Tribunal judiciaire d’Évry, 17 janvier 2025, RG n° 24/01119
Tribunal judiciaire d’Évry, 17 janvier 2025, RG n° 24/01119

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire d’Évry

Thématique : Expertise judiciaire et relogement : enjeux de responsabilité dans un projet immobilier.

Résumé

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
Au Nom du Peuple Français

Tribunal judiciaire d’EVRY
Pôle des urgences civiles
Juge des référés

Ordonnance du 17 janvier 2025
MINUTE N° 25/______
N° RG 24/01119 – N° Portalis DB3Q-W-B7I-QNIG

PRONONCÉE PAR

Elisa VALDOR, Juge,
Assistée de Alexandre EVESQUE, greffier, lors des débats à l’audience du 3 décembre 2024 et de Alexandre EVESQUE, greffier, lors du prononcé

ENTRE :

dossier initial RG 24/01119

Monsieur [I] [J]
demeurant [Adresse 2]

représenté par Maître Sophie HADDAD de la SELARL HADDAD-MOUTIER SOCIÉTÉ D’AVOCATS, avocate au barreau de l’ESSONNE

Madame [B] [C] épouse [J]
demeurant [Adresse 2]

représentée par Maître Sophie HADDAD de la SELARL HADDAD-MOUTIER SOCIÉTÉ D’AVOCATS, avocate au barreau de l’ESSONNE

dossier initial RG 24/01170

SNC LNC ZETA PROMOTION
dont le siège social est sis [Adresse 8]

représentée par Maître Fabrice LEPEU de l’AARPI KLP AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0404

DEMANDEURS

D’UNE PART

ET :

S.A.S. DSA
dont le siège social est sis [Adresse 7]

représentée par Maître Serge BRIAND de la SELEURL BRIAND AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0208

S.A.R.L. ADEO
dont le siège social est sis [Adresse 3]

représentée par Maître Benoît ARNAUD de l’AARPI LMT AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R169

Compagnie d’assurance AXA FRANCE IARD, en qualité d’assureur des sociétés STB, ADEO et DSA
dont le siège social est sis [Adresse 5]

représentée par Maître Serge BRIAND de la SELEURL BRIAND AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0208

Société ZURICH INSURANCE EUROPE AG, en qualité de constructeur non réalisateur
dont le siège social est sis [Adresse 1]

représentée par Maître Sandrine ADIDA, avocate au barreau de PARIS, vestiaire : G0107

S.N.C. LNC ZETA PROMOTION
dont le siège social est sis [Adresse 8]

représentée par Maître Fabrice LEPEU de l’AARPI KLP AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0404

S.A. LES NOUVEAUX CONSTRUCTEURS
dont le siège social est sis [Adresse 8]

représentée par Maître Fabrice LEPEU de l’AARPI KLP AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0404

S.A.S. EIFFAGE ENERGIE SYSTEMES BARTH (EES BARTH)
dont le siège social est sis [Adresse 12]

représentée par Maître Sandra MOUSSAFIR de la SELEURL CABINET SANDRA MOUSSAFIR, avocate au barreau de PARIS, vestiaire : C1845

S.A. SMA SA, es qualité d’assureur de la société EES BARTH
dont le siège social est sis [Adresse 9]

représentée par Maître Paul-Henry LE GUE de la SELARL LE GUE & DA COSTA, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0242, substitué par Maître David CHICH, avocat au barreau de l’ESSONNE

Société STB
dont le siège social est sis [Adresse 4]

représentée par Maître Alexandre GUEZENNEC, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0691

DÉFENDERESSES

D’AUTRE PART

ORDONNANCE : Prononcée publiquement par mise à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort.

**************

EXPOSE DU LITIGE

Par ordonnance du 26 mai 2023 rendue dans l’affaire enregistrée sous le numéro de répertoire général 23/00332, le juge des référés du tribunal judiciaire d’Evry-Courcouronnes a, sur la demande de Monsieur [I] [J] et Madame [B] [J] née [C], ordonné une expertise judiciaire au contradictoire de la SNC LNC ZETA PROMOTION et de la SA LES NOUVEAUX CONSTRUCTEURS, et désigné pour y procéder Monsieur [S] [R], lequel empêché, a été remplacé Monsieur [T] [W], par ordonnance du magistrat chargé du contrôle des expertise en date du 23 juin 2023.

