L’Essentiel : La SA SNCF a engagé M. [H] en tant qu’agent de surveillance avec une clause de dédit-formation. Après sa démission le 5 décembre 2019, la SNCF a réclamé 20 440 euros pour le remboursement de la formation. Le conseil de prud’hommes a d’abord jugé la clause licite, mais ce jugement a été annulé pour signification tardive. En janvier 2023, la SNCF a relancé la procédure, et le 14 décembre 2023, la cour a confirmé la condamnation de M. [H]. Cependant, M. [H] a fait appel, arguant de la nullité de la clause, qui a finalement été déclarée nulle par la cour.
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Contexte de l’affaireLa SA SNCF, spécialisée dans le transport ferroviaire, a engagé M. [E] [H] en tant qu’agent de surveillance par un contrat de travail à durée indéterminée, incluant une clause de dédit-formation. Au moment de la rupture, M. [H] percevait un salaire brut mensuel de 2 301,29 euros. Démission et demande de remboursementM. [H] a démissionné le 5 décembre 2019, et la SNCF a pris acte de cette démission tout en lui réclamant le remboursement de 20 440 euros en vertu de la clause de dédit-formation. La SNCF a saisi le conseil de prud’hommes pour obtenir cette somme. Jugement du conseil de prud’hommesLe 14 juin 2021, le conseil de prud’hommes a jugé que la clause de dédit-formation était licite et a condamné M. [H] à rembourser la somme demandée. Cependant, ce jugement est devenu non-avenu en raison d’une signification tardive. Nouvelle saisine et décisionLe 23 janvier 2023, la SNCF a de nouveau saisi le conseil de prud’hommes, qui a rendu un jugement le 14 décembre 2023, confirmant la condamnation de M. [H] à rembourser 20 440 euros et le déboutant de ses demandes. Appel de M. [H]M. [H] a interjeté appel de cette décision le 11 janvier 2024, contestant la validité de la clause de dédit-formation et demandant une réduction du montant dû. Arguments des partiesM. [H] soutient que la clause de dédit-formation est nulle en raison de contradictions avec d’autres clauses de son contrat. La SNCF, quant à elle, demande la confirmation du jugement initial et le remboursement de la somme due. Analyse de la clause de dédit-formationLa cour a examiné la légalité de la clause de dédit-formation, précisant qu’elle doit respecter certaines conditions pour être valide. En l’espèce, la SNCF a respecté ses obligations de formation, mais la clause était jugée confuse et contradictoire. Décision de la courLa cour a infirmé le jugement précédent, déclarant la clause de dédit-formation nulle et déboutant la SNCF de sa demande de paiement. Elle a également condamné la SNCF à verser 3 500 euros à M. [H] pour ses frais de procédure. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la légalité de la clause de dédit-formation dans le contrat de travail de M. [H] ?La clause de dédit-formation est une disposition contractuelle qui engage un salarié à rester au service de son employeur après avoir bénéficié d’une formation financée par ce dernier. Selon la jurisprudence, cette clause est licite à condition de respecter plusieurs critères. En effet, elle doit être prévue dans une convention particulière conclue avant le début de la formation, précisant la date, la nature, la durée de la formation et son coût réel pour l’employeur, ainsi que le montant et les modalités de remboursement à la charge du salarié. De plus, le financement de la formation doit dépasser les obligations légales ou conventionnelles imposées à l’employeur. L’employeur doit également prouver qu’il a effectivement financé la formation et le salarié doit conserver sa liberté de rompre son contrat de travail à tout moment. Enfin, le montant de l’indemnité de dédit-formation doit être proportionné aux frais de formation engagés. Dans le cas présent, la SNCF a respecté ces conditions en stipulant dans le contrat de travail de M. [H] que la formation était entièrement financée par elle, d’un coût total de 20 440 euros, et que le salarié s’engageait à rester au service de la SNCF pendant une durée minimale de 5 ans. Cependant, la cour a jugé que la clause était nulle en raison de son caractère