Discrimination syndicale et évolution de carrière : un salarié rétabli dans ses droits.

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Discrimination syndicale et évolution de carrière : un salarié rétabli dans ses droits.

L’Essentiel : M. [O] [N], employé par Arcelormittal Méditerranée depuis 1977, a dénoncé une stagnation de carrière qu’il attribue à des discriminations syndicales. Après avoir saisi le conseil de prud’hommes en 2013, il a obtenu un jugement en 2016 ordonnant son repositionnement et des dommages-intérêts. En appel, la société conteste la recevabilité de sa demande et l’absence de preuves concernant l’exposition à l’amiante. M. [N] réclame la confirmation du jugement initial et des indemnités pour frais d’appel. Le tribunal a reconnu la discrimination et accordé 94 224 euros pour le préjudice matériel, tout en infirmant les dommages-intérêts pour préjudice moral.

Contexte de l’affaire

M. [O] [N], né le 16 novembre 1955, a été embauché en 1977 par la société Solmer, devenue par la suite Arcelormittal Méditerranée. Il a commencé sa carrière en tant que fondeur avant d’être affecté en 1981 au poste de pompier. Au fil des années, il a dénoncé une stagnation de sa carrière, qu’il attribue à des discriminations liées à ses activités syndicales.

Actions en justice

Le 29 décembre 2005, M. [N] a écrit à la direction des ressources humaines pour signaler sa situation. En avril 2013, il a saisi le conseil de prud’hommes de Martigues, alléguant une discrimination syndicale. Le conseil a rendu un jugement en mars 2016, ordonnant son repositionnement à un coefficient supérieur et condamnant la société à lui verser des dommages-intérêts.

Appel de la société

La société Arcelormittal Méditerranée a interjeté appel du jugement, contestant la recevabilité de la demande de M. [N] et arguant de l’absence de preuve d’une exposition aux risques liés à l’amiante et aux agents cancérogènes. Elle a également demandé une réduction des montants des indemnités accordées.

Arguments de M. [N]

M. [N] a demandé la confirmation du jugement initial et a réclamé un repositionnement rétroactif à un coefficient plus élevé, ainsi que des indemnités pour les frais d’appel. Il a soutenu que sa stagnation de carrière était liée à son engagement syndical et a fourni des preuves de sa participation active dans diverses instances syndicales.

Discrimination syndicale

Le tribunal a examiné les éléments de preuve fournis par M. [N], notamment des témoignages et des documents attestant de sa stagnation de carrière et de l’impact de son engagement syndical sur son évolution professionnelle. La société n’a pas réussi à prouver que les décisions prises à son encontre étaient justifiées par des éléments objectifs.

Réparation du préjudice

Le tribunal a déterminé que M. [N] avait subi un préjudice matériel en raison de la discrimination, calculant les dommages-intérêts sur la base d’une méthode de triangulation des salaires. La somme totale de 94 224 euros a été accordée pour réparer le préjudice subi entre 1992 et 2012.

Demande d’indemnisation pour exposition à l’amiante

M. [N] a également demandé des dommages-intérêts pour exposition à l’amiante et aux agents cancérogènes. Le tribunal a jugé que sa demande était recevable et non prescrite, en raison de l’absence d’information sur les risques liés à son exposition.

Décision finale

Le tribunal a confirmé la majorité des décisions du jugement initial, tout en infirmant la partie relative aux dommages-intérêts pour préjudice moral. La société a été condamnée à verser des frais d’appel à M. [N] et à prendre en charge les dépens.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les implications de la discrimination syndicale selon le Code du travail ?

La discrimination syndicale est strictement prohibée par le Code du travail. L’article L.1132-1 stipule qu’aucun salarié ne peut être licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire en raison de ses activités syndicales.

Cet article précise que les discriminations peuvent être directes ou indirectes, et qu’elles touchent à divers aspects de la vie professionnelle, y compris l’avancement et la rémunération.

De plus, l’article L.2141-5 interdit à l’employeur de prendre en compte l’appartenance à un syndicat pour ses décisions concernant le recrutement, la répartition du travail, ou l’octroi d’avantages sociaux.

Enfin, l’article L.1134-1 impose à l’employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, lorsque le salarié présente des éléments laissant supposer l’existence d’une discrimination.

Ainsi, dans le cas de M. [N], les éléments qu’il a fournis concernant sa stagnation de carrière et l’impact de son engagement syndical sur son évolution professionnelle sont cruciaux pour établir la discrimination.

Comment se calcule le préjudice en cas de discrimination ?

Le préjudice résultant d’une discrimination est régi par l’alinéa 3 de l’article L. 1334-5 du Code du travail, qui dispose que les dommages et intérêts doivent réparer l’entier préjudice résultant de la discrimination, pendant toute sa durée.

Dans le cas de M. [N], la méthode utilisée pour évaluer le préjudice est la ‘méthode Clerc’, qui consiste à comparer l’écart de rémunération entre le salarié discriminé et ses collègues de qualification et d’âge similaires.

La cour a retenu que le préjudice doit être calculé sur la base de la rémunération annuelle en moyenne mensuelle, incluant à la fois le salaire de base et les compléments de salaire, conformément à la jurisprudence (Soc., 7 juillet 2009, pourvoi n° 08-42.094).

Ainsi, le préjudice total de M. [N] a été évalué à 94 224 euros, en tenant compte de la perte de droits à la retraite et des revenus non versés.

