L’Essentiel : Le 8 novembre 2012, la RIVP a signé un bail avec la FIDL pour des locaux destinés à l’accompagnement des lycéens. En mai 2021, la RIVP a signifié un commandement de payer pour des loyers impayés, entraînant une assignation en justice en décembre. La RIVP a demandé la résiliation du bail et l’expulsion de la FIDL, qui a reconnu une dette partielle. Le tribunal a constaté l’acquisition de la clause résolutoire, condamnant la FIDL à payer 22 849,26 euros, avec un plan de remboursement sur 24 mois, sous peine d’expulsion.
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Constitution du bailLe 8 novembre 2012, la société LA REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE [Localité 4] (RIVP) a signé un bail civil avec l’association FEDERATION INDEPENDANTE ET DEMOCRATIQUE LYCEENNE (FIDL) pour des locaux destinés à l’accompagnement des lycéens. Le bail, d’une durée d’un an renouvelable tacitement, stipule un loyer annuel de 8 600 euros, payable trimestriellement. Commandement de payerLe 4 mai 2021, la RIVP a signifié à la FIDL un commandement de payer pour un montant de 29 427,74 euros, correspondant aux loyers et charges impayés jusqu’au 30 avril 2021. Ce commandement visait à activer la clause résolutoire du bail. Assignation en justiceLe 17 décembre 2021, la RIVP a assigné la FIDL devant le tribunal judiciaire de Paris pour faire constater l’acquisition de la clause résolutoire, demander l’expulsion de la locataire, et obtenir le paiement d’une indemnité d’occupation ainsi qu’un arriéré locatif de 19 178,37 euros. Demandes de la RIVPDans ses conclusions du 5 avril 2023, la RIVP a demandé au tribunal de constater la résiliation du bail à compter du 4 juin 2021, de prononcer l’expulsion de la FIDL, et de condamner cette dernière à verser 22 849,26 euros, avec intérêts et indemnité d’occupation. Réponse de la FIDLLa FIDL, dans ses conclusions du 14 février 2023, a demandé le rejet des demandes de la RIVP, tout en reconnaissant une dette de 8 710,14 euros pour les loyers de 2019, et a sollicité des délais de paiement. Clôture de l’instructionL’instruction a été clôturée par ordonnance le 28 septembre 2023, et l’affaire a été plaidée le 4 novembre 2024, avec une mise en délibéré prévue pour le 20 janvier 2025. Acquisition de la clause résolutoireLa RIVP a soutenu que la clause résolutoire était acquise depuis le 4 juin 2021, car la FIDL n’avait pas régularisé sa dette dans le délai d’un mois après le commandement de payer. La FIDL a contesté cette acquisition, affirmant avoir effectué des paiements partiels. Arriéré locatif et exception d’inexécutionLa RIVP a affirmé que la dette locative s’élevait à 22 849,26 euros, tandis que la FIDL a soutenu avoir réduit sa dette à 8 710,14 euros. La FIDL a également tenté d’invoquer une exception d’inexécution, arguant d’un accès restreint aux locaux. Quantum de la detteLe tribunal a constaté que la FIDL n’avait pas prouvé avoir réglé l’intégralité de sa dette. La RIVP a présenté un décompte à jour, confirmant le montant de 22 849,26 euros dû par la FIDL. Demande de délais de paiementLa FIDL a demandé un échelonnement de sa dette sur cinq ans, mais le tribunal a limité cette possibilité à deux ans, en accordant des délais de paiement sous certaines conditions. Décision du tribunalLe tribunal a constaté l’acquisition de la clause résolutoire, condamné la FIDL à payer 22 849,26 euros, et autorisé un plan de remboursement sur 24 mois. En cas de non-paiement, la clause résolutoire reprendrait effet, entraînant l’expulsion de la FIDL. La FIDL a également été condamnée aux dépens et à verser 1 500 euros à la RIVP. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la nature et les effets de la clause résolutoire dans le contrat de bail ?La clause résolutoire est une disposition contractuelle qui permet à une partie de mettre fin au contrat de manière automatique en cas de non-respect des obligations par l’autre partie. Selon l’article 1184 du Code civil, dans sa version antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques. Cela signifie que si l’une des parties ne respecte pas ses engagements, l’autre peut demander la résolution du contrat, mais cela doit être fait en justice. Dans le cas présent, la clause résolutoire stipule que le bail peut être résilié de plein droit par le bailleur si le locataire ne paie pas son loyer dans le délai imparti, après un commandement de payer resté sans effet. La RIVP a donc pu constater l’acquisition de la clause résolutoire en