Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Rennes
Thématique : Prolongation de rétention administrative : conditions et enjeux de l’ordre public.
→ RésuméContexte de l’affaireMonsieur [B] [V], de nationalité algérienne, a été placé en rétention administrative en raison d’une interdiction définitive du territoire français prononcée en août 2021. Le Préfet d’Indre-et-Loire a ordonné son placement en rétention le 16 novembre 2024, en considérant qu’il représentait une menace pour l’ordre public et qu’il ne pouvait justifier de garanties suffisantes pour éviter un risque de fuite. Prolongations de la rétentionLa rétention de Monsieur [B] [V] a été prolongée à plusieurs reprises par le tribunal judiciaire de Rennes. Après une première prolongation de 26 jours en novembre 2024, une seconde de 30 jours en décembre 2024, une nouvelle demande de prolongation de 15 jours a été formulée le 14 janvier 2025, qui a été acceptée par le magistrat le 15 janvier 2025. Appel de la décisionMonsieur [B] [V] a formé appel de cette ordonnance le 16 janvier 2025, soutenant que les conditions pour une nouvelle prolongation n’étaient pas réunies, notamment en raison de l’absence de réponse des autorités consulaires algériennes et de l’absence de menace à l’ordre public, arguant qu’il n’avait pas d’antécédents judiciaires récents. Arguments du procureur généralLe procureur général a également sollicité l’infirmation de la décision, soulignant que la menace à l’ordre public devait être caractérisée et actuelle, et que les éléments de la dernière condamnation de Monsieur [B] [V] ne suffisaient pas à justifier son maintien en rétention. Analyse des conditions de rétentionLe tribunal a examiné les conditions de rétention, en se basant sur le code de l’entrée et du séjour des étrangers. Il a noté que l’administration avait effectué les diligences nécessaires pour obtenir un laissez-passer consulaire, et que la situation diplomatique entre la France et l’Algérie pouvait évoluer. Décision du tribunalLe tribunal a conclu que les conditions pour une prolongation de la rétention étaient remplies, en raison de la menace à l’ordre public représentée par Monsieur [B] [V], qui avait des antécédents judiciaires significatifs. La décision de prolongation de la rétention a donc été confirmée, et la demande d’aide juridictionnelle a été rejetée. |
COUR D’APPEL DE RENNES
N° 25/20
N° RG 25/00031 – N° Portalis DBVL-V-B7J-VRZ3
JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT
O R D O N N A N C E
articles L 741-10 et suivants du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile
Nous, Sébastien PLANTADE, conseiller à la cour d’appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L.741-10 et suivants du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, assisté de Eric LOISELEUR, greffier placé,
Statuant sur l’appel formé le 16 Janvier 2025 à 14H02 par la CIMADE pour :
M. [B] [V]
né le 07 Avril 1992 à [Localité 1] (ALGERIE)
de nationalité Algérienne
ayant pour avocat Me Elodie PRAUD, avocat au barreau de RENNES
d’une ordonnance rendue le 15 Janvier 2025 à 16H57 par le magistrat en charge des rétentions administratives du Tribunal judiciaire de RENNES qui a ordonné la prolongation du maintien de M. [B] [V] dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire pour une durée maximale de quinze jours à compter du 15 Janvier 2024 à 24H00;
En l’absence de représentant de la PREFECTURE D’INDRE ET LOIRE, dûment convoqué,
En l’absence du procureur général régulièrement avisé, Monsieur FICHOT, avocat général, ayant fait connaître son avis par écrit déposé le 16 Janvier 2025 lequel a été mis à disposition des parties.
En présence de [B] [V], assisté de Me Elodie PRAUD, avocat,
Après avoir entendu en audience publique le 17 Janvier 2025 à 10H00 l’appelant assisté de M. [S] [E], interprète en langue arabe, ayant préalablement prêté serment et son avocat en leurs observations,
Avons mis l’affaire en délibéré et ce jour, avons statué comme suit :
Monsieur [B] [V] a fait l’objet d’une peine d’interdiction définitive du territoire français, prononcée le 26 août 2021 par jugement contradictoire du Tribunal correctionnel de Tours. Un arrêté fixant le pays de renvoi a été édicté le 15 novembre 2024.
Le 16 novembre 2024, Monsieur [B] [V] s’est vu notifier par le Préfet d’Indre-et-Loire une décision de placement en rétention administrative, au centre de rétention administrative (CRA) de [Localité 2] pour une durée de quatre jours. Pour fonder sa décision, le Préfet a considéré que faisant l’objet d’une interdiction définitive du territoire français, Monsieur [B] [V] avait déjà été condamné, était défavorablement connu des services de police, représentait par son comportement une menace réelle et récurrente pour l’ordre public et ne présentait pas de garanties suffisantes de représentation propres à prévenir un risque de fuite, ne pouvant justifier de ses ressources ni de sa domiciliation alléguée chez sa s’ur et n’ayant pas déféré à une précédente mesure d’éloignement.
