Expulsion et contestation : enjeux de la curatelle et des procédures d’occupation

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Expulsion et contestation : enjeux de la curatelle et des procédures d’occupation

L’Essentiel : Le 28 janvier 2021, le tribunal d’Antony a ordonné l’expulsion de Monsieur [H] [L] et Madame [W] [T] [S] pour non-paiement de redevances à l’association COALLIA. La Cour d’appel de Versailles a confirmé cette décision le 17 mai 2022, augmentant la dette. Après un commandement de quitter les lieux le 22 février 2021, l’expulsion a eu lieu le 10 juillet 2024. Monsieur [L] a contesté cette expulsion en août 2024, arguant de la mauvaise signification des actes et de la perte de biens. Toutefois, le juge a rejeté ses demandes, confirmant la régularité de la procédure.

Exposé du litige

Le 28 janvier 2021, le tribunal de proximité d’Antony a rendu un jugement qui a constaté la résiliation d’une convention d’occupation, ordonné l’expulsion de Monsieur [H] [L] et Madame [W] [T] [S], et condamné ces derniers à payer des redevances impayées à l’association COALLIA. La Cour d’appel de Versailles a confirmé ce jugement le 17 mai 2022, en augmentant le montant de la dette. Un commandement de quitter les lieux a été signifié le 22 février 2021, et l’expulsion a eu lieu le 10 juillet 2024.

Demande de contestation

Monsieur [L] a saisi le juge de l’exécution le 5 août 2024 pour contester le procès-verbal d’expulsion et demander une réintégration dans le logement. L’audience a eu lieu le 6 décembre 2024, où les deux parties ont présenté leurs arguments respectifs.

Arguments de Monsieur [L]

Monsieur [L] a soutenu qu’il était sous curatelle renforcée depuis le 9 août 2022 et que les significations des actes d’expulsion n’avaient pas été correctement effectuées. Il a également mentionné la perte de biens personnels lors de l’expulsion et a demandé des dommages-intérêts pour préjudice moral.

Réponse de l’association COALLIA

L’association COALLIA a contesté les demandes de Monsieur [L], affirmant que toutes les procédures avaient été correctement suivies et que les significations avaient été valablement effectuées. Elle a également souligné que Monsieur [L] avait eu plusieurs occasions de régler sa dette avant l’expulsion.

Décision du juge de l’exécution

Le juge a rejeté les demandes de Monsieur [L] concernant la nullité de la procédure d’expulsion et la réintégration dans les lieux. Il a déclaré irrecevable la demande de délai avant l’expulsion et a rejeté les demandes de dommages-intérêts. Monsieur [L] a été condamné aux dépens et à verser 500 euros à l’association COALLIA au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conséquences juridiques de la résiliation de la convention d’occupation ?

La résiliation de la convention d’occupation entraîne des conséquences juridiques significatives, notamment l’expulsion de l’occupant et l’obligation de payer des indemnités d’occupation.

Selon l’article 1736 du Code civil, « le contrat de location est résilié de plein droit lorsque le locataire ne paie pas le loyer à l’échéance convenue ».

Dans ce cas, le juge des référés a constaté l’acquisition de la clause résolutoire et a ordonné l’expulsion de Monsieur [H] [L] et Madame [W] [T] [S] à compter du 10 mars 2020, date de la résiliation.

Cela signifie que, dès cette date, les occupants étaient tenus de quitter les lieux et de payer les redevances impayées, conformément à l’article 7 de la loi du 6 juillet 1989, qui stipule que « le locataire est tenu de payer le loyer et les charges aux termes convenus ».

Ainsi, la résiliation a eu pour effet immédiat de rendre exigibles les sommes dues et de permettre l’expulsion des occupants.

Quels sont les droits des personnes sous curatelle en matière d’expulsion ?

Les droits des personnes sous curatelle sont protégés par le Code civil, notamment en ce qui concerne la nécessité d’une assistance pour effectuer des actes juridiques.

L’article 467 du Code civil précise que « la personne en curatelle ne peut, sans l’assistance du curateur, faire aucun acte qui, en cas de tutelle, requerrait une autorisation du juge ou du conseil de famille ».

Cela signifie que toute signification d’acte, y compris un commandement de quitter les lieux, doit être faite au curateur.

Dans le cas présent, le commandement de quitter les lieux a été signifié à Monsieur [L] avant son placement sous curatelle, ce qui le rend opposable.

L’article 444 du Code civil stipule également que les jugements portant ouverture de la curatelle ne sont opposables aux tiers que deux mois après mention en marge de l’acte de naissance.