raison du non-paiement des loyers par la FIDL, ce qui a conduit à la résiliation du bail à compter du 4 juin 2021. Quelles sont les obligations du bailleur et du preneur en vertu du Code civil ?Les obligations du bailleur et du preneur sont définies par les articles 1719 et 1728 du Code civil. L’article 1719 stipule que le bailleur est tenu de délivrer la chose louée, de l’entretenir et d’en assurer la jouissance paisible. Il est précisé que le bailleur doit : 1. Délivrer au preneur la chose louée et, s’il s’agit de son habitation principale, un logement décent. De son côté, l’article 1728 impose au preneur deux obligations principales : 1. User de la chose louée raisonnablement et selon sa destination. Ces obligations sont interdépendantes, ce qui signifie qu’une inexécution par l’une des parties peut justifier une inexécution par l’autre. Comment la FIDL peut-elle invoquer une exception d’inexécution ?L’exception d’inexécution permet à une partie de ne pas exécuter son obligation si l’autre partie n’exécute pas la sienne. Selon l’article 1719 du Code civil, le preneur peut invoquer cette exception s’il démontre qu’il est dans l’impossibilité totale d’exploiter les locaux loués. Cependant, il incombe à celui qui invoque cette exception de prouver l’inexécution de l’obligation de l’autre partie, conformément à l’ancien article 1315 du Code civil. Dans le cas présent, la FIDL a allégué une impossibilité d’accès aux locaux en raison d’un changement de serrures, mais n’a pas fourni de preuves suffisantes pour établir que cette impossibilité était due à un manquement de la RIVP. Ainsi, la FIDL n’a pas pu justifier son exception d’inexécution pour échapper au paiement de ses loyers. Quelles sont les conséquences du non-paiement des loyers par la FIDL ?Le non-paiement des loyers a conduit à l’acquisition de la clause résolutoire, entraînant la résiliation du bail. Conformément à l’article 1343-2 du Code civil, les intérêts échus dus au moins pour une année entière seront capitalisés. La RIVP a également le droit de demander une indemnité d’occupation, qui correspond au montant du loyer contractuel, majoré des taxes et charges, jusqu’à la libération des locaux. En cas de non-paiement d’une seule mensualité, la totalité de la somme restant due deviendra immédiatement exigible, et la clause résolutoire reprendra son plein effet, permettant à la RIVP de procéder à l’expulsion de la FIDL. Ainsi, la FIDL est condamnée à payer la somme de 22 849,26 euros au titre de son arriéré locatif, avec intérêts au taux légal à compter de la décision. Quelles sont les dispositions relatives à l’échelonnement des paiements ?L’article 1343-5 du Code civil permet au juge de reporter ou d’échelonner le paiement des sommes dues, mais dans la limite de deux années. Dans cette affaire, la FIDL a demandé un échéancier de cinq ans, ce qui n’est pas conforme à la limitation prévue par la loi. Cependant, la RIVP a indiqué qu’elle ne s’opposait pas à un échelonnement sur 24 mois, à condition d’inclure une clause de déchéance du terme. Le tribunal a donc décidé d’accorder à la FIDL la possibilité de s’acquitter de sa dette en vingt-quatre mensualités égales, tout en précisant que la clause résolutoire serait suspendue pendant cette période. En cas de non-paiement d’une mensualité, la clause résolutoire reprendrait son effet, permettant à la RIVP de procéder à l’expulsion de la FIDL. |
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le:
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18° chambre
1ère section
N° RG 21/15935
N° Portalis 352J-W-B7F-CVW5J
N° MINUTE : 3
contradictoire
Assignation du :
17 Décembre 2021
JUGEMENT
rendu le 20 Janvier 2025
DEMANDERESSE
REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE [Localité 4]
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Maître Catherine HENNEQUIN de la SELAS LHUMEAU GIORGETTI HENNEQUIN & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #P0483
DÉFENDERESSE
Association FEDERATION INDEPENDANTE ET DEMOCRATIQUE LYCEENNE
[Adresse 3]
[Localité 5]
représentée par Maître Ivan TEREL de l’AARPI Grinal Klugman Aumont & Associés, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #R0026
Décision du 20 Janvier 2025
18° chambre 1ère section
N° RG 21/15935 – N° Portalis 352J-W-B7F-CVW5J
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Par application des articles R.212-9 du Code de l’Organisation Judiciaire et 812 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été attribuée au Juge unique.