Quelles sont les conditions de recevabilité des demandes de dommages-intérêts pour exposition à l’amiante ?

La recevabilité des demandes de dommages-intérêts pour exposition à l’amiante est encadrée par l’article L. 451-1 du Code de la sécurité sociale, qui stipule que le pôle social du tribunal judiciaire a compétence exclusive pour connaître des demandes en réparation des préjudices nés d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle.

Cependant, dans le cas de M. [N], la cour a jugé que sa demande ne relevait pas d’une action en réparation d’une maladie professionnelle reconnue, mais plutôt d’un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité.

L’article L. 230-2 du Code du travail, devenu L. 4121-1 et L. 4121-2, impose à l’employeur de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé des travailleurs.

Ainsi, la cour a déclaré recevable la demande de M. [N] pour préjudice d’anxiété lié à l’exposition à l’amiante, car il n’avait pas été informé des risques, et le délai de prescription n’avait pas commencé à courir.

Quelles sont les obligations de l’employeur en matière de sécurité au travail ?

Les obligations de l’employeur en matière de sécurité au travail sont clairement définies dans le Code du travail. L’article L. 4121-1 impose à l’employeur de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Cela inclut l’évaluation des risques et la mise en place de mesures de prévention adaptées. L’article L. 4121-2 précise que l’employeur doit informer et former les travailleurs sur les risques auxquels ils sont exposés.

Dans le cas de M. [N], il a été établi qu’il avait été exposé à des substances dangereuses, notamment l’amiante, sans que des mesures adéquates de protection aient été mises en place.

Les pièces produites par M. [N] montrent que l’employeur était conscient des risques liés à l’exposition à l’amiante et aux agents cancérogènes, mais n’a pas pris les mesures nécessaires pour protéger ses employés, ce qui constitue un manquement à son obligation de sécurité.

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-6

ARRÊT AU FOND

DU 17 JANVIER 2025

N°2025/012

Rôle N°20/06340

N° Portalis DBVB-V-B7E-BGAOI

Société ARCELORMITTAL MEDITERRANEE, prise en son établissement de [Localité 3]

C/

[O] [N]

Copie exécutoire délivrée

le : 17/01/2025

à :

– Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d’AIX EN PROVENCE

– Me Cédric HEULIN, avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de MARTIGUES en date du 04 Mars 2016 enregistré au répertoire général sous le N° 13/257.

APPELANTE

Société ARCELORMITTAL MEDITERRANEE, prise en son établissement de [Localité 3] sis [Adresse 5], dont le siège social est sis [Adresse 1]

représentée par Me Denis PASCAL, avocat au barreau de MARSEILLE

et par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE,

INTIME

Monsieur [O] [N], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Cédric HEULIN, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 19 Novembre 2024 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Pascal MATHIS, Président de chambre, et Madame Ursula BOURDON-PICQUOIN, Conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Pascal MATHIS, Président de chambre

Madame Ursula BOURDON-PICQUOIN, Conseiller

Madame Raphaelle BOVE, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Pascale ROCK.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 Janvier 2025.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 Janvier 2025.

Signé par Monsieur Pascal MATHIS, Président de chambre et Mme Suzie BRETER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*-*-*-*-*

M. [O] [N], né le 16 novembre 1955, a été embauché en juin 1977 par la société Solmer située à [Localité 3] aux droits de laquelle se trouve la société Arcelormittal Méditerranée en qualité de fondeur aux Hauts Fourneaux, statut ouvrier, niveau 1, 3ème échelon. Il a été affecté le 1er février 1981 à un emploi de pompier.

Le 29 décembre 2005, il a adressé un courrier à la direction des ressources humaines de la société Sollac Méditerranée afin de dénoncer une stagnation dans son évolution de carrière en faisant référence à ses activités syndicales.

Estimant avoir été victime d’une discrimination syndicale dans le déroulement de sa carrière, M. [N] a saisi, le 8 avril 2013, le conseil de prud’hommes de Martigues. Le conseil de prud’hommes s’est déclaré en partage de voix, par procès-verbal du 18 décembre 2014.

En décembre 2015, M. [N] a quitté l’entreprise dans le cadre de son départ en retraite. En dernier lieu, il était positionné au coefficient 255.

Par jugement du 4 mars 2016, le conseil de prud’hommes de Martigues, en sa formation de départage, a ainsi statué :

– repositionne M. [N] au coefficient 305 ;

– condamne la société Arcelormittal Méditerranée à payer à M. [N] [O] les sommes de:

– 94 224 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice matériel ;

– 3 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral ;

– 5 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice d’anxiété ;

– 1 500 euros à titre d’indemnité globale sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

avec intérêts de droit à compter du 16 avril 2013 ;

– déboute les parties de plus amples demandes ;

– ordonne l’exécution provisoire sur la somme de 50 000 euros et sur l’indemnité globale ;

– condamne la société Arcelormittal Méditerranée aux dépens.

Par déclaration du 16 mars 2016 notifiée par voie électronique, la société Arcelormittal Méditerranée a interjeté appel de ce jugement.

