L’Essentiel : En 2017, l’URSSAF Rhône-Alpes a contrôlé la société [7], spécialisée dans les jeux de hasard, entraînant un redressement de 192.443 euros. Contestant certains points, la société a saisi la commission de recours amiable, qui a rejeté ses demandes. Elle a ensuite introduit un recours devant le tribunal judiciaire de Bourg-en-Bresse. Lors de l’audience du 28 octobre 2024, la société a demandé l’annulation de plusieurs redressements, arguant que certaines indemnités n’étaient pas soumises à cotisations. Le tribunal a déclaré le recours recevable, mais a débouté la société sur plusieurs demandes, ordonnant un recalcul du montant dû par l’URSSAF.
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Contexte de l’affaireLa société [7] est spécialisée dans l’organisation de jeux de hasard et d’argent. En 2017, l’URSSAF Rhône-Alpes a réalisé un contrôle comptable, aboutissant à une lettre d’observations le 15 octobre 2018, qui a mentionné quatorze chefs de redressement pour un montant total de 192.443 euros. La société a contesté certains de ces redressements par courrier le 16 novembre 2018. Procédures de contestationSuite à la mise en demeure de l’URSSAF le 11 janvier 2019, la société a saisi la commission de recours amiable le 7 février 2019. Cette commission a rejeté les demandes de la société par une décision du 17 juillet 2020. La société a alors introduit un nouveau recours devant le tribunal judiciaire de Bourg-en-Bresse, enregistré sous le RG n° 20/472, en jonction avec le dossier n° 19/284. Audiences et plaidoiriesLes parties ont été convoquées pour une audience le 28 octobre 2024, où il a été convenu que le président statue à juge unique. La société a demandé l’annulation de plusieurs chefs de redressement, ainsi que la minoration de certains montants, tout en réclamant des frais de justice. Arguments de la société [7]La société a soutenu que certaines indemnités versées à des employés étaient de nature indemnitaire et non soumises à cotisations. Elle a également fait valoir que l’URSSAF n’avait pas respecté les procédures de contrôle antérieures, arguant d’un accord tacite sur certaines pratiques. De plus, elle a contesté la nature des frais d’entreprise et des avantages en nature qui avaient été redressés. Arguments de l’URSSAFL’URSSAF a demandé le rejet des demandes de la société, affirmant que les indemnités versées devaient être soumises à cotisations. Elle a soutenu que la société n’avait pas prouvé que certaines sommes étaient indemnitaires et a insisté sur le fait que les frais d’entreprise n’étaient pas justifiés. L’URSSAF a également souligné que les redressements étaient fondés sur des éléments de droit et de fait. Décision du tribunalLe tribunal a déclaré le recours de la société recevable, mais a débouté la société de ses demandes d’annulation concernant plusieurs chefs de redressement. Il a rectifié le montant d’un des redressements et a ordonné à l’URSSAF de recalculer le montant dû. L’affaire a été renvoyée pour une audience ultérieure afin de statuer sur la demande reconventionnelle de condamnation. |
Q/R juridiques soulevées :
Sur la recevabilité du recoursLe recours formé par la SOCIETE [7] est recevable en vertu de l’article R 142-1 du code de la sécurité sociale, qui stipule que les réclamations contre les décisions des organismes de sécurité sociale doivent être soumises à une commission de recours amiable dans un délai de deux mois suivant la notification de la décision contestée. En application des articles R 142-1-A et R 142-10-1 du même code, le tribunal judiciaire doit être saisi dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision de la commission de recours amiable ou de l’expiration du délai de deux mois prévu par l’article R 142-6. Dans cette affaire, la commission de recours amiable a été saisie dans les délais impartis, et aucune critique n’a été formulée à cet égard. Ainsi, le tribunal déclare le recours recevable. Sur les chefs de redressement contestésLes chefs de redressement contestés par la SOCIETE [7] relèvent de l’article L 242-1 du code de la sécurité sociale, qui définit les rémunérations soumises à cotisations. Cet article précise que toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l’occasion du travail, y compris les salaires, indemnités de congés payés, primes et avantages en nature, sont considérées comme des rémunérations. En ce qui concerne la prime versée à M. [I], l’URSSAF a maintenu le redressement en raison de l’absence de remise effective de la médaille du travail. La SOCIETE [7] a soutenu que cette prime avait été assujettie à cotisations, mais il a été établi que la somme de 3.218 € n’a pas été soumise à cotisations sociales, justifiant ainsi le redressement. Pour les indemnités transactionnelles versées à M. [A], l’URSSAF a également maintenu le redressement, car la somme de 2.500 € versée à M. [A] a été considérée comme une rémunération, étant donné qu’elle correspondait à des jours de repos non pris. Concernant les indemnités versées à M. [B] et M. [O], le tribunal a constaté que ces indemnités étaient également soumises à cotisations, car elles n’avaient pas été qualifiées de dommages-intérêts dans les protocoles transactionnels. Ainsi, les redressements relatifs aux chefs n° 2, 3, 4, 5, 6, 9, 12, 13, et 14 sont validés. Sur la déduction forfaitaire spécifiqueL’article R243-59-7 du code de la sécurité sociale stipule que le redressement ne peut porter sur des éléments ayant déjà fait l’objet d’un précédent contrôle sans observations de l’organisme. La SOCIETE [7] a contesté le redressement relatif à la déduction forfaitaire spécifique, arguant qu’aucune observation n’avait été faite lors des contrôles précédents. Cependant, le tribunal a constaté que l’URSSAF avait émis des observations concernant l’absence d’accord exprès des salariés pour l’application de cette déduction. En conséquence, la SOCIETE [7] n’a pas réussi à prouver l’existence d’un accord tacite de l’URSSAF sur ce point. Ainsi, le redressement concernant la déduction forfaitaire spécifique est fondé, et la SOCIETE [7] sera déboutée de sa demande d’annulation. Sur les frais professionnels non justifiésSelon l’article L 242-1 du code de la sécurité sociale, les sommes versées aux travailleurs en contrepartie de leur travail sont soumises à cotisations. Les frais professionnels doivent être justifiés comme étant engagés dans l’intérêt de l’entreprise. Dans cette affaire, l’URSSAF a relevé que certaines dépenses effectuées par des salariés n’étaient pas justifiées comme des frais professionnels. Les factures fournies ne précisaient pas l’identité des bénéficiaires ni le lien avec l’activité professionnelle. Par conséquent, le tribunal a validé le redressement opéré sur ces frais, considérant que la SOCIETE [7] n’avait pas apporté la preuve que ces dépenses étaient engagées dans l’intérêt de l’entreprise. Sur les avantages en nature liés aux hébergementsLes avantages en nature, tels que les frais d’hébergement, sont soumis à cotisations, sauf s’ils peuvent être justifiés comme des frais professionnels. L’URSSAF a redressé la SOCIETE [7] sur plusieurs nuitées offertes, considérant qu’elles n’étaient pas justifiées par un caractère professionnel. Le tribunal a examiné les cas individuels et a constaté que pour certains séjours, le caractère professionnel n’était pas établi, tandis que pour d’autres, il était justifié. Ainsi, le redressement a été partiellement validé, et la base de régularisation a été ajustée. Sur la cession d’un véhicule à valeur modiqueConcernant la cession d’un véhicule à Mme [S] [V] pour 500 €, l’URSSAF a estimé que cette valeur était minorée. La SOCIETE [7] a contesté le montant du redressement, mais n’a pas fourni de justificatifs suffisants pour prouver la valeur réelle du véhicule. Le tribunal a donc validé l’évaluation faite par l’URSSAF, considérant que la valeur retenue était fondée sur des éléments objectifs. Sur les prestations du comité d’entrepriseLes prestations des comités d’entreprise sont considérées comme des avantages soumis à cotisations. La SOCIETE [7] a contesté le redressement lié aux sommes détournées par un ancien membre du comité, arguant que ces sommes ne devraient pas être considérées comme des rémunérations. Cependant, le tribunal a rappelé que l’employeur est responsable du paiement des cotisations sociales sur toutes les sommes versées aux salariés, indépendamment des agissements fautifs d’un membre du comité. Ainsi, les redressements relatifs aux prestations du comité d’entreprise ont été validés. ConclusionLe tribunal a déclaré l’action de la SOCIETE [7] recevable, a débouté la société de ses demandes d’annulation pour plusieurs chefs de redressement, a rectifié le montant d’un chef de redressement, et a ordonné à l’URSSAF de recalculer le montant dû. L’affaire sera renvoyée pour statuer sur la demande reconventionnelle. |
PÔLE SOCIAL
JUGEMENT DU 20 Janvier 2025
Affaire :
Société [7]
contre :
URSSAF RHONE ALPES
Dossier : N° RG 19/00284 – N° Portalis DBWH-W-B7D-FC6O
Décision n°25/
Notifié le
à
– Société [7]
– URSSAF RHONE ALPES
Copie le:
à
– Me Céline DONAT
– la SELAS ACO AVOCATS
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
PRÉSIDENT : Nadège PONCET
ASSESSEUR EMPLOYEUR : Valérie BREVET
GREFFIER : Ludivine MAUJOIN
statuant dans les conditions d’application de l’article L.218-1 du Code de l’Organisation Judiciaire,
PARTIES :
DEMANDEUR :
Société [7]
[Adresse 4]
[Localité 1]
représentée par Me Céline DONAT, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES
DÉFENDEUR :
URSSAF RHONE ALPES
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Maître Charlotte GINGELL de la SELAS ACO AVOCATS, avocats au barreau de LYON (Toque 487)
Date du recours : 07 Mai 2019
Plaidoirie : 28 Octobre 2024
Délibéré : 16 Décembre 2024 prorogé au 20 Janvier 2025
EXPOSE DU LITIGE
La SOCIETE [7] (ci-après [7]) a pour activité l’organisation de jeux de hasard et d’argent.
L’URSSAF RHONE-ALPES a effectué un contrôle d’assiette comptable pour la période de l’année 2017.
Une lettre d’observations a été adressée à la [7] le 15 octobre 2018 comportant quatorze chefs de redressement et une observation pour l’avenir, envisageant un redressement pour un total de 192.443 euros .
Par courrier du 16 novembre 2018, la [7] a formulé des observations et contesté six chefs de redressement.
Par lettre en réponse du 3 décembre 2018, l’URSSAF a répondu aux observations de la société et a procédé à l’annulation partielle :
-du chef de redressement n°2 (primes versées à l’occasion de la remise de la médaille d’honneur du travail),
-du chef de redressement n°7 (dépenses d’hébergement pour personnel salarié « offerts hébergement »).
Le 11 janvier 2019, l’URSSAF RHONE-ALPES a mis en demeure la [7] de payer la somme de 209.203 € dont 18.376 € de pénalités et majorations de retard.
La [7] a contesté cette mise en demeure auprès de la commission de recours amiable de l’URSSAF le 7 février 2019.
Par lettre recommandée avec accusé de réception expédiée le 7 mai 2019, la [7] par l’intermédiaire de son conseil, a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Bourg-en-Bresse d’un recours contre cette décision implicite de rejet. L’affaire a été enregistrée sous le RG n° 19/284.
La commission de recours amiable, par décision du 17 juillet 2020 notifiée par courrier daté du 28 juillet 2020, a rejeté l’ensemble des demandes de la [7].
Par lettre recommandée avec accusé de réception expédiée le 25 septembre 2020, la [7] par l’intermédiaire de son conseil, a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Bourg-en-Bresse a nouveau d’un recours contre cette décision explicite de rejet. L’affaire a été enregistrée sous le RG n° 20/472.
Les parties ont été invitées à conclure dans le cadre de la mise en état à compter du 5 septembre 2022 et le dossier RG n° 20/472 a fait l’objet d’une jonction avec le dossier n°19/284.
Les parties ont été convoquées pour l’audience du 28 octobre 2024.
Il a été fait application de l’article L 218-1 du code de l’organisation judiciaire, les parties ne s’opposant pas à ce que le président statue à juge unique.
L’affaire a été retenue et plaidée.