Avis en a été donné aux avocats constitués qui ne s’y sont pas opposés.
Madame Diana SANTOS CHAVES, Juge, statuant en juge unique,
assistée de Monsieur Christian GUINAND, Greffier principal,
DÉBATS
A l’audience du 04 Novembre 2024, tenue en audience publique, avis a été donné aux avocats des parties que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 20 janvier 2025.
JUGEMENT
Rendu par mise à disposition au greffe
Contradictoire
en premier ressort
Par acte sous seing privé du 8 novembre 2012, la société LA REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE [Localité 4] (ci-après la « RIVP ») a consenti un bail civil à l’association FEDERATION INDEPENDANTE ET DEMOCRATIQUE LYCEENNE, ci-après la FIDL, portant sur des locaux à destination de « l’accompagnement des lycéens pour la prise de conscience de leurs droits et de leurs devoirs », dépendant d’un ensemble immobilier situé [Adresse 3], à [Localité 5], à compter du 14 novembre 2012, pour une durée d’un an tacitement reconductible d’année en année faute de congé, moyennant un loyer de 8 600 euros par an, hors taxes et hors charges, payable trimestriellement à terme d’avance.
Par acte extrajudiciaire du 4 mai 2021, la RIVP a fait signifier à la FIDL un commandement de payer visant la clause résolutoire portant sur une somme de 29 427,74 euros due au titre des loyers et charges impayés arrêtés au 30 avril 2021, outre le coût de l’acte de 237,45 euros.
Par acte du 17 décembre 2021, la RIVP a fait assigner la FIDL devant le tribunal judiciaire de Paris, aux fins notamment de voir constater l’acquisition de la clause résolutoire, ordonner l’expulsion de la locataire et prononcer sa condamnation au paiement d’une indemnité d’occupation et d’une somme de 19 178,37 euros au titre de son arriéré locatif.
