Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Saint-Denis de La Réunion
Thématique : Responsabilité fiscale du dirigeant et manquements répétés aux obligations fiscales
→ RésuméFAITSPar acte d’huissier de justice du 27 juillet 2022, le comptable du pôle de recouvrement spécialisé de la Réunion a assigné Monsieur [G] [P] devant le tribunal judiciaire de Saint Denis sur le fondement de l’article L.267 du livre des procédures fiscales. Le 2 mars 2023, la présidente du tribunal a ordonné un sursis à statuer en attendant une décision du tribunal correctionnel de Saint Denis, et a radié l’affaire. Le 19 mars 2024, le comptable a sollicité la déclaration de responsabilité solidaire de Monsieur [P] pour le paiement des impositions dues par l’Eurl Techni Bat Construction, ainsi que d’autres demandes financières. PROCÉDUREMonsieur [P] a assigné en intervention forcée Madame [W] [Y] le 29 juillet 2024, cherchant à la garantir de toute condamnation. Les deux dossiers ont été joints par ordonnance du 26 septembre 2024. Le comptable a exposé que Monsieur [P], gérant de la société Techni Bat Construction de 2006 à 2019, avait manqué à ses obligations fiscales, avec des manquements graves constatés lors d’un contrôle fiscal en 2015 et d’autres manquements postérieurs. Monsieur [P] a contesté sa responsabilité, affirmant que Madame [Y] était la gérante de fait. PRÉTENTIONSMonsieur [P] a soutenu que les manquements fiscaux étaient dus à Madame [Y], qui aurait retenu des courriers et détourné des fonds. Il a également affirmé que l’impossibilité de recouvrement était liée à des détournements de fonds et à une restructuration de la société. En réponse, le comptable a souligné que les manquements de Monsieur [P] avaient permis une survie artificielle de la société, aggravant la dette fiscale. Madame [Y] a contesté la demande de Monsieur [P], arguant qu’un protocole transactionnel l’en empêchait. MOTIFS DE LA DÉCISIONLe tribunal a jugé que l’intervention de Madame [Y] était recevable, et a débouté Monsieur [P] de ses demandes. Il a déclaré Monsieur [P] responsable solidairement du paiement des impositions dues par l’EURL Techni Bat Construction, condamnant ce dernier à payer la somme de 510.113,58 € au comptable, ainsi que des dépens et des indemnités. L’exécution provisoire a été ordonnée, considérant que le comptable avait agi avec diligence pour recouvrer les impositions dues. |
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE ST DENIS
MINUTE N°
CHAMBRE DES REFERES
AFFAIRE N° RG 24/00115 – N° Portalis DB3Z-W-B7I-GUXQ
NAC : 90Z
JUGEMENT STATUANT SELON
LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE AU FOND
AUDIENCE DU 30 Janvier 2025
DEMANDERESSE
M. LE COMPTABLE DU POLE RECOUVREMENT SPÉCIALISÉ DE LA REUNION
[Adresse 1]
[Localité 4]
Rep/assistant : Maître Céline MAZAUDIER-PICHON DE BURY de la SELARL PRAGMA, avocats au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
DEFENDEUR
M. [G] [O] [P]
[Adresse 2]
[Localité 5]
Rep/assistant : Me Sylvie MOUTOUCOMORAPOULE, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
INTERVENANTE FORCÉE
Mme [W] [Y]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 6]
Rep/assistant : Maître Mathieu GIRARD de la SELARL HOARAU-GIRARD, avocats au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
LORS DES DÉBATS :
Président : Catherine VANNIER
Greffier : Marina GARCIA
Audience Publique du : 28 Novembre 2024
LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Jugement prononcé le 30 Janvier 2025 , par décision contradictoire en premier ressort, et par mise à disposition au greffe de la juridiction par Madame Catherine VANNIER, Première Vice-présidente, assistée de Madame Marina GARCIA, Greffier
Copie exécutoire à Maître MAZAUDIER-PICHON DE BURY et Maître GIRARD délivrée le :
Copie certifiée conforme à Maître MOUTOUCOMORAPOULE délivrée le :
FAITS PROCEDURE PRETENTIONS
Par acte d’huissier de justice du 27 juillet 2022, le comptable du pôle de recouvrement spécialisé de la Réunion (PRS) a fait assigner à jour fixe Monsieur [G] [P] devant le tribunal judiciaire de Saint Denis de la Réunion sur le fondement de l’article L.267 du livre des procédures fiscales (LPF).
