Licenciement pour inaptitude et contestation de harcèlement moral : enjeux de preuve et de responsabilité.

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Licenciement pour inaptitude et contestation de harcèlement moral : enjeux de preuve et de responsabilité.

L’Essentiel : Monsieur [G] [U] a été engagé par la SA PAGES JAUNES SOLOCAL depuis le 19 février 1996, occupant le poste de conseiller communication digitale depuis 2014. En arrêt de travail pour maladie depuis septembre 2020, sa pathologie a été reconnue comme professionnelle en avril 2022. Licencié pour inaptitude le 29 juin 2022, il a saisi le conseil de prud’hommes pour harcèlement moral, demandant la nullité de son licenciement. Le jugement du 24 octobre 2023 a débouté ses demandes, confirmant la légitimité de son licenciement. Monsieur [G] [U] a interjeté appel, tandis que l’employeur a formé un appel incident.

Engagement et Poste de Monsieur [G] [U]

Monsieur [G] [U] a été engagé par la SA PAGES JAUNES SOLOCAL sous contrat de travail à durée indéterminée depuis le 19 février 1996. Il occupe le poste de conseiller communication digitale spécialiste depuis le 21 juillet 2014, avec un temps de travail soumis à une convention de forfait annuel en jours de 210 jours. La convention collective nationale de la publicité s’applique à son contrat.

Arrêt de Travail et Reconnaissance de Maladie Professionnelle

À partir du 22 septembre 2020, Monsieur [G] [U] a été placé en arrêt de travail pour maladie, sans reprendre son poste. Le 7 avril 2022, la CPAM de Meurthe-et-Moselle a reconnu le caractère professionnel de sa pathologie. Le 27 avril 2022, la médecine du travail a déclaré Monsieur [G] [U] inapte à son poste et à tout autre poste au sein de l’entreprise, précisant qu’un reclassement était impossible.

Licenciement pour Inaptitude Professionnelle

Le 29 juin 2022, Monsieur [G] [U] a été licencié pour inaptitude professionnelle, en raison de l’impossibilité de reclassement. En réponse à cette situation, il a saisi le conseil de prud’hommes de Nancy le 31 mai 2021, alléguant avoir été victime de harcèlement moral et demandant la résiliation judiciaire de son contrat de travail.

Demandes de Monsieur [G] [U]

Monsieur [G] [U] a formulé plusieurs demandes, incluant la nullité de son licenciement, des indemnités pour harcèlement moral, ainsi que des rappels de salaires et d’indemnités diverses. Il a également demandé des dommages et intérêts pour licenciement abusif et pour non-respect des obligations contractuelles de l’employeur.

Jugement du Conseil de Prud’hommes

Le jugement rendu le 24 octobre 2023 a débouté Monsieur [G] [U] de toutes ses demandes, concluant qu’il n’avait pas subi de harcèlement moral et que la SA PAGES JAUNES SOLOCAL n’avait commis aucun manquement à ses obligations. Le tribunal a également confirmé que le licenciement de Monsieur [G] [U] était fondé sur une cause réelle et sérieuse.

Appel de Monsieur [G] [U] et Réactions de l’Employeur

Monsieur [G] [U] a interjeté appel le 30 octobre 2023, tandis que la SA PAGES JAUNES SOLOCAL a formé un appel incident le 15 avril 2024. Les deux parties ont déposé leurs conclusions respectives, et le dossier a été clôturé le 18 septembre 2024.

Arguments sur la Convention de Forfait en Jours

Monsieur [G] [U] a contesté la validité de la convention de forfait, arguant que l’employeur n’avait pas respecté ses obligations de suivi de la charge de travail. La SA PAGES JAUNES SOLOCAL a soutenu que la convention était valide et conforme aux accords d’entreprise.

Heures Supplémentaires et Rappels de Salaires

Monsieur [G] [U] a demandé des rappels de salaires pour heures supplémentaires non payées, soutenant que la convention de forfait n’était pas opposable pour certaines années. La société a contesté ces demandes, arguant que le salarié n’avait pas fourni de preuves suffisantes.

Indemnités et Dommages et Intérêts

Le jugement a été partiellement réformé, condamnant la SA PAGES JAUNES SOLOCAL à verser à Monsieur [G] [U] des sommes pour heures supplémentaires et dommages et intérêts, tout en déboutant les parties de leurs demandes supplémentaires. La cour a également statué sur les demandes de remboursement de jours de RTT.

Conclusion et Décision Finale

La cour a confirmé certaines décisions du jugement initial tout en réformant d’autres, notamment en ce qui concerne les rappels de salaires et les remboursements dus. Les parties ont été déboutées de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile, et chaque partie a été laissée à la charge de ses propres dépens.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions de validité d’une convention de forfait en jours ?

La convention de forfait en jours est régie par les articles L. 3121-64 et L. 3121-65 du Code du travail.

L’article L. 3121-64 stipule qu’un accord peut prévoir la conclusion de conventions individuelles de forfait en heures ou en jours sur l’année.

Il est précisé que l’employeur doit s’assurer que la charge de travail du salarié est compatible avec le respect des temps de repos quotidiens et hebdomadaires.

Cela implique également l’organisation d’un entretien annuel avec le salarié pour discuter de sa charge de travail, de l’organisation de son travail, et de l’articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle.

Ainsi, pour qu’une convention de forfait en jours soit valide, elle doit être conforme à ces exigences, notamment en ce qui concerne le suivi de la charge de travail et la tenue d’entretiens réguliers.

En l’espèce, la société SOLOCAL a produit un accord d’entreprise et des preuves d’entretiens pour les années 2017 et 2019, mais pas pour 2018 et 2020, ce qui a conduit à l’inopposabilité de la convention pour ces deux années.

Quelles sont les obligations de l’employeur en matière de sécurité et de santé au travail ?

Les obligations de l’employeur en matière de sécurité et de santé au travail sont énoncées dans l’article L. 4121-1 du Code du travail.

Cet article stipule que l’employeur doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Cela inclut l’évaluation des risques et la mise en place de mesures de prévention adaptées.

Dans le cas de Monsieur [G] [U], la médecine du travail a déclaré son inaptitude à son poste, ce qui a conduit à son licenciement pour inaptitude professionnelle.

La cour a jugé que la société SOLOCAL n’avait pas manqué à son obligation de sécurité, car elle avait respecté les procédures en matière de santé au travail.

Quelles sont les conditions de reconnaissance du harcèlement moral au travail ?

Le harcèlement moral est défini par l’article L. 1152-1 du Code du travail, qui stipule qu’aucun salarié ne doit subir des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail.