Aux termes de ses dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 5 avril 2023, la RIVP demande au tribunal, au visa des articles 1343-2, 1728, 1729 et 1741 du code civil et des articles 696 et 700 du code de procédure civile, de :
« A titre principal :
CONSTATER l’acquisition de la clause résolutoire et en conséquence la résiliation de plein droit du bail liant la RIVP à l’association FIDL, à compter du 4 juin 2021,
A titre subsidiaire :
PRONONCER la résiliation judiciaire du bail civil du 8 novembre 2012,
En tout état de cause :
DEBOUTER l’association FIDL de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions,
CONDAMNER l’association FIDL à verser à la RIVP la somme de 22.849,26 €, en principal, à parfaire, et à valoir sur le décompte définitif qui sera établi au jour de la libération effective des lieux,
ASSORTIR lesdites condamnations des intérêts au taux légal et ce à compter du commandement de payer du 4 juin 2021 pour la somme de 22.849,26 €,
ORDONNER la capitalisation desdits intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 (anc. 1154) du Code civil,
ORDONNER l’expulsion de l’association FIDL ainsi que celle de tous occupants de son chef des lieux litigieux, avec l’assistance d’un serrurier, et d’un représentant des forces de l’ordre si besoin est, sous astreinte de 200 € par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir,
ORDONNER la séquestration des objets mobiliers pouvant se trouver dans les lieux dans tel garde-meubles du choix de la RIVP aux frais, risques et périls de l’association FIDL,
CONDAMNER l’association FIDL à verser à la RIVP une indemnité d’occupation égale aux loyers, charges et taxes qui auraient été dus si le bail s’était poursuivi, à compter de la date de résiliation et ce jusqu’à la libération complète des lieux litigieux, par remise des clefs,
RAPPELER l’exécution provisoire de droit du jugement à intervenir, sur les seuls chefs de demandes de la RIVP,
CONDAMNER l’association FIDL à verser à la RIVP la somme de 1.500 € en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,
CONDAMNER l’association FIDL entiers dépens, dont distraction au profit de la SELAS LGH & ASSOCIES, en la personne de Maître Catherine HENNEQUIN, avocat aux offres de droit, en applications des dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile. »
Aux termes de ses conclusions en réponse, notifiées par voie électronique le 14 février 2023, la FIDL demande au tribunal judiciaire, au visa des articles 1343-2, 1719, 1728, 1729, 1732 et 1741 et suivants du code civil et de l’article 700 du code de procédure civile, de :
« À titre principal,
– DÉBOUTER la RÉGIE IMMOBILIÈRE DE LA VILLE DE [Localité 4] (RIVP) de l’intégralité de ses demandes ;
À titre subsidiaire,
– CONDAMNER la FIDL à verser à la RÉGIE IMMOBILIÈRE DE LA VILLE DE [Localité 4] (RIVP) la somme de 8 710,14 € correspondant aux trois trimestres de loyer au titre de l’année 2019, répartis sur cinq années pour un montant de 1742,30 € par an ;
– ÉCARTER l’exécution provisoire de la décision à intervenir ;
En tout état de cause,
– CONDAMNER la RÉGIE IMMOBILIÈRE DE LA VILLE DE [Localité 4] (RIVP) au paiement de la somme de 1.500 euros à l’association FÉDÉRATION INDÉPENDANTE ET DÉMOCRATIQUE LYCÉENNE (FIDL) au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens. »
La clôture de l’instruction a été prononcée par ordonnance du 28 septembre 2023.
L’affaire a été plaidée à l’audience du 4 novembre 2024 et mise en délibéré au 20 janvier 2025 par mise à disposition au greffe.
Sur l’acquisition de la clause résolutoire
La RIVP sollicite l’acquisition de la clause résolutoire et l’expulsion de la FIDL. Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir que les causes du commandement de payer visant la clause résolutoire signifié le 4 mai 2021 n’ont pas été régularisées dans le délai d’un mois qui y était spécifié, de sorte que la clause résolutoire est acquise depuis le 4 juin 2021.
La FIDL indique qu’elle a effectué des versements le 28 juillet 2021, le 28 février 2022 et le 3 mars 2022, réduisant le solde de sa dette à la somme de 8 710,14 euros, qu’elle a donc fait preuve de bonne foi dans l’exécution de son contrat et qu’elle a versé les loyers impayés des années 2019 à 2021 dès qu’elle en a été en capacité, qu’en conséquence il y a lieu de rejeter la demande d’expulsion formée à son encontre.
Aux termes de l’article 1134 du code civil, dans sa version antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 applicable au présent litige, devenu 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.
Selon l’article 1184 du code civil, dans sa version antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 applicable au présent litige, la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l’une des deux parties ne satisfera point à son engagement. Dans ce cas, le contrat n’est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l’engagement n’a point été exécuté, a le choix ou de forcer l’autre à l’exécution de la convention lorsqu’elle est possible, ou d’en demander la résolution avec dommages et intérêts. La résolution doit être demandée en justice, et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances.