Dans ses dernières conclusions notifiées au greffe par voie électronique le 29 octobre 2024 et développées oralement à l’audience, auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens, la société ArcelorMittal Méditerranée, appelante, demande à la cour de :

à titre principal,

– juger irrecevable la demande indemnitaire de M. [N] pour non-respect des dispositions de l’article L.451-1 du code de la sécurité sociale ;

– débouter le demandeur en conséquence de ses demandes, fins et conclusions ;

à titre subsidiaire,

– constater l’absence de preuve d’une exposition personnelle et continue de M. [N] au risque CMR et à l’amiante;

– constater l’absence de preuve d’un comportement fautif imputable à la société ArcelorMittal Méditerranée;

– constater l’absence de preuve d’un préjudice actuel, direct et certain en lien avec l’activité professionnelle;

– débouter en conséquence le demandeur en conséquence de ses demandes, fins et conclusions;

à titre encore plus subsidiaire,

– ramener à de bien plus justes proportions les demandes d’indemnisation au titre du préjudice d’anxiété ;

en tout état de cause,

– rejeter toute prétention adverse plus amples ou contraires ;

– dire et juger n’y avoir lieu à condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

– condamner M. [N] à lui payer la somme de 3.000 euros au titre des frais de première instance en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamner M. [N] à lui payer la somme de 3.000 euros au titre des frais d’appel en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

– laisser les dépens à la charge de M. [N].

Dans ses dernières écritures transmises au greffe par voie électronique le 12 novembre 2024 et développées oralement à l’audience auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens, M. [N] demande à la cour de :

– confirmer en toutes ses dispositions le jugement de départage du conseil de prud’hommes de Martigues en date du 4 mars 2016 ;

y ajouter,

– ordonner son repositionnement au coefficient 305 mais à compter de janvier 2012 et ce avec toutes conséquences de droit, notamment sur la rémunération ;

– condamner la société ArcelorMittal Méditerranée à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en cause d’appel ;

– condamner ladite société aux entiers dépens dont les frais éventuels d’exécution.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la discrimination syndicale :

Aux termes de l’article L.1132-1 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable au litige, aucun salarié ne peut être licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, en raison, notamment, de ses activités syndicales.

L’article L.2141-5 du code du travail prévoit qu’il est interdit à l’employeur de prendre en considération l’appartenance à un syndicat ou l’exercice d’une activité syndicale pour arrêter ses décisions en matière notamment de recrutement, de conduite et de répartition du travail, de formation professionnelle, d’avancement, de rémunération et d’octroi d’avantages sociaux, de mesures de discipline et de rupture du contrat de travail.

L’article L.1134-1 du même code dispose, par ailleurs, que lorsque survient un litige en raison d’une méconnaissance de ces dispositions, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. (Soc., 20 septembre 2023, pourvoi n° 22-16.130).

M. [N] expose avoir été un militant syndical adhérent au syndicat CGT de 1977 à 1980, au syndicat FO de 1980 à 1997 puis au syndicat CFE-CGC depuis 1997. Il indique avoir activement participé aux mouvements de grève au sein de la société Solmer, puis Sollac en 1978 et 1979. Il mentionne avoir été pour la première fois candidat aux élections professionnelles des délégués du personnel et membres du comité d’entreprise en 1992. Il indique avoir été élu délégué du personnel de 1998 à 2007, membre du CHSCT de 1997 à 2013, puis disposé d’un mandat de délégué du personnel suppléant. Il précise que son engagement syndical était connu de sa hiérarchie et de la direction au moins à compter de 1992 et que s’il a bénéficié d’une progression régulière et satisfaisante jusqu’en 1992, cette évolution a été ensuite clairement ralentie.

Le salarié justifie par les pièces produites avoir été :

– candidat aux élections des représentants du personnel au comité d’établissement de 1992;

– candidat aux élections des délégués du personnel de 1993 ;

– élu membre du CHSCT Fonte en janvier 1997 ;

– élu délégué du personnel en juin 1998 ;

– réélu membre du CHSCT Fonte en février 1999 ;

– réélu délégué du personnel en juin 2000 ;

– réélu membre du CHSCT Fonte en mars 2001 ;

– réélu délégué du personnel en juin 2002 ;

– réélu membre du CHSCT Fonte en mars 2003 ;

– réélu délégué du personnel en juin 2004 ;

– élu membre du CHSCT I.E.G en mars 2005 ;

– réélu délégué du personnel en juin 2006 ;

– réélu membre du CHSCT zone Fonte/ NRJ en avril 2011.

Il communique en outre des bulletins de salaire de 1978 et 1979 mentionnant des retenues pour absences ‘code 907″ correspondant aux absences pour fait de grève.

A l’appui d’une discrimination syndicale de 1992 à 2012, le salarié invoque les faits et circonstances suivantes:

– le blocage au même coefficient ;

– la prise en compte de l’activité syndicale dans son évaluation ;

– le nombre anormal d’augmentations individuelles ;

– le blocage au Groupe Référence Emploi (GRE) 470 ;

– le non-respect des engagements d’évolution ;

– la violation par l’employeur des accords d’entreprise ;

– l’inadéquation du coefficient par rapport aux fonctions occupées.

– Sur le blocage au même coefficient :

M. [N] expose avoir subi une stagnation de carrière à compter de 1992, être resté bloqué pendant 6 ans au coefficient 225, pendant 9 ans et 3 mois au coefficient 240, puis au coefficient 255 de 2008 à 2015, date de son départ à la retraite, ce qui selon lui est parfaitement anormal au vu des statistiques sur les anciennetés et durées moyennes dans les coefficients établies par Arcelor.