Ainsi, le placement sous curatelle de Monsieur [L] n’est pas opposable aux actes signifiés avant cette date, y compris le commandement d’expulsion.

Quelles sont les conditions de validité du procès-verbal d’expulsion ?

Le procès-verbal d’expulsion doit respecter certaines conditions de validité, conformément aux articles R432-1 et R432-2 du Code des procédures civiles d’exécution.

Ces articles stipulent que « l’huissier de justice dresse un procès-verbal des opérations d’expulsion, remis ou signifié à la personne expulsée, qui contient, à peine de nullité, la description des opérations et l’identité des personnes présentes ».

En l’espèce, le procès-verbal d’expulsion a été remis en main propre à Monsieur [L] lors de l’expulsion, et a ensuite été signifié à ses curateurs.

Monsieur [L] a contesté la validité de cette signification, mais aucun délai n’est prescrit par les textes pour la signification aux curateurs.

De plus, l’absence de grief démontré par Monsieur [L] concernant cette signification a conduit à la conclusion que le procès-verbal était valide.

Quelles sont les possibilités de contestation d’un procès-verbal d’expulsion ?

La contestation d’un procès-verbal d’expulsion peut se faire par voie d’inscription de faux, conformément à l’article 1371 du Code civil, qui stipule que « l’acte authentique fait foi jusqu’à inscription de faux ».

Monsieur [L] a soutenu qu’il n’était pas en état de signer l’inventaire dressé par le commissaire de justice et qu’il manquait certains de ses effets personnels.

Cependant, l’inventaire dressé par le commissaire de justice est présumé exact jusqu’à preuve du contraire, et toute contestation doit être faite dans le cadre d’une procédure distincte.

Ainsi, les moyens développés par Monsieur [L] concernant l’inventaire et la destruction de ses effets personnels n’ont pas été retenus, car ils ne démontrent pas de vice dans le procès-verbal d’expulsion.

Quelles sont les conditions pour obtenir un délai de grâce avant expulsion ?

Les conditions pour obtenir un délai de grâce avant expulsion sont énoncées à l’article L.412-3 du Code des procédures civiles d’exécution.

Cet article stipule que « le juge peut accorder des délais renouvelables aux occupants de locaux d’habitation dont l’expulsion a été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales ».

Dans le cas présent, la demande de délai de grâce de Monsieur [L] a été déclarée irrecevable, car il ne remplissait pas les conditions requises, notamment le fait qu’il n’occupait plus le logement.

Ainsi, la question du remboursement de la dette locative est restée sans objet, car l’expulsion avait déjà eu lieu et Monsieur [L] ne pouvait pas bénéficier d’un délai de grâce.

Quelles sont les conséquences des demandes indemnitaires dans le cadre d’une expulsion ?

Les demandes indemnitaires dans le cadre d’une expulsion doivent démontrer l’existence d’une faute de la part de l’association ou de l’huissier de justice.

Dans cette affaire, les demandes de Monsieur [L] au titre de dommages et intérêts ont été rejetées, car il n’a pas prouvé l’existence d’une faute de l’association COALLIA en lien avec la procédure d’expulsion.

L’article 700 du Code de procédure civile permet de condamner une partie à verser une somme à l’autre au titre des frais irrépétibles, mais cela nécessite également une justification de la demande.

En l’espèce, les demandes indemnitaires de Monsieur [L] ont été rejetées, car il n’a pas démontré de préjudice résultant d’une faute de l’association COALLIA.

DOSSIER N° : N° RG 24/06794 – N° Portalis DB3R-W-B7I-ZXTZ
AFFAIRE : [H] [L] / Association COALLIA (anciennement l’AFTAM)

Minute n°

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NANTERRE

LE JUGE DE L’EXECUTION

JUGEMENT DU 17 JANVIER 2025

COMPOSITION DU TRIBUNAL

PRESIDENT : Amélie DRZAZGA

GREFFIER : Marie-Christine YATIM

DEMANDEUR

Monsieur [H] [L]
domicilié chez son curateur aux biens
Monsieur [B] [M]
[Adresse 6]
[Localité 4]

comparant et assisté par Me Axel MENINGAND, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : NAN464
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro C920502024004738 du 01/08/2024 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de NANTERRE)

DEFENDERESSE

Association COALLIA (anciennement l’AFTAM)
[Adresse 1]
[Localité 3]

représentée par Maître François-Luc SIMON de la SELAS SIMON ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : P0411

Le Tribunal après avoir entendu les parties et/ou leurs avocats en leurs conclusions à l’audience du 06 Décembre 2024 a mis l’affaire en délibéré et indiqué que le jugement serait rendu le 17 Janvier 2025, par mise à disposition au Greffe.