La [7] représentée par son conseil, se référant à ses écritures, demande au tribunal :
-d’annuler les redressements relatifs :
*à l’indemnité forfaitaire transactionnelle versée à M. [I],
*à l’indemnité transactionnelle versée à M. [A],
*aux indemnités transactionnelles versées à MM. [B] et [O],
*à la déduction forfaitaire spécifique,
*au comité d’entreprise ;
-d’annuler et subsidiairement de minorer le redressement portant sur les « offerts hébergements »,
-de minorer le redressement concernant la valeur de cession du véhicule à un prix modique,
-de condamner l’URSSAF RHONE-ALPES à lui payer la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Au soutien de ses demandes, la [7] expose :
-que la médaille du travail de M. [I] a bien été assujettie à hauteur de 1.568 € ainsi que cela résulte de son bulletin de paie,
-que l’indemnité transactionnelle versée à M. [A] a été versée alors que ce dernier a démissionné mais aurait pu solliciter la requalification en « démission forcée », ce salarié ayant été convoqué à un entretien préalable au licenciement pour des faits graves,
-qu’il appartient à l’URSSAF de rapporter la preuve que cette somme n’aurait pas de finalité indemnitaire pour prétendre qu’elle devait être soumise à cotisations,
-que la somme de 2.500 € est forfaitaire et bien indemnitaire, et ne correspond nullement au paiement de congés que l’employeur a toujours contesté ; elle vise à réparer la perte d’emploi du salarié et à éviter des frais de procédure,
-que M. [B] et M. [O] ont fait l’objet d’une procédure de licenciement pour faute grave, que cette qualification a été maintenue par l’employeur de sorte que l’URSSAF était mal fondée à assujettir aux cotisations tout ou partie de l’indemnité transactionnelle au titre de l’indemnité compensatrice de préavis, la faute grave privant les salariés de cette indemnité,
-qu’elle applique la déduction forfaitaire spécifique à son personnel éligible dans les mêmes conditions depuis 2005, c’est-à-dire sans avoir demandé préalablement l’accord exprès des salariés concernés,
-qu’en application de l’article R 243-59-7 du code de la sécurité sociale, le redressement ne pouvait être fait sur des éléments ayant déjà fait l’objet d’un précédent contrôle et n’ayant pas donné lieu à observation de l’URSSAF,
-qu’elle est donc fondée à se prévaloir d’un accord tacite de l’URSSAF sur ce point,
-que certains salariés étaient déjà concernés lors du précédent contrôle de 2012,
-que lors du contrôle de 2007, des régularisations ont été opérées concernant cette déduction forfaitaire spécifique uniquement concernant son champ d’application, certains personnels n’étant pas éligibles, mais qu’il n’a nullement été reproché l’absence d’accord exprès des salariés concernés,
-qu’en 2012, les inspecteurs ont contrôlé le respect du périmètre d’application de la déduction forfaitaire spécifique, mais il n’a nullement été fait observer que l’employeur devait justifier de l’accord explicite des salariés concernés en ce sens,
-que la liste des documents consultés a permis à l’URSSAF, lors des précédents contrôles, de se prononcer en toute connaissance de cause sur ces éléments,
-qu’en 2007 et 2012, aucune observation n’a été formée par les inspecteurs sur l’absence d’accord individuel des salariés employés en salle de jeux,
-que les situations sont identiques en fait et en droit, le texte applicable (article 9 de l’arrêté du 25 juillet 2005 modifiant l’arrêté du 20 décembre 2002) étant inchangé,
-que tout au plus l’organisme aurait pu émettre une observation pour l’avenir en vertu de son obligation d’information et de conseil,
-que les notes de frais de Mmes [W], [E] et [V] sont en réalité des frais d’entreprise,
-que les nuitées offertes sont des frais d’entreprise et non une prise en charge de dépenses personnelles du salarié,
-qu’il est en effet d’usage d’offrir la chambre d’hôtel aux bons clients tout en dissimulant leur identité d’où la mention « invité 100% »,
-que les inspectrices n’ont procédé à aucune vérification sur la qualité professionnelle de la personne hébergée,
-qu’à titre surabondant, le tarif de nuitée retenu est sans rapport avec le tarif public moyen,
-que pour la cession du véhicule, la base doit être minorée en considération de la valeur argus du véhicule,
-que s’agissant des sommes détournées par un ancien membre du comité d’entreprise, elles ne peuvent donner lieu à redressement dans la mesure où l’employeur n’a nullement entendu conférer d’avantage ou de rémunération à cette personne,
-que s’agissant de sommes détournées dont l’origine est illicite, elles n’ont pas le caractère de rémunération,
-que l’intéressé a été condamné pénalement.
