRA a procédé à des travaux réparatoires dès le 15 février 2023, en mandatant la société GEOSEC afin qu’elle réalise des injections de résine, rendant ainsi impossible pour tout expert de pouvoir constater des fissures qui ont été colmatées ; l’expert du cabinet POLYEXPERT n’a pas été en mesure de constater les fissures lors de sa réunion d’expertise en visioconférence et lors de sa seconde visite.
La décision a été mise en délibéré au 28 janvier 2025.
PAR CES MOTIFS
Nous, Gaële FRANCOIS-HARY, Première Vice-Présidente au Tribunal judiciaire de Versailles, statuant en qualité de Juge des référés, par ordonnance contradictoire et en premier ressort, mise à disposition au greffe après débats en audience publique :
Ordonnons une expertise,
Commettons pour y procéder M. [R] [D], expert, inscrit sur la liste de la Cour d’appel de Versailles, avec mission de :
* convoquer et entendre les parties, assistées, le cas échéant, de leurs conseils, et recueillir leurs observations à l’occasion de l’exécution des opérations ou de la tenue des réunions d’expertise,
* se faire remettre toutes les pièces utiles à l’accomplissement de sa mission,
* se rendre sur les lieux et en faire la description,
* relever et décrire les désordres affectant l’immeuble litigieux, allégués dans l’assignation et résultant des pièces produites,
* en détailler les causes et fournir tous éléments permettant à la juridiction de déterminer à quels intervenants ou événement ces désordres sont imputables, dans quelle proportion,
* déterminer notamment si la fissure litigieuse est due à la sécheresse reconnue comme catastrophe naturelle sur la commune des [Localité 3] sur la période du 1er avril au 30 septembre 2022,
* indiquer les conséquences de ces désordres quant à la solidité, l’habitabilité, l’esthétique du bâtiment, et, plus généralement quant à l’usage qui peut en être attendu ou quant à la conformité à sa destination,
* évaluer, notamment au vu de devis communiqués par les parties, les solutions et travaux nécessaires pour remédier tant aux désordres qu’aux dommages conséquents et en chiffrer le coût,
* préciser et évaluer les préjudices et coûts induits par ces désordres et par les solutions possibles pour y remédier,
* rapporter toutes autres constatations utiles à l’examen des prétentions des parties,
* mettre, en temps utile, au terme des opérations d’expertise, par le dépôt d’un pré-rapport, les parties en mesure de faire valoir, dans le délai qu’il leur fixera, leurs observations qui seront annexées au rapport,
Disons que l’expert pourra, si besoin est, se faire assister de tout sapiteur de son choix,
Fixons à 4000 euros le montant de la provision à valoir sur la rémunération de l’expert, qui sera versé par la demanderesse, au plus tard le 30 avril 2025, entre les mains du régisseur d’avance de recettes de cette juridiction, sous peine de caducité,
Rappelons que le règlement peut être effectué par virement bancaire (en demandant le RIB à l’adresse mail : [Courriel 4] ) ou soit par chèque à l’ordre de la Régie d’avances et recettes du Tribunal Judiciaire Versailles, accompagné de la copie de la décision,
Impartissons à l’expert, pour le dépôt du rapport d’expertise, un délai de 8 mois à compter de l’avertissement qui lui sera donné par le greffe du versement de la provision,
Disons qu’en cas de refus ou d’empêchement de l’expert, il sera procédé à son remplacement par le magistrat chargé du contrôle des expertises qui est par ailleurs chargé de la surveillance des opérations d’expertise,
Disons que les dépens seront à la charge de la demanderesse.
Prononcé par mise à disposition au greffe le VINGT HUIT JANVIER DEUX MIL VINGT CINQ par Gaële FRANÇOIS-HARY, Première Vice-Présidente, assistée de Virginie DUMINY, Greffier, lesquelles ont signé la minute de la présente décision.
Le Greffier La Première Vice-Présidente
Virginie DUMINY Gaële FRANÇOIS-HARY
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