EXPOSE DU LITIGE

Par jugement en date du 28 janvier 2021, le juge des référés du tribunal de proximité d’ANTONY a notamment :
– constaté l’acquisition de la clause résolutoire insérée à la convention d’occupation et la résiliation de plein droit de cette convention depuis le 10 mars 2020 ;
– ordonné l’expulsion de Monsieur [H] [L] et Madame [W] [T] [S], ainsi que tous occupants de leur chef, du logement situé [Adresse 2] ;
– condamné Monsieur [H] [L] et Madame [W] [T] [S] à payer à l’association COALLIA la somme de 6.422,68 euros au titre des redevances et indemnités impayées, terme du mois de novembre 2020 inclus ;
– fixé l’indemnité mensuelle d’occupation due par Monsieur [H] [L] et Madame [W] [T] [S] à l’association COALLIA à compter de la résiliation de la convention d’occupation et jusqu’à libération effective du logement, au montant de la redevance mensuelle qui aurait été due si le bail s’était poursuivi ;
– condamné Monsieur [H] [L] et Madame [W] [T] [S] à payer à l’association COALLIA à compter du mois de décembre 2020 l’indemnité d’occupation mensuelle ainsi fixée ;
– condamné Monsieur [H] [L] et Madame [W] [T] [S] aux dépens de l’instance.

Par arrêt du 17 mai 2022, la Cour d’appel de VERSAILLES a confirmé ce jugement en toutes ses dispositions sauf à émender sur le montant de la dette, condamnant Monsieur [H] [L] et Madame [W] [T] [S] à payer à l’association COALLIA la somme de 7.579,40 euros au titre des redevances impayées à la date du 4 janvier 2022, mois de décembre 2021 inclus, condamnant également Monsieur [H] [L] et Madame [W] [T] [S] à payer à l’association COALLIA la somme de 1.200 euros d’indemnité de procédure, outre les dépens de l’instance.

Par acte de commissaire de justice délivré le 22 février 2021, l’association COALLIA, au visa du jugement de première instance, a fait signifier un commandement de quitter les lieux à Monsieur [H] [L] et Madame [W] [T] [S].

L’expulsion de Monsieur [L] et ses deux filles a eu lieu le 10 juillet 2024.

Par requête en date du 5 août 2024, Monsieur [L] a saisi le juge de l’exécution afin de contester le procès-verbal d’expulsion, de réintégrer les lieux et de se voir accorder un délai pour quitter les lieux, situés [Adresse 2].

L’affaire a été retenue, après un renvoi, à l’audience du 6 décembre 2024, lors de laquelle les parties ont été entendues, chacune étant représentée par son conseil respectif.

A l’audience, Monsieur [L], représenté par son conseil, a soutenu oralement des conclusions dûment visées, aux termes desquelles il demande à voir :
– adjuger à [H] [L] le bénéfice de ses conclusions et l’en dire bien fondé ;
– prononcer l’annulation du procès-verbal d’expulsion du 4 juillet 2024 ;
– en conséquence, ordonner la réintégration de [H] [L] et de tous occupants de son fait dans les lieux sis [Adresse 2] à [Localité 5] ;
– en conséquence, accorder à [H] [L] un délai de sursis à expulsion de 12 mois;
– en conséquence, condamner l’association COALLIA à verser à Monsieur [L] la somme de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral subi ;
– condamner l’association COALLIA à verser à Monsieur [L] la somme de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral causé par la destruction de ses papiers et documents personnels ;
– à titre subsidiaire, appréciant souverainement la situation économique des parties, dire et juger qu’il n’y a pas lieu de condamner Monsieur [L] au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– statuer ce que de droit sur les frais irrépétibles et les dépens.

En réplique, l’association COALLIA, représentée par son conseil, a soutenu oralement des conclusions dûment visées, au terme desquelles elle sollicite que Monsieur [L] soit débouté de l’intégralité de ses demandes, que sa demande d’annulation du procès-verbal soit rejetée ainsi que sa demande de réintégration et sa demande tendant à obtenir des délais de grâce et sa demande de condamnation à des dommages et intérpets. L’association COALLIA sollicite également la condamnation de Monsieur [L] au paiement de la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, il convient de se reporter aux conclusions des parties visées à l’audience.