L’URSSAF, pour sa part, se référant à ses écritures, demande au tribunal de débouter la [7] de l’ensemble de ses demandes et reconventionnellement de condamner la [7] à lui payer la somme de 209.203 € au titre de rappel de cotisations et contributions sociales ainsi qu’à lui verser la somme de 1.800 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Au soutien de ses prétentions l’URSSAF fait valoir :
-qu’il n’est pas justifié de la remise de la médaille du travail à M. [I],
-qu’en revanche M. [I] a perçu une somme de 3.218 € sans versement d’aucune charge sociale,
-que cette somme aurait dû être soumise à cotisations sociales,
-qu’en application de l’article L 242-1 du code de la sécurité sociale, tout avantage en argent ou en nature versé en contrepartie ou à l’occasion du travail doit être soumis à cotisations,
-que doivent être soumises à cotisations : les indemnités compensatrices de préavis, la rémunération versée pendant la durée du congé de reclassement n’excédant pas le préavis, les indemnités de congés payés, les indemnités de non concurrence,
-que seules les indemnités versées dans le cadre d’une rupture à l’initiative de l’employeur peuvent bénéficier d’une exclusion d’assiette,
-que le versement d’indemnités transactionnelles ne suffit pas à justifier d’une exonération de cotisations,
-que la charge de la preuve du caractère indemnitaire des sommes versées en exonération de cotisations sociales incombe à l’employeur,
-que M. [A] n’a pas été licencié mais a démissionné, et qu’il a simplement contesté son solde de tout compte, estimant ne pas avoir été payé de tous ses jours de congés,
-que sur le bulletin de salaire il est indiqué, pour la somme de 2.500 €, « indemnité transactionnelle : 2.500 (…) informations = solde jour congés RTT solde jour récupération »,
-qu’ainsi cette somme correspond bien à un rappel de salaire,
-que M. [O] a été licencié pour faute grave et qu’ultérieurement le salarié a contesté son licenciement au motif qu’il était sans cause réelle et sérieuse,
-qu’il lui a été versé la somme de 15.250 € au titre d’une indemnité transactionnelle forfaitaire et que cette somme n’a pas été qualifiée de dommages-intérêts,
-que de même M. [B] a été licencié pour faute grave,
-qu’il a été versé à ce dernier la somme de 11.850 € brut dans le cadre d’une transaction,
-qu’il ne s’agit nullement de dommages-intérêts,
-que les accords transactionnels ne précisent pas la nature des sommes versées,
-que la [7] ne rapporte pas ainsi la preuve qui lui incombe,
-que s’agissant de la déduction forfaitaire spécifique, il incombe à l’employeur de rapporter la preuve d’une décision implicite de l’URSSAF,
-que l’existence d’une pratique antérieure litigieuse ou l’absence de redressement ne suffisent pas à caractériser l’existence d’une décision implicite admettant la pratique litigieuse,
-que les inspecteurs se sont aperçus que pour les salariés embauchés en extras, la clause relative à l’accord pour la pratique de la déduction forfaitaire spécifique n’était pas dans leur contrat, et que pour les autres salariés concernés, pour certains d’entre eux, la clause ne figurait pas dans leur contrat de travail,
-que les circonstances sont différentes, les salariés concernés étant, à défaut de preuve du contraire, différents,
-que les nouveaux contrats de travail produits ont été signés avant l’arrêté du 20 décembre 2002,
-que l’identité de pratique, et l’acceptation de l’inspecteur de l’époque, ne sont donc pas démontrées,
-qu’une observation pour l’avenir fait allusion à l’accord nécessaire des salariés pour la déduction forfaitaire lors du contrôle de 2007 pour les artistes du spectacle,
-qu’il n’est pas démontré que les contrats signés entre 2002 et 2007 auraient fait l’objet d’avenants de régularisation,
-que les observations de l’URSSAF démontrent bien qu’elle a attiré l’attention de l’employeur sur le fait que certains contrats de travail contenaient l’accord du salarié pour la déduction forfaitaire spécifique, et d’autres non, qu’en conséquence elle a informé et conseillé l’employeur,
-que les frais d’entreprise ont un caractère exceptionnel, doivent être exposés dans l’intérêt de l’entreprise et en dehors de l’exercice normal de l’activité du travailleur salarié ou assimilé,
-que les factures produites ne précisent pas l’identité des clients, que certaines correspondent à des factures d’hôtel et de restaurant mais que d’autres correspondent à l’achat de de bijoux, de chocolat ou de parfum,
-qu’il n’est pas démontré que ces dépenses auraient été effectuées dans l’intérêt de l’entreprise,
-qu’il n’est pas non plus fourni de programme de travail pour le déplacement et le séjour à [Localité 6],
-que s’agissant des nuitées, les inspecteurs sont revenus sur les nuitées de certains salariés et mandataires de la société mais qu’au surplus il n’est pas justifié de la finalité professionnelle des autres nuitées, aucun programme de travail n’étant fourni aux dates litigieuses,
-que les inspecteurs ont appliqué le tarif de vente public, toutes taxes comprises, en appliquant la remise maximum de 30 % sur la vente de produits de l’entreprise aux salariés,
-que la côte argus alléguée du véhicule n’est pas avérée,
-que par principe les sommes versées aux salariés par le comité social et économique entrent dans l’assiette des cotisations sociales,
-qu’en l’espèce le paiement par le comité d’entreprise des biens, voyages et frais divers, retraits bancaires et chèques dont a bénéficié M. [U] n’entraient pas dans le cadre des dépenses inhérentes aux budget de fonctionnement et d’œuvres sociales du comité d’entreprise,
-que ces sommes doivent donc donner lieu au paiement de cotisations sociales,
-que si ces versements sont le fait d’un ancien salarié ayant agi sans le consentement de la direction, l’employeur reste seul débiteur des charges sociales pour toutes les sommes versées ou avantages servis aux salariés en contrepartie de leur travail, qu’il reste ainsi juridiquement responsable,
-que la [7] s’est prévalu d’un préjudice du fait du redressement opéré sur ces sommes détournées,
-que M. [U] n’a pas été le seul bénéficiaire des sommes qui ont fait l’objet de ce chef de redressement.
L’affaire a été initialement mise en délibéré au 16 décembre 2024, le délibéré ayant été prorogé au 20 janvier 2025.
I. Sur la recevabilité du recours
L’article R 142-1 du code de la sécurité sociale prévoit que les réclamations relevant de l’article L 142-4 formées contre les décisions prises par les organismes de sécurité sociale et de mutualité sociale agricole de salariés ou de non-salariés sont soumises à une commission de recours amiable. Cette commission doit être saisie dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision contre laquelle les intéressés entendent former une réclamation.
En application des articles R 142-1-A et R 142-10-1 du code de la sécurité sociale, le tribunal judiciaire spécialement désigné pour connaître du contentieux visé à l’article L 211-16 du COJ doit être saisi dans un délai de deux mois à compter soit de la date de notification de la décision de la commission de recours amiable, soit de l’expiration du délai de deux mois prévu par l’article R 142-6 du même code.
En l’espèce la commission de recours amiable a été saisie préalablement à la présente juridiction et les délais n’ont fait l’objet d’aucune critique.
Le recours est donc recevable.
II. Sur les chefs de redressement contestés
En application de l’article L 242-1 du code de la sécurité sociale, pour le calcul des cotisations de sécurité sociale, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l’occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l’entremise d’un tiers à titre de pourboire.
Somme perçue par M. [I] (chef de redressement n°2)
L’URSSAF a maintenu le redressement concernant la prime versée à M. [I] d’un montant de 3.218 € figurant sur sa fiche de paie sous la mention « Médaille du travail de Grand Or pour 40 ans » au motif que cette médaille n’a pas été remise à l’intéressé et qu’il ne s’agit pas d’une somme ayant la nature de dommages-intérêts.