Il produit aux débats outre des pièces dites collectives concernant d’autres instances et salariés, des pièces dites individuelle et notamment :

– la fiche individuelle ArcelorMittal du salarié éditée le 4 mars 2013 mentionnant le coefficient 225 à compter du 1er septembre 1992, le coefficient 240 à partir du 1er novembre 1998 et le coefficient 255 à partir du 1er février 2008 ;

– une courbe de carrière qu’il a établie montrant un maintien au coefficient 225 de septembre 1992 à novembre 1998 (6 ans), au coefficient 240 de novembre 1998 à février 2008 (9 ans et 3 mois) puis au coefficient 255 à compter du 1er février 2008;

– les tableaux et courbes des durées moyennes par coefficient et ancienneté établis par l’employeur chaque année de 1992 à 2006 montrant qu’en 1992, la durée moyenne au coefficient 225 est en moyenne pour les hommes de 2,2 ans, en 1996 et 1998 de 3 ans ; qu’en 1998, la durée moyenne au coefficient 240 est en moyenne pour les hommes de 3 ans, en 2000, 2006 de 4 ans; qu’en 2006, la durée moyenne au coefficient 255 est en moyenne pour les hommes de 4 ans ;

– ses bulletins de salaire 2011, 2012 et 2013 ;

– un panel de 14 salariés, ayant une ancienneté dans la société à 1977, embauchés comme ouvriers spécialisés au coefficient 155 au sein de l’établissement de [Localité 3], avec un un diplôme équivalent relevant du niveau V de l’Education Nationale, concluant que le dernier salaire mensuel moyen connu (RAMM : Rémunération Annuelle en moyenne mensuelle) s’élève à 3.353 euros correspondant à un repositionnement au coefficient 305 selon la méthode Clerc ;

– des extraits des livres d’embauche mentionnant la date d’entrée et le coefficient initial des salariés du panel communiqué.

– Sur la prise en compte de l’activité syndicale dans son évaluation :

M. [N] explique n’avoir bénéficié d’aucun aménagement pour l’exercice de ses mandats, ses absences au titre des heures de délégation, étant jugées comme ‘un handicap’ à son évolution de carrière.

Il verse aux débats plusieurs entretiens d’évaluation faisant très explicitement référence à ses mandats syndicaux :

– entretien 2001 : ‘Membre du CHSCT de la zone Fonte, délégué du personnel, membre de plusieurs commissions ses nombreuses missions extérieures au GIP rendent difficile la réalisation de l’entretien professionnel de M. [N]’ ;

– entretien d’évaluation 2003 : ‘malgré son mandat CHSCT qui lui prend pas mal de temps’;

– entretien d’évaluation 2004 : ‘Agent ayant divers mandats au syndicat, donc très souvent absent, gênant le bon fonctionnement de l’équipe et pour lui également’;

– entretien d’évaluation 2006 : ‘Agent délégué CHSCT Souvent absent dû à son mandat’.

– Sur le nombre anormal d’augmentations individuelles :

M. [N] indique n’avoir bénéficié que de deux augmentations individuelles de 1998 à 2013, soit en plus de 15 ans, alors qu’au sein du service GIP, la moyenne d’augmentation individuelle est d’environ deux ans. Il ajoute que les seules augmentations individuelles dont il a bénéficié étaient attachées à des changements de coefficients.

La fiche individuelle ArcelorMittal du salarié éditée le 4 mars 2013 mentionne des augmentations individuelles le 1er novembre 1998, le 1er mai 2007 et le 1er octobre 2010.

– Sur le blocage au Groupe Référence Emploi (GRE) 470 :

Le salarié souligne que lors de la mise en place du dispositif ‘Groupe Référence Emploi’, il a volontairement été positionné par la hiérarchie au GRE 470 (‘Technicien d’intervention et de protection’) au lieu du GRE 480 (‘Technicien sécurité’) qui correspondait davantage à sa carrière et à ses compétences et qui permettait de bénéficier d’une évolution de coefficient plus importante.

A l’appui de ses dires, il produit les pièces suivantes :

– la fiche compétence du Technicien d’intervention et de protection ayant une ‘technicité particulière’, un coefficient plancher de 190 et un coefficient plafond de 335 et la mission d’ ‘assurer la protection des personnes et des biens du site’;

– la fiche compétence du Technicien sécurité ayant une ‘technicité générale’, un coefficient plancher de 240 et un coefficient plafond de 365 et la mission suivante: ‘en assurant un rôle de spécialiste ou d’expert, aider les départements de l’usine à développer la prévention, à promouvoir la sécurité, à gérer les accidents du travail. Assurer l’interface avec les organismes officiels’;

– une fiche individuelle mentionnant le groupe d’emploi ‘470 Technicien d’intervention et de protection’ depuis janvier 1995.

– Sur le non-respect des engagements d’évolution :

M. [N] fait valoir qu’en 2007, que sa hiérarchie lui a proposé une mission de responsable de sécurité dans le cadre du chantier de la rénovation de la coulée continue 1 en évoquant à l’issue une évolution de carrière ; qu’en dépit des engagements faits et de la réussite de la mission, il a été enjoint de retourner à l’issue au PC du GIP. Il précise que le poste d’animateur-sécurité, qui aurait dû lui être proposé, au regard des bons résultats obtenusdans le cadre de la mission, a été attribué à un salarié qui n’était pas formé pour la fonction. Il ajoute qu’en ce qui le concerne, il avait exercé des fonctions de chef de garde en qualité de sous-officier de sapeurs-pompiers au centre de secours de [Localité 4].