contradictoire avec d’autres dispositions du contrat, notamment celles relatives à la période d’essai. Quelles sont les conséquences de la nullité de la clause de dédit-formation ?La nullité de la clause de dédit-formation entraîne des conséquences significatives pour les parties. En effet, lorsque la clause est déclarée nulle, l’employeur ne peut plus exiger le remboursement des frais de formation engagés par le salarié. Dans cette affaire, la cour a infirmé le jugement précédent et a déclaré la clause de dédit-formation insérée dans le contrat de travail de M. [H] nulle. Par conséquent, la SNCF a été déboutée de sa demande en paiement de l’indemnité de dédit-formation de 20 440 euros. Cette décision repose sur le fait que la clause était incompréhensible pour le salarié, en raison de son interaction avec d’autres clauses du contrat, notamment celles relatives à la période d’essai. La cour a ainsi considéré que le salarié ne pouvait pas clairement appréhender les conséquences de son engagement, ce qui a conduit à la nullité de la clause. En conséquence, la SNCF a également été condamnée aux dépens de première instance et d’appel, ainsi qu’à verser à M. [H] une indemnité de 3 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, qui permet de condamner la partie perdante à payer une somme pour couvrir les frais de justice de l’autre partie. Comment la cour a-t-elle interprété les clauses contradictoires du contrat de travail ?La cour a examiné les clauses du contrat de travail de M. [H] pour déterminer si elles étaient compatibles entre elles. Elle a constaté que la clause de dédit-formation et la clause relative à la durée du contrat, qui prévoyait une période d’essai d’un an, étaient contradictoires. La clause de dédit-formation stipulait que si le salarié quittait l’entreprise dans les 30 mois suivant la signature du contrat, il devait rembourser les frais de formation. En revanche, la clause relative à la période d’essai permettait au salarié de rompre le contrat sans indemnité pendant cette période. La cour a conclu que ces deux clauses, bien qu’insérées dans le même contrat, ne pouvaient pas être considérées comme indépendantes. En effet, elles avaient des conséquences différentes en cas de rupture du contrat de travail par le salarié. La cour a donc jugé que le salarié ne pouvait pas comprendre clairement les implications de son engagement en raison de cette contradiction. Ainsi, la cour a déclaré la clause de dédit-formation nulle, ce qui a eu pour effet d’annuler la demande de la SNCF pour le remboursement des frais de formation. Cette décision souligne l’importance de la clarté et de la cohérence des clauses contractuelles pour garantir la compréhension des droits et obligations des parties. |
N° RG 24/00036
N° Portalis DBVD-V-B7I-DTTP
Décision attaquée :
du 14 décembre 2023
Origine :
conseil de prud’hommes – formation paritaire de BOURGES
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M. [E] [H]
C/
S.A. SNCF
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Expéd. – Grosse
Me PEPIN 17.1.25
Me GUYOT 17.1.25
COUR D’APPEL DE BOURGES
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 17 JANVIER 2025
6 Pages
APPELANT :
Monsieur [E] [H]
[Adresse 1]
Représenté par Me Frédéric PÉPIN substitué par Me Pierre PIGNOL, avocats postulants, du barreau de BOURGES
Ayant pour dominus litis Me Laura TAFANI, du barreau d’AIX-EN-PROVENCE
INTIMÉE :
S.A. SNCF
[Adresse 2]
Représentée par Me Henri GUYOT, substitué par Me Aude LE GOFFIC, de la SELAS ÆRIGE, avocats au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR
Lors des débats :
PRÉSIDENT : Mme VIOCHE, présidente de chambre, rapporteur
en l’absence d’opposition des parties et conformément aux dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme DELPLACE
Lors du délibéré : Mme VIOCHE, présidente de chambre
Mme de LA CHAISE, présidente de chambre
Mme CHENU, conseillère
Arrêt du 17 janvier 2025 – page 2
DÉBATS : À l’audience publique du 06 décembre 2024, la présidente ayant pour plus ample délibéré, renvoyé le prononcé de l’arrêt à l’audience du 17 janvier 2025 par mise à disposition au greffe.