Désormais, dans ses dernières écritures, la [7] fait valoir qu’en réalité cette prime a été assujettie à cotisation à hauteur de 1.568 €.
Finalement, il résulte des explications des parties que M. [I] n’a jamais bénéficié de la médaille du travail, même s’il l’avait sollicitée et que son employeur lui a accordé une gratification en ce sens au moment de son départ. C’est ainsi que le protocole transactionnel prévoit de lui « appliquer » le bénéfice de cette médaille et ce, en sus de l’indemnité transactionnelle forfaitaire de 45.000 €.
En l’absence de remise effective de cette médaille, l’URSSAF était bien fondée à effectuer un redressement de ce chef.
La [7] indique désormais que cette gratification aurait été assujettie en partie à des cotisations sociales. Or, à la lecture du bulletin de salaire de mai 2016 de M. [I], la gratification à hauteur de 3.218 € ne porte trace d’aucun décompte de cotisations sociales. En effet, au titre du bénéfice de la médaille du travail, cette somme s’ajoute à la somme de 1.568 €. C’est ainsi que la colonne « gains » porte trace de trois versements :
1.568 €
45.000 €
3.218 €.
L’URSSAF n’a donc pas fait d’erreur dans le calcul du redressement qu’elle a maintenu pour la somme de 1.636 €. La [7] sera déboutée de sa demande d’annulation de ce chef de redressement.
Indemnités transactionnelles : M. [A] (chef de redressement n°3)
Par application de l’article L 242-1 du code de la sécurité sociale, est exclue de l’assiette des cotisations, dans la limite d’un montant fixé à deux fois la valeur annuelle du plafond mentionné à l’article L. 241-3, la part des indemnités versées à l’occasion de la rupture du contrat de travail ou de la cessation forcée des fonctions de mandataires sociaux, dirigeants et personnes visées à l’article 80 ter du code général des impôts qui n’est pas imposable en application de l’article 80 duodecies du même code. Toutefois, les indemnités versées à l’occasion de la cessation forcée des fonctions de mandataires sociaux, dirigeants et personnes mentionnées à l’article 80 ter du code général des impôts d’un montant supérieur à cinq fois le plafond annuel défini par l’article L. 241-3 du présent code sont intégralement assimilées à des rémunérations pour le calcul des cotisations visées au premier alinéa du présent article. Pour l’application du présent alinéa, il est fait masse des indemnités liées à la rupture du contrat de travail et de celles liées à la cessation forcée des fonctions.
Dès lors que l’indemnité transactionnelle est conclue pour une somme globale et forfaitaire, il appartient au juge du fond de rechercher, nonobstant la qualification retenue par les parties, si ce montant n’inclut pas des éléments de rémunération légaux ou conventionnels, tels que l’indemnité de préavis, demeurant soumis à cotisations, par distinction de la partie purement indemnitaire destinée à mettre fin à un litige concernant l’exécution ou la rupture du contrat de travail.
La [7] maintient que la somme de 2.500 € brut versée à M. [A] a la nature de dommages-intérêts. Il est constant que l’intéressé n’a pas été licencié mais a démissionné le 12 août 2016. Il résulte de la transaction signée le 14 octobre 2016 que la contestation du salarié portait uniquement sur son solde de tout compte, ce dernier s’estimant fondé à être indemnisé pour 30 jours de récupération de repos, jours fériés et RTT car il aurait travaillé davantage que son forfait jours en 2016 (ce qui était le cas en 2015). En aucun cas, il n’est fait mention de l’intention du salarié de voir requalifier sa démission en licenciement et il est indifférent que le salarié ait fait l’objet d’un rappel à l’ordre et ait été convoqué à un entretien préalable, la transaction ne revenant aucunement sur ces éléments. Par conséquent, l’indemnité visée dans la transaction, nonobstant la référence à un « préjudice », a bien la nature d’une rémunération, puisqu’elle correspond au paiement de jours de repos et est la contrepartie des jours travaillés par le salarié.
Le redressement à hauteur de 1.184 € est donc bien fondé et la demande d’annulation sera rejetée.
Indemnités transactionnelles : M. [B] et M. [O] (chef de redressement n°4)
Par application de l’article L 242-1 du code de la sécurité sociale, est exclue de l’assiette des cotisations, dans la limite d’un montant fixé à deux fois la valeur annuelle du plafond mentionné à l’article L. 241-3, la part des indemnités versées à l’occasion de la rupture du contrat de travail ou de la cessation forcée des fonctions de mandataires sociaux, dirigeants et personnes visées à l’article 80 ter du code général des impôts qui n’est pas imposable en application de l’article 80 duodecies du même code. Toutefois, les indemnités versées à l’occasion de la cessation forcée des fonctions de mandataires sociaux, dirigeants et personnes mentionnées à l’article 80 ter du code général des impôts d’un montant supérieur à cinq fois le plafond annuel défini par l’article L. 241-3 du présent code sont intégralement assimilées à des rémunérations pour le calcul des cotisations visées au premier alinéa du présent article. Pour l’application du présent alinéa, il est fait masse des indemnités liées à la rupture du contrat de travail et de celles liées à la cessation forcée des fonctions.
Dès lors que l’indemnité transactionnelle est conclue pour une somme globale et forfaitaire, il appartient au juge du fond de rechercher, nonobstant la qualification retenue par les parties, si ce montant n’inclut pas des éléments de rémunération légaux ou conventionnels, tels que l’indemnité de préavis, demeurant soumis à cotisations, par distinction de la partie purement indemnitaire destinée à mettre fin à un litige concernant l’exécution ou la rupture du contrat de travail. Les indemnités transactionnelles entrent donc par principe dans l’assiette des cotisations de sécurité sociale, à moins que l’employeur ne rapporte la preuve qu’elles concourent, pour tout ou partie de leur montant, à l’indemnisation d’un préjudice.