En l’espèce, le bail unissant les parties stipule que la locataire est redevable d’un loyer annuel d’un montant de 8 600 euros par an, hors taxes et hors charges, payable trimestriellement à terme d’avance, et que la preneuse verse chaque mois une provision pour charges initialement fixée à 230 euros.
Le bail contient, en son article 11, la clause résolutoire suivante : « A défaut de paiement à une échéance exacte de tout ou partie d’un seul terme de loyer, ou des charges et remboursements divers qui sont payables en même temps que celui-ci, ou de toutes sommes qui constituent l’accessoire, ou à défaut de l’exécution de l’une quelconque des conditions du présent bail, toutes les conditions étant de même rigueur, et un mois après un commandement demeuré sans effet ou huit jours après une sommation d’exécuter restée sans effet, et contenant déclaration par le bailleur de son intention d’user du bénéfice de la présente clause, le présent bail pourra être résilié de plein droit par le bailleur si bon lui semble par acte extrajudiciaire sans qu’il soit nécessaire de faire une demande en justice, sans préjudice de toutes dépenses, dommages et intérêts que le bailleur pourrait réclamer au preneur.
L’expulsion pourra avoir lieu en vertu d’une simple ordonnance de référé, sans que des offres ultérieures puissent arrêter l’effet de cette clause.
Si au mépris de cette clause, le preneur refusait de quitter immédiatement les lieux, une indemnité d’occupation mensuelle et indivisible égale à la valeur d’un quart d’une annuité du loyer alors en vigueur sera due au bailleur.
Cette disposition constitue une condition essentielle et déterminante du présent bail, sans laquelle il n’aurait pas été consenti.
Tous frais de procédure, de poursuites ou de mesures conservatoires ainsi que tous frais de levée d’états et de notifications, resteront à la charge du preneur, et seront considérés comme suppléments et accessoires du loyer.
La résiliation ne donne lieu en faveur du preneur à aucune répétition ni recours contre le bailleur pour raison de dépenses, embellissements ou toutes autres clauses quelconques. »
Par acte extrajudiciaire du 4 mai 2021, la RIVP, a fait signifier à la FIDL un commandement de payer visant la clause résolutoire portant sur une somme de 29 427,74 euros au titre des loyers et provisions sur charges impayés arrêtés au 30 avril 2021.
Il sera relevé que ce commandement mentionne expressément la clause résolutoire et la reproduit.
Alors que la preuve des paiements lui incombe en application de l’article 1315 devenu 1353 du code civil, la FIDL n’établit pas avoir procédé à un paiement soldant l’ensemble des sommes visées aux termes du commandement de payer dans le délai contractuellement prévu d’un mois suivant sa délivrance. Au contraire, la locataire n’allègue avoir commencé à apurer son arriéré qu’à compter du 28 juillet 2021, soit près de trois mois après la signification du commandement de payer par la RIVP.
En outre, la FIDL ne conteste le montant de sa dette en raison d’un manquement de la bailleresse que pour la fraction correspondant aux trois premiers trimestres de l’année 2019, soit la somme de 8 710,14 euros.
Dès lors, le non-apurement des causes du commandement du 4 mai 2021 dans le délai contractuellement prévu d’un mois étant démontré par la bailleresse, il convient de constater que la clause résolutoire du bail est acquise et que le contrat de bail est résilié depuis le 4 juin 2021 à vingt-quatre heures.
Sur l’arriéré locatif et la demande de délais de la FIDL
La RIVP expose que la dette locative de la FIDL s’élève à la somme de 22 849,26 euros, premier trimestre 2023 inclus, selon décompte arrêté au 2 mars 2023, et conteste toute exception d’inexécution au bénéfice de la preneuse.
La FIDL soutient pour sa part qu’elle a procédé à six versements le 28 juillet 2021, le 28 février 2022 et le 3 mars 2022, réduisant le solde de sa dette à la somme de 8 710,14 euros, et que ce solde n’est pas dû en vertu de l’exercice d’une exception d’inexécution. Au soutien de cette exception, elle indique que la RIVP a permis la remise des clés et le changement des serrures des locaux loués à MM. [P] [B] et [S] [O] à l’issue de manœuvres de ces derniers, l’empêchant d’accéder aux locaux loués.