Pour qu’il y ait harcèlement, il faut que les faits soient répétés et qu’ils portent atteinte aux droits et à la dignité du salarié, altèrent sa santé physique ou mentale, ou compromettent son avenir professionnel.

En cas de litige, l’article L. 1154-1 impose au salarié de présenter des faits laissant supposer l’existence d’un harcèlement.

Il incombe ensuite à l’employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs de harcèlement.

Dans le cas de Monsieur [G] [U], la cour a jugé qu’il n’avait pas établi de manière suffisante les faits de harcèlement moral, et a donc débouté sa demande.

Quelles sont les conséquences d’un licenciement jugé abusif ?

Les conséquences d’un licenciement abusif sont régies par l’article L. 1235-1 du Code du travail, qui prévoit que le salarié peut demander des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi.

Le montant de ces dommages et intérêts est déterminé par le juge, en tenant compte de la durée de l’ancienneté du salarié, de la situation de l’entreprise, et des circonstances de la rupture.

Dans le cas de Monsieur [G] [U], la cour a jugé que son licenciement n’était pas abusif, ce qui a conduit à un rejet de ses demandes d’indemnités associées à un licenciement abusif.

Quelles sont les règles concernant le paiement des heures supplémentaires ?

Les heures supplémentaires sont régies par l’article L. 3171-4 du Code du travail, qui stipule qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur doit fournir des éléments justifiant les horaires effectivement réalisés par le salarié.

Le salarié doit également appuyer sa demande de paiement d’heures supplémentaires par des éléments suffisamment précis.

Dans le cas de Monsieur [G] [U], la cour a jugé que les tableaux qu’il avait fournis étaient suffisamment précis pour établir ses heures supplémentaires, et a donc fait droit à sa demande de rappel de salaires pour les années 2018 et 2020.

Quelles sont les implications d’une convention de forfait en jours sur le droit au repos compensateur ?

L’article L. 3121-30 du Code du travail précise que des heures supplémentaires peuvent être accomplies dans la limite d’un contingent annuel, et que les heures effectuées au-delà de ce contingent ouvrent droit à une contrepartie obligatoire sous forme de repos.

Dans le cas de Monsieur [G] [U], la cour a jugé que la convention de forfait en jours était opposable pour l’année 2019, mais pas pour 2018 et 2020, ce qui a conduit à la reconnaissance de son droit au repos compensateur pour ces deux années.

Ainsi, l’inopposabilité de la convention de forfait a eu pour conséquence que Monsieur [G] [U] a pu revendiquer des heures supplémentaires et un repos compensateur pour les années concernées.

ARRÊT N° /2025

PH

DU 20 JANVIER 2025

N° RG 23/02290 – N° Portalis DBVR-V-B7H-FIJW

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NANCY

21/00249

24 octobre 2023

COUR D’APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE – SECTION 2

APPELANT :

Monsieur [G] [U]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Fabrice GOSSIN de la SCP FABRICE GOSSIN ET ERIC HORBER, avocat au barreau de NANCY

INTIMÉE :

S.A. PAGES JAUNES-SOLOCAL prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Olivier BAUER de la SELEURL CABINET DE MAITRE OLIVIER BAUER, avocat au barreau de NANCY substitué par Me QUENET, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré,

Président : WEISSMANN Raphaël,

Conseillers : BRUNEAU Dominique,

STANEK Stéphane,

Greffier lors des débats : RIVORY Laurène

DÉBATS :

En audience publique du 10 Octobre 2024 ;

L’affaire a été mise en délibéré pour l’arrêt être rendu le 05 Décembre 2024 ; par mise à disposition au greffe conformément à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ; puis à cette date le délibéré a été prorogé au 16 Janvier 2025 ; puis à cette date le délibéré a été prorogé au 20 Janvier 2025 ;

Le 20 Janvier 2025, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l’arrêt dont la teneur suit :

EXPOSÉ DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES

Monsieur [G] [U] a été engagé sous contrat de travail à durée indéterminée, par la SA PAGES JAUNES SOLOCAL à compter du 19 février 1996.

Il occupe le poste de conseiller communication digitale spécialiste depuis le 21 juillet 2014, et son temps de travail est soumis à une convention de forfait annuel en jours à hauteur de 210 jours.

La convention collective nationale de la publicité s’applique au contrat de travail.

A compter du 22 septembre 2020, le salarié a été placé en arrêt de travail pour maladie, sans reprendre son poste de travail.

Par décision du 07 avril 2022, la CPAM de Meurthe-et-Moselle a reconnu le caractère professionnel de la pathologie de Monsieur [G] [U].

Par décision du 27 avril 2022 de la médecine du travail dans le cadre d’une visite de reprise, Monsieur [G] [U] a été déclaré inapte à son poste de travail et à tout poste au sein de l’entreprise, avec la précision que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi.

Par courrier du 29 juin 2022, Monsieur [G] [U] a été licencié pour inaptitude professionnelle, avec impossibilité de reclassement.

Par requête initiale du 31 mai 2021, Monsieur [G] [U] a saisi le conseil de prud’hommes de Nancy, aux fins :

– de dire et juger qu’il a été victime de harcèlement moral,

– de prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail en raison du harcèlement moral dont il a été victime,

– en conséquence, de prononcer la nullité de son licenciement,

– de condamner la SA PAGES JAUNES SOLOCAL à lui verser les sommes suivantes :

– 2 064,74 euros à titre de complément d’indemnité spéciale de licenciement,

– 685,26 euros à titre de complément d’indemnité de préavis,

– 4 439,16 euros à titre de rappel sur congés d’ancienneté,

– 20 000,00 euros de dommages et intérêts pour harcèlement moral,

– 100 000,00 euros de dommages et intérêts pour licenciement nul,

A titre subsidiaire :

– de dire et juger la demande de résiliation judiciaire fondée sur les manquements aux obligations contractuelles de l’employeur,

– en conséquence, de dire et juger son licenciement abusif,

– de condamner la SA PAGES JAUNES SOLOCAL à lui verser les sommes suivantes :

– 20 000,00 euros de dommages et intérêts pour harcèlement moral,

– 2 064,74 euros à titre de complément d’indemnité spéciale de licenciement,

– 685,26 euros à titre de complément d’indemnité de préavis,

– 4 439,16 euros à titre de rappel sur cognés d’ancienneté,

– 20 000,00 euros de dommages et intérêts pour harcèlement moral,

– 69 361,92 euros de dommages et intérêts pour licenciement abusif,

En tout état de cause :

– de condamner la SA PAGES JAUNES SOLOCAL à lui verser les sommes suivantes :

– 23 119,61 euros au visa de l’article 8223-1 du code du travail,

– 23 030,67 euros à titre de rappel sur heures supplémentaires non payés entre 2018 et2020, congés payés inclus,

– 3 279,76 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de l’impossibilité de prise de repos compensateur éludé entre 2018 et 2020,

– 3 000,00 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice né du dépassement de la durée maximale de travail,

– de condamner la SA PAGES JAUNES SOLOCAL à lui verser la somme de 5 000,00 euros à en application de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens,

– d’ordonner l’exécution provisoire de la décision en application de l’article 515 du code de procédure civile.