Par ordonnance du 10 mai 2024, le juge des référés du tribunal judiciaire d’Evry-Courcouronnes, sur la demande de la SNC LNC ZETA PROMOTION et de la SA LES NOUVEAUX CONSTRUCTEURS, a déclaré communes à la SA EIFFAGE ENERGIE SYSTEMES BARTH-EES BARTH, la SA SMA, la SAS STB, la SAS DSA, la SARL ADEO et la SA AXA FRANCE IARD, les opérations d’expertise ordonnées par l’ordonnance de référé du 26 mai 2023.

Concernant l’instance enrôlée sous le numéro de répertoire général 24/01119
Par actes de commissaire de justice du 9 octobre 2024, Monsieur [I] [J] et Madame [B] [J] née [C] ont fait assigner devant le Président du tribunal judiciaire d’Evry-Courcouronnes, statuant en référés, la société LNC ZETA PROMOTION, la société LES NOUVEAUX CONSTRUCTEURS, la société EIFFAGE ENERGIE SYSTEMES BARTH, la SMA SA en qualité d’assureur de la société EIFFAGE ENERGIE SYSTEMES BARTH, la société STB, la société ADEO, la société DSA et la société AXA FRANCE IARD en qualité d’assureur des sociétés STB, ADEO et DSA aux fins de voir :

condamner in solidum les sociétés LNC ZETA PROMOTION, LES NOUVEAUX CONSTRUCTEURS, EIFFAGE ENERGIE SYSTEMES BARTH, la compagnie SMA SA, les sociétés STB, ADEO, DSA et la société AXA FRANCE IARD, et à tout le moins les sociétés LNC ZETA PROMOTION et les NOUVEAUX CONSTRUCTEURS, prises en la personne de leurs représentants légaux, à leur verser une provision de 40.000 euros à valoir sur leurs préjudices ;mettre à la charge in solidum des sociétés LNC ZETA PROMOTION et LES NOUVEAUX CONSTRUCTEURS, prises en la personne de leurs représentants légaux, les frais d’expertise à venir ;condamner les sociétés LNC ZETA PROMOTION et LES NOUVEAUX CONSTRUCTEURS, prises en la personne de leurs représentants légaux, à leur verser une somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.- réserver les dépens.

Au soutien de leurs prétentions, Monsieur [I] [J] et Madame [B] [J] née [C] font valoir, au visa de l’article 835 du code de procédure civile, que :

par acte authentique en date du 10 mai 2022, ils ont acquis de la société LNC ZETA PROMOTION un appartement ainsi que deux emplacements de parking souterrain, en l’état futur d’achèvement, au sein d’un ensemble immobilier à usage principal d’habitation sis [Adresse 6] à [Localité 11], moyennant un prix de 283.000 euros ;le 27 juin 2022, la SNC LNC ZETA PROMOTION a déclaré attester de l’achèvement des travaux et ils ont attesté prendre possession du bien, avec les réserves figurant à l’état contradictoire des lieux ;par courrier recommandé en date du 20 juillet 2022, et dans les jours qui ont suivi, il n’ont eu de cesse de dénoncer les différents désordres constatés, dont notamment une forte humidité, un dysfonctionnement du disjoncteur et une non-conformité du robinet du jardin extérieur ;l’intervention d’un technicien dépêché à cet effet n’a pas mis fin aux désordres ;ils ont donc mis en demeure la société LNC ZETA PROMOTION par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 29 octobre 2022 ;la société LES NOUVEAUX CONSTRUCTEURS a annoncé en réponse programmer une intervention en urgence, laquelle n’a pas été suivie d’effet ;la situation s’est ensuite aggravée, l’appartement étant devenu insalubre selon les termes du constat dressé par le commissaire de justice le 27 janvier 2023, lequel a recensé de nombreuses malfaçons et notamment une forte humidité, aussi bien dans la cuisine, que dans le salon, les chambres et le sous-sol ;ces désordres ont affecté leur santé morale et physique et celle de leur fils de trois ans ;une expertise judiciaire a été ordonnée à leur demande, par ordonnance du 26 mai 2023 et l’expert a considéré que les conséquences des désordres rendaient l’appartement non conforme à sa destination et indiqué qu’il était nécessaire de reloger la famille dans les plus brefs délais et d’entamer des investigations lourdes et destructives ;l’état du logement continuant à se dégrader, ils ont été contraints de quitter l’appartement litigieux et ont emménagé, à compter du 10 mai 2024, dans un appartement situé à [Localité 10], moyennant un loyer mensuel de 1600 euros charges comprises, venant s’y ajouter différents frais ;asphyxiés financièrement, ils se sont rapprochés des sociétés LNC ZETA PROMOTION et LES NOUVEAUX CONSTRUCTEURS afin de solliciter la prise en charge de leurs frais de relogement, et ce, d’autant qu’une provision complémentaire de 13 680 euros était fixée par ordonnance du 21 juin 2024 du magistrat chargé du contrôle des expertises ;
dès lors et compte tenu de l’ampleur des désordres constatés et des premières causes desdits désordres retenues par l’expert, et des préjudices qu’ils ont d’ores et déjà subis, ils sont recevables et bien fondés à solliciter la condamnation in solidum de l’ensemble des défendeurs, et à tout le moins, des sociétés LNC ZETA PROMOTION et LES NOUVEAUX CONSTRUCTEURS, à leur verser une provision de 40.000 euros à valoir sur leurs préjudices, et de mettre à la charge des sociétés LNC ZETA PROMOTION et LES NOUVEAUX CONSTRUCTEURS les frais d’expertise à venir.
Cette instance a été enrôlée sous le numéro de répertoire général 24/01119.