Par décision en date du 2 mars 2023, la présidente du tribunal a ordonné le sursis à statuer dans l’attente de la décision devant être rendue par le tribunal correctionnel de Saint Denis et ordonné la radiation de l’affaire.
Par conclusions de remise au rôle en date du 19 mars 2024, le comptable du PRS, sur le fondement de l’article L.267 du LPF et de l’article 1353 du code civil, sollicite de voir :
Déclarer l’action recevable et bien fondée,Juger que les conditions d’application de l’article L.267 du LPF sont réunies,En conséquence,
Déclarer Monsieur [P] [G] responsable solidairement du paiement des impositions et pénalités fiscales dues par l’Eurl Techni Bat Construction et générées pendant sa gérance,Juger que les faits commis par Madame [Y] pour lesquels le tribunal correctionnel de Saint Denis l’a reconnu coupable dans son jugement du 24 mars 2023 sont sans incidence sur l’impossibilité de recouvrement de la somme de 510.113,58 € devenus exigibles pendant la gérance de Monsieur [P],Condamner Monsieur [P] [G] à payer au comptable du PRS la somme de 510.113,58 €,Condamner Monsieur [P] [G] aux dépens,Condamner Monsieur [P] [G] au paiement d’une indemnité de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,Ordonner l’exécution provisoire de la décision,Rejeter l’ensemble des demandes de Monsieur [P].
Par acte de commissaire de justice en date du 29 juillet 2024, Monsieur [G] [P] a fait assigner en intervention forcée Madame [W] [Y] aux fins de le garantir de toute condamnation et que la décision lui soit déclarée commune.
Par ordonnance du 26 septembre 2024, les deux dossiers étaient joints.
A l’appui de ses demandes, le comptable du PRS expose que le Directeur Régional des Finances Publiques de la Réunion l’a autorisé à engager l’action prévue à l’article L.267 du LFP à l’encontre de Monsieur [P], de sorte que celle-ci est recevable. Monsieur [P] était le gérant de la société Techni Bat Construction du 5 septembre 2006 au 31 décembre 2019. Il a manqué à ses obligations fiscales. Les manquements sont graves et répétés et ont été constatés lors du contrôle fiscal effectué en 2015 (minoration d’actif net sur 2013, minoration volontaire du chiffre d’affaires sur les années 2012 à 2015, minoration de TVA). D’autres manquements ont encore été constatés postérieurement au contrôle de 2015 et notamment portant sur la CVAE (absence de dépôt de la déclaration de CVAE 2015, défaut de paiement de la CVAE 2015), sur la TVA (défaut de paiement de la TVA exigible, absence de dépôt des déclarations mensuelles de TVA sur les années 2015, 2017, 2018, 2019) ou encore sur les déclarations d’impôts sur les sociétés (retards importants sur les dépôts de déclarations, absence de paiement des insuffisances de versements…).
Monsieur [P] était le gérant de la société Techni Bat Construction depuis le 5 septembre 2006 jusqu’au 31 décembre 2019, soit sur la période au cours de laquelle les manquements répétés ont été constatés. Monsieur [P] ne démontre pas l’existence d’une délégation de pouvoir et alors que la direction effective n’est exonératoire pour le dirigeant de droit que si celle-ci est exclusive. En l’absence de justifications, la seule constatation des inobservations fiscales permet d’établir sa responsabilité. Le comptable du PRS estime que les documents versés (bilans des années 2015 à 2019) et l’attestation de la comptable sont insuffisants à établir la réalité d’une gestion effective et exclusive de la société par Madame [Y]. Il ajoute que, lors du contrôle fiscal fin 2015 / début 2016, l’interlocuteur du vérificateur était Monsieur [P] qui exerçait seul la gérance de la société. Ce dernier était présent lors de la quasi-totalité des interventions sur place et était assisté de sa comptable, Madame [F]. Il n’a jamais contesté son rôle dans la société et a été le seul correspondant des services fiscaux en charge du dossier de la société Techni Bat Construction, soit directement, soit par l’intermédiaire de sa comptable. Il est le signataire des différents courriers ou formulaires adressés au SIE de [Localité 8] et sa demande de délais de paiement porte bien sa signature. Monsieur [P] était donc bien le dirigeant effectif de la société et responsable à ce titre des déclarations et des paiements fiscaux pendant la période de son mandat.