-M. [B]
Il résulte de la lettre d’observation et du protocole transactionnel que M. [B] a été licencié pour faute grave le 3 décembre 2015, suite à un abandon de poste, sans percevoir ni indemnité de rupture ni indemnité de préavis. Le salarié a fait part à son employeur de son intention de contester ce licenciement soulignant l’absence de préavis et d’indemnité de rupture. Il résulte du protocole que le salarié conteste son licenciement pour faute grave, faisant état du fait que son absence était liée à son état de santé et au fait qu’il entendait prendre des récupérations accumulées. L’employeur maintient que l’absence de M. [B] est caractéristique d’un abandon de poste. En définitive, la [7] verse à titre d’indemnité transactionnelle forfaitaire, « en réparation de l’ensemble des préjudices occasionnés par la conclusion, l’exécution et par la rupture de son contrat de travail » la somme de 11.850 €. Ce faisant, le protocole ne précise par la nature indemnitaire de cette somme, et ce qu’elle indemnise comme préjudice. Il résulte au contraire du protocole que le litige porte bien sur la qualification de faute grave entrainant ou non le paiement d’une indemnité de licenciement et d’une indemnité de préavis. Dès lors, en l’absence de preuve rapportée que l’indemnité correspondrait à des dommages-intérêts, c’est à raison que l’URSSAF a effectué un redressement sur cette indemnité forfaitaire.
-M. [O]
Il résulte de la lettre d’observation et du protocole transactionnel que M. [O], embauché le 2 mai 1994, avec un salaire brut mensuel de 4.518 € à son départ, a fait l’objet d’un licenciement pour faute grave le 22 octobre 2015 pour abandon de poste, sans percevoir ni indemnité de rupture ni indemnité de préavis. Le salarié a contesté ce licenciement estimant qu’il était sans cause réelle et sérieuse puisqu’en effet son absence fait suite à une dégradation de ses conditions de travail, ce dernier étant mis dans l’impossibilité de prendre ses vacances. Chacune des parties reste sur sa position distincte concernant l’existence d’une faute grave ou d’un licenciement injustifié. En définitive, la [7] a versé à titre d’indemnité transactionnelle forfaitaire, « en réparation de l’ensemble des préjudices occasionnés par la conclusion, l’exécution et par la rupture de son contrat de travail » la somme de 15.250 €. Ce faisant, le protocole ne précise par la nature indemnitaire de cette somme, et ce qu’elle indemnise comme préjudice. Il résulte au contraire du protocole que le litige porte bien sur la qualification de faute grave entrainant ou non le paiement d’une indemnité de licenciement et une indemnité de préavis. Dès lors, en l’absence de preuve rapportée que l’indemnité correspondrait à des dommages-intérêts, c’est à raison que l’URSSAF a effectué un redressement sur cette indemnité forfaitaire.
Déduction forfaitaire spécifique (chef de redressement n°5)
Aux termes de l’article R243-59-7 du code de la sécurité sociale, le redressement établi en application des dispositions de l’article L. 243-7 ne peut porter sur des éléments qui, ayant fait l’objet d’un précédent contrôle dans la même entreprise ou le même établissement n’ont pas donné lieu à observations de la part de l’organisme effectuant le contrôle dans les conditions prévues à l’article R. 243-59 dès lors que :
1° L’organisme a eu l’occasion, au vu de l’ensemble des documents consultés, de se prononcer en toute connaissance de cause sur ces éléments ;
2° Les circonstances de droit et de fait au regard desquelles les éléments ont été examinés sont inchangées.
Par ailleurs, il résulte de l’article 9 de l’arrêté du 20 décembre 2002 modifié par l’arrêté du 25 juillet 2005 que l’employeur peut opter pour la déduction forfaitaire spécifique lorsqu’une convention ou un accord collectif du travail l’a explicitement prévu ou lorsque le comité d’entreprise ou les délégués du personnel ont donné leur accord.
A défaut, il appartient à chaque salarié d’accepter ou non cette option. Celle-ci peut alors figurer soit dans le contrat de travail ou un avenant au contrat de travail, soit faire l’objet d’une procédure mise en œuvre par l’employeur consistant à informer chaque salarié individuellement par lettre recommandée avec accusé de réception de ce dispositif et de ses conséquences sur la validation de ses droits, accompagné d’un coupon-réponse d’accord ou de refus à retourner par le salarié. Lorsque le travailleur salarié ou assimilé ne répond pas à cette consultation, son silence vaut accord définitif.
En l’espèce un redressement a été effectué au motif que les conditions de l’arrêté précité n’ont pas toutes été respectées, puisqu’en l’absence d’accord collectif ou d’entreprise prévoyant l’application de la déduction forfaitaire spécifique, l’employeur n’a pas été en mesure de justifier de l’accord de tous les salariés concernés et notamment :
-des salariés embauchés dans le cadre d’extras,
-de certains salariés travaillant également dans les salles de jeux.
Or, la [7] conteste ce redressement au motif que cet accord non explicite des salariés n’aurait pas été exigé lors des deux précédents contrôles en 2007 et 2012, ce qui constitue une décision implicite de l’organisme de recouvrement et empêche le redressement, seules de simples observations pour l’avenir étant envisageables.
La charge de la preuve de l’accord tacite de l’organisme de recouvrement pèse sur le cotisant.
Tout d’abord, il n’est pas contesté que sur la nécessité d’un accord exprès du salarié à l’application de la déduction forfaitaire spécifique, la législation n’a pas évolué et était identique lors des trois contrôles de 2007, 2012 et 2018.
S’agissant du contrôle de 2007, l’URSSAF avait analysé l’application de cette déduction forfaitaire spécifique et avait effectué des redressements concernant son périmètre d’application, cette déduction ayant été appliquée à tort à du personnel non éligible. Par ailleurs, une observation avait justement été faite pour l’avenir s’agissant de la déduction forfaitaire spécifique appliquée aux artistes, en ce que leur accord exprès concernant cette pratique n’était pas justifié. En revanche, il est exact qu’aucun redressement ni aucune observation n’a été émise pour l’application de la déduction pour le personnel en salle de jeux. Toutefois, compte tenu de l’observation faite sur le même fondement concernant les artistes, il ne peut être considéré que l’URSSAF a entendu valider la pratique de l’employeur de l’absence d’accord exprès des salariés pour la déduction spécifique. La [7] ne démontre pas que l’URSSAF avait bien consulté les contrats de travail de ces salariés en salle pour vérifier ce point. La [7] ne démontre pas non plus que ces accords étaient inexistants s’agissant des mêmes salariés. En effet, pour des contrats anciens, l’accord du salarié résulte nécessairement d’un avenant ou d’une consultation par coupon-réponse, il est donc normal que ces contrats ne contiennent aucune clause. Enfin, il convient encore de souligner que lors du contrôle litigieux, en 2018, l’URSSAF relève que l’accord du salarié fait défaut dans certains contrats seulement. Cela signifie bien que pour certains salariés, l’accord exprès pour la déduction forfaitaire avait été recueilli.