L’affaire appelée à l’audience du 19 novembre 2024, a été renvoyée à l’audience du 3 décembre 2024.

A l’audience du 3 décembre 2024, Monsieur [I] [J] et Madame [B] [J] née [C], représentés par leur avocat, ont soutenu leurs prétentions et moyens figurant dans leur acte introductif d’instance et déposés les pièces visées dans leur bordereau.

La société LNC ZETA PROMOTION et la société LES NOUVEAUX CONSTRUCTEURS, représentées par leur conseil, reprenant les termes de leurs conclusions en réponse, ont sollicité du juge des référés de :

à titre liminaire, mettre hors de cause la société LES NOUVEAUX CONSTRUCTEURS ;recevoir la SNC LNC ZETA PROMOTION en ses demandes et les dires bien fondées ;rejeter les demandes des époux [J] ;à titre subsidiaire, réduire le montant de la provision qui pourra être allouée aux époux [J] à de plus justes proportions ;prononcer la jonction de l’instance avec celle pendante devant le juge des référés du tribunal de céans sous le numéro RG 24/01170 ;condamner la compagnie ZURICH INSURANCE à garantir et relever indemne la SNC LNC ZETA PROMOTION de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre, au profit des époux [J] ;condamner les consorts [J] et tout autre partie succombante à leur verser la somme de 1.000 euros chacune au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
A l’appui de leur défense et de leurs prétentions, elles font valoir, au visa des articles 145 et 835 du code de procédure civile, que :