Le salarié produit les pièces suivantes :

– un courriel de Mme [K] adressée à M. [N] l’informant de l’impossibilité de lui proposer une évolution professionnelle au sein du GIP en raison de ses restrictions d’aptitude. Mme [K] dit lui proposer par contre une mission de 6 mois d’animation de la sécurité du chantier CC1 permettant de ‘mettre en valeur’ ses ‘compétences professionnelles’ et de lui ouvrir ‘des opportunités’ ‘vers des postes en dehors du GIP’;

– un courrier du 16 mai 2007 de M. [L] évoquant le respect des engagements par le biais d’une augmentation individuelle de 60 euros au 1er mai pour l’investissement dans la mission et un changement de coefficient ; il ajoute : ‘Lors de notre rencontre du 14 mai vous exprimé votre insatisfaction concernant ces mesures que vous jugez insuffisantes. Cependant je vous rappelle que notre objectif est de vous donner une réelle perspective de carrière, et que si vous interrompiez votre mission, nous considérerions cette décision comme un renoncement de votre part à toute évolution significative.’ ;

– une attestation de 1997 du centre de secours principal de [Localité 4] certifiant qu’il a exercé l’activité de chef de garde de sapeurs-pompiers volontaires et professionnels de juillet 1978 à mai 1995 ;

– un extrait du guide des sapeurs-pompiers sur le chef de garde.

– Sur la violation par l’employeur des accords d’entreprise :

M. [N] indique ensuite que l’employeur n’a pas respecté les divers accords d’entreprise.

Se référant à l’avenant n° 1 du 6 octobre 1992 et à l’accord ACAP 2000 du 17 décembre 1990 sur la conduite de l’activité professionnelle, il souligne ne pas avoir bénéficié d’entretien professionnel de suivi de carrière tous les ans.

Le salarié relève également qu’alors que l’article 43 de l’accord ACAP 2000 prévoit que le ‘parcours [de carrière] se fera sur la base d’une progression moyenne de 3 points de classification par année’, il n’a évolué que 30 points sur une période de 22 ans (de 1993 – à 2015), soit une moyenne de 1,36 points par an.

– Sur l’inadéquation du coefficient par rapport aux fonctions occupées :

Il souligne enfin avoir été affecté à des postes dont le coefficient est supérieur au sien et été maintenu au coefficient 255. Il produit document intitulé ‘situation des emplois’ du service ‘Surveillance, incendie, standard’ de novembre 1987 mentionnant que le chef de poste est positionné au coefficient 305, l’adjoint au chef de poste à un coefficient compris entre 270/285 et l’animateur sécurité entre 270/335.

Au vu des pièces produites, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination.

La société conteste toute discrimination syndicale.

Elle insiste sur le parcours de carrière atypique de M. [N], embauché en qualité de deuxième fondeur, puis muté en 1980 au service incendie en qualité pompier ambulancier, affecté à un poste de garde pompier assermenté de 1987 à 1995 et à compter de 1995, à un poste de technicien intervention protection. Elle ajoute qu’il a eu une fonction postée au service GIP (vidéo-surveillance et téléphoniste sans effort physique) suite à une restriction d’aptitude par le médecin du travail en 2002.

Elle relève qu’alors que sa première candidature à une élection professionnelle intervient en mars 1992, M. [N] a été promu le septembre suivant au coefficient 225 ; elle souligne que le salarié, qui évoque un une stagnation à partir du coefficient 225, a bénéficié au total de 8 coefficients (soit un changement toutes les 5,42 années).

Elle indique avoir respecté le dispositif conventionnel en ce qui concerne le parcours minimum de carrière, M. [N] ayant eu une évolution de carrière bien supérieure au minima conventionnel (2,86 points par année de 1977 à 2012 alors que le parcours de carrière minimum de l’Acap 2000 prévoit une progression moyenne de 1.5 points par année).

Elle souligne que la mise en place des accords d’entreprise s’agissant des entretiens professionnels a été progressive ; que de 1996 à 2012, M. [N] a bénéficié de 8 entretiens professionnels (entretiens en 1996, 1997, 2001, 2003, 2004, 2006, 2010 et 2012).

Elle expose enfin que les différents panels produits par M. [N], et notamment le dernier concernant 14 salariés communiqué en appel, ne sont pas représentatifs. Elle explique qu’eu égard au parcours particulier de M. [N], un panel comparatif ne peut être établi ; qu’en tout état de cause, la situation de M. [N] doit être comparée à celle des salariés du GIP avec lesquels il a travaillé pendant 35 ans.

La société appelante vers aux débats les pièces suivantes :

– un tableau relatif à l’évolution de carrière de M. [N] par rapport au minimum de carrière;

– des fiches d’aptitude médicale de M. [N] ;

– des tableaux critiquant les panels adverses et des pièces justificatives ;

– un tableau comparatif de la situation des salariés du GIP au 31 décembre 2015, année de départ à la retraite de M. [N] (date d’embauche allant de1977 à 2010, niveaux de diplôme de l’éducation nationale de IV à VI et coefficients en décembre 2015 allant de 215 à 365).