Concernant le lien de causalité entre les manquements du dirigeant et l’impossibilité de recouvrement, le comptable du PRS précise avoir agi avec célérité pour le recouvrement de l’impôt. Dix mises en demeure tenant lieu de commandement de payer ont été adressées à la société. Deux avis à tiers détenteur (ATD) ont été envoyés aux principaux clients de la société. L’ATD adressé à la SIDR a fait l’objet d’une mainlevée à la suite d’un délai de paiement, qui prévoyait le versement de 24 mensualités de 10.000 € chacune entre le 15 février 2017 et le 15 janvier 2019. L’Eurl Techni Bat Construction a effectué les paiements jusqu’en septembre 2019. A l’arrêt des paiements, le PRS a repris les poursuites en effectuant des saisies à tiers détenteur auprès des établissements bancaires et des clients de la société. Il ajoute que toutes les sommes saisies ont bien été imputées sur les dettes de la société.
Par ailleurs, les détournements de fonds de Madame [Y] sur les comptes de la société Techni Bat et de la société Techni Bat Construction porte sur une somme de 251.180 € concernant la société Techni Bat et de 22.274 € concernant la société Techni Bat Construction. Les deux sociétés sont deux entités juridiques distinctes. Monsieur [P] entretient une confusion délibérée entre les deux sociétés. Seuls, huit chèques de la société Techni Bat Construction ont été détournés pour un montant de 22.274 €, la majorité des détournements concerne la société Techni Bat et n’explique pas l’impossibilité de recouvrement des 510.113,58 € devenus exigibles pendant la gérance de Monsieur [P]. L’escroquerie dont il a été victime est ainsi sans incidence sur l’impossibilité de recouvrement. Dès lors, l’argument de Monsieur [P] tendant à faire constater l’absence de lien de causalité entre les manquements constatés et l’impossibilité de recouvrement sera rejeté.
Enfin, concernant l’attribution d’un délai de paiement, le PRS précise avoir accordé des délais de paiement par courrier du 6 décembre 2016 à l’Eurl Techni Bat Construction prévoyant le versement de 24 mensualités de 10.000 € entre le 15 février 2017 et le 15 janvier 2019. La situation fiscale de la société devait être revue à l’issue de cette période. Il ajoute que l’obligation d’information du dirigeant prévue par l’instruction du 6 septembre 1988 vise le cas où la mise en cause du dirigeant est engagée à la suite du non-respect du plan de règlement. Or, le PRS a accordé des délais de paiement jusqu’au 15 janvier 2019, date à laquelle le plan a pris fin, la société Techni Bat Construction ayant par la suite continué ses versements. A l’arrêt des paiements, le PRS a repris les poursuites et effectué de nouvelles saisies à tiers détenteur. Ce n’est qu’une fois que le PRS a constaté l’impossibilité de recouvrement et ne disposant d’aucune autre possibilité d’action pour recouvrer sa créance, que celui-ci a assigné Monsieur [P] pour qu’il soit jugé solidairement responsable du paiement des impositions et pénalités dues par l’Eurl Techni Bat Construction et générées pendant sa période de gestion. L’action sur le fondement de l’article L.267 du LPF n’a pas été engagée en raison d’une défaillance de paiement dans le cadre du plan de règlement de sorte que Monsieur [P] ne peut s’exonérer de sa responsabilité en soutenant que le comptable n’a pas satisfait à son obligation d’information. Le PRS ajoute encore que les manquements de Monsieur [P] ont perduré après l’octroi du plan de règlement et les poursuites effectuées par le PRS n’ont pas permis de solder la dette. Les manquements relatifs aux déclarations et au paiement des impositions ont permis de différer la mise en recouvrement des impositions, les services fiscaux devant procéder par voie de taxation d’office, permettant ainsi à la société Tehcni Bat Construction de jouir d’une trésorerie artificielle grâce à l’absence de paiement des impôts dus et aux sommes collectées au titre de la TVA et non remboursées. Monsieur [P] a donné à la société des moyens de survie artificielle conduisant à l’accumulation d’une dette fiscale excessive qui n’a pu être réglée malgré les diligences du comptable public. Le plan n’a pas permis de solder la dette fiscale de la société qui a arrêté les paiements mensuels effectués après la fin de ce plan, et le PRS a été contraint d’engager de nouvelles poursuites qui sont restées vaines. Dès lors, la suspension des poursuites résultant de l’octroi d’un délai de paiement ne peut avoir de conséquence sur la mise en cause de Monsieur [P], dirigeant effectif de la société et responsable à ce titre des déclarations et des paiements fiscaux et dont la carence a rendu impossible le recouvrement de la dette fiscale.