L’affaire a été mise en délibéré au 17 janvier 2025, par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les demandes tendant à voir « constater » , « adjuger » ou « donner acte »

A titre liminaire, il y a lieu de rappeler qu’en application de l’article 4 du code de procédure civile, les demandes tendant à voir « constater », « adjuger » ou « donner acte » ne sont pas des prétentions, en ce sens qu’elles ne sont pas susceptibles d’emporter des conséquences juridiques, mais des moyens, sur lesquels le juge de l’exécution n’est pas tenu de statuer.

Sur la demande en nullité de la procédure d’expulsion

Monsieur [L] fait principalement valoir qu’il bénéficie d’une mesure de curatelle renforcée depuis le 9 août 2022. Il souligne qu’un commandement de quitter les lieux lui a été signifié le 22 février 2021 mais que par suite de l’arrêt du 17 mai 2022, aucun nouveau commandement de quitter les lieux ne lui a été signifié et que ses curateurs n’ont jamais reçu signification d’aucun commandement de quitter les lieux. Monsieur [L] ajoute que le commissaire de justice avait bien connaissance de l’intervention de plusieurs curateurs, lesquels sont mentionnés par le procès-verbal d’expulsion. Pour autant, l’expulsion leur a été notifiée tardivement, six jours plus tard pour le curateur aux biens et onze jours après les opérations d’expulsion pour la curatrice à la personne. Par ailleurs, Monsieur [L] ajoute qu’il n’était pas en état de formuler des observations quant à l’inventaire réalisé lors de l’expulsion, lequel n’est pas exhaustif. Il manque notamment son appareil de télésurveillance cardiaque ainsi que ses papiers et effets personnels dont il souligne qu’ils auraient été détruit le 3 octobre 2024. Monsieur [L] ajoute qu’il traverse une situation personnelle difficile, rencontrant des difficultés pour se reloger, lesquelles s’ajoutent à ses difficultés de santé. Il précise néanmoins qu’il avait apuré sa dette auprès de COALLIA.

En réplique, l’association COALLIA estime que le jugement de première instance ainsi que l’arrêt d’appel et le commandement de quitter les lieux, tous signifiés avant le placement sous curatelle de Monsieur [L], ont été valablement signifiés. L’association ajoute que le procès-verbal d’expulsion a été signifié aux curateurs et souligne que les textes ne prévoient pas de délai particulier pour effectuer cette signification. S’agissant de l’inventaire dressé lors de l’expulsion par le Commissaire de justice, l’association COALLIA estime que le procès-verbal fait foi jusqu’à inscription de faux. L’association COALLIA ajoute que, dans les faits, Monsieur [L] a déjà bénéficié de plus de trois ans de délais avant son expulsion et estime donc que ce dernier fait preuve de mauvaise volonté soulignant notamment les multiples incidents de paiement de la redevance, ce malgré plusieurs tentatives de règlement amiable. L’association COALLIA souligne qu’au 3 octobre 2024, date à laquelle elle a récupéré les clés, une dette existait toujours à hauteur de 1.843,53 euros, ce malgré un effacement de dette par la commission de surendettement à hauteur de 10.750 euros. Ce montant a finalement été réglé le 24 octobre 2024 et l’association COALLIA indique qu’un éventuel trop-perçu consécutivement à une régularisation tardive par la CAF, fera l’objet d’une restitution. L’association COALLIA souligne sa mission, en qualité d’association à but non lucratif et estime que Monsieur [L] ne rapporte pas la preuve de dilligences sérieuses de recherche de logement. Elle s’oppose à l’octroi de délais de même qu’à l’octroi de dommages et intérêts soulignant avoir eu à diligenter cette procédure d’expulsion en raison des agissements de Monsieur [L] lui-même.

La nullité des actes d’huissier est régie par les dispositions qui gouvernent la nullité des actes de procédure en vertu de l’article 649 du code de procédure civile, qui conduit à distinguer les nullités pour vice de forme (articles112 et suivants du code de procédure civile) et les nullités pour irrégularité de fond (articles 117 et suivants du code de procédure civile).

Les premières doivent être soulevées in limine litis (art. 74 du même code) et n’entraînent la nullité de l’acte qu’en cas de démonstration d’un grief, et ce, même s’il s’agit d’une formalité substantielle ou d’ordre public conformément à l’article 114 du même code, alors que les secondes (à savoir le défaut de capacité d’ester en justice, le défaut de pouvoir d’une partie ou d’une personne figurant au procès comme représentant soit d’une personne morale, soit d’une personne atteinte d’une incapacité d’exercice et le défaut de capacité ou de pouvoir d’une personne assurant la représentation d’une partie en justice) peuvent être proposées en tout état de cause (article 118).