Vu le jugement du conseil de prud’hommes de Nancy rendu le 24 octobre 2023, lequel a :

– jugé que Monsieur [G] [U] n’a pas subi de harcèlement moral,

– jugé que la SA PAGES JAUNES SOLOCAL n’a commis aucun manquement à son encontre à l’encontre de Monsieur [U] [G] suffisamment grave pour justifier la résolution judiciaire du contrat de travail,

– jugé que la SA PAGES JAUNES SOLOCAL n’a pas manqué à son obligation de sécurité de résultat,

– juger que la SA PAGES JAUNES SOLOCAL a exécuté de bonne foi le contrat de travail,

En conséquence :

– débouté Monsieur [G] [U] sur le paiement de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi en raison du harcèlement moral

– débouté Monsieur [G] [U] sur l’ensemble de ses demandes et conclusions liées aux conséquences du harcèlement moral à son encontre,

– débouté Monsieur [G] [U] sur sa demande de requalification de son licenciement en licenciement nul et de toutes ses demandes d’indemnités associées,

– débouté Monsieur [G] [U] sur sa demande de requalification de son licenciement en licenciement abusif et de toutes ses demandes d’indemnités associés,

– débouté Monsieur [G] [U] sur sa demande de rappel sur congés d’ancienneté,

– jugé que le contrat de travail de Monsieur [U] [G] n’est pas résilié,

– débouté Monsieur [G] [U] de toutes ses demandes associées à la résiliation judiciaire,

– jugé que la convention de forfait jour de Monsieur [U] [G] est privée d’effet,

– en conséquence, condamné la SA PAGES JAUNES SOLOCAL à verser à Monsieur [G] [U] les sommes suivantes :

– 23 030,67 euros à titre de rappel d’heures supplémentaires non payées entre 2018 et 2020, congés payés inclus,

– 3 279,76 euros à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice subi du fait de l’impossibilité de prise du repos compensateur,

– 1 500,00 euros en réparation d’un préjudice né du dépassement de la durée maximale du travail,

– condamné Monsieur [G] [U] à verser à la SA PAGES JAUNES SOLOCAL la somme de 4 077,16 euros à titre de remboursement des jours de réduction du temps de travail devenus sans objet et réglés de mai 2018 à septembre 2020,

– débouté Monsieur [G] [U] de sa demande au titre du travail dissimulé,

– ordonné l’exécution provisoire qui est due de droit à Monsieur [G] [U], du présent jugement conformément aux dispositions de l’article 515 du code de procédure civile,

– condamné la SA PAGES JAUNES SOLOCAL à payer à Monsieur [G] [U] la somme de 2 500,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la SA PAGES JAUNES SOLOCAL aux frais et dépens de la procédure.

Vu l’appel formé par Monsieur [G] [U] le 30 octobre 2023,

Vu l’appel incident formé par la SA PAGES JAUNES SOLOCAL le 15 avril 2024,

Vu l’article 455 du code de procédure civile,

Vu les conclusions de Monsieur [G] [U] déposées sur le RPVA le 31 mai 2024, et celles de la SA déposées sur le RPVA le 11 septembre 2024,

Vu l’ordonnance de clôture rendue le 18 septembre 2024,

Monsieur [G] [U] demande :

– de le dire et juger bien fondé en ses demandes, fins et conclusions,

– d’infirmer le jugement entrepris, sauf en ce qu’il l’a débouté la SA PAGES JAUNES SOLOCAL de sa demande au visa de l’article 700 du code de procédure civile et l’a condamnée à lui verser les sommes suivantes :

– 23 030,67 euros à titre de rappel d’heures supplémentaires non payées entre 2018 et 2020, congés payés inclus,

– 3 279,76 euros à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice subi du fait de l’impossibilité de prise du repos compensateur,

– 1 500,00 euros en réparation d’un préjudice né du dépassement de la durée maximale du travail,

– 2 500,00 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens de la procédure,

*

Statuant à nouveau :

A titre principal :

– de dire et juger sa demande de résiliation judiciaire du contrat fondée du fait du harcèlement moral endurée et des manquements à l’obligation de sécurité,

– de dire et juger qu’il a été victime de harcèlement moral,

– de dire et juger le licenciement nul,

– de condamner la SA PAGES JAUNES SOLOCAL à lui verser les sommes suivantes :

– 2 064,74 euros à titre de complément d’indemnité spéciale de licenciement, et à établir un nouveau bulletin de salaire n’assujettissant pas l’indemnité spéciale de licenciement aux charges sociales et à l’impôt sur le revenu, outre la restitution des retenues indues,

– 685,26 euros à titre de complément d’indemnité de préavis,

– 4 439,16 euros à titre de rappel sur congés d’ancienneté,

– 20 000,00 euros de dommages et intérêts pour harcèlement moral,

– 100 000,00 euros de dommages et intérêts pour licenciement nul,

– 23 119,61 euros au visa de l’article L.8223-1 du code du travail,

– 5 000,00 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– de condamner la SA PAGES JAUNES SOLOCAL aux entiers dépens,

*

A titre subsidiaire :

– de dire et juger sa demande de résiliation judiciaire du contrat fondée du fait des manquements à l’obligation de sécurité ainsi qu’aux obligations contractuelles au visa de l’article L.1222-1 du code du travail,

– de dire et juger le licenciement abusif,

– de condamner la SA PAGES JAUNES SOLOCAL à lui verser les sommes suivantes :

– 2 064,74 euros à titre de complément d’indemnité spéciale de licenciement, et à établir un nouveau bulletin de salaire n’assujettissant pas l’indemnité spéciale de licenciement aux charges sociales et à l’impôt sur le revenu, outre la restitution des retenues indues,

– 685,26 euros à titre de complément d’indemnité de préavis,

– 4 439,16 euros à titre de rappel sur congés d’ancienneté,

– 20 000,00 euros de dommages et intérêts pour harcèlement moral,

– 69 361,92 euros de dommages et intérêts pour licenciement abusif,

– 23 119,61 euros au visa de l’article L.8223-1 du code du travail,

– 5 000,00 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– de condamner la SA PAGES JAUNES SOLOCAL aux entiers dépens,

– de débouter la SA PAGES JAUNES SOLOCAL en ses demandes, fins et conclusions.

