Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Versailles
Thématique : Conflit autour d’une extension de maison : enjeux d’expertise et responsabilités des parties
→ RésuméContexte de l’affaireMadame et Monsieur [T] sont propriétaires d’un bien immobilier à [Adresse 6], [Localité 11]. Dans le but d’agrandir leur maison, ils ont engagé Monsieur [Y], architecte, par un contrat daté du 24 octobre 2021. Monsieur [Y] était couvert par une assurance auprès de la MAF. Un permis de construire a été délivré le 10 mars 2022, modifié par la suite le 3 août 2022. Les travaux et sous-traitanceLes travaux d’extension ont été confiés à la société KJC, selon un devis établi le 20 juin 2022. Cette société a sous-traité plusieurs lots : le lot électricité à la société EC2F, le lot plomberie à l’entreprise [W], et le lot couverture à l’entreprise NESALY. Chacune de ces entreprises était également assurée par différentes compagnies. Réception des travaux et réservesLa réception des travaux a eu lieu le 13 mars 2023, avec un total de 18 réserves. Certaines de ces réserves ont été levées, tandis que d’autres ont été ajoutées. Les parties ont tenté de trouver un accord, ce qui a abouti à la signature d’un protocole le 16 octobre 2023, suite à une réunion impliquant Monsieur [Y] et le gérant de KJC. Procédure judiciaireLe 2 septembre 2024, Madame et Monsieur [T] ont assigné plusieurs parties, dont Monsieur [Y] et les sociétés impliquées, devant le Tribunal judiciaire de Versailles, demandant une expertise. Ils ont maintenu leur demande d’expertise et se sont opposés à la fin de non-recevoir soulevée par Monsieur [W], arguant qu’il n’était pas partie au protocole d’accord. Arguments des partiesLes demandeurs ont justifié leur demande d’expertise par l’importance des désordres constatés et ont contesté les demandes de mise hors de cause et de provision de Monsieur [Y]. Les sociétés KJC, BPCE IARD et MIC INSURANCE COMPANY ont exprimé des réserves. Monsieur [Y] a demandé que l’expertise soit limitée aux désordres spécifiquement mentionnés et a réclamé une provision pour ses honoraires. Décision du tribunalLe tribunal a accueilli l’intervention de la société MAAF ASSURANCES et a déclaré recevable la demande d’expertise. Les demandes de mise hors de cause de certaines parties ont été rejetées. Une expertise a été ordonnée, avec des instructions précises pour l’expert désigné, qui devra évaluer les désordres et leurs causes. Provision et dépensLe tribunal a fixé à 4000 euros TTC le montant de la provision à verser pour la rémunération de l’expert, à régler par les demandeurs. Il a également décidé qu’aucune des parties n’était considérée comme succombante à ce stade, et que les dépens seraient à la charge des demandeurs. |
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
DU 28 JANVIER 2025
N° RG 24/01297 – N° Portalis DB22-W-B7I-SKSS
Code NAC : 54G
AFFAIRE : [K] [V] épouse [T], [N] [T] C/ [Z] [W], S.A.S. NESALY, S.A. MIC INSURANCE COMPANY, Société SOCIÉTÉ EC2F, [C] [Y], S.A.M.C.V. MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANÇAIS (MAF), S.A.R.L. KJC BATI, S.A.M.C.V. SMABTP, S.A. BPCE IARD, S.A. MAAF PRO
DEMANDEURS
Madame [K] [V] épouse [T]
née le 09 Décembre 1978 à [Localité 20],
demeurant [Adresse 6] – [Localité 11]
représentée par Me Pascal FOURNIER, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 38
Monsieur [N] [T]
né le 01 Août 1977 à [Localité 22],
demeurant [Adresse 6] – [Localité 11]
représenté par Me Pascal FOURNIER, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 38
DEFENDEURS
Entreprise [W]
Entreprise individuelle, dont le siège social est [Adresse 5], [Localité 16], inscrite au répertoire SIREN n°351 289 863 00042, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,
représenté par Me Caroline GRIMA, avocat au barreau de VAL D’OISE, vestiaire : 147
La Société NESALY
S.A.S.U immatriculée au RCS de Créteil sous le numéro 882 998 248, dont le siège social est [Adresse 3], [Localité 17], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
défaillante
S.A. MIC INSURANCE COMPANY