la société LES NOUVEAUX CONSTRUCTEURS doit être mise hors de cause dans la mesure où, d’une part, elle n’est pas la contractante des époux [J], lesquels ont acquis leur appartement auprès de la SNC LNC ZETA PROMOTION, qui a procédé à la livraison des biens acquis, et d’autre part, elle n’est intervenue en aucun titre dans le cadre de l’acte à construire ;La SNC LNC ZETA PROMOTION a, sans aucune reconnaissance de responsabilité et pour le compte de qui il appartiendra, payé une avance de 1.600 euros afin de permettre aux époux [J] de s’acquitter de leur loyer du mois de juin 2024 ;si le principe de la prise en charge des loyers peut constituer un préjudice indemnisable, il en est autrement du montant des charges, dont le détail n’est pas connu mais qui correspondent à des services et prestations fournis par le bailleur, tel que le chauffage et l’eau chaude, et, si les époux [J] étaient restés dans leur logement, ils auraient tout de même dû s’acquitter de cette dépense, qu’ils ne paient pas en double puisque leur bien est inoccupé ;le dépôt de garantie n’est pas davantage un préjudice indemnisable, étant récupérable lors de la libération des lieux loués, il n’est pas justifié du quantum de la demande au titre des frais de procédures et/ou de conseil, qui fait doublon avec la demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;elle a mis en cause les autres sociétés défenderesses dans le cadre des opérations d’expertise dans la mesure où elles sont intervenues à l’opération de construction ou assureur des intervenants à l’opération de construction ;l’expert a, aux termes de sa note aux parties n°1, constaté que les désordres rendaient l’appartement non conforme à sa destination et indiqué qu’il était nécessaire de reloger la famille, dans les plus brefs délais, et d’entamer des investigations lourdes et destructives, dans ces certains cas ;ces désordres étant de nature décennale, elle va, en sa qualité de constructeur non réalisateur, voir sa responsabilité civile décennale engagée ;elle est assurée auprès de la compagnie ZURICH INSURANCE EUROPE AG au titre de sa responsabilité décennale ;elle est donc bien fondée à demander à ce que la société ZURICH INSURANCE EUROPE AG soit condamnée à la garantir et la relever indemne de toutes les condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre au profit des époux [J].
La société ADEO, représentée par son conseil, a, se référant à ses conclusions en défense notifiées par RPVA, le 26 novembre 2024, sollicité du juge des référés de :

constater le caractère inopposable et non contradictoire des opérations d’expertise judiciaire aux constructeurs nouvellement mis en cause, à défaut de la tenue d’une réunion d’expertise contradictoire, la réunion fixée initialement le 9 septembre 2024 ayant été annulée ;
En conséquence,

dire qu’aucune condamnation ne peut intervenir à l’encontre des constructeurs sur la base des constatations effectuées par l’Expert judiciaire de manière non contradictoire à leur égard ;
En tout état de cause,

constater qu’il n’est pas établi une quelconque imputabilité des désordres d’infiltrations dans l’appartement avec les travaux d’étanchéité réalisés par la société ADEO, le rapport d’investigation ayant conclu négativement sur l’existence d’une relation de cause à effet au vu des investigations menées ;
En conséquence,

juger qu’il existe des contestations sérieuses sur la demande de condamnation provisionnelle de Monsieur et Madame [J] contre la société ADEO ;se déclarer incompétent sur la demande de condamnation provisionnelle et renvoyer les parties à se pourvoir au fond ;les débouter de toute demande de condamnation à son encontre ;les condamner au paiement d’une indemnité de 2.500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.

Au soutien de sa défense, elle fait valoir, au visa de l’article 835 du code de procédure civile, que :

si elle a été régulièrement appelée à l’expertise judiciaire, par ordonnance de référé du 10 mai 2024, la réunion à laquelle elle a été convoquée a été annulée de sorte qu’à ce jour les opérations d’expertise n’ont pas été rendues contradictoires et opposables aux constructeurs et qu’aucune demande de condamnation ne peut être formulée à leur encontre sur le fondement des constatations de l’expert judiciaire effectuées avant leur mise en cause ;elle a réalisé des travaux d’étanchéité au titre des terrasses inaccessibles et terrasses accessibles et des balcons non isolés, ainsi que de la terrasse rez-de-chaussée pour un montant de 243.000 euros HT, qui ont été régulièrement réceptionnés selon procès-verbal du 23 juin 2022, sans réserve, et il ressort du rapport d’intervention du 13 octobre 2022 de IBRF que les désordres allégués au titre de l’expertise judiciaire ne sont pas imputables aux ouvrages d’étanchéité réalisés par elle ,la demande de condamnation provisionnelle des demandeurs à son encontre se heurte à une contestation sérieuse à défaut de pouvoir établir une imputabilité des désordres d’infiltrations au titre d’une défaillance des ouvrages d’étanchéité relevant de sa sphère d’intervention.
La société STB, représentée par son conseil et se référant à ses conclusions notifiées par RPVA, le 28 novembre 2024, a sollicité du juge des référés de :

