Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Nantes
Thématique : Reconnaissance de nationalité et conditions d’enregistrement
→ RésuméContexte de l’AffairePar acte d’huissier du 6 octobre 2021, [K] [I] a assigné le procureur de la République devant le tribunal judiciaire de Nantes pour faire constater l’enregistrement de sa déclaration de nationalité, souscrite le 18 octobre 2019, en tant que mineure recueillie par des ressortissants français. Elle souhaite être reconnue comme française. Demandes de [K] [I]Dans ses conclusions du 17 mars 2023, [K] [I] demande au tribunal de constater la régularité de la procédure, l’enregistrement de sa déclaration de nationalité, et de déclarer qu’elle est française depuis le 18 octobre 2019. Elle requiert également l’exécution provisoire de la décision et le remboursement des dépens. Situation Personnelle de [K] [I]Née le 4 juin 1997 en Algérie de parents inconnus, [K] [I] a été recueillie à l’âge de quatre mois par un couple franco-algérien. Elle est arrivée en France en 2018 et a souscrit sa déclaration de nationalité en 2019. Cependant, elle a reçu un refus d’enregistrement le 28 décembre 2020, au motif qu’elle était majeure au moment de la déclaration. Arguments de [K] [I]Elle soutient que le refus d’enregistrement est irrecevable car le directeur des services de greffe judiciaire devait agir dans un délai de six mois. Elle affirme que son dossier était complet et qu’aucune demande de pièces complémentaires ne lui a été adressée. Elle conteste également la demande reconventionnelle du ministère public, arguant que ce dernier a dépassé le délai pour agir. Position du Ministère PublicDans ses conclusions du 11 janvier 2022, le ministère public demande de débouter [K] [I] de ses demandes et soutient que la décision de refus d’enregistrement n’est pas tardive. Il conteste la régularité de la déclaration, affirmant qu’elle a été souscrite alors que [K] [I] était majeure. Décision du TribunalLe tribunal a constaté que la procédure était régulière et que le refus d’enregistrement du 28 décembre 2020 était tardif. Il a déclaré que la déclaration de nationalité de [K] [I] devait être enregistrée de plein droit au 26 avril 2019. Cependant, il a également annulé cet enregistrement, déclarant que [K] [I] n’était pas française, car elle avait souscrit sa déclaration alors qu’elle était majeure. Conséquences de la DécisionLe tribunal a ordonné la mention de cette décision conformément à l’article 28 du Code civil et a débouté [K] [I] de ses autres demandes. Elle a été condamnée aux dépens, et il n’y a pas eu d’exécution provisoire de la décision. |
C.L
M-C P
LE 30 JANVIER 2025
Minute n°
N° RG 21/04571 – N° Portalis DBYS-W-B7F-LH4H
[K] [I]
C/
M. LE PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE DE NANTES
NATIO 21-85
copie exécutoire
copie certifiée conforme
délivrée à
30/01/2025
copie certifiée conforme
délivrée à
PR (3)
Me N. SEMLALI
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE NANTES
———————————————-
HUITIEME CHAMBRE
Jugement du TRENTE JANVIER DEUX MIL VINGT CINQ
Composition du Tribunal lors des débats et du délibéré :
Président : Florence CROIZE, Vice-présidente,
Assesseur : Géraldine BERHAULT, Première Vice-Présidente,
Assesseur : Marie-Caroline PASQUIER, Vice-Présidente,
GREFFIER : Caroline LAUNAY
Débats à l’audience publique du 22 NOVEMBRE 2024 devant Florence CROIZE, vice-présidente, siégeant en juge rapporteur, sans opposition des avocats, qui a rendu compte au Tribunal dans son délibéré.
Prononcé du jugement fixé au 30 JANVIER 2025, date indiquée à l’issue des débats.
Jugement prononcé par mise à disposition au greffe.
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ENTRE :
Madame [K] [I], demeurant [Adresse 1]
Rep/assistant : Me Nawal SEMLALI, avocat au barreau de RENNES, avocat plaidant
DEMANDERESSE.
D’UNE PART
ET :
M. LE PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE DE NANTES
représenté par Céline MATHIEU-VARENNES, procureur adjoint
DEFENDEUR.
D’AUTRE PART
EXPOSÉ DU LITIGE ET DES DEMANDES
Par acte d’huissier du 6 octobre 2021, [K] [I] a fait assigner le procureur de la République devant le tribunal judiciaire de Nantes afin de faire constater à titre principal, l’enregistrement de plein droit de la déclaration de nationalité souscrite le 18 octobre 2019 en application de l’article 21-12 du code civil, en tant que mineure recueillie par des ressortissants français et de dire qu’elle est française.