S.A. immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 885 241 208, dont le siège social est sis [Adresse 4] – [Localité 7], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
ès-qualité d’assureur de la SASU NESALY
représentée par Me Mélina PEDROLETTI, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 626, Me Sandra GRASLIN LATOUR, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : L 301
La Société EC2F
La Société immatriculée au RCS de MELUN sous le numéro 424 986 321 00034;
dont le siège social est sis [Adresse 19] – [Localité 10] , prise en la personne de ses représentants légaux en exercice domicilié en cette qualité audit siège,
représentée par Me Karine PUECH, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 726, Me Sophia RIZK, avocat au barreau de MEAUX,
Monsieur [C] [Y]
né le 14 Juillet 198,
demeurant [Adresse 2] – [Localité 12]
représenté par Me Florence FAURE, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 146
La Société MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANÇAIS (MAF)
Entreprise régie par le code des assurances SI, immatriculé au SIRET sous le numéro 784 647 349 00074, dont le siège social est sis [Adresse 1] – [Localité 8], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
défaillante
La Société BATI
SARL immatriculée au RCS de MELUN sous le numéro 451 597 355, dont le siège social est sis [Adresse 19] – [Localité 10], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
représentée par Me Laura CABRERA, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 296, Me Alexandre KARACADAG, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P 205
La Société SMABTP
Entreprise régi par le Code des assurances, immatriculée au RCS de PARIS 775 684 764, dont le siège social est sis [Adresse 15] – [Localité 9], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
défaillante
La Société BPCE IARD
SA à directoire et conseil de surveillance, immatriculée au RCS de NIORT sous le numéro 401 380 472, dont le siège social est sis [Adresse 18] de [Localité 14] – [Localité 13], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège;
Es qualité d’assureur de la société EC2F (numéro police 191 342 214),
représentée par Me Mélanie GAUTHIER, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 135
La Société MAAF PRO
SA immatriculée au RCS de NIORT sous le numéro 542 073 580, dont le siège social est sis [Adresse 18] – [Localité 14]; prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
défaillante
INTERVENTION VOLONTAIRE :
La Société MAAF ASSURANCES
Société anonyme au capital de 160.000.000 euros, inscrite au RCS de NIORT sous le numéro 542 073 580, dont le siège social est sis [Adresse 18], [Localité 14], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
représentée par Me Mélanie GAUTHIER, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 135
Débats tenus à l’audience du : 17 Décembre 2024
Nous, Gaële FRANÇOIS-HARY, Première Vice-Présidente au Tribunal Judiciaire de Versailles, assistée de Virginie DUMINY, Greffier,
Après avoir entendu les parties comparantes ou leur conseil, à l’audience du 17 Décembre 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 28 Janvier 2025, date à laquelle l’ordonnance suivante a été rendue :
EXPOSE DU LITIGE
Madame et Monsieur [T] sont propriétaires d’un bien situé [Adresse 6] à [Localité 11]. Souhaitant réaliser une extension de leur maison, ils ont confié ces travaux à Monsieur [Y], architecte, suivant contrat du 24 octobre 2021. Monsieur [Y] était assuré auprès de la MAF.
Le permis de construire a été accordé suivant arrêté du 10 mars 2022, modifié par arrêté du 3 août 2022
Les travaux ont été confiés à la société KJC suivant devis établi le 20 juin 2022. Cette dernière a sous-traité le lot électricité à la société EC2F, assurée auprès de BPCE IARD, le lot plomberie à l’entreprise [W], assurée auprès de la MAAF PRO, et les travaux de couverture à l’entreprise NESALY, assurée auprès de MIC INSURANCE COMPANY;
La réception est intervenue le 13 mars 2023 avec les 18 réserves. Certaines réserves ont été levées, et de nouvelles réserves ont été déclarées.