débouter les époux [J] de l’ensemble de leurs demandes ; subsidiairement, condamner toute partie succombante à la garantir et relever indemne de toute condamnation en principal, frais et accessoires ; condamner les époux [J] et toute partie succombante à lui verser la somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens ;
Au soutien de sa défense et de ses prétentions, elle expose, au visa de l’article 835 du code de procédure civile, que dans le cadre de l’opération de construction, elle s’est vue confier par la société LNC ZETA PROMOTION, par contrat de marché du 5 septembre 2019, la réalisation du lot 2C «Rabattement de nappe», et du lot n°3 «gros œuvre», et que la demande de provision des époux [J] se heurte à plusieurs contestations sérieuses en ce que :

sa responsabilité dans la survenance des désordres constatés dans l’appartement des époux [J] ne fait l’objet d’aucun commencement de démonstration alors qu’il est nécessaire que le caractère décennal du désordre soit constaté et que l’imputabilité technique des locateurs d’ouvrage dans la survenance du désordre soit établie ce qui n’est pas le cas en l’espèce ;l’expert judiciaire n’a pas caractérisé une responsabilité technique de sa part dans les désordres constatés et aucune réunion d’expertise au contradictoire des différents locateurs d’ouvrage n’a eu lieu depuis leur mise en cause, par ordonnance du 10 mai 2024 ;l’expert dans sa note aux parties n°1 n’évoque que des causes probables dans la survenance des désordres, ce qui ne permet pas d’établir des responsabilités, et aucune ne concerne le lot «gros œuvre» ;
la somme provisionnelle de 40.000 euros réclamée par les demandeurs ne correspond manifestement pas à des frais qu’ils auraient réellement engagés, puisqu’ils n’ont exposés que la somme de 10.852 euros pour leurs frais de relogement et servirait à couvrir le remboursement du prêt immobilier qui ne saurait constituer un préjudice et les frais d’expertise alors que le magistrat du contrôle des expertises a écarté la demandes des époux [J] tendant à ce que les frais d’expertise ne soient plus à leur charge.
En outre, elle sollicite, à titre subsidiaire, si la demande des époux [J] était accueillie, d’être garantie et relevée indemne par toute partie succombante, en raison de l’absence de démonstration d’une quelconque faute de sa part.

La société EIFFAGE ENERGIE SYSTEMES BARTH, représentée par son conseil et se référant à ses conclusions notifiées par RPVA, le 2 décembre 2024, sollicite du juge des référés de :

A titre principal,

juger qu’il n’existe aucune obligation incontestable à l’encontre de la société EIFFAGE ENERGIE SYSTEMES BARTH ; juger que les consorts [J] ne justifient pas des préjudices allégués ;
En conséquence,

débouter les consorts [J] de leur demande de provision ;
A titre subsidiaire,

limiter la demande de condamnation des consorts [J] et la ramener à de plus justes proportions ;
En tout état de cause,

condamner les sociétés LNC ZETA PROMOTION, LES NOUVEAUX CONSTRUCTEURS, STB, ADEO, DSA, la compagnie SMA SA, et la compagnie AXA France IARD à relever et garantir la société EIFFAGE ENERGIE SYSTEME BARTH de toute condamnation susceptible d’intervenir à son encontre ;débouter les parties de l’ensemble de leurs demandes formées à l’encontre de la société EIFFAGE ENERGIE SYSTEME BARTH ; condamner les consorts [J] et toute partie succombante à verser à la société EIFFAGE ENERGIE SYSTEME BARTH la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.
Au soutien de sa défense et de ses prétentions, elle fait valoir, au visa des articles 6, 9, 334 et 835 du code de procédure civile et des articles 1792-1 et 1353 du code civil, que :