Sur la signification des actes de la procédure d’expulsion aux curateurs de Monsieur [L]

Par application de l’article 467 du code civil, la personne en curatelle ne peut, sans l’assistance du curateur, faire aucun acte qui, en cas de tutelle, requerrait une autorisation du juge ou du conseil de famille. Lors de la conclusion d’un acte écrit, l’assistance du curateur se manifeste par l’apposition de sa signature à côté de celle de la personne protégée. A peine de nullité, toute signification faite à cette dernière l’est également au curateur. En outre, l’article 444 du code civil prévoit que les jugements portant ouverture, modification ou mainlevée de la curatelle ou de la tutelle ne sont opposables aux tiers que deux mois après que la mention en a été portée en marge de l’acte de naissance de la personne protégée selon les modalités prévues par le code de procédure civile. Toutefois, même en l’absence de cette mention, ils sont opposables aux tiers qui en ont personnellement connaissance.

En ce qui concerne le procès-verbal d’expulsion, les articles R432-1 et R432-2 du code des procédures civiles d’exécution prévoit que l’huissier de justice dresse un procès-verbal des opérations d’expulsion, remis ou signifié à la personne expulsée, qui contient, à peine de nullité:
1° La description des opérations auxquelles il a été procédé et l’identité des personnes dont le concours a été nécessaire ;
2° La désignation de la juridiction compétente pour statuer sur les contestations relatives aux opérations d’expulsion.
Le procès-verbal est signé par toutes les personnes mentionnées au 1°. En cas de refus de signer, il en est fait mention.

En l’espèce, le jugement du tribunal de proximité d’ANTONY du 28 janvier 2021, puis l’arrêt de la Cour d’appel de Versailles, du 17 mai 2022, ont été rendus antérieurement au placement sous curatelle de Monsieur [L], lequel est intervenu le 9 août 2022. Le commandement de quitter les lieux a également été signifié à Monsieur [L] avant son placement sous curatelle, le 22 février 2021. L’ensemble de ces documents ont donc valablement été signifiés à Monsieur [L], alors que le jugement de curatelle n’était pas encore rendu.

Ce placement sous curatelle est donc inopposable aux tiers s’agissant de la notification du commandement de quitter les lieux et de la décision d’expulsion, rendue en première instance puis confirmée en appel.

Concernant la signification du procès-verbal d’expulsion, ce document a été remis en main propre à Monsieur [L] lors de l’expulsion, le 4 juillet 2024. Il a ensuite été signifié à chacun des curateurs, aux biens et à la personne, le 10 et le 15 juillet 2024. Monsieur [L] estime que cette signification est tardive mais aucun délai n’est prescrit par les textes. Au demeurant, Monsieur [L] ne démontre pas l’existence d’un grief, en lien avec cette signification qu’il qualifie de trop tardive, dans la mesure où il a pu élever contestation dans les délais légaux, ce d’autant plus qu’il résulte des pièces versées au dossier que le curateur aux biens a été informé de l’expulsion le jour-même puisqu’un contact téléphonique a eu lieu avec ce dernier au cours des opérations d’expulsion.

Le procès-verbal d’expulsion a donc valablement été remis en main propre à Monsieur [L] puis signifié à ses deux curateurs.

Sur l’inventaire dressé dans le procès-verbal d’expulsion

L’article R433-1 du code des procédures civiles d’exécution prévoit que si des biens ont été laissés sur place ou déposés par l’huissier de justice en un lieu approprié, le procès-verbal d’expulsion contient, en outre, à peine de nullité :
1° Inventaire de ces biens, avec l’indication qu’ils paraissent avoir ou non une valeur marchande;
2° Mention du lieu et des conditions d’accès au local où ils ont été déposés ;
3° Sommation à la personne expulsée, en caractères très apparents, d’avoir à les retirer dans le délai de deux mois non renouvelable à compter de la remise ou de la signification de l’acte, faute de quoi les biens qui n’auront pas été retirés seront vendus aux enchères publiques dans le cas où l’inventaire indique qu’ils paraissent avoir une valeur marchande ; dans le cas contraire, les biens seront réputés abandonnés, à l’exception des papiers et documents de nature personnelle qui seront placés sous enveloppe scellée et conservés pendant deux ans par l’huissier de justice ;
4° Mention de la possibilité, pour la personne expulsée, de contester l’absence de valeur marchande des biens, à peine d’irrecevabilité dans le délai d’un mois à compter de la remise ou de la signification de l’acte ;
5° L’indication du juge de l’exécution territorialement compétent pour connaître de la contestation;
6° La reproduction des dispositions des articles R. 121-6 à R. 121-10, R. 442-2 et R. 442-3.