S’agissant du contrôle de 2012, l’URSSAF n’a émis aucune observation ni fait aucun redressement concernant de la déduction forfaitaire spécifique. Il n’est pas certain que ce point ait fait l’objet d’un contrôle à l’époque. La [7] échoue donc à prouver que sa pratique aurait été vérifiée et approuvée tacitement lors du contrôle de 2012. Si cette vérification a eu lieu, la [7] échoue à démontrer que les accords des salariés faisaient défaut comme lors du présent contrôle. En effet et à nouveau, il doit être rappelé que les inspecteurs de recouvrement ont bien spécifié qu’en 2018 seulement certains contrats étaient incomplets en ne stipulant pas l’accord du salarié.
Par conséquent, la [7] échoue à rapporter la preuve de l’accord tacite de l’URSSAF concernant l’absence de nécessité de l’accord exprès des salariés pour la déduction forfaitaire lors des précédents contrôles. Au contraire ce point avait été soulevé en observation lors du contrôle de 2007, même si cela s’est limité aux salariés artistes.
Par suite, ce chef de redressement est bien fondé et la [7] sera déboutée de sa demande d’annulation.
Frais professionnels / d’entreprise non justifiés (chef de redressement n° 6)
Aux termes de l’article L 242-1 du code de la sécurité sociale, sont considérées comme des rémunérations soumises à cotisations et contributions sociales, toutes les sommes versées et les avantages accordés aux travailleurs salariés en contrepartie ou à l’occasion du travail.
Seuls peuvent être déduits de l’assiette des cotisations :
– les sommes ayant le caractère de frais professionnels au sens de l’arrêté du 20 décembre 2002
– les frais que le salarié avance pour le compte de l’entreprise.
La prise en charge de dépenses personnelles constitue un avantage en espèces soumis à cotisations et contributions sociales dès lors qu’il n’est pas établi que le salarié les a engagées dans l’intérêt de l’employeur.
En l’espèce il résulte de la lettre d’observations que les inspectrices de l’URSSAF ont mis en évidence l’existence de dépenses effectuées par Mme [H] [W], Mme [T] [E] et Mme [R] [V] sans qu’il soit justifié du fait qu’il s’agirait de frais professionnels ou de frais exposés dans l’intérêt de l’entreprise. Il est ainsi noté que certaines dépenses correspondent à un voyage à [Localité 6] (durant les congés payés) et à l’achat de bijoux. Les factures de restaurant et d’hôtel ne mentionnent ni le nom, ni la fonction des invités, ni la raison du déplacement. Souvent le bénéficiaire de la dépense est inconnu.
Le total de ces dépenses représente 121 € en 2015, 103 € en 2016 et 3.630 € en 2017.
Les justificatifs fournis ne permettent pas en effet de rattacher les dépenses remboursées par l’entreprise à ses salariés à l’intérêt de l’entreprise. Ainsi, pour les principales dépenses, il doit être relevé qu’effectivement aucun programme de travail n’est fourni s’agissant du déplacement de Mme [E] à [Localité 6] pendant ses congés (961 €). Par ailleurs, le bénéficiaire final du bijou d’un montant de 2.410 CHF n’est pas connu. Il en est de même des notes de restaurant et d’hôtels. Etant donné l’absence de justificatif sur le lien exclusif entre ses dépenses et l’intérêt de l’entreprise, le redressement est justifié et la demande d’annulation sera rejetée.
« Offerts hébergement » (chef de redressement n°7)
Les avantages en nature, comme la fourniture ou la mise à disposition d’un bien ou service permettant au salarié de faire l’économie de frais qu’il aurait dû normalement supporter, sont soumis à cotisations.
Les frais d’entreprise non soumis à cotisations sont les frais correspondants à des charges d’exploitation de l’entreprise présentant un caractère exceptionnel, étant exposé dans l’intérêt de l’entreprise et en dehors de l’exercice normal de l’activité du travailleur salarié ou assimilé.
En l’espèce il résulte de la lettre d’observations et de la lettre en réponse aux observations qu’un redressement a été opéré sur un certain nombre d’hébergement offerts.
Pour que les nuitées offertes soient prises en compte comme des frais d’entreprise et non comme un avantage en nature, il doit être rapporté la preuve du caractère professionnel de ces frais, en lien avec l’activité de l’entreprise. Suite aux observations de la société, les inspectrices sont notamment revenues sur le redressement pour les nuitées concernant Mme [C], M. [X] [Y], M. [M] [D], M. [G] [V] et M. [K] [L].
Toutefois la société maintient ses contestations concernant M. [X] [Y], Mme [C], M. [P] [N], M. [Z] [D], M. [G] [V], M. [K] [L] et M. [F] [J].
Concernant M. [X] [Y], consultant et conseiller pour les opérations de jeux et de loisirs dans le monde entier, invité par M. [V] du 16 au 17 février 2016, compte tenu des observations des inspectrices, du fait que ce séjour a eu lieu en semaine, il pouvait être retenu le caractère professionnel de ce séjour et aucune justification n’est donnée au maintien du redressement sur cette somme.
Concernant Mme [C], l’URSSAF est revenue sur sa position antérieurement.
Concernant M. [P] [N], nonobstant ses fonctions au sein du groupe et sa qualité d’administrateur, au vu du nombre de chambre retenues (5) et de l’absence de justificatifs, le redressement demeure bien fondé.
Concernant M. [Z] [D], peu important ses fonctions dans le groupe, il apparaît qu’il a séjourné du 22 avril au 5 mai 2015 soit 13 jours incluant deux week-ends, de sorte que le caractère professionnel du séjour n’est pas justifié et que le redressement est bien fondé.
Concernant M. [G] [V], directeur d’un casino appartenant au groupe, aucun motif n’est donné à ces séjours, le redressement est donc justifié.