Au vu de ces pièces, l’employeur ne justifie pas d’éléments objectifs permettant de démontrer que la différence de traitement de M. [N] est totalement étrangère à son engagement syndical. Il ne justifie pas le maintien du salarié dans des coefficients hiérarchiques au-delà de la durée moyenne (maintien au coefficient 225 pendant 6 ans, au coefficient 240 pendant 9 ans et 3 mois). Il ne s’explique pas sur la teneur des entretiens professionnels se référant explicitement à son activité de représentant du personnel. Il ne produit aucun panel permettant de remettre en cause les panels établis par le salarié. Sur ces bases, la discrimination syndicale doit en conséquence être considérée comme établie. Il convient en conséquence de confirmer le jugement déféré sur ce point.

Sur la réparation du préjudice :

L’alinéa 3 de l’article L. 1334-5 du code du travail dispose que les dommages et intérêts réparent l’entier préjudice résultant de la discrimination, pendant toute sa durée.

M. [N] applique la ‘méthode Clerc’ consistant à effectuer une triangulation à partir de l’écart de rémunération observé, sur toute la durée de la discrimination, entre le salarié discriminé et ses collègues de qualification et d’âge similaires. Cette méthode, qui n’est pas contestée par l’employeur, sera retenue en l’absence de proposition d’une autre règle de calcul alternative.

La société intimée oppose par contre que le préjudice ne peut être calculé que sur le salaire de base et non sur la rémunération annuelle en moyenne mensuelle.

La cour répond que la comparaison entre les salariés inclus dans un panel doit porter tant sur le salaire de base que sur les compléments de salaire. (Soc., 7 juillet 2009, pourvoi n° 08-42.094)

Le différentiel entre la rémunération annuelle en moyenne mensuelle du coefficient 305 et celle du coefficient 255 est donc fixé à 604 euros.

Le préjudice est donc de [604 euros x 12 (mois) x 20 ans (de 1992 à 2012 compris)] divisé par deux, soit : 72480 euros. A cette somme, doit s’ajouter une majoration fixée à 30 % afin de tenir compte de la perte de droits à la retraite du fait du différentiel de revenus non versés et de la prévoyance, soit 21744 euros.

Par voie de confirmation du jugement déféré, la société Arcelormittal Méditerranée sera en conséquence condamnée à payer à M. [C] la somme totale de 94224 euros (72480+ 21744) à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la discrimination dont il a été victime sur la période de 1992 à 2012.

L’existence d’un préjudice moral n’est pas rapportée. Le salarié est par voie d’infirmation du jugement déféré débouté de ce chef de demande.

Sur la demande de dommages et intérêts pour exposition à l’amiante et aux agents cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction (dit CMR) :

Sur la prescription :

Selon l’article L. 1471-1 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017, toute action portant sur l’exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit.

Le point de départ de la prescription est la date à laquelle le salarié a eu connaissance du risque à l’origine de l’anxiété.

Il ne ressort pas des éléments du dossier que le salarié a été informé des risques liés à une exposition à l’amiante ainsi qu’aux agents cancérogène, mutagène ou toxique pour la reproduction (CMR). Le délai de prescription s’agissant du préjudice d’anxiété lié à ces risques n’avait donc pas commencé à courir à la date de la saisine de la juridiction prud’homale.

Il s’en déduit que les demandes en réparation du préjudice d’anxiété causé notamment par l’exposition à l’amiante ou des substances CMR formées par M. [N] sont recevables.

Sur la recevabilité de la demande de M. [C] eu égard aux dispositions de l’article L.451-1 du code de la sécurité sociale :

Par application de l’article L.451-1 du code de la sécurité sociale et L.211-16 du code de l’organisation judiciaire, depuis le 1er janvier 2019, le pôle social du tribunal judiciaire a une compétence exclusive pour connaître des demandes en réparation des préjudices nés d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle.

Il résulte de l’article L. 230-2 du code du travail devenu L. 4121-1 et L. 4121-2 dudit code que l’employeur est tenu de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

La société Arcelormittal Méditerranée fait valoir que le salarié qui se prévaut d’une pathologie à part en entière (troubles psychologiques), qui trouverait exclusivement et directement son origine dans son activité professionnelle, doit au préalable présenter une demande de reconnaissance d’une maladie professionnelle auprès de la caisse primaire d’assurance maladie.

Le salarié répond que le préjudice moral ou d’anxiété n’est prévu par aucun des tableaux des maladies professionnelles ; qu’il n’est pas (encore) malade ; qu’en réalité la société cherche à contester la compétence matérielle de la juridiction prud’homale pour connaître de ce litige; que faute d’avoir été soulevée in limine litis conformément à l’article 74 du code de procédure civile, cette exception de procédure  » détournée  » doit être rejetée.

En l’espèce, la demande du salarié ne relève pas d’une action en réparation d’une maladie telle que visée par l’article L. 451-1 du code de la sécurité sociale. Aucune maladie n’a été reconnue d’origine professionnelle et le préjudice invoqué par le salarié résulte d’une situation d’inquiétude permanente face aux risques de déclaration d’une maladie consécutive à l’exposition à l’amiante ou à un ou plusieurs CMR. M. [N] fonde sa demande sur le manquement de l’employeur à son obligation de sécurité. Il convient dès lors de rejeter l’irrecevabilité soulevée.