Sur l’exception d’inexécution
Selon l’article 1719 du code civil, le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu’il soit besoin d’aucune stipulation particulière : 1° de délivrer au preneur la chose louée et, s’il s’agit de son habitation principale, un logement décent. Lorsque des locaux loués à usage d’habitation sont impropres à cet usage, le bailleur ne peut se prévaloir de la nullité du bail ou de sa résiliation pour demander l’expulsion de l’occupant ; 2° d’entretenir cette chose en état de servir à l’usage pour lequel elle a été louée ; 3° d’en faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail ; 4° d’assurer également la permanence et la qualité des plantations.
D’après l’article 1728 du code civil, le preneur est tenu de deux obligations principales: 1° d’user de la chose louée raisonnablement, et suivant la destination qui lui a été donnée par le bail, ou suivant celle présumée d’après les circonstances, à défaut de convention; 2° de payer le prix du bail aux termes convenus.
Il est de principe que l’interdépendance des obligations réciproques résultant d’un contrat synallagmatique comme le bail permet à l’une des parties de ne pas exécuter son obligation lorsque l’autre n’exécute pas la sienne, si cette inexécution est suffisamment grave.
En application de ces textes et principes, il est établi que le preneur n’est fondé à invoquer une exception d’inexécution pour échapper au paiement de ses loyers que s’il démontre l’impossibilité totale dans laquelle il est placé d’exploiter les locaux par lui pris à bail.
Il est par ailleurs rappelé que, conformément à l’ancien article 1315 du code civil, il appartient à celui qui invoque l’exception d’inexécution en alléguant que son contractant n’a pas rempli ses obligations d’établir cette inexécution.
En l’espèce, la locataire allègue une impossibilité d’accéder aux locaux du fait d’un changement des serrures de ces derniers, de sorte que le moyen de la FIDL est fondé sur une impossibilité totale d’exploiter et est dès lors susceptible de justifier la mise en œuvre d’une exception d’inexécution.
Cependant, pour démontrer le changement des serrures, la FIDL se limite à produire une plainte du 7 juin 2019, déposée par elle devant le tribunal de grande instance de Paris des chefs d’abus de confiance et d’accès, maintien et modification d’un système de traitement automatisée de donnée, laquelle ne fait pas mention d’un changement de serrures au sein des locaux pris à bail.
Au surplus, dans l’hypothèse d’un changement des serrures, il n’apparaît nullement établi que la bailleresse en ait été l’auteur. Il est à cet égard relevé que le tribunal de grande instance de Paris, par jugement du 10 décembre 2019 produit par la FIDL, a condamné M. [B] à verser à la FIDL à titre provisionnel 3 000 euros de dommages et intérêts notamment justifiés par une privation de l’usage normal de ses locaux. En outre, aux termes du compte-rendu d’infraction initial du 1er juin 2019 également versé aux débats par la FIDL, M. [D] [G] a déclaré au nom de la FIDL : « Après avoir effectué une petite enquête de voisinnage, une voisinne de l’appartement du dessus m’a expliqué avoir vu en ancien adhérent de l’association, Mr [B] [P] ainsi qu’un serrurier le 28/05/2019 en fin d’après-midi. »
Dès lors, l’impossibilité d’exploitation invoquée par la FIDL n’étant pas suffisamment démontrée et ne découlant pas, en tout état de cause, d’un manquement de la RIVP à ses obligations mais d’agissements de tiers n’étant pas parties au présent litige, la FIDL n’est pas fondée à invoquer une exception d’inexécution à l’encontre de la bailleresse pour échapper au paiement de ses loyers et charges.
Sur le quantum de la dette
Il résulte de l’article 1315 devenu 1353 du code civil qu’il incombe au preneur d’établir qu’il s’est libéré du paiement du loyer et des accessoires contractuellement dus entre les mains de son bailleur.