Monsieur [P] s’oppose aux demandes du PRS. Il réplique que la gérance de la société avait été confiée à son ancienne compagne, madame [Y], gérante de fait. Celle-ci contribuait activement à la gestion quotidienne de la société, lui-même étant sur les chantiers. Ni la gérante de fait ni la comptable ne l’ont averti sur les risques et les manquements fiscaux de la société. Les manquements fiscaux sont le fait de Madame [Y] qui opérait une rétention des courriers qu’elle recevait dans le but de nuire à la société et à son gérant de droit. Dès qu’il a été informé des malversations, il a préféré être le seul interlocuteur des services fiscaux. Il estime ne pas avoir exercé son pouvoir de direction effective de la société de sorte que sa responsabilité personnelle ne peut être engagée.
De même, Monsieur [P] estime que l’impossibilité de recouvrement était essentiellement liée aux détournements de fonds opérés par Madame [Y] sur les comptes personnels et professionnels de Monsieur [P] ainsi qu’à la rétention de courrier. Ce dernier précise qu’une restructuration liée à une perte financière de la société Techni Bat Construction avait été décidée et l’activité était alors essentiellement exercée dans le cadre de l’Eurl Techni Bat. Le bénéfice de cette société a été en grande partie utilisé pour financer la dette fiscale de la société Techni Bat Construction. Il estime encore avoir versé la somme de 651.125 € et ajoute que le PRS n’a pas pris en compte les sommes qu’il a récupérées au titre des avis à tiers détenteur (opérations [Adresse 9] pour 64.162,43 €, [Adresse 11] et [Adresse 10] pour 95.875,39 €, SCCV [Adresse 7] pour 41.112,27 €). Il rappelle avoir été victime d’escroqueries de la part de son ancienne concubine pour un montant de plus de 477.000 €. Ces faits frauduleux ont eu pour conséquence de vider les comptes des sociétés de Monsieur [P] qui se sont retrouvés à cours de trésorerie constituant une des causes essentielles de l’impossibilité de recouvrement des dettes fiscales, objet de la présente procédure. Madame [Y] a reconnu les faits de détournements dans le but de nuire à Monsieur [P]. Elle a été condamnée par le tribunal correctionnel le 24 mars 2023 démontrant ainsi être la seule responsable en sa qualité de gérante de fait du défaut de déclaration aux services fiscaux. Cette condamnation démontre l’intention de Madame [Y] de compromettre la société Techni Bat Construction quand bien même les détournements de fonds s’élèvent à la somme de 22.274 €, notamment dans la dissimulation de documents ou le défaut de déclaration de la TVA sur plusieurs années expliquant le non-recouvrement de 510.113,58 €. Il ajoute avoir respecté l’échéancier pendant trois ans. L’arrêt des paiements est la conséquence des détournements de fonds de Madame [Y]. La reconnaissance de culpabilité de Madame [Y] a une incidence directe sur les manquements reprochés à Monsieur [P] du fait qu’il ne gérait pas de manière effective la société Techni Bat Construction.