Les parties ont tenté de se rapprocher et un protocole d’accord a été signé le 16 octobre 2023 établi par Monsieur [H] suite à une réunion sur place en présence de Monsieur [Y] et du gérant de la société KJC concernant certains et les travaux de reprise.
Un constat de commissaire de justice a été établi le 5 mars 2024.
Par acte de Commissaire de Justice en date du 2 septembre 2024, M. [N] [T] et Mme [K] [T] ont assigné M. [C] [Y], la société MAF (es qualité d’assureur de M. [Y]), la société KJC BATI, la société SMABTP (es qualité d’assureur de KJC BATI), la société EC2F, la société BPCE IARD (es qualité d’assureur de EC2F), l’Entreprise [W], la société MAAF PRO (es qualité d’assureur de Entreprise [W]), la société NESALY et la société MIC INSURANCE COMPANY (es qualité d’assureur de NESALY) en référé devant le Tribunal judiciaire de Versailles aux fins de voir ordonner une expertise.
Aux termes de leurs conclusions, les demandeurs maintiennent leur demande d’expertise et sollicitent de voir débouter Monsieur [W] de sa fin de non-recevoir et débouter Monsieur [Y] de sa demande reconventionnelle de provision.
Ils s’opposent à l’irrecevabilité de la demande d’expertise soulevée par M. [W] faisant valoir que si une transaction peut effectivement faire obstacle à l’introduction d’une action en justice ultérieure, encore faut-il que le défendeur qui souhaite se prévaloir d’une telle fin de non-recevoir ait été lui-même partie au protocole ; M. [W] n’est pas en l’espèce partie au protocole litigieux ; en tout état de cause, non seulement le protocole particulièrement sommaire n’a pas permis la résolution complète des désordres qui y sont évoqués mais, plus encore, d’autres désordres seraient imputables à l’intervention de M. [W], et n’ont pas fait l’objet d’un quelconque accord amiable.
Ils soutiennent qu’ils justifient au regard de l’importance des désordres d’un motif légitime de conserver ou d’établir une preuve avant tout procès, et s’opposent aux demandes de mise hors de cause et à la demande provision présentée à titre reconventionnel par M. [Y]
La société KJC BATI, la société BPCE IARD (es qualité d’assureur de EC2F) et la société MIC INSURANCE COMPANY (es qualité d’assureur de NESALY) ont formulé protestations et réserves.
Aux termes de ses conclusions, M. [C] [Y] sollicite de voir :
– lui donner acte de ses protestations et réserves sur la demande de désignation d’un expert judiciaire, et circonscrire la mission de l’expert à l’examen des désordres expressément allégués par Monsieur et Madame [T] dans leur assignation et étayés par des pièces versées aux débats,
– condamner solidairement ou, à défaut, in solidum Monsieur et Madame [T] à lui payer à titre de provision la somme de 2943,63 euros TTC à valoir sur le solde d’honoraires de maîtrise d’œuvre, et subsidiairement, en cas de rejet de cette demande, confier à l’expert la mission de faire les comptes entre les parties,
– condamner solidairement ou, à défaut, in solidum Monsieur et Madame [T] aux entiers dépens.
Aux termes de ses conclusions, la société EC2F conclut à sa mise hors de cause et formule à titre subsidiaire protestations et réserves.
Aux termes de ses conclusions, l’Entreprise [W] sollicite de voir :
– à titre liminaire, juger irrecevable la demande d’expertise judiciaire à son égard, pour défaut de qualité à agir, le seul désordre allégué à son encontre ayant fait l’objet d’un protocole d’accord en date du 16 octobre 2023,
– à titre principal, débouter Monsieur et Madame [T] de l’intégralité de leurs demandes à son égard,
– subsidiairement, lui donner acte de ses protestations et réserves, et dire que la mesure d’expertise devra être strictement limitée aux désordres expressément visés et étayés dans l’assignation,
– condamner Monsieur et Madame [T] à lui payer la somme de 1000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
La société MAAF ASSURANCES, intervenante volontaire, a formulé protestations et réserves.