Aux termes de l’article 1153 du code civil dans sa version antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 applicable au présent litige, les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d’une obligation de somme d’argent consistent dans l’intérêt au taux légal.
En l’espèce, la RIVP produit un décompte actualisé au 2 mars 2023 aux termes duquel elle apparaît rester créancière de la FIDL pour une somme totale de 22 849,26 euros.
La FIDL, sur qui pèse la charge de la preuve du paiement des loyers et accessoires, se borne à produire un tableau faisant état de six versements datés du 28 juillet 2021, du 28 février 2022 et du 3 mars 2022, dont il y a lieu de relever qu’ils sont intégralement pris en compte à la troisième page du relevé de la RIVP.
La FIDL sera donc condamnée à payer à la RIVP la somme de 22 849,26 euros correspondant aux loyers et charges échus et demeurés impayés jusqu’au 2 mars 2023, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision.
Les intérêts échus dus au moins pour une année entière seront capitalisés dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil.
Sur les délais de paiement
La FIDL sollicite l’échelonnement du règlement de sa dette locative par la mise en place d’un échéancier de cinq ans.
La RIVP est opposée à de tels délais, mais indique qu’elle ne serait pas opposée à l’octroi de délais au profit de l’association FIDL dans la limite de 24 mensualités, à condition qu’une clause de déchéance du terme soit intégrée au dispositif, prévoyant qu’en l’absence de paiement d’une seule mensualité en sus du loyer courant le bail serait résilié et l’expulsion de l’association FIDL pourrait être poursuive.
Aux termes de l’article 1343-5 du code civil, pris en son premier alinéa, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.
En l’espèce, il ne saurait être fait droit à la demande d’échelonnement de l’arriéré de la FIDL par la mise en place d’un échéancier de cinq ans, l’article 1343-5 du code civil limitant la faculté d’échelonnement des sommes dues à deux ans.
La FIDL ne produit en outre aucune pièce au soutien de sa demande de délais de grâce.
Toutefois, la RIVP ne s’opposant pas à l’octroi de délais sur 24 mois, il y a lieu d’accueillir la demande de délais de paiement formulée par la FIDL dans la limite de deux années, et d’autoriser la FIDL à s’acquitter de sa dette en vingt-quatre mensualités égales et successives, outre les loyers en cours.
Dans l’attente du règlement total de la dette, la clause résolutoire sera suspendue et, à l’issue de l’exécution du plan de remboursement des arriérés, elle sera réputée n’avoir jamais été acquise et l’exécution du bail se poursuivra conformément aux stipulations contractuelles.
Toutefois, en cas de non-paiement d’un seul terme, passé le délai de 15 jours à compter de l’envoi d’une lettre recommandée avec accusé de réception valant mise en demeure demeurée infructueuse, l’intégralité de la somme restant due deviendra exigible, la clause résolutoire reprendra de plein droit son effet, le bail sera résilié, la RIVP pourra, sans saisir à nouveau le juge, faire procéder à l’expulsion de la FIDL en vertu du présent jugement. Il n’y a pas lieu d’ordonner d’astreinte à ce stade.
En ce cas, celui qui se maintient sans droit dans des lieux après l’expiration de son titre d’occupation commettant une faute quasi-délictuelle ouvrant droit à une indemnité correspondant à la valeur équitable des lieux et assurant, en outre, la réparation du préjudice résultant d’une occupation sans bail, la FIDL devra payer à la RIVP une indemnité d’occupation, jusqu’à la libération des locaux par la remise des clés, d’un montant égal au montant du loyer contractuel, majoré des taxes et charges.
Sur les autres demandes
La FIDL, succombante, sera condamnée aux dépens, lesquels comprendront le coût du commandement de payer en date du 4 mai 2021, en application de l’article 696 du code de procédure civile, avec distraction au profit de Me Hennequin.
Elle sera en outre condamnée au paiement de la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et déboutée de sa demande formée de ce chef.