La SA PAGES JAUNES SOLOCAL demande :

– de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :

– jugé que Monsieur [G] [U] n’a pas subi de harcèlement moral,

– jugé que la société n’a commis aucun manquement à son encontre, suffisamment grave pour justifier la résolution judiciaire du contrat de travail,

– jugé qu’elle n’a pas manqué à son obligation de sécurité de résultat,

– jugé qu’elle a exécuté de bonne foi le contrat de travail,

– débouté Monsieur [G] [U] de ses prétentions à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral et de toutes ses demandes subséquentes,

– débouté Monsieur [G] [U] de sa demande de requalifier son licenciement en licenciement nul et de toutes les demandes associées,

– débouté Monsieur [G] [U] de ses prétentions au titre des congés payés pour ancienneté ;

– débouté Monsieur [G] [U] de sa demande de résolution judiciaire du contrat de travail et de toutes les demandes associées,

*

En conséquence :

– de constater l’absence de preuve de griefs précis et concordants, personnels à Monsieur [G] [U],

– de dire et juger qu’elle n’a commis aucun manquement à son encontre, a fortiori suffisamment graves pour justifier la résolution judiciaire du contrat de travail,

– de dire et juger que le licenciement de Monsieur [G] [U] est fondé sur une cause réelle et sérieuse,

– de réformer le jugement entrepris en ce qu’il a privé d’effet la convention de forfait jours, applicable entre les parties et condamné la société au versement des sommes suivantes :

– 23 030, 67 euros à titre de rappel d’heures supplémentaires,

– 3 279,76 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect du droit à repos compensateur,

– 1 500,00 euros pour non-respect de la durée maximale du travail,

– de réformer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société au versement de la somme de 2 500,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et en tous les dépens,

– de débouter Monsieur [G] [U] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

*

A titre infiniment subsidiaire et si par extraordinaire la Cour de céans estimait pouvoir faire droit pour tout ou partie aux prétentions formées par Monsieur [G] [U] à titre d’heures supplémentaires :

– de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné Monsieur [G] [U] au versement de la somme de 4 077, 16 euros à titre de remboursement des jours de réduction du temps de travail devenues sans objet et réglées de mai 2018 à septembre 2020,

*

En tout état de cause :

– de le condamner à payer à la société la somme de 5 000,00 au titre de l’article 700 du code de procédure civile et en tous les dépens.

SUR CE, LA COUR

Pour plus ample exposé sur les moyens et prétentions des parties, il est expressément renvoyé aux dernières écritures qu’elles ont déposées sur le RPVA, s’agissant de l’employeur le 11 septembre 2024, et en ce qui concerne le salarié le 31 mai 2024.

Sur la convention de forfait en jours

M. [G] [U] soutient que la convention de forfait est nulle, et que l’employeur ne justifie par ailleurs pas de la tenue d’un entretien annuel pour s’assurer de la compatibilité de sa charge de travail avec sa vie personnelle, et que la convention est privée d’effet.

La société SOLOCAL expose que la convention de forfait en jours est prévue par un accord d’entreprise du 20 mars 2000, conclu par la société ODA devenue SOLOCAL, et que la convention de forfait-jours est intégrée dans le contrat de travail de M. [G] [U] en son article 4.

S’agissant du suivi de la charge de travail, la société SOLOCAL fait valoir que l’entretien a eu lieu, mais que ne peuvent être produits ceux qui concernent 2018 et 2020, de sorte qu’au mieux les prétentions de l’appelant ne pourraient porter que sur ces deux années.

Motivation

Il résulte des dispositions de l’article L. 3121-64 du code du travail qu’un accord peut prévoir la conclusion de conventions individuelles de forfait en heures ou en jours sur l’année.

Aux termes des dispositions de l’article L. 3121-65 du même code l’employeur s’assure que la charge de travail du salarié est compatible avec le respect des temps de repos quotidiens et hebdomadaires;

Il organise une fois par an un entretien avec le salarié pour évoquer sa charge de travail, qui doit être raisonnable, l’organisation de son travail, l’articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle ainsi que sa rémunération.

La société SOLOCAL produit en pièce 20 un accord d’entreprise ODA du 20 mars 2000, prévoyant en son article 7 les modalités d’application d’un forfait en jours pour certains cadres.

L’intimée justifie par ses pièces 20 bis 1 à 6 que le société ODA est devenue Pages Jaunes puis SOLOCAL.

La convention précitée du 20 mars 2000 servant donc de support à la convention individuelle de forfait-jour intégrée au contrat de travail de l’appelant, celle-ci n’est pas nulle.

La société SOLOCAL produit en pièces 26 et 27 les entretiens d’évaluation de M. [G] [U] pour les années 2017 et 2019, qui comprennent une rubrique « synthèse collaborateur (faits marquants de l’année, conditions de travail, équilibre vie professionnelle/vie personnelle, charge de travail et amplitude).

L’entretien pour 2017 ayant été réalisé le 26 juin 2017, la convention de forfait n’est opposable à M. [G] [U] que pour le premier semestre 2017.

Elle lui est opposable pour 2019, puisque réalisée le 11 février 2020.

En conséquence, M. [G] [U], qui formule des demandes de rappel d’heures supplémentaires pour les années 2018 à 2020, est en droit de faire valoir l’inopposabilité de la convention de forfait pour 2018 et 2020, et donc l’application de la durée légale de travail de 35 heures par semaine pour ces deux années.

Le jugement sera réformé en conséquence.

Sur la demande de rappel pour heures supplémentaires

M. [G] [U] renvoie à sa pièce 16, au soutien de sa demande de rappel.

La société SOLOCAL fait valoir que le salarié ne verse aux débats aucune pièce corroborant son tableau d’heures supplémentaires ; qu’il aurait dû déduire 5 heures par semaine, correspondant à ses temps de trajets du matin et du soir, pour se rendre sur son lieu de travail ; qu’à titre subsidiaire il convient de réduire de 2 heures par mois sa demande, l’accord d’entreprise prévoyant une durée de travail de 37 heures que pour les salariés qui ne sont pas au forfait, dès lors qu’ils bénéficient de jours de RTT ; qu’il n’explicite pas le calcul de son taux horaire ; qu’il ne lui a jamais été demande d’effectuer des heures supplémentaires.