ARRÊT : Contradictoire – Prononcé publiquement le 17 janvier 2025 par mise à disposition au greffe.
FAITS ET PROCÉDURE :
La SA SNCF, ci-après dénommée la SNCF, est spécialisée dans le domaine du transport ferroviaire et de la mobilité et employait plus de 11 salariés au moment de la rupture.
Suivant contrat de travail au cadre permanent en date du 14 août 2017, M. [E] [H] a été engagé à compter du 24 août suivant par l’EPIC SNCF, devenu la SA SNCF, en qualité d’agent de la surveillance, qualification B, position de rémunération 4, échelon 00. Ce contrat comprenait en page 5 une clause de dédit-formation.
La relation de travail était régie par le statut des relations collectives entre la SNCF, la SNCF Réseau, et la SNCF Mobilités constituant le Groupe Public ferroviaire et leur personnel.
En dernier lieu, M. [H] percevait un salaire brut mensuel de 2 301,29 euros.
Par courrier du 5 décembre 2019, M. [H] a démissionné de ses fonctions. Le 9 décembre suivant, la SNCF l’a informé qu’elle prenait acte de sa démission mais qu’en application de la clause de dédit-formation, il lui était redevable de la somme de 20 440 euros.
Le 30 décembre 2020, la SNCF a saisi le conseil de prud’hommes de Bourges, section commerce, afin d’obtenir la condamnation de M. [H] au remboursement de cette somme.
Par jugement réputé contradictoire en date du 14 juin 2021, le conseil de prud’hommes, retenant que la clause de dédit-formation était licite et opposable au salarié, a condamné ce dernier à payer à la SNCF la somme ainsi réclamée ainsi qu’aux entiers dépens.
Le jugement ayant été signifié par acte du 23 mai 2022 par procès-verbal de recherches infructueuses et étant devenu non-avenu faute de l’avoir été dans le délai de six mois prévu par l’article 478 du code de procédure civile, la SNCF a, le 23 janvier 2023, de nouveau saisi le conseil de prud’hommes en paiement de l’indemnité de dédit-formation.
Par jugement en date du 14 décembre 2023, auquel il est renvoyé pour plus ample exposé, le conseil de prud’hommes, statuant en sa formation de départage, a condamné M. [H] à payer à la SNCF la somme de 20 440 euros au titre de la clause de dédit-formation, a débouté le salarié de l’ensemble de ses demandes et l’a condamné aux dépens.
Le 11 janvier 2024, M. [H] a régulièrement relevé appel de cette décision par voie électronique.
DEMANDES ET MOYENS DES PARTIES :
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour se réfère expressément à leurs conclusions.
Arrêt du 17 janvier 2025 – page 3
1) Ceux de M. [H] :
Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe le 4 décembre 2024, poursuivant l’infirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions, il demande à la cour de’:
À titre principal, déclarer nulle la clause de dédit-formation et débouter la SNCF de toutes ses demandes,
À titre subsidiaire, réduire le montant dû au titre de la clause de dédit-formation à l’euro symbolique,
En toute hypothèse, condamner la SNCF au paiement d’une indemnité de procédure de 3 500 € ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.
2) Ceux de la SNCF :
Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe 3 décembre 2024, elle demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a dit que la clause de dédit-formation était licite, a condamné le salarié au paiement de la somme de 20 440 euros ainsi qu’aux entiers dépens.
Elle demande à la cour, statuant à nouveau, de :
– condamner M. [H] au remboursement de la somme de 20 440 € à titre d’indemnité de dédit-formation,
– débouter M. [H] de sa demande de minoration du montant de l’indemnité de dédit-formation,
en tout état de cause, le condamner aux entiers dépens et au paiement des sommes de 2 800 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et de 3 000 euros au titre de ceux engagés en cause d’ appel.