S’agissant de M. [L], le redressement est également justifié, les explications de la société selon laquelle il était directeur et avait fini tard étant peu convaincantes, au regard de la durée du séjour et du fait qu’il a invité dans cet hôtel un proche sans fonction connue au sein de la société. Le redressement est donc fondé.
Enfin s’agissant de M. [J], assureur, le redressement est également justifié dans la mesure où le séjour inclut un week-end et qu’à cette occasion deux chambres ont été retenues sans que l’identité du 2e invité soit précisée.
Pour ce qui est de l’évaluation de l’avantage en nature, l’URSSAF a retenu le prix de vente public affiché sur internet pour une chambre confort (tarif le plus bas) avec application de la réduction de 30% applicable sur la vente de produits de l’entreprise à ses salariés. Il ne peut lui être reproché de ne pas avoir tenu compte des offres promotionnelles ni d’avoir pris en référence le prix toutes taxes comprises.
La base de régularisation doit donc seulement être minorée de 206,50 € pour l’année 2016 (pour 2016 : 21 476 € au lieu de 21.682,50 €) pour ce chef de redressement.
Véhicule cédé pour une valeur modique (chef de redressement n°9)
Un véhicule de marque NISSAN QUASHQAI a été mis à disposition de Mme [S] [V] durant son contrat de travail. A l’occasion de son départ, ce véhicule lui a été cédé pour la somme de 500 €.
Les inspectrices ayant procédé au contrôle ont estimé que cette valeur était minorée.
La [7] ne conteste pas le principe du redressement mais son montant.
En l’absence de justificatifs disponibles pour évaluer la côte du véhicule, les inspectrices ont retenu les caractéristiques suivantes :
Véhicule de 8 ans, nombre de kilomètres annuels estimés à 12.680 à partir du site « [5] »,soit une valeur de 9.377 €.
La [7] maintient ses contestations en estimant que la côte argus du véhicule à considérer était de 6.389 € en prenant en compte un kilométrage de 163.661.
Toutefois les éléments produits par la [7] ne permettent pas de vérifier les éléments avancés par elle et notamment le kilométrage.
L’évaluation forfaitaire retenue par l’URSSAF est donc bien fondée et la [7] sera déboutée de sa demande en nullité concernant ce chef de redressement.
Comité d’entreprise (chef de redressement n°12, 13,14)
En application de l’article L 242-1 du code de la sécurité sociale, les prestations des comités d’entreprise sont considérées comme des avantages en espèces ou en nature versés en contrepartie ou à l’occasion du travail et sont donc soumises à cotisations.
Toutefois diverses dérogations ont été instaurées par les instructions ministérielles des 17 avril 1985, 12 décembre 1988 et 2 juillet 1992 concernant les secours, la participation aux activités de loisirs, les bons d’achat, les cadeaux, l’aide aux particuliers employeurs, la prévoyance, la retraite supplémentaire.
En l’espèce, la contestation du redressement porte uniquement sur le fait qu’à l’occasion du contrôle URSSAF, la [7] s’est rendu compte du fait que le secrétaire du comité d’entreprise de l’époque a détourné des sommes importantes à son profit (paiement de frais personnels, usage de carte bancaire pour des dépenses personnelles…). L’intéressé ayant fait l’objet d’une condamnation pénale pour abus de confiance, la [7] conteste le fait que les sommes détournées puissent avoir le caractère de rémunération.
Or, l’employeur est seul débiteur des charges sociales pour toutes les sommes versées ou avantages servis aux salariés en contrepartie de leur travail y compris des cotisations afférentes aux prestations allouées par le comité social et économique, dès lors que celles-ci entrent dans l’assiette de ces charges sociales. L’employeur est donc responsable du paiement des cotisations sociales concernant les avantages divers tirés du comité, et peu importe que les agissements fautifs aient été à l’initiative d’un ancien membre du comité, et que ce dernier en ait bénéficié majoritairement. Concernant la responsabilité civile ou pénale de ce membre du comité, elle n’a pas d’incidence sur l’obligation au paiement des cotisations sociales dues par l’employeur, il appartiendra seulement à ce dernier, le cas échéant, de former un recours contre l’intéressé (en ce sens CA Aix-en-Provence, arrêt du 4 juin 2021, Répertoire général nº 20/05041). D’ailleurs, il résulte bien de la décision pénale produite qu’un renvoi sur intérêts civils a été ordonné afin de chiffrer le préjudice subi par la [7] du fait du redressement URSSAF.
Ainsi, les redressements opérés par l’URSSAF et relatifs au comité d’entreprise seront globalement validés et la [7] sera déboutée de sa demande d’annulation de ce chef.
III. Sur la demande reconventionnelle de condamnation
Compte tenu de la validation partielle du chef de redressement n°7 il convient d’ordonner à l’URSSAF de procéder au recalcul du redressement, et de renvoyer l’affaire à l’audience du 31 mars 2025 9h, afin qu’il soit statué sur la demande reconventionnelle.
Il convient de surseoir à statuer sur le surplus des demandes.
Le tribunal judiciaire spécialement désigné pour connaître du contentieux visé à l’article L 211-16 du COJ, statuant par décision contradictoire, rendue en premier ressort, par mise à disposition au greffe,
Déclare l’action de la [7] recevable,
Déboute la [7] de sa demande d’annulation du redressement pour les chefs n° 2, 3, 4, 5, 6, 9, 12, 13, 14,
Rectifie le chef de redressement n°7 en ce que la base de régularisation pour 2016 est de 21 476 € (au lieu de 21.682,50 €),
Déboute la [7] de ses demandes de minoration pour le surplus,
Avant dire droit sur la demande reconventionnelle de condamnation,
Ordonne à l’URSSAF RHONE-ALPES de recalculer le montant dû en rectifiant le chef de redressement n°7 comme indiqué,
Renvoie l’affaire à l’audience du 31 mars 2025 9h, avec obligation faite à l’URSSAF de préciser son nouveau chiffrage avant le 10 mars 2025 par voie de conclusions adressées à l’autre partie,
Réserve la demande d’article 700 du code de procédure civile et les dépens.
En foi de quoi, la Présidente et le Greffier ont signé le présent jugement.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE
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