Motivation

L’article L. 3171-4 du code du travail dispose qu’ en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction.

La preuve des heures de travail effectuées n’incombe spécialement à aucune des parties mais le salarié doit appuyer sa demande en paiement d’heures supplémentaires par la production d’éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l’employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.

En pièces 16-1 et 16-3, M. [G] [U] produit des tableaux indiquant par jour ses heures de début et fin de travail le matin et l’après-midi, et en déduit des heures supplémentaires au taux de 25 % et au taux de 50 %.

Ces éléments sont suffisamment précis pour permettre à l’employeur, à qui incombe le contrôle des heures travaillées, d’y répondre avec ses propres éléments.

La société SOLOCAL ne produit aucun décompte des heures travaillées.

Son argument relatif au temps de trajet est inopérant, M. [G] [U] indiquant son heure de début et son heure de fin de travail ; est également inopérant son argument sur l’accord pour effecteur des heures supplémentaires, dans la mesure où, ainsi que cela résulte des conclusions des parties, M. [G] [U] effectuait son travail au lieu de l’entreprise, sauf quelques déplacements extérieurs, et qu’il se trouvait donc sous la surveillance de son employeur, qui n’argue pas s’être opposé à l’exécution des horaires indiqués dans les tableaux de M. [G] [U].

La société SOLOCAL, qui critique le taux horaire appliqué par M. [G] [U], n’explicite pas en quoi il serait erroné, et quel taux horaire devrait être appliqué, la cour n’ayant pas à se substituer aux parties dans le développement de leurs arguments.

Il ne sera pas déduit 2 heures par mois pour tenir compte des jours de RTT, dès lors que la société SOLOCAL formule par ailleurs une demande de remboursement de jours de RTT, et qu’elle ne produit pas elle-même de décompte des heures qui seraient dues, après réduction de ces deux heures mensuelles, la cour n’ayant pas à se substituer aux parties dans le développement de leurs arguments.

Dans ces conditions, et au vu des pièces précitées de M. [G] [U], il sera fait droit aux demandes de rappels de salaires pour les années 2018 et 2020, à hauteur respectivement de 5038,61 euros, outre 503,86 euros au titre des congés payés afférents, et 5 695,89 euros, outre 569,59 euros au titre des congés payés afférents, la société SOLOCAL ne critiquant pas à titre subsidiaire le détail des calculs de M. [G] [U].

Le jugement sera réformé en ce sens.

Sur l’indemnité pour défaut de repos compensateur

La société SOLOCAL estime qu’il n’y a pas lieu à repos compensateur, ni à contrepartie, M. [G] [U] « ne démontrant pas la réalité des heures supplémentaires dont il sollicite le paiement, Monsieur [U] ne justifie pas avoir dépassé le contingent annuel d’heures supplémentaires ».

M. [G] [U] fonde sa demande sur un dépassement du contingent d’heures supplémentaires en 2019.

Motivation

L’article L. 3121-30 du code du travail dispose que des heures supplémentaires peuvent être accomplies dans la limite d’un contingent annuel. Les heures effectuées au-delà de ce contingent annuel ouvrent droit à une contrepartie obligatoire sous forme de repos.

Les heures prises en compte pour le calcul du contingent annuel d’heures supplémentaires sont celles accomplies au-delà de la durée légale.

Il résulte des développements qui précèdent que la convention de forfait en jours est opposable à M. [G] [U] pour 2019.

Aucune heures supplémentaire n’étant due pour cette année, M. [G] [U] sera débouté de sa demande au titre du repos compensateur.

Le jugement sera infirmé sur ce point.

Sur la demande de dommages et intérêts pour dépassement de la durée hebdomadaire maximale de travail

M. [G] [U] explique avoir dépassé la durée maximale de travail les semaines des : 28 janvier, 04 février, 02 septembre, 09 septembre, 16 septembre et 23 septembre 2019.

La société SOLOCAL s’oppose à la demande, considérant que le dépassement n’est pas démontré.

Motivation

Aux termes de l’article L3121-20 du code du travail, au cours d’une même semaine, la durée maximale hebdomadaire de travail est de quarante-huit heures.

Il ressort de la lecture de la pièce 16-2 de M. [G] [U] que :

– la semaine du 28 janvier 2019 il a travaillé 42 heures 30

– la semaine du 04 février 2019 il a travaillé 52h30

– la semaine du 02 septembre 2019 il a travaillé 42 heures 30

– la semaine du 09 septembre 2019 il a travaillé 52 heures 30

– la semaine du 16 septembre 2019 il a travaillé 52 heures 30

– la semaine du 23 septembre 2019 il a travaillé 52 heures 30.

M. [G] [U] ayant dépassé la durée maximale de travail sur 4 de ces 6 semaines, le jugement sera confirmé en ce qu’il a condamné en conséquence l’employeur à des dommages et intérêts.

Sur la demande d’indemnité pour travail dissimulé

M. [G] [U] fait valoir les heures supplémentaires accomplies et considère que l’intention frauduleuse résulte de ce que la société SOLOCAL, en toute connaissance de cause, a méconnu ses obligations en matière de contrôle du temps de travail.

La société SOLOCAL conteste tout caractère intentionnel.

Motivation

En l’espèce, l’existence d’heures supplémentaires résultant de l’inopposabilité de la convention de forfait, le caractère intentionnel de la dissimulation d’heures travaillées n’est pas établi.

Le jugement qui a débouté M. [G] [U] de sa demande à ce titre sera donc confirmé.

Sur la demande de remboursement des jours de RTT

La société SOLOCAL demande de condamner M. [G] [U] à lui rembourser 4077,16 euros de jours de RTT, s’il était fait droit aux prétentions de ce dernier relatives aux heures supplémentaires.

M. [G] [U] ne conclut pas sur ce point.

Motivation

En application de la convention de forfait en jours, qui a été déclarée inopposable à M. [G] [U] pour les années 2018 et 2020, celui-ci a bénéficié de jours de RTT.

En conséquence de l’inapplication rétroactive de la convention, M. [G] [U] est tenu au remboursement de ces jours désormais indus.

La société SOLOCAL détaille sa demande en page 37 de ses écritures, en ventilant les montants réclamés par années et mois.

En l’absence de contestation subsidiaire des montants par le salarié, il sera fait droit à la demande pour les années 2018 et 2020, soit un total de 2 234,09 euros.