La procédure a été clôturée le 4 décembre 2024.
1) Sur la demande d’application de la clause de dédit-formation :
Une clause de dédit-formation a pour objet de prévoir qu’en contrepartie d’une formation entièrement financée par l’employeur, le salarié s’engagera, après avoir suivi sa formation, à rester à son service pendant une période définie à défaut de quoi, en cas de départ survenant avant le terme de celle-ci, il devra rembourser une somme forfaitaire ou ses frais de formation.
Il est acquis qu’une telle clause est licite dans la mesure où elle constitue la contrepartie d’un engagement pris par l’employeur d’assurer une formation entraînant des frais réels au-delà des dépenses imposées par la loi ou la convention collective et où elle n’a pas pour effet de priver le salarié de la faculté de démissionner (Soc. 17 juill. 1991,n° 88-40.201).
Elle doit donc respecter les conditions cumulatives suivantes :
– elle doit faire l’objet d’une convention particulière conclue avant le début de la formation précisant la date, la nature, la durée de la formation et son coût réel pour l’employeur, ainsi que le montant et les modalités de remboursement à la charge du salarié,
– le financement de la formation doit dépasser les éventuelles obligations légales ou conventionnelles imposées à l’employeur,
Arrêt du 17 janvier 2025 – page 4
– celui-ci doit avoir effectivement financé la formation et pouvoir rapporter la preuve de cette dépense,
– le salarié doit conserver sa liberté de rompre son contrat de travail à tout moment,
– le montant de l’indemnité de dédit-formation doit être proportionné aux frais de formation engagés.
En l’espèce, la SNCF réclame à M. [H] le paiement de l’indemnité de dédit-formation prévue par son contrat de travail en conséquence de son départ anticipé le 5 décembre 2019, soit 2,5 années ou 29 mois après la signature dudit contrat. Elle expose qu’elle a pour sa part respecté son engagement de lui dispenser une formation théorique et pratique de 300 heures, destinée à l’acquisition de connaissances et compétences nécessaires à l’exercice des missions d’Agent Opérationnel Sûreté ainsi qu’à l’obtention de l’habilitation préfectorale au port d’armes, étant rappelé que l’agent doit prêter serment avant d’exercer ses fonctions, mais que celui-ci n’a pas satisfait à l’obligation prévue en contrepartie ni n’a réglé l’indemnité prévue dans ce cas et ce en dépit de ses demandes.
La clause de dédit-formation insérée à la page 5 du contrat de travail de M. [H] est libellée comme suit:
‘M. [H] [E] suivra une formation dénommée Fonctions Agent Opérationnel SUGE devant débuter en principe le 28 août 2017 d’une durée de 300 heures, s’étendant sur une période de 8 mois. Cette formation sera destinée à l’acquisition de connaissances permettant d’exercer les missions d’Agent Opérationnel de la Surveillance Générale et sera dispensée par SNCF.
SNCF s’engage à prendre en charge entièrement le coût de la formation dont le montant total s’élève à 20 440 euros.
Le salaire de M. [H] [E] lui sera intégralement maintenu pendant toute le durée de la formation. Ses frais de déplacement, de repas et d’hébergement seront pris en charge conformément aux textes réglementaires en vigueur.
Passés les trois premiers mois de son contrat de travail, M. [H] [E] s’engage, en contrepartie de cette formation, à rester au service de SNCF pendant une durée minimale de 5 ans.
Passés les trois premiers mois de son contrat de travail, en cas de cessation du contrat de travail, qu’il s’agisse d’une cessation durant le stage d’essai à l’initiative du salarié, d’une démission, d’un congédiement par mesure disciplinaire, d’une radiation des cadres ou d’une révocation, M. [H] [E] s’engage à rembourser à SNCF les frais de formation, soit une somme de 20 440 euros si la cessation du contrat de travail intervient dans les 30 mois.