La société MAF (es qualité d’assureur de M. [Y]), la société SMABTP (es qualité d’assureur de KJC BATI), la société MAAF PRO (es qualité d’assureur de Entreprise [W]) et la société NESALY ne sont pas représentées.
La décision a été mise en délibéré au 28 janvier 2025.
PAR CES MOTIFS
Nous, Gaële FRANCOIS-HARY, Première Vice-Présidente au Tribunal judiciaire de Versailles, statuant en qualité de Juge des référés, par ordonnance réputée contradictoire et en premier ressort, mise à diposition au greffe après débats en audience publique :
Accueillons l’intervention volontaire de la société MAAF ASSURANCES,
Déclarons recevable la demande d’expertise,
Rejetons les demandes de mise hors de cause de M. [C] [Y], de la société EC2F et de l’Entreprise [W],
Ordonnons une expertise,
Commettons pour y procéder M. [P] [F], expert, inscrit sur la liste de la Cour d’appel de Versailles, avec mission de :
* convoquer et entendre les parties, assistées, le cas échéant, de leurs conseils, et recueillir leurs observations à l’occasion de l’exécution des opérations ou de la tenue des réunions d’expertise,
* se faire remettre toutes les pièces utiles à l’accomplissement de sa mission,
* se rendre sur les lieux et en faire la description,
* relever et décrire les désordres, malfaçons et inachèvements affectant l’immeuble litigieux, allégués dans l’assignation et résultant des pièces produites,
* en détailler les causes et fournir tous éléments permettant à la juridiction de déterminer à quels fournisseurs ou intervenants ces désordres, malfaçons et inachèvements sont imputables, dans quelle proportion,
* indiquer les conséquences de ces désordres, malfaçons et inachèvements quant à la solidité, l’habitabilité, l’esthétique du bâtiment, et, plus généralement quant à l’usage qui peut en être attendu ou quant à la conformité à sa destination,
* évaluer, notamment au vu de devis communiqués par les parties, les solutions et travaux nécessaires pour remédier tant aux désordres qu’aux dommages conséquents et en chiffrer le coût,
* préciser et évaluer les préjudices et coûts induits par ces désordres, malfaçons et inachèvements et par les solutions possibles pour y remédier,
* donner son avis sur les comptes présentés par les parties,
* rapporter toutes autres constatations utiles à l’examen des prétentions des parties,
* mettre, en temps utile, au terme des opérations d’expertise, par le dépôt d’un pré-rapport, les parties en mesure de faire valoir, dans le délai qu’il leur fixera, leurs observations qui seront annexées au rapport,
Disons que l’expert pourra, si besoin est, se faire assister de tout sapiteur de son choix,
Fixons à 4000 euros TTC le montant de la provision à valoir sur la rémunération de l’expert, qui sera versé par les demandeurs, au plus tard le 15 mai 2025, entre les mains du régisseur d’avance de recettes de cette juridiction, sous peine de caducité,
Rappelons que le règlement peut être effectué par virement bancaire (en demandant le RIB à l’adresse mail : [Courriel 21] ) ou soit par chèque à l’ordre de la Régie d’avances et recettes du Tribunal Judiciaire Versailles, accompagné de la copie de la décision,
Impartissons à l’expert, pour le dépôt du rapport d’expertise, un délai de 8 mois à compter de l’avertissement qui lui sera donné par le greffe du versement de la provision,
Disons qu’en cas de refus ou d’empêchement de l’expert, il sera procédé à son remplacement par le magistrat chargé du contrôle des expertises qui est par ailleurs chargé de la surveillance des opérations d’expertise,
Disons n’y avoir lieu à référé sur la demande reconventionnelle de provision,
Disons n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Disons que les dépens seront à la charge des demandeurs.
Prononcé par mise à disposition au greffe le VINGT HUIT JANVIER DEUX MIL VINGT CINQ par Gaële FRANÇOIS-HARY, Première Vice-Présidente, assistée de Virginie DUMINY, Greffier, lesquelles ont signé la minute de la présente décision.
Le Greffier La Première Vice-Présidente
Virginie DUMINY Gaële FRANÇOIS-HARY
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