La présente décision étant de droit exécutoire à titre provisoire en vertu de l’article 514 du code de procédure civile dans sa rédaction issue du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019, et la FIDL ne démontrant pas que l’exécution provisoire est incompatible avec la nature de l’affaire, sa demande tendant à écarter l’exécution provisoire sera rejetée.
Le tribunal, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort,
Constate l’acquisition de la clause résolutoire insérée au bail portant sur les locaux situés [Adresse 3], à [Localité 5], à la date du 4 juin 2021 à vingt-quatre heures, par l’effet du commandement du 4 mai 2021 délivré par la société LA REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE [Localité 4] à l’association FEDERATION INDEPENDANTE ET DEMOCRATIQUE LYCEENNE,
Condamne l’association FEDERATION INDEPENDANTE ET DEMOCRATIQUE LYCEENNE à payer à la société LA REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE [Localité 4] la somme de 22 849,26 euros au titre de son arriéré locatif arrêté au 2 mars 2023 inclus, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision, et dit que les intérêts échus dus au moins pour une année entière seront capitalisés dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil,
Ordonne la suspension des effets de la clause résolutoire, et autorise l’association FEDERATION INDEPENDANTE ET DEMOCRATIQUE LYCEENNE à se libérer de cette somme en vingt-quatre mensualités égales et successives payables le 15 de chaque mois – en sus des loyers et charges courants – et, pour la première fois, le 15 du mois suivant le mois au cours duquel le présent jugement est prononcé,
Dit qu’à défaut de règlement à échéance d’une seule et unique mensualité ou des loyers et provisions pour charges courants et passé le délai de quinze jours suivant l’envoi d’une lettre recommandée avec accusé de réception valant mise en demeure restée infructueuse :
– la totalité de la somme restant due deviendra immédiatement exigible et recouvrable par la société LA REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE [Localité 4],
– la clause résolutoire reprendra de plein droit son plein effet et le bail sera résilié,
– l’association FEDERATION INDEPENDANTE ET DEMOCRATIQUE LYCEENNE devra libérer les locaux loués sis [Adresse 3], à [Localité 5], de sa personne, de ses biens et de tous occupants de son chef,
– faute pour l’association FEDERATION INDEPENDANTE ET DEMOCRATIQUE LYCEENNE de libérer spontanément les locaux susvisés, la société LA REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE [Localité 4] sera immédiatement autorisée à procéder à son expulsion et à celle de tous occupants de son chef, au besoin avec l’assistance de la force publique et d’un serrurier,
– l’association FEDERATION INDEPENDANTE ET DEMOCRATIQUE LYCEENNE sera redevable à la société LA REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE [Localité 4] d’une indemnité d’occupation, jusqu’à la libération des locaux par la remise des clés, d’un montant égal au montant du loyer contractuel, majoré des taxes et charges,
Rappelle qu’en ce cas le sort des meubles trouvés dans les lieux est régi par l’article L. 433-1 du code des procédures civiles d’exécution,
Condamne l’association FEDERATION INDEPENDANTE ET DEMOCRATIQUE LYCEENNE à payer à la société LA REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE [Localité 4] la somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
Déboute l’association FEDERATION INDEPENDANTE ET DEMOCRATIQUE LYCEENNE de sa demande en application de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne l’association FEDERATION INDEPENDANTE ET DEMOCRATIQUE LYCEENNE aux dépens, comprenant le coût du commandement de payer du 4 mai 2021, avec distraction au profit de la SELAS LGH & Associés en la personne de Me Catherine Hennequin,
Rejette la demande de l’association FEDERATION INDEPENDANTE ET DEMOCRATIQUE LYCEENNE tendant à voir écarter l’exécution provisoire du présent jugement,
Déboute les parties du surplus de leurs demandes plus amples ou contraires.
Fait et jugé à Paris le 20 Janvier 2025.
Le Greffier Le Président
Christian GUINAND Diana SANTOS CHAVES
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