Sur le harcèlement moral

Aux termes des dispositions de l’article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

En application de l’article L. 1154-1 du code du travail, lorsque survient un litige relatif à l’application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3, le salarié présente des faits laissant supposer l’existence d’un harcèlement.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

M. [G] [U] explique avoir subi à partir de 2019 des faits de harcèlement moral de la part de sa hiérarchie.

Il rapporte les faits suivants :

– alors que ses objectifs avaient été fixés, sa responsable va lui retirer des clients, sans être consulté.

Il renvoie à ses pièces 2 et 3.

La pièce 2 est un mail du 23 octobre 2019 adressé à M. [G] [U] par la directrice de publicité, lui annonçant le retrait de 7 clients.

La pièce 3 est un mail de M. [G] [U] adressé le 28 octobre 2019 à la directrice de publicité pour lui indiquer qu’il n’est pas d’accord avec ces retraits, alors qu’il dispose encore de suffisamment de temps pour traiter l’ensemble de son portefeuille.

Le fait est matériellement établi.

– en début d’année 2020, il va être averti le vendredi soir qu’il fera l’objet d’un accompagnement le lundi par le directeur régional des ventes, au mépris de la liberté d’organisation des cadres au forfait.

Il ajoute que ce dernier entendait le « mettre au pas » en le suivant, l’écoutant et l’infantilisant, allant jusqu’à lui préconiser des phrases de présentation au téléphone face à ses prospects.

Il renvoie à ses pièces 4 et 5.

Les pièces 4 et 5 sont des tableaux de « bilan d’accompagnement » de M. [G] [U] par Mme [J] [M] [Z] [directrice de publicité] pour celui de janvier et par M. [G][R] pour celui de février.

Ces pièces n’établissent pas qu’il aurait été prévenu de l’accompagnement le vendredi soir pour le lundi.

Si les tableaux font état de remarques et conseils sur la manière de démarcher les prospects, il n’en ressort pas de caractère offensant ou infantilisant.

Le fait n’est donc pas matériellement établi.

– il va ensuite être affecté au groupe de M. [T], groupe de travail formé d’une équipe essentiellement alsacienne ; il va subir : une absence de toute communication entre les rendez-vous ; des critiques verbales dans la voiture sur l’organisation, le manque de professionnalisme ; l’établissement de rapports toujours négatifs ; des écoutes téléphoniques lorsqu’il est en home office.

Il ne renvoie à aucune pièce. Le fait n’est donc pas matériellement établi.

– à l’occasion d’un challenge commercial, chaque jour de septembre 2020 il recevait un tableau avec des briques bleues selon le degré d’atteinte ; sa ligne restait blanche ; son responsable l’appelait tous les jours pour lui en faire part.

Il renvoie à sa pièce 6.

Il s’agit de la capture d’écran d’un tableau, dans lequel apparaissent une liste de noms, puis des codes lettres, des montants et des lignes de « briques ».

La ligne de M. [G] [U] indique 0 % et aucune brique bleue n’apparaît en face de son nom.

Il convient de noter que trois autres personnes se trouvent à 0 % et ont une ligne sans brique bleue.

Cette pièce ne justifie pas d’un appel quotidien de son responsable au sujet de ses résultats.

Seule l’absence de résultat est matériellement établie.

– il va apprendre que tous les autres commerciaux, sauf lui, s’étaient vus attribuer une partie du portefeuille de dépannage, à hauteur d’une quinzaine de dossiers chacun.

Il renvoie à sa pièce 15.

La pièce 15 est un mail de M. [G] [R] du 11 septembre 2020, adressé à une quarantaine de personnes au sujet du « cross country challenge », félicitant 10 personnes pour leurs résultats de la veille.

Cette pièce ne concerne pas une attribution de dossiers.

Le fait n’est pas matériellement établi.

– la veille de son départ en vacances à la fin du mois de juillet 2020, M. [T] va l’appeler pour lui conseiller de changer de travail.

Il ne renvoie à aucune pièce.

Le fait n’est pas matériellement établi.

– lors de son retour de congés, il lira sur son écran le compte-rendu d’une réunion avec la mention « renouveler c’est MOURIR ».

Il renvoie à sa pièce 7.

Cette pièce 7 est une impression d’écran : « Synthèse de notre échange avec [O][F] :

‘ Renouveler c’est mourir

‘Abonnement 24 M

‘Son sujet : Acquisition (parc X Arpa = revenu)

etc. »

Le fait est matériellement établi.

– il a subi une augmentation des objectifs et de ses horaires de travail.

Il renvoie à sa pièce 26

La pièce 26 est une attestation de Mme [L] [A], qui précise avoir été salariée de la société SOLOCAL de 2001 à 2022, et indique que M. [G] [U] « a subi pendant de nombreuses années la pression de la direction de SOLOCAL (‘) La pression de la direction n’a cessé d’augmenter. Augmentation des objectifs, horaires de travail qui ne cessaient d’augmenter également. (…) ».

Cette pièce, n’est ni précise ni circonstanciée.

Le fait n’est donc pas matériellement établi.

– il va s’arrêter pour un syndrome anxio-dépressif qui sera reconnu comme maladie professionnelle.

Il renvoie à ses pièces 8 et 19.

La pièce 8 est un arrêt de travail du 22 septembre 2020 au 25 octobre 2020 pour syndrome anxio-dépressif.

La pièce 19 est un courrier de la CPAM du 07 avril 2022, informant M. [G] [U] de ce que le comité de reconnaissance des maladies professionnelles a émis un avis favorable à la reconnaissance de sa maladie comme maladie professionnelle.

Le fait est matériellement établi.

– il a prévenu de la prolongation de son arrêt de travail en octobre 2020 ; l’arrêt maladie ne parvient pas à son employeur, qui lui adresse un courrier recommandé mentionnant son absence à son poste de travail.

Il renvoie à ses pièces 9 et 10.

La pièce 9 est l’impression d’écran d’un échange de sms ; il informe « [Y] » le 26 novembre 2020 que son arrêt est prolongé jusqu’au 26 décembre ; le destinataire répond à cet envoi.

La pièce 10 est un courrier en recommandé avec accusé de réception du 14 décembre 2020 que lui a adressé son employeur, indiquant que le salarié ne s’est pas présenté à son travail depuis le 25 novembre 2020 et qu’il n’a pas reçu de justificatif d’absence.

Le fait est matériellement établi.

– au bout de trois mois d’absence on lui a réclamé son matériel, alors que d’autres salariés avaient encore leur matériel après 6 mois d’absence.

Il ne renvoie à aucune pièce ; le fait n’est donc pas matériellement établi.