Sur les risques amiante et CMR:

En application des dispositions des articles 1134 et 1147 du code civil et L.4121 1 du code du travail, l’employeur est tenu envers le salarié d’une obligation de sécurité, notamment en ce qui concerne les maladies professionnelles contractées par le salarié du fait des produits fabriqués ou utilisés par l’entreprise.

L’ancien article 233-1 du code du travail, en vigueur du 7 décembre 1976 au 31 décembre 1992, disposait déjà que les établissements et locaux industriels devaient être aménagés de manière à garantir la sécurité des travailleurs.

En application des règles de droit commun régissant l’obligation de sécurité de l’employeur, le salarié qui justifie d’une exposition à une substance générant un risque élevé de développer une pathologie grave, potentiellement autre que l’amiante, peut agir contre son employeur pour manquement de ce dernier à son obligation de sécurité.

En application des règles de droit commun régissant l’obligation de sécurité de l’employeur, le salarié ayant exercé une activité sur un site non inscrit sur la liste prévue par l’article 41 de la loi du 23 décembre 1998, qui justifie d’une exposition à l’amiante ou à une autre substance toxique ou nocive générant un risque élevé de développer une pathologie grave et d’un préjudice d’anxiété personnellement subi résultant d’un tel risque, peut agir contre son employeur pour manquement de ce dernier à son obligation de sécurité.

M. [N] expose avoir travaillé aux Hauts Fourneaux de 1977 à 1981 puis en qualité de pompier du GIP. Il précise qu’en tant que pompier, il était tenu de s’équiper avec des gants de travail et équipements de protection en amiante et intervenait sur toutes les installations de l’usine de [Localité 3].

Il produit des attestations d’anciens salariés témoignant notamment de l’utilisation fréquente de tenues de protection en amiante et de leur usure laissant apparaître des fibres d’amiante et des interventions dans l’unité Cokerie sans masque de protection.

Il communique également des pièces collectives à d’autres dossiers de salariés relatives à l’amiante :

– un synoptique de la fabrication d’acier au sein de l’usine de [Localité 3] ;

– un tableau récapitulatif des secteurs de l’usine exposés à l’amiante ;

– un plan de l’usine de [Localité 3] avec l’impact ponts roulants ;

– des comptes rendus du CHSCT du 20 décembre 1977, du 25 avril 1978, du 26 juillet 1978 du 24 octobre 1978 ;

– le compte rendu de la réunion trimestrielle du comité de coordination des CHSCT du 11 mars 1991, 9 décembre 1991, 8 avril 1997, du 9 octobre 1997 ;

– des comptes rendus du groupe amiante du 7 novembre 1991, du 4 mars 1992, du 25 mai 1992, du 10 juillet 1992, du 9 septembre 1992 ;

– la note interne de M [V] en date du 21 février 1992 ;

– des notes manuscrites de M [X] du 13 mai 1992, du 17 juin 1992, de M [P] à M [V] du 20 mai 1997 ;

– le projet de plan de rejet de retrait de Sollac de 1997 ‘Enlèvement de plaques contenant de l’amiante’ ;

– le courrier de l’inspecteur du travail M. [G] au directeur des établissements Sollac du 2 aout 2001 ;

– les rapports médicaux annuels de 1998 à 2007 concernant les différents secteurs, de l’usine et l’ensemble de maladies professionnelles ;

– le bilan social de l’établissement années 2005, 2006 et 2007 ;

– le bilan des déclarations des maladies professionnelles de 1995 à 2004 ;

– un tableau récapitulatif des secteurs de l’usine exposés à l’amiante ;

– un plan de l’usine avec impacts sur les ponts roulants ;

– le recensement des ponts roulants ;

– des photographies d’un freinage du câble de levage d’un pont roulant, d’un pont roulant d’aciérie, d’un pont roulant d’aciérie simple, d’un flexible amianté.

– la liste des décès prématurés Arcelormittal à la fonte ;

– un arrêt de la Cour de Cassation n° 12-13610 du 14 février 2013 ;

– des attestations d’anciens salariée : M. [D] (attestation non signée et sans pièce d’identité jointe), M. [M], M. [Z], ancien membre du CHSCT Fonte (attestation sans pièce d’identité jointe).

Il se réfère en outre à des pièces collectives à d’autres instances et salariés relatives aux risques d’exposition aux substances CMR :

– le tableau n° 16 bis des maladies professionnelles ;

– un courrier du 28 août1985 du CHSCT Fonte au médecin inspecteur régional du travail,

– le compte-rendu de la visite de la Cram Sud Est du 17 mai 1978 indiquant que la valeur-seuil de concentration dans l’air de benzo [a] pyrène est largement dépassée dans le haut fourneau n°1/ plancher de coulée S et recommandant une surveillance médicale spéciale du personnel,

– le compte-rendu des mesures et analyses par l’INRS avril 1979 aux postes de travail d’une batterie de fours à coke sidérurgique : cokerie Solmer mentionnant : ‘- Les mesures de concentrations moyennes effectuées à 1’aide des préleveurs individuels portés par le personnel pendant 1/2 poste complet montrent que les valeurs limites re commandées (0,2 mg/m3 en « extractible par le benzène » et 0,15 ug/m3 en benzo a] pyrène) sont atteintes ou dépassées à presque tous les postes de travail de l’installation. – Les postes les plus exposés sont à 1’évidence d’une part ceux situés sur le sommet de la batterie (enfourneurs, luteurs, régleurs, et personnel d’entretien) d’autre part les postes d’entretien des postes latérales des fours. L’efficacité des dispositifs de conditionnement de 1’air des diverses cabines ne semble pas suffisante pour abaisser la concentration intérieure en dessous de la valeur limite quand la concentration extérieure est forte (cas de 1’enfourneuse)’ ;