le fait que l’expert judiciaire estime que les désordres rendraient l’appartement non conforme à sa destination nécessitant un relogement ne justifie nullement le paiement d’une provision in solidum par l’ensemble des parties attraites à la procédure dès lors que les mesures d’instruction à ce stade ne permettent pas de déterminer indiscutablement les responsabilités des parties à la cause, ce qui est renforcé par le fait que les opérations d’expertise sont actuellement en cours et que l’expert a indiqué la nécessité d’investigations complémentaires, en ce que ni la cause, ni les imputabilités n’ont encore été déterminées ;
aucun accédit n’a eu lieu au contradictoire des locateurs d’ouvrage mis en cause, dont elle, par l’ordonnance du 10 mai 2024 ;il n’existe donc aucune obligation incontestable à son égard de sorte que les époux [J] seront déboutés de leur demande de provision ;les préjudices allégués ne sont nullement justifiés dans leur principe et quantum et, plus particulièrement, les frais de procédure et de conseil juridique et le dépôt de garantie ne constituent pas des préjudices indemnisables, et le préjudice moral n’est ni chiffré, ni justifié ;à titre subsidiaire, le préjudice allégué sera limité et ramené à de plus justes proportions et ne saurait excéder 12.375 euros en comptabilisant le coût de déménagement, les honoraires de location et les loyers depuis le 10 mai 2024 ;si par extraordinaire, le juge des référés entrait en voie de condamnation à son encontre, elle sera recevable et bien fondée en son appel en garantie à l’encontre des autres parties défenderesses, en l’absence de démonstration d’une quelconque faute de sa part.
La société SMA, en sa qualité d’assureur de la société EIFFAGE ENERGIE SYSTEMES BARTH, représentée par son conseil et se référant à ses conclusions notifiées par RPVA, le 2 décembre 2024, sollicite du juge des référés de :

débouter Monsieur [J] de leurs demandes à l’encontre de la SMA SA ; constater que la SMA SA n’a pas été visée ni impliquée par l’expertise judiciaire en cours et qu’aucune imputabilité n’a été établie à son encontre ; juger que la demande de condamnation in solidum visant la SMA SA souffre de contestations sérieuses.
En conséquence,

rejeter la demande de condamnation in solidum de la SMA SA avec les autres parties, en raison de l’absence de tout fondement juridique et factuel, ainsi que du défaut de motivation des conclusions de Monsieur [J] concernant la SMA SA ; – réserver les dépens.

Au soutien de sa défense, elle fait valoir, au visa de l’article 835 du code de procédure civile, qu’elle entend s’opposer fermement aux demandes de condamnation in solidum formulées par les époux [J] dans la mesure où :

elle n’a pas été expressément mise en cause lors de l’expertise judiciaire en cours ;l’expertise diligentée ne mentionne à aucun moment la responsabilité ou l’imputabilité directe de la société EIFFAGE ENERGIE SYSTEME BARTH et donc de son assureur, dans les désordres constatés ;il apparait donc que la société EIFFAGE ENERGIE SYSTEME BARTH n’a commis aucune faute engageant sa responsabilité, ce qui exclut toute condamnation, même à titre conservatoire ou provisionnel ; les époux [J] ne motivent en rien leur demande de condamnation à l’égard de la SMA SA.
La société DSA et la société AXA FRANCE IARD, en qualité d’assureur des sociétés DSA, STB et ADEO, se référant à leurs conclusions notifiées par RPVA, le 13 novembre 2024, sollicitent du juge des référés de :

débouter les consorts [J] ;condamner les consorts [J] et tout autre partie succombante à leur verser la somme de 800 euros chacune au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Au soutien de leur défense, elles font valoir, au visa de l’article 835 du code de procédure civile, que :

la note aux parties de l’expert ne suffit pas à établir le caractère inhabitable du logement en l’absence d’un arrêté préfectoral en ce sens, et alors que si tel était le cas, l’assureur dommages-ouvrage n’aurait pas manqué de prendre en charge les travaux nécessaires pour remédier à la situation alléguée par les demandeurs ;même si le juge des référés considérait que le caractère décennal des désordres n’est pas sérieusement contestable, engageant ainsi la responsabilité de plein droit du promoteur en vertu de l’article 1646-1 du code civil, il constaterait qu’il n’a pas la compétence pour statuer sur la responsabilité des locateurs d’ouvrage ;d’une part, ni l’expert judiciaire ni les demandeurs ne sont en mesure d’indiquer quelle entreprise a réalisé quel lot, ni quelles prestations étaient précisément comprises dans chaque lot, d’autre part, l’expert judiciaire se contente, dans sa note aux parties n°1, d’émettre des hypothèses pour expliquer les désordres, aucune investigation technique n’ayant encore été entreprise pour vérifier lesquelles de ces hypothèses peuvent être retenues, et lesquelles doivent être écartées ;il n’est donc absolument pas possible à ce stade de conclure de manière sérieuse qu’il existerait un quelconque lien d’imputabilité entre les ouvrages réalisés par les sociétés DSA, STB ou ADEO et les désordres allégués par les demandeurs.
Concernant l’instance enrôlée sous le numéro de répertoire général 24/01170
Par acte de commissaire de justice du 6 novembre 2024, la SNC ZETA PROMOTION a fait assigner devant le Président du tribunal judiciaire d’Evry-Courcouronnes, statuant en référés, la société ZURICH INSURANCE EUROPE AG, en qualité d’assureur constructeur non réalisateur aux fins de :