Au terme de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 17 mars 2023, [K] [I], au visa des dispositions des articles 21-12, 26-3, et 26-4 du code civil, demande au tribunal de :
– CONSTATER la délivrance du récépissé prévu à l’article 1043 du Code de procédure civile et dire par conséquent la procédure régulière au regard de ces dispositions ;
– CONSTATER l’enregistrement de plein droit de la déclaration de nationalité souscrite par Madame [K] [I], née le 04/06/1997 à [Localité 2] (Algérie) ;
– CONSTATER que celle-ci est bien de nationalité française et ce depuis le 18 octobre 2019 ;
– ORDONNER la mention prévue par l’article 28 du Code civil ;
– Ordonner l’exécution provisoire de la décision ;
– Dépens comme de droit ;
Elle expose être née le 04 juin 1997 à [Localité 2] (Algérie) de parents inconnus et avoir été recueillie à quatre mois dans le cadre d’une procédure de kafala par Monsieur [I] et Madame [O] tous deux franco-algériens et être entrée en France pour les rejoindre en 2018. Elle indique que le 18 octobre 2019, elle a souscrit une déclaration de nationalité et que ce n’est que le 28 décembre 2020 qu’elle s’est vue notifier un procès-verbal d’une décision refusant sa déclaration de nationalité au motif qu’elle était irrecevable comme ayant été souscrite par une personne majeure.
Elle fait valoir en premier lieu que le refus d’enregistrement est irrecevable en ce que le directeur des services de greffe judiciaire peut refuser l’enregistrement de la déclaration dans un délai maximum de six mois et à défaut de refus dans ce délai, copie de la déclaration doit être remise au déclarant avec mention de son enregistrement. Elle en déduit que le refus d’enregistrement de sa déclaration de nationalité en date du 18 octobre 2019 est non avenu, et que passé le délai de six mois l’enregistrement de sa déclaration est de droit, y compris en l’absence de remise de récepissé dès lors que son dossier était complet, aucune demande de pièce complémentaire ne lui ayant jamais été adressée.elle ajoute que c’est en vain que le ministère public se prévaut de l’absence de récepissé qui ne résulte que des carences de l’autorité judiciaire, pour repousser le point de départ du délai de six mois au jour de la notification du refus.
Elle soutient remplir en tout état de cause les conditions requises par l’article 21-12 du code civil pour réclamer la nationalité française.
Enfin elle conclut au rejet de la demande reconventionnelle du ministère public tendant à l’annulation de l’enregistrement de sa nationalité, au motif que la déclaration a été souscrite alors qu’elle était devenue majeure, dès lors que sa nationalité devant être enregistrée de plein droit le 18 avril 2020, le ministère public devait, en application de l’article 26-4 du code civil, en l’absence de fraude, agir en annulation avant le 18 avril 2022, alors qu’il ne l’a fait qu’aux termes de ses écritures notifiées le 8 juin 2022. Elle estime dès lors que le délai biennal étant dépassé au moment des conclusions du procureur de la République, sa demande reconventionnelle est irrecevable.
Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 11 janvier 2022, le ministère public requiert de :
– Constater la procédure régulière au regard de l’article 1043 du code de procédure civile ;
– Débouter [K] [I] de l’intégralité de ses demandes ;
Subsidiairement,
– Dire que [K] [I], née le 4 juin 1997 à [Localité 2] (Algérie), n’est pas française ;
– Ordonner la mention prévue par l’article 28 du code civil.
Le ministère public soutient en substance que la décision du 28 décembre 2020 refusant l’enregistrement n’est pas tardive en l’absence de récepissé ayant fait courir le point de départ du délai de six mois prévu à l’article 26-3 alinéa 3 du code civil. Il rappelle que l’objet du récepissé est d’attester de la remise de toutes les pièces nécessaires à l’examen du dossier. Il considère que les conditions de l’article 26-4 du code civil ne sont pas réunies, de sorte que la déclaration ne peut faire l’objet d’un enregistrement de plein droit.
Subsidiairement, à titre reconventionnel, le ministère public demande l’annulation de l’enregistrement de plein droit au motif quela déclaration de la nationalité de [K] [I] a été souscrite du temps de sa majorité, de sorte que les dispositions de l’article 21-12 ne sont pas réunies.
En réponse à [K] [I] il soutient que l’article 26-4 alinéa 2 lui permet de contester l’enregistrement dans le délai de deux ans à compter de la date de la décision ordonnant l`enregistrement, donc la date du jugement à intervenir dans l`hypothèse où le tribunal ordonnerait un tel enregistrement. Il en déduit que sa demande reconventionnelle est recevable.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 15 octobre 2024.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal, statuant publiquement, par jugement mis à disposition, contradictoire et en premier ressort,
CONSTATE que la procédure prévue par l’article 1043 du Code de procédure civile a été respectée ;
DIT que la décision en date du 28 décembre 2020 par laquelle le directeur des services de greffe judiciaires du tribunal d’instance de Rennes a refusé d’enregistrer la déclaration de [K] [I] est non avenue ;
DIT que la déclaration de nationalité souscrite par [K] [I] est enregistrée de plein droit au 26 avril 2019 ;
DÉCLARE recevable la demande reconventionnelle du ministère public en annulation de l’enregistrement de nationalité ;
ANNULE l’enregistrement de la nationalité intervenue de plein droit le 26 avril 2019 ;
DIT que [K] [I], née le 4 juin 1997 à [Localité 2] (Algérie), n’est pas française ;
ORDONNE la mention prévue par l’article 28 du Code civil ;
DÉBOUTE [K] [I] du surplus de ses demandes ;
CONDAMNE [K] [I] aux dépens.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT
Caroline LAUNAY Florence CROIZE
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