Par requête motivée en date du 19 novembre 2024, reçue le 20 novembre 2024 à 09h 36 au greffe du tribunal judiciaire de Rennes, le représentant du préfet d’Indre-et-Loire a saisi le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Rennes d’une demande de prolongation pour une durée de 26 jours de la rétention administrative de Monsieur [B] [V].
Par ordonnance rendue le 21 novembre 2024, le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Rennes a rejeté le recours tendant à l’annulation de l’arrêté de placement en rétention administrative et ordonné la prolongation du maintien de Monsieur [B] [V] en rétention dans les locaux non pénitentiaires pour un délai maximum de 26 jours à compter du 20 novembre 2024. Cette décision a été confirmée par la Cour d’Appel de Rennes le 24 novembre 2024.
Par requête motivée en date du 16 décembre 2024, reçue le 16 décembre 2024 à 10h 23 au greffe du tribunal de Rennes, le représentant du préfet de l’Indre-et-Loire a saisi le magistrat du tribunal judiciaire de Rennes d’une nouvelle demande de prolongation pour une durée de 30 jours de la rétention administrative de Monsieur [B] [V].
Par ordonnance rendue le 17 décembre 2024, le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Rennes a ordonné la prolongation du maintien de Monsieur [B] [V] en rétention dans les locaux non pénitentiaires pour un délai maximum de 30 jours. Cette décision a été confirmée par la Cour d’Appel de Rennes le 19 décembre 2024.
Par requête motivée en date du 14 janvier 2025, reçue le 14 janvier 2025 à 12h 31 au greffe du tribunal judiciaire de Rennes, le représentant du Préfet de l’Indre-et-Loire a saisi le tribunal judiciaire de Rennes d’une demande de prolongation pour une durée de 15 jours de la rétention administrative de Monsieur [B] [V].
Par ordonnance rendue le 15 janvier 2025, le magistrat du siège du Tribunal judiciaire de Rennes a ordonné la prolongation du maintien de Monsieur [B] [V] en rétention dans les locaux non pénitentiaires pour un délai maximum de 15 jours.
Par déclaration reçue au greffe de la Cour le 16 janvier 2025 à 14h 02, Monsieur [B] [V] a formé appel de cette ordonnance.
L’appelant fait valoir, au soutien de sa demande d’infirmation de la décision entreprise, que les conditions propres à une troisième prolongation de la rétention administrative ne sont pas réunies, en l’absence de réponse des autorités consulaires saisies, ajoutant que son comportement ne peut constituer une menace à l’ordre public, alors qu’il n’a plus d’antécédent judiciaire depuis quatre ans, et partant, l’absence de perspectives d’éloignement à bref délai, faute de réponse des autorités consulaires algériennes, à l’aune de la fraîcheur des relations diplomatiques entre la France et l’Algérie.
Le procureur général, suivant avis écrit du 16 janvier 2025 sollicite l’infirmation de la décision entreprise, faisant observer que le motif de la menace à l’ordre public doit être caractérisé, démontré et actuel, et qu’en l’espèce, il ne peut être mobilisé par le renvoi à la dernière condamnation ou mise en cause de l’intéressé remontant au 07 janvier 2020 selon l’ordonnance attaquée.
Comparant à l’audience, indiquant ne pas avoir de passeport, Monsieur [B] [V] expose vouloir sortir du centre de rétention et retrouver sa liberté, ne comprenant pas son maintien en rétention en l’absence de réponse des autorités saisies. Reprenant les arguments exposés dans la déclaration d’appel, demandant l’infirmation de la décision querellée, le conseil de Monsieur [V] souligne que les conditions posées par l’article L742-5 ne sont pas remplies en l’espèce, que la menace à l’ordre public n’est pas caractérisée en l’espèce, les mises en cause visées jusqu’en 2020 n’étant pas suffisantes, alors qu’aucun élément n’indique que l’Algérie va délivrer un laissez-passer consulaire en l’état des relations diplomatiques avec la France. Il est en outre formé une demande sur le fondement des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 sur l’aide juridictionnelle.
Le représentant de la Préfecture d’Indre-et-Loire ne comparaît pas à l’audience et n’a pas produit de mémoire d’appel.
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement,
Déclarons l’appel recevable,
Confirmons l’ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Rennes en date du 15 janvier 2025,
Rejetons la demande titre de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l’aide juridictionnelle,
Laissons les dépens à la charge du trésor public,
Fait à Rennes, le 17 Janvier 2025 à 12H00
LE GREFFIER, PAR DÉLÉGATION, LE CONSEILLER,
Notification de la présente ordonnance a été faite ce jour à [B] [V], à son avocat et au préfet
Le Greffier,
Cette ordonnance est susceptible d’un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.
Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général.
Le Greffier
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