la recevoir en ses demandes et les dire bien fondées ;voir ordonner la jonction de la présente instance avec l’affaire principale enrôlée sous le numéro de répertoire général 24/01119 ;condamner la compagnie ZURICH INSURANCE EUROPE AG à la garantir et relever indemne de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre, au profit des époux [J], et ce en principal, frais et accessoires, avec capitalisation des intérêts au sens de l’article 1343-2 du code civil ;réserver les dépens
Cette instance a été enrôlée sous le numéro de répertoire général 24/01170.

L’affaire a été appelée à l’audience de référé du 3 décembre 2024.

A l’audience du 3 décembre 2024, la SNC LNC ZETA PROMOTION, représentée par son avocat, a, se référant à ses conclusions notifiées par RPVA, le 29 novembre 2024, réitéré ses demandes figurant dans son acte introductif d’instance, y ajoutant une demande de condamnation de la société ZURICH INSURANCE EUROPE AG à lui payer une somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

A l’appui de ses demandes, la société LNC ZETA PROMOTION expose, au visa des article 331 alinéa 2 et 333 du code de procédure civile, et des articles 1792 et suivants du code civil, que :

l’expert a, aux termes de sa note aux parties n°1, constaté que les désordres rendaient l’appartement non conforme à sa destination et indiqué qu’il était nécessaire de reloger la famille, dans les plus brefs délais, et d’entamer des investigations lourdes et destructives, dans ces certains cas ;ces désordres étant de nature décennale, elle va, en sa qualité de constructeur non réalisateur, voir sa responsabilité civile décennale engagée ;elle est assurée auprès de la compagnie ZURICH INSURANCE EUROPE AG au titre de sa responsabilité décennale ;elle est donc bien fondée à demander à ce que la société ZURICH INSURANCE EUROPE AG soit condamnée à la garantir et la relever indemne de toutes les condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre au profit des époux [J].
En réponse, à la prétendue apparence des désordres lors de la réception alléguée par la société ZURICH INSURANCE EUROPE AG pour contester le caractère décennal desdits désordres, elle objecte que les causes des désordres évoqués par l’expert ne sont que probables et ne sont pas déterminées avec exactitude, et plus précisément, il n’est pas établi que le prétendu défaut de raccordement d’eaux pluviales serait en lien avec les désordres constatés et l’apparence de ce défaut de raccordement est loin d’être évident et n’a en tout état cause pas été révélé dans son ampleur au moment de la réception.

La société ZURICH INSURANCE EUROPE AG, représentée par son conseil et se référant à ses conclusions notifiées par RPVA, le 2 décembre 2024, sollicite du juge des référés de :

constater l’existence d’une contestation sérieuse en raison de l’absence de démonstration du caractère décennal des désordres n’ouvrant pas droit à l’application des garanties souscrites auprès de la société ZURICH INSURANCE par la société SNC LNC ZETA PROMOTION ; constater l’existence d’une contestation sérieuse en raison de l’inopposabilité des constats et conclusions de l’Expert Judiciaire à la société ZURICH INSURANCE ;débouter en conséquence purement et simplement la SNC LNC ZETA PROMOTION de sa demande d’être garantie de l’ensemble des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre au bénéfice des époux [J] ;condamner la société SNC LNC ZETA PROMOTION à verser à la société ZURICH INSURANCE la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;la condamner aux entiers dépens conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile
Au soutien de sa défense, elle fait valoir, au visa de l’article 835 du code de procédure civile et des articles 1792 et suivants du code civil, que la demande de garantie de la SNC LNC ZETA PROMOTION se heurte à des contestations sérieuses au regard de l’absence de démonstration du caractère décennal des désordres et de l’inopposabilité des constats réalisés par l’expert judiciaire dans la mesure où :