Par application de l’article 1371 du code civil, l’acte authentique fait foi jusqu’à inscription de faux de ce que l’officier public dit avoir personnellement accompli ou constaté.

En l’espèce, Monsieur [L] estime qu’il n’était pas en état de signer l’inventaire dressé par le commissaire de justice et indique qu’il manque certains de ses effets personnels. Pour autant, la mention par le commissaire de justice de ses diligences et constatations vaut jusqu’à inscription de faux en sorte que l’inventaire qu’il a dressé au cours des opérations d’expulsion ne peut être remis en question qu’à l’occasion d’une procédure distincte en inscription de faux, de même que l’absence de papiers et effets personnels constatée par le commissaire de justice dans le procès-verbal d’expulsion.

Le commissaire de justice ayant constaté l’absence de papiers et effets personnels, il n’était tenu de conserver aucun document pendant le délai de deux ans prévu à l’article R433-6 du code des procédures civiles d’exécution.

En conséquence, les moyens développés par Monsieur [L] s’agissant de la signification des actes de la procédure d’expulsion ainsi que concernant le respect des dispositions du code des procédures civiles d’exécution relativement à ses biens notamment étant rejetés, il sera débouté de sa demande de nullité de la procédure d’expulsion, du commandement de quitter les lieux et du procès-verbal d’expulsion.

Sur la demande de réintégration des lieux et de délais à la mesure d’expulsion

En application de l’article L.412-3 du code des procédures civiles d’exécution, dans sa version issue de la loi n°2023-668 du 27 juillet 2023 applicable en l’espèce, le juge peut accorder des délais renouvelables aux occupants de locaux d’habitation ou à usage professionnel dont l’expulsion a été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales et à condition que lesdits occupants ne soient pas entrés dans les locaux à l’aide de manœuvres, de menaces, de voies de fait ou de contrainte.

En l’espèce, la demande d’annulation du procès-verbal d’expulsion ayant été rejetée, il ne pourra être fait droit à la demande de réintégration des lieux de Monsieur [L].

Ainsi, Monsieur [L] n’occupe plus le logement et il ne remplit donc pas les conditions prévues à l’article L.412-3 du code des procédures civiles d’exécution tendant à l’octroi de délai et la question du remboursement ou non de la dette locative demeure indifférente.

La demande de délais à expulsion de Monsieur [L] sera donc déclarée irrecevable.

Sur les demandes indemnitaires

Les demandes tendant à l’annulation du procès-verbal d’expulsion ayant été rejetées, Monsieur [L] ne démontre pas l’existence d’une faute de l’association COALLIA en lien avec la procédure d’expulsion et la destruction de ses effets personnels en sorte que ses demandes au titre de dommages et intérêts seront rejetées.

Sur les demandes accessoires

Par application de l’article 696 du code de procédure civile, il convient de condamner Monsieur [L] aux dépens de la présente instance.

Eu égard à la nature du litige, il y a lieu de fixer à la somme de 500 euros le montant de l’indemnité que Monsieur [L] devra verser à l’association COALLIA sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Il est rappelé que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire en vertu de l’article R.121-21 du code des procédures civiles d’exécution.

PAR CES MOTIFS

La juge de l’exécution, statuant par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort ;

REJETTE la demande de Monsieur [H] [L] de nullité de la procédure d’expulsion, du commandement de quitter les lieux et du procès-verbal d’expulsion ;

REJETTE la demande de réintégration des lieux formée par Monsieur [H] [L];

DECLARE irrecevable la demande de délai avant d’être expulsée formée par Monsieur [H] [L] ;

REJETTE les demandes indemnitaires formées par Monsieur [H] [L] ;

REJETTE le surplus des demandes de Monsieur [H] [L] ;

CONDAMNE Monsieur [H] [L] aux dépens ;

CONDAMNE Monsieur [H] [L] à payer à l’association COALLIA la somme de 500 euros, au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

RAPPELLE que les décisions du juge de l’exécution sont exécutoires de plein droit.

Ainsi jugé et prononcé le 17 janvier 2025, à NANTERRE

LE GREFFIER LA JUGE DE L’EXÉCUTION

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