Monsieur [P] ajoute avoir appelé en cause Madame [Y]. Il indique que la transaction ne porte que sur le volet pénal sans aucune mention sur l’instance introduite à l’initiative du comptable public. Madame [Y] a contribué activement à la gestion quotidienne de la société Techni Bat Construction. La tenue de la comptabilité et les déclarations de TVA étaient confiées à une comptable, Madame [F] [H] qui travaillait en étroite collaboration avec Madame [Y]. L’impossibilité de recouvrement est imputable aux agissements fautifs de cette dernière qui a conduit la société à une situation de cessation des paiements et au non-respect de ses obligations fiscales. Il estime ne pas être responsable solidairement du paiement des impositions et pénalités fiscales dues par la société Techni Bat Construction. Il sollicite, dans l’hypothèse d’une condamnation, de retenir la responsabilité de Madame [Y] et de la condamner à garantir toutes condamnations prononcées à son encontre.
Enfin, Monsieur [P] estime que l’attribution d’un délai de paiement est de nature à exonérer sa responsabilité personnelle pour inobservations des obligations fiscales de la société. L’attribution d’un délai de paiement tend à rompre le lien de causalité entre les inobservations fiscales et l’impossibilité de recouvrement puisque ce délai octroyé traduit la renonciation du comptable public pour la durée de l’échéancier de mise en œuvre de mesures coercitives pour le paiement des impositions dues par la société de sorte que l’octroi de délais de paiement est de nature à écarter la responsabilité personnelle du dirigeant. C’est ainsi que les dispositions de l’instruction du 6 septembre 1988 prévoit que le comptable public qui accorde un délai de paiement ne peut poursuivre son dirigeant en paiement solidaire de la dette à défaut du respect du plan que s’il l’a préalablement informé que, dans une telle hypothèse, il serait amené à engager sa responsabilité personnelle en mettant en œuvre les dispositions des articles L.266 et L.267 du LFP. Or, le courrier du 6 décembre 2016 accordant des délais de paiement ne précise pas que des poursuites seraient susceptibles de s’exercer sur le patrimoine personnel du dirigeant et ne fait aucune référence à la responsabilité solidaire de celui-ci sur le fondement de l’article L.267 du LFP. Il estime la lecture littérale du texte par le comptable public erronée. Pour Monsieur [P], en aucun cas, il est nécessaire que l’action du comptable public ait pour cause exclusive le non-respect du plan de règlement pour que le gérant puisse se prévaloir du défaut d’information prévue par l’instruction du 6 septembre 1988. La responsabilité solidaire du gérant doit être écartée pour les dettes ayant fait l’objet d’un plan de règlement dès lors que celui-ci n’a pas été expressément informé de la possibilité du comptable public d’en poursuivre un jour le paiement sur son patrimoine personnel.
Madame [Y] estime la demande de Monsieur [P] irrecevable. Elle indique qu’un protocole transactionnel a été signé le 15 mars 2023, Monsieur [P] ayant reçu en transaction la propriété de deux maisons d’une valeur totale de 300.000 €. Cette transaction a autorité de la chose jugée entre les parties et interdit à Monsieur [P] d’engager tout autre action indemnitaire contre Madame [Y]. Elle ajoute qu’elle n’a jamais été la gérante de fait de la société, mais n’était que la concubine de Monsieur [P]. Monsieur [P] se contente d’affirmer qu’elle serait la gérante de fait sans produire aucune pièce le justifiant. Elle sollicite que Monsieur [P] soit débouté de sa demande. Elle estime cette procédure abusive et sollicite la condamnation de ce dernier à lui verser la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts.
L’affaire a été mise en délibéré le 30 janvier 2025.
PAR CES MOTIFS
La présidente, statuant selon la procédure accélérée au fond, par décision contradictoire et en premier ressort,
DIT recevable l’intervention forcée de Madame [W] [Y],
DÉBOUTE Monsieur [G] [P] de l’ensemble de ses demandes,
DÉCLARE Monsieur [G] [P] responsable solidairement du paiement des impositions et pénalités fiscales dues par l’EURL Techni Bat Construction et générées pendant sa gérance,
CONDAMNE Monsieur [G] [P] à payer au Comptable du Pôle de Recouvrement Spécialisé de la Réunion la somme de 510.113,58 €,
CONDAMNE Monsieur [G] [P] aux dépens,
CONDAMNE Monsieur [G] [P] à payer au Comptable du Pôle de Recouvrement Spécialisé de la Réunion la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE Monsieur [G] [P] à payer à Madame [W] [Y] la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit,
LE GREFFIER LE PRESIDENT
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