– il n’a bénéficié d’aucune augmentation sur la partie fixe de sa rémunération depuis quatre années, contrairement à ses collègues ; son salaire global a baissé en 2019 et 2020 en raison d’objectifs inatteignables et incompréhensibles ; il n’a jamais bénéficié d’entretien au cours de l’année évoquant ses conditions de travail et la compatibilité du forfait jours avec sa vie familiale et personnelle.

Il ne renvoie à aucune pièce ; le fait n’est donc pas matériellement établi.

– il a réalisé un grand nombre d’heures supplémentaires non rémunérées.

Il ne renvoie à aucune pièce ; il résulte cependant des développements qui précèdent qu’il sera fait droit en partie à sa demande de rappel au titre d’heures supplémentaires.

– il a subi un dépassement de la durée maximale de travail hebdomadaire à plusieurs reprises.

Il ne renvoie à aucune pièce ; il résulte cependant des développements précédents qu’il a dépassé ponctuellement de 4h30 la durée maximale de travail hebdomadaire, en février et septembre 2019.

Sont donc matériellement établis :

– le retrait de 7 clients, annoncé par mail du 23 octobre 2019

– le fait que sur un tableau de septembre 2020 sa ligne de résultats est vierge

– l’existence d’un document reçu, selon l’appelant, en septembre 2020, portant la mention « renouveler c’est MOURIR »

– le fait qu’après avoir prévenu son employeur par sms le 26 novembre 2020 que son arrêt est prolongé jusqu’au 26 décembre, il a reçu de son employeur un courrier en recommandé avec accusé de réception du 14 décembre 2020 que lui a adressé son employeur, indiquant que le salarié ne s’est pas présenté à son travail depuis le 25 novembre 2020 et qu’il n’a pas reçu de justificatif d’absence

– le dépassement ponctuel de la durée maximale hebdomadaire de travail,

– l’existence d’heures supplémentaires

– son arrêt de travail pour syndrome anxio-dépressif et la reconnaissance de sa maladie professionnelle.

Ces éléments matériellement établis, pris dans leur ensemble, laissent supposer l’existence d’un harcèlement moral.

En ce qui concerne le retrait de dossiers, la société SOLOCAL fait valoir que les commerciaux ne sont pas propriétaires du portefeuille qui leur est confié, et que les clients doivent être visités chque année, à des dates fixes, pour qu’ils ne soient pas victimes d’une rupture de diffusion des produits digitaux en cours ; elle précise que les méthodes commerciales préconisées supposent que les vendeurs disposent d’un temps suffisant pour présenter toutes les offres.

La société SOLOCAL indique que M. [G] [U] se trouvait à la fin du mois d’octobre avec un reste en main trop important pour traiter tous ses clients avant la fin de l’année.

Sa responsable le prévenait et dressait la liste des clients qui n’avaient pas été traités aux dates prévues ; le 24 octobre elle le recevait pour en discuter avec lui puis lui adressait un courriel. la société SOLOCAL renvoie à sa pièce 3.

L’intimée précise que 7 clients seulement ont été repris au lieu des 13 prévus initialement, et estime que loin de caractériser un acte de harcèlement, cette mesure était destinée à lui permettre une fin de campagne sereine tout en préservant les intérêts de l’entreprise.

La société SOLOCAL produit en pièce 2 un mail adressé par la directrice de publicité à M. [G] [U] le 22 octobre 2019, intégrant un listing, lui expliquant qu’elle va lui retirer 13 commandes « car tu ne pourras pas tout traiter » « compte tenu de tous les comptes à rentrer avant fin novembre » ; elle lui propose d’en reparler le lendemain.

La société SOLOCAL produit en pièce 3 un mail de la directrice de publicité du 24 octobre 2019 « suite à notre conversation de ce jour » ; elle explique que son avancement est moindre que l’avancement théorique « ce qui fait apparaître un retard théorique de 13 commandes. Je ne souhaite pas te mettre en difficulté quant à ton rythme et la cadence de travail à fournir pour closer la totalité de ton portefeuille.(‘) « Elle indique enfin finalement lui retirer 7 contrats « cela te permettra de mieux gérer dans le temps et l’avancement du traitement de ton portefeuille (…) ».

Il résulte de ces pièces qu’ainsi que l’expose la société SOLOCAL, le retrait était expliqué au salarié, et a fait l’objet d’une discussion dont a résulté une réduction du nombre de contrats retirés, et que ces retraits étaient réalisés pour permettre au salarié de réaliser son travail, dans les délais, sans surcharge de travail.

Ce fait est donc étranger à tout harcèlement.

S’agissant du bilan de M. [G] [U] pour le challenge de septembre 2020, la société SOLOCAL fait valoir que le mail produit en pièce 15 par le salarié est un mail de son directeur qui adresse ses félicitations à 10 personnes, dont l’intéressé. Les tableaux que ce dernier produit n’étaient pas joint à ce courriel, aucune pièce jointe n’étant visée par le mail. L’intimée explique que ces documents listent l’avancement de tous les vendeurs sur un objectif ponctuel ; si M. [G] [U] est à 0 c’est parce qu’il n’a enregistré aucune commande à ce titre, et il n’est pas le seul.

Le mail en pièce 15 de M. [G] [U] n’indique effectivement aucune pièce jointe.

Le score vierge de M. [G] [U] sur le tableau qu’il produit est équivoque, trois autres collègues étant dans la même situation, ce qui, en l’absence d’éléments complémentaires, peut s’expliquer par un manque objectif de résultats.

Le fait est donc exclusif de tout harcèlement.

S’agissant de l’arrêt de travail de M. [G] [U], la société SOLOCAL explique que l’un des avis de renouvellement ne lui est pas parvenu, si bien qu’elle a été contrainte de lui demander de justifier son absence, l’article 63 de la convention collective lui faisant obligation de faire parvenir le formulaire dans les 3 jours. Elle estime qu’il était légitime qu’elle s’en inquiète trois semaines plus tard.

Compte tenu des explications fournies par l’employeur, et de l’absence de justification par M. [G] [U] de la transmission de son arrêt de travail dans les délais, le fait est étranger à tout harcèlement.

S’agissant du document portant la mention « renouveler c’est MOURIR », la société SOLOCAL fait valoir qu’on ne connaît pas l’origine de ce document, ni sa date, ni d’où il est tiré, ni comment M. [G] [U] a pu l’obtenir.

Ce document en pièce 7 du salarié semble être un extrait d’un diaporama support d’une présentation de type « powerpoint », et la phrase litigieuse semble correspondre à un point de l’exposé.