les garanties que la SNC LNC ZETA PROMOTION a souscrites auprès d’elle au titre de la police constructeur non réalisateur n’ont vocation à s’appliquer que dans le cadre désordres relevant des dispositions de l’article 1792 et suivants du code civil ;l’expert judiciaire a indiqué qu’il existait une impropriété à destination, ayant même préconisé le relogement, mais la cause et la nature des désordres restent inconnues puisqu’il évoque des causes probables et que des sondages destructifs sont prévus ;l’expert judiciaire a relevé que plusieurs désordres étaient visibles à l’œil nul et que certaines malfaçons étaient visibles à la réception ;la société SNC LNC ZETA PROMOTION ne démontre ainsi pas le caractère décennal des désordres, pas plus que l’impropriété à destination qui justifie un examen plus approfondi des désordres, par la réalisation de sondages et investigations ;il ressort des échanges entre les époux [J] et le promoteur que des recherches de fuites ont été réalisées ayant conclu à une cause extérieure à la construction, à savoir un immeuble voisin et d’autres investigations auraient permis de constater que la fuite à l’origine des infiltrations résulterait également de l’alimentation du lave-linge du logement voisin ;l’analyse technique nécessaire afin d’établir la nature décennale des désordres et l’application des garanties au titre de la police CNR démontre le caractère sérieusement contestable de l’obligation de garantie ;sa mise en cause dans le cadre des opérations d’expertise n’est intervenue que par ordonnance de référé du 20 aout 2024 et aucune réunion d’expertise n’a eu lieu à son contradictoire de sorte qu’elle n’a pas participé aux constats de l’expert et n’a pas été en mesure d’adresser un dire pour faire valoir ses arguments et discuter de la nature réelle des désordres.
******

Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé à l’assignation introductive d’instance et aux écritures déposées et développées oralement à l’audience ainsi qu’à la note d’audience.

L’affaire a été mise en délibéré au 17 janvier 2025.

PAR CES MOTIFS

Le juge des référés, statuant publiquement par ordonnance contradictoire et en premier ressort ;

ORDONNE la jonction de l’instance enrôlée sous le numéro de répertoire général 24/01119 avec celle enrôlée sous le numéro de répertoire général 24/01170, sous le numéro le plus ancien ;

REJETTE la demande de mise hors de cause de la SA LES NOUVEAUX CONSTRUCTEURS ;

DIT n’y avoir lieu à référé concernant la demande de provision formée par Monsieur [I] [J] et Madame [B] [J] née [C] à l’encontre des sociétés LES NOUVEAUX CONSTRUCTEURS, EIFFAGE ENERGIE SYSTEMES BARTH, ADEO, DSA, la société SMA SA en qualité d’assureur de la société EIFFAGE ENERGIE SYSTEMES BARTH, et la société AXA FRANCE IARD en qualité d’assureur des sociétés STB, ADEO et DSA ;

CONDAMNE la SNC LNC ZETA PROMOTION à payer à Monsieur [I] [J] et Madame [B] [J] née [C], à titre provisionnel, la somme de 16.710,48 euros (seize mille sept cent dix euros et quarante huit centimes) à valoir sur la réparation de leurs préjudices au titre des frais de relogement, des honoraires de location et des frais de déménagement ;

DIT n’y avoir lieu à référé concernant la demande de prise en charge des frais d’expertise ;

CONDAMNE la société ZURICH INSURANCE EUROPE AG à garantir son assurée, la SNC LNC ZETA PROMOTION, des condamnations prononcées à son encontre, dans le cadre de la présente instance, au profit des époux [J] ;

CONDAMNE la SNC LNC ZETA PROMOTION aux dépens de la présente instance ;

CONDAMNE la SNC LNC ZETA PROMOTION à payer à Monsieur [I] [J] et Madame [B] [J] née [C] la somme de 2.000 (deux mille) euros au titre des frais irrépétibles ;

DEBOUTE les autres parties de leurs demandes au titre des frais irrépétibles ;

REJETTE toute demande plus ample ou contraire ;

RAPPELLE que la présente décision est exécutoire par provision.

Ainsi fait et prononcé par mise à disposition au greffe, le 17 janvier 2025, et nous avons signé avec le greffier.

Le Greffier, Le Juge des Référés,

 


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