Toute cessation du contrat de travail pour ces mêmes motifs au-delà de ces 30 mois entraînera un remboursement proportionnel au nombre de mois restant à courir jusqu’à l’expiration des 5 ans, chacun de ces mois représentant 1/30ème des frais de formation.
En cas de cessation du contrat de travail pendant la période de formation, ce remboursement sera réalisé au prorata de la formation que l’intéressé(e) aura effectivement reçue.
Cette somme sera exigible à la date du départ effectif de M. [H] [E].’
Il en résulte pour le salarié l’engagement, en contrepartie de la formation dispensée, de rester dans les effectifs de la SNCF pendant 5 ans à compter du 24 août 2017, soit jusqu’au 24 août 2022.
M. [H], pour s’opposer au paiement d’une indemnité de dédit-formation, prétend d’abord que la clause dont les termes viennent d’être rappelés est contradictoire par rapport à la clause relative à la durée du contrat, figurant en page 2 de son contrat de travail et prévoyant que durant le stage d’essai d’un an, il pourra être mis fin aux relations contractuelles sans indemnité, sous réserve de respecter un préavis. Il ajoute que la présence de ces deux clauses, qui ne sont ni distinctes ni indépendantes contrairement à ce qu’ont retenu les premiers juges dès lors qu’elles sont insérées sans le même contrat, crée un déséquilibre significatif entre les droits et
Arrêt du 17 janvier 2025 – page 5
obligations des parties. Il en déduit que le clause de dédit-formation n’est en conséquence pas compréhensible et que partant, elle est nulle.
La SNCF réplique que cet argument est inopérant dès lors que la clause intitulée ‘durée du contrat’ est relative au stage d’essai d’une durée d’un an, assimilable à une période d’essai, expressément prévu par les Statuts de la SNCF, réglementaire et obligatoire pour tout agent du cadre permanent, dont la légalité a été confirmée par le Conseil d’État.
Elle précise que le ‘stage d’essai’ a pour but de permettre à l’employeur d’apprécier les compétences du salarié sur son poste et à celui-ci d’évaluer si son poste lui convient, sans créer de déséquilibre préjudiciable à ce dernier puisque si l’employeur rompt la période d’essai, le salarié ne devra pas d’indemnité de dédit-formation, alors que la clause de dédit-formation laisse au salarié la possibibilité de rompre son stage à l’essai pendant trois mois sans être non plus redevable d’une indemnité.
La clause intitulée ‘durée du contrat’ insérée en page 2 du contrat de travail est rédigée comme suit :
‘Le présent contrat est conclu pour une durée indéterminée.
Il est prévu un stage d’essai dont la durée est de 12 mois à compter de l’admission au cadre permanent. La durée de ce stage d’essai peut être prolongée, conformément aux dispositions du chapitre 5 du Statut des relations collectives entre SNCF, SNCF Réseau, SNCF Mobilités constituant le Groupe Public Ferroviaire et leur personnel et de la réglementation en vigueur.
Dans cette perspective, et conformément au chapitre 5 du Statut des relations collectives entre SNCF, SNCF Réseau, SNCF Mobilités constituant le Groupe Public Ferroviaire et leur personnel, les services de l’intéressé donnent lieu durant le stage d’essai à des appréciations écrites portant à la fois sur sa conduite et ses aptitudes professionnelles.
Durant la période du stage d’essai, il peut être mis fin au contrat de travail sans indemnité et sous réserve d’un préavis de huit jours en cas de rupture à l’initiative de l’agent et d’un mois en cas de rupture à l’initiative de l’entreprise. En cas de faute grave, le congédiement intervient sans préavis.
Au-delà du stage d’essai, il peut être mis fin au contrat de travail par l’une ou l’autre des parties, dans les conditions prévues par le chapitre 7 du Statut des relations collectives entre SNCF, SNCF Réseau, SNCF Mobilités constituant le Groupe Public Ferroviaire et leur personnel et les textes réglementaires pris pour son application.’
Il résulte de cette clause que sous réserve de respecter un préavis, d’une durée différente selon que la décision soit prise