L’Essentiel : M. [B] a assigné en responsabilité la société [G] et associés, ainsi que M. [G], en raison d’une ordonnance constatant son désistement d’action. La cour d’appel a déclaré son action irrecevable, estimant que la mission de l’avocat s’achevait avec la décision de justice. M. [B] conteste cette décision, arguant que le délai de prescription ne commence qu’à l’expiration du délai de recours. Il soutient que la cour a violé des dispositions du code civil et du code de procédure civile, entraînant ainsi l’irrecevabilité de son action.
|
Contexte de l’affaireM. [G], avocat au sein de la société [G] et associés, a assisté M. [B] dans une instance qui s’est conclue par une ordonnance du juge de la mise en état le 2 septembre 2013, constatant le désistement d’action notifié par M. [G] le 8 avril 2013. Situation de la société [G] et associésLa société [G] et associés a été placée en redressement judiciaire le 29 septembre 2016, et un plan de continuation de dix ans a été homologué par un jugement rendu le 9 octobre 2017. Action en responsabilitéLe 17 septembre 2018, M. [B] a assigné en responsabilité la société [G] et associés, M. [G], ainsi que Mme [C] et M. [F], en leur qualité respective d’administrateur ad hoc et de commissaire à l’exécution du plan. Ces derniers ont opposé la prescription de l’action intentée par M. [B]. Arguments de M. [B]M. [B] conteste la décision de la cour d’appel qui a déclaré son action irrecevable. Il soutient que le délai de prescription pour agir en responsabilité contre un avocat commence à courir à partir de l’expiration du délai de recours contre la décision ayant mis fin à l’instance, sauf si les relations entre le client et l’avocat ont cessé avant cette date. Décision de la cour d’appelLa cour d’appel a retenu que la mission de l’avocat prend fin au jour du prononcé de la décision de justice qui termine l’instance. En l’espèce, la mission de M. [G] a pris fin le 2 septembre 2013, date à laquelle l’ordonnance du juge a constaté son désistement. Par conséquent, l’action intentée par M. [B] le 17 septembre 2018 a été jugée prescrite. Violation des textesLa cour d’appel a été considérée comme ayant violé les articles pertinents du code civil et du code de procédure civile en statuant de la sorte, ce qui a conduit à la déclaration d’irrecevabilité de l’action de M. [B]. |
Q/R juridiques soulevées :
Quel est le délai de prescription pour l’action en responsabilité d’un client contre son avocat ?Le délai de prescription de l’action en responsabilité du client contre son avocat est régi par l’article 2225 du Code civil, qui stipule : « L’action en responsabilité civile se prescrit par cinq ans à compter du jour où la victime a connu ou aurait dû connaître les faits permettant d’exercer son droit. » Dans le cas présent, la jurisprudence précise que ce délai court à compter de l’expiration du délai de recours contre la décision ayant terminé l’instance pour laquelle l’avocat a été mandaté. Ainsi, si le client n’a pas eu connaissance des fautes de l’avocat avant la fin de l’instance, le délai de prescription ne commence à courir qu’à ce moment-là. Il est également important de noter que, selon l’article 412 du Code de procédure civile, l’ordonnance du juge de la mise en état, qui met fin à l’instance, est susceptible d’appel dans les quinze jours suivant sa signification. Cela signifie que tant que le client a la possibilité de contester la décision, le délai de prescription n’est pas encore engagé. Comment la cour d’appel a-t-elle interprété la fin de la mission de l’avocat ?La cour d’appel a interprété que la mission de l’avocat prend fin au jour du prononcé de la décision de justice qui termine l’instance pour laquelle il a été mandaté. Cette interprétation repose sur l’article 2225 du Code civil, qui établit que la responsabilité de l’avocat ne peut être engagée qu’après la fin de sa mission. Dans l’affaire en question, la cour a retenu que la mission de M. [G] a pris fin le 2 septembre 2013, date à laquelle le juge de la mise en état a prononcé l’ordonnance constatant le désistement de M. [B]. Par conséquent, l’action en responsabilité intentée par M. [B] le 17 septembre 2018 a été jugée prescrite, car elle a été engagée plus de cinq ans après la fin de la mission de l’avocat. Cette décision a été contestée par M. [B], qui a soutenu que le délai de prescription ne commençait à courir qu’après l’expiration du délai de recours contre la décision de justice, ce qui n’avait pas été pris en compte par la cour d’appel. Quels articles de loi ont été cités pour justifier la décision de la cour d’appel ?La cour d’appel a cité plusieurs articles de loi pour justifier sa décision, notamment : – **Article 2225 du Code civil** : qui traite du délai de prescription en matière de responsabilité civile. – **Article 412 du Code de procédure civile** : qui précise que l’ordonnance du juge de la mise en état est susceptible d’appel dans les quinze jours suivant sa signification. – **Article 13 du décret n° 2005-790 du 12 juillet 2005** : qui concerne les règles de déontologie de la profession d’avocat. – **Article 776 du Code de procédure civile** : qui traite des délais de prescription et des interruptions de ces délais. Ces articles ont été combinés pour établir que le délai de prescription de l’action en responsabilité de M. [B] contre son avocat a commencé à courir à partir de la fin de la mission de l’avocat, ce qui a conduit à la déclaration d’irrecevabilité de son action. La cour a ainsi conclu que la mission de M. [G] avait pris fin le 2 septembre 2013, rendant l’action de M. [B] prescrite. |
MY1
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 29 janvier 2025
Cassation
Mme CHAMPALAUNE, président
Arrêt n° 73 F-D
Pourvoi n° M 23-18.847
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 29 JANVIER 2025
M. [M] [B], domicilié chez [Adresse 4], a formé le pourvoi n° M 23-18.847 contre l’arrêt rendu le 21 mars 2023 par la cour d’appel de Paris (pôle 4, chambre 13), dans le litige l’opposant :
1°/ à M. [Z] [G], domicilié [Adresse 3],
2°/ à la société d’avocats [G] et associés, société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 1], représentée par son liquidateur amiable, M. [Z] [G],
3°/ à Mme [L] [C], domiciliée maison des Avocats [Adresse 5], ès qualités d’administrateur ad hoc de M. [Z] [G],
4°/ à M. [X] [F], domicilié [Adresse 2], en qualité de commissaire à l’exécution du plan de la société d’avocats [G] et associés,
défendeurs à la cassation.
Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Kass-Danno, conseiller référendaire, les observations de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de M. [B], de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [G], de la société d’avocats [G] et associés, de Mme [C], et l’avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l’audience publique du 3 décembre 2024 où étaient présents Mme Champalaune, président, Mme Kass-Danno, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Ben Belkacem, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
1. Selon l’arrêt attaqué (Paris, 21 mars 2023), M. [G], avocat membre de la société [G] et associés, a assisté M. [B] dans une instance s’étant achevée par une ordonnance du juge de la mise en état du 2 septembre 2013, constatant le désistement d’action notifié par M. [G] le 8 avril 2013.
2. La société [G] et associés a fait l’objet d’un redressement judiciaire le 29 septembre 2016 et un plan de continuation de dix ans a été homologué par jugement du 9 octobre 2017.
3. Le 17 septembre 2018, M. [B] a assigné en responsabilité la société [G] et associés, M. [G], Mme [C], en qualité d’administrateur ad hoc de M. [G], et M. [F], en qualité de commissaire à l’exécution du plan de la société [G] et associés, lesquels lui ont opposé la prescription de son action.
Enoncé du moyen
4. M. [B] fait grief à l’arrêt de déclarer irrecevable son action, alors « que le délai de prescription de l’action en responsabilité du client contre son avocat, au titre des fautes commises dans l’exécution de sa mission, court à compter de l’expiration du délai de recours contre la décision ayant terminé l’instance pour laquelle il avait reçu mandat de représenter et d’assister son client, à moins que les relations entre le client et son avocat aient cessé avant cette date ; qu’en l’espèce, pour déclarer irrecevable l’action en responsabilité engagée par M. [B] contre son avocat, l’arrêt retient que « la mission de l’avocat a pris fin au jour du prononcé de la décision de justice qui termine l’instance pour laquelle il a reçu mandat d’assister ou de représenter son client et qu’ainsi, la mission de Me [G] a pris fin le 2 septembre 2013, jour du prononcé de l’ordonnance du juge de la mise en état ayant prononcé son désistement, de sorte que l’action en responsabilité contre l’avocat intentée par acte d’huissier de justice du 17 septembre 2018 qui seul interrompt le délai pour agir doit être déclarée prescrite » ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a méconnu les articles 2225 du code civil, 412 et 795 du code de procédure civile et 13 du décret n° 2005-790 du 12 juillet 2005. »
Vu l’article 2225 du code civil, l’article 412 du code de procédure civile, l’article 13 du décret n° 2005-790 du 12 juillet 2005 relatif aux règles de déontologie de la profession d’avocat et l’article 776 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n°2005-1678 du 28 décembre 2005 :
5. Il résulte de la combinaison des trois premiers de ces textes que le délai de prescription de l’action en responsabilité du client contre son avocat, au titre des fautes commises dans l’exécution de sa mission, court à compter de l’expiration du délai de recours contre la décision ayant terminé l’instance pour laquelle il avait reçu mandat de représenter et d’assister son client, à moins que les relations entre le client et son avocat aient cessé avant cette date.
6. Selon le quatrième, est susceptible d’appel, dans les quinze jours de sa signification, l’ordonnance du juge de la mise en état statuant sur un incident mettant fin à l’instance, ayant pour effet de mettre fin à celle-ci ou en constatant l’extinction.
7. Pour déclarer irrecevable l’action de M. [B], l’arrêt retient qu’en application de l’article 2225 du code civil, la mission de l’avocat prend fin au jour du prononcé de la décision de justice, qui termine l’instance à laquelle celui-ci a reçu mandat d’assister ou de représenter son client et que la mission de M. [G], ayant pris fin le 2 septembre 2013, jour du prononcé de l’ordonnance du juge de la mise en état constatant son désistement, cette action, intentée le 17 septembre 2018, est prescrite.
8. En statuant ainsi, la cour d’appel a violé les textes susvisés.
Laisser un commentaire