Comme le fait valoir l’intimée, M. [G] [U] ne justifie ni de son origine ni de sa date, le document ne comportant aucune précision sur ces points.

Compte tenu de ces éléments, le fait est étranger à tout harcèlement.

S’agissant des heures supplémentaires, les réponses de la société SOLOCAL sont celles opposées à la demande de rappel d’heures supplémentaires.

Il en va de même s’agissant du dépassement de la durée hebdomadaire maximale de travail, la société SOLOCAL ne formulant pas d’autre réponse que celle opposée à la demande du salarié de dommages et intérêts à ce titre.

Au terme des développements qui précèdent, l’existence d’heures supplémentaires ne résultent que de l’inopposabilité de la convention de forfait qui s’appliquait à M. [G] [U], et qui faisaient l’objet d’une contrepartie en jours de RTT.

Le dépassement de la durée hebdomadaire maximale de travail n’a concerné qu’une semaine en février 2019 et trois semaines en septembre 2019, à hauteur de 4h30 pour chacune de ces semaines, soit une hausse limitée sur deux périodes très ponctuelles.

Compte tenu de ces éléments, ces deux faits sont étrangers à tout harcèlement moral.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a débouté M. [G] [U] de toutes ses demandes fondées sur un harcèlement moral.

Sur la demande de résiliation judiciaire

M. [G] [U] fonde sa demande sur :

« – un harcèlement moral caractérisé

– une modification contractuelle imposée au salarié

– un non-respect des obligations inhérentes au contrat de travail

– une atteinte à l’obligation de sécurité de résultat »

Il résulte du développement qui précède qu’il est constaté l’absence de harcèlement moral ; les autres arguments listés par M. [G] [U] ne sont pas explicités dans ses écritures.

L’appelant sera donc débouté de sa demande ; le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur l’indemnité de licenciement

M. [G] [U] explique que l’indemnité spéciale de licenciement qui devait lui être versée devait être d’un montant de 59 728,32 euros ; qu’il n’a perçu que 57 663,58 euros ; que par ailleurs la société SOLOCAL a assujetti partiellement cette indemnité aux charges sociales et à l’impôt sur le revenu sur une assiette de 23 244,30 euros.

La société SOLOCAL affirme que l’indemnité spéciale de licenciement était de 57 663,59 euros, et que par ailleurs elle était nécessairement soumise à la CSG-CRDS au-delà du montant de l’indemnité conventionnelle de licenciement.

Motivation

M. [G] [U] expose une formule de calcul, qu’il n’explicite pas, sur une base de 3853,44 euros, qu’il n’explique pas.

La société SOLOCAL renvoie à sa pièce 32 pour le calcul du salaire de référence et de l’indemnité de spéciale de licenciement.

Cette pièce 32 indique la rémunération de référence du mois de septembre 2019 au mois d’août 2020, et en déduit une rémunération mensuelle de 3 625,02 euros ; cette fiche indique, pour le calcul de l’ancienneté, la date d’embauche et la date de fin de préavis.

Ces éléments étant conformes aux dispositions de l’article R1234-4 du code du travail sur le salaire de référence et en l’absence de motivation de sa demande par M. [G] [U], celui-ci en sera débouté.

La société SOLOCAL indique dans ses écritures que cette indemnité était soumise à la CSG- CRDS au-delà du montant de l’indemnité conventionnelle de licenciement, en application des articles L241-1 du code de la sécurité sociale et 80 duodecies du CGI.

Aux termes des dispositions de l’article 80 duodecies du code général des impôts, toute indemnité versée à l’occasion de la rupture du contrat de travail constitue une rémunération imposable, sous réserve d’exceptions.

Aux termes des dispositions des articles L136-2 et L242-1 du code de la sécurité sociale, l’indemnité de licenciement, dépassant un certain plafond, est soumise à la CSG et à la CRDS.

Il résulte de ces dispositions que l’indemnité spéciale de licenciement est imposable et soumise aux cotisations sociales, selon son montant le cas échéant.

M. [G] [U] n’explique pas à titre subsidiaire en quoi les calculs opérés par l’employeur ne respecteraient pas les seuils de déclenchements des retenues fiscales ou sociales.

M. [G] [U] sera donc débouté de ses demandes de remboursement et d’édition d’un bulletin de salaire rectificatif ; le jugement sera confirmé sur ces points.

Sur l’indemnité compensatrice de préavis

M. [G] [U] fonde sa demande sur un salaire de référence de 3 853,44 euros.

Celui-ci n’en justifiant pas plus qu’au soutien de sa demande au titre de l’indemnité de licenciement, il sera de la même façon débouté de sa demande.

Sur la demande de congés d’ancienneté

M. [G] [U] explique qu’en application des dispositions conventionnelles, il doit bénéficier de 24 jours de congés supplémentaires, pour un montant de 4 439,16 euros.

La société SOLOCAL s’oppose à la demande, expliquant qu’il a reçu à ce titre 6 883,72euros à ce titre.

Motivation

Aux termes de l’article 1353 du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver.

Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction

PAR CES MOTIFS

La Cour, chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

Infirme le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Nancy le 24 octobre 2023 en ce qu’il a :

– condamné la SA PAGES JAUNES SOLOCAL à verser à Monsieur [G] [U] les sommes suivantes :

– 23 030,67 euros à titre de rappel d’heures supplémentaires non payées entre 2018 et 2020, congés payés inclus,

– 3 279,76 euros à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice subi du fait de l’impossibilité de prise du repos compensateur,

– condamné Monsieur [G] [U] à verser à la SA PAGES JAUNES SOLOCAL la somme de 4 077,16 euros à titre de remboursement des jours de réduction du temps de travail devenus sans objet et réglés de mai 2018 à septembre 2020 ;

Le confirme pour le surplus,

Statuant à nouveau dans ces limites,

Condamne la société SOLOCAL à payer à M. [G] [U] :

– 5038,61 euros, outre 503,86 euros au titre des congés payés afférents,

– 5 695,89 euros, outre 569,59 euros au titre des congés payés afférents,

en paiement d’heures supplémentaires ;

Condamne M. [G] [U] à payer à la société SOLOCAL 2 234,09 euros en remboursement de jours de RTT ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Y ajoutant,

Déboute les parties de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens.

Ainsi prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Et signé par Monsieur Raphaël WEISSMANN, Président de Chambre, et par Madame Laurène RIVORY, Greffier.

LE GREFFIER LE PRESIDENT DE CHAMBRE

Minute en vingt pages


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