– un courrier du 31 octobre 1985 de l’inspecteur du travail au directeur de la société Solmer suite à la visite de la zone HF2 constatant des dégagements de fumées contenant du benzène et pointant que ‘les postes débouchage du trou de coulée et abord immédiat des rigoles lors du nettoyage, sont particulièrement exposés’ et demandant la mise en place d’une ‘aspiration efficace des fumées et poussières’ ;

– des fiches toxicologiques INRS du benzène, du sulfure d’hydrogène et de dioxines et furanes, différentes publications de l’association pour la prise en charge des maladies éliminables sur le registre des postes de travail ayant déjà causé des maladies professionnelles reconnues et indemnisées, sur le programme sic 2012, des articles du site de l’IRNS et de presse des tracts syndicaux,

– un nouveau courrier du 12 mai 1987 de l’inspection du travail au directeur de la société Solmer concernant toujours l’exposition au benzo à pyrène ;

– un courrier du 4 décembre 1987 de l’inspection du travail au directeur de la société Solmer sollicitant de ce dernier la fourniture de moyens de protection individuels face au dépassement de la valeur limite de 1,5 microgramme par m³ ;

– des fiches toxicologiques INRS du benzène, du sulfure d’hydrogène, trichloéthylène;

– des photographies des ateliers et notamment des coulées ;

– un courrier du 23 novembre 1999 de l’inspection du travail au directeur de la société Sollac l’informant de la transmission au procureur de la république d’un procès-verbal pour infraction aux articles R237-6, R237-7 et R237-8 du code du travail relevée suite à son enquête relative à l’exposition de salariés de l’entreprise Multiserv à des produits cancérogènes sur les planchers de la coulée des hauts-fourneaux ;

– un courrier du 24 juin 2003 de l’inspection du travail au directeur de la société Sollac constatant suite à sa visite que la phase d’identification des produits cancérigène, mutagènes et toxiques était terminée et la phase de substitution engagée, que la liste des travailleurs exposés et les fiches d’exposition étaient en cours d’élaboration et rappelant la nécessité d’une information et formation des salariés exposés aux produits CMR et le caractère insuffisant des plans de prévention ne faisant pas toujours apparaître de manière évidente le risque d’exposition à des CMR mais également à d’autres risques pouvant générer des pathologies à effet différé ;

– des extraits de rapports annuels du service médical Sollac 1984, 1985, 1986, 1988, 1989, 1991 et 1992 ;

– un courrier du 3 août 2012 de l’inspection du travail au directeur de la société ArcelorMittal rappelant la nécessité d’intervention des opérateurs dans les zones fortement polluées et constatant l’absence ou insuffisance des équipements de protection respiratoire requis (masques ventilés). L’inspecteur relève s’agissant du fonctionnement industriel des batteries de fours de la cokerie que ‘la situation actuelle n’est pas conforme à la réglementation, édictée depuis 2001, concernant la prévention de l’exposition aux agents cancérigène, mutagènes ou reprotoxiques’ ; il pointe le non-respect de la norme concernant l’exposition aux hydrocarbures aromatiques polycycliques générés par l’exploitation de la cokerie : ‘persistance de fuites au niveau des portes de fours, et/ou des portillons en partie haute’, ‘au niveau 18 m’ ‘des émanations importantes au niveau des tampons’.

M. [A] établit par les pièces produites qu’il été exposé à l’amiante et à des agents cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction (CMR) du fait de ses fonctions et conditions de travail au moins de 1977 à 2002 et que ces expositions ont généré pour lui un risque élevé de développer des pathologies graves.

Il ressort ensuite de ce qui précède que la société était à la fois informée de la présence d’amiante dans l’usine et des risques liés à l’inhalation de la poussière d’amiante, à la concentration dans l’air importante de benzo [a] pyrène au moins de 1978 à janvier 1982 à prox

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par arrêt mis à disposition au greffe et contradictoirement ;

CONFIRME le jugement en ses dispositions soumises à la cour sauf en ce qu’il a condamné la société Arcelormittal Méditerranée à payer à M. [O] [N] la somme de 3000 euros en réparation du préjudice moral résultant de la discrimination ;

STATUANT à nouveau du chef infirmé et y ajoutant ;

DEBOUTE M. [O] [N] de sa demande de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral résultant de la discrimination ;

DIT recevable la demande de dommages et intérêts pour exposition à l’amiante et aux agents cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction (CMR) eu égard aux dispositions de l’article L.451-1 du code de la sécurité sociale ;

DECLARE recevable comme non prescrite la demande de dommages-intérêts pour exposition à l’amiante et aux agents cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction (CMR) ;

CONDAMNE la société Arcelormittal Méditerranée aux dépens d’appel ;

CONDAMNE la société Arcelormittal Méditerranée à payer à M. [O] [N] la somme de 1000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en cause d’appel ;

DEBOUTE la société Arcelormittal Méditerranée de sa demande au titre des frais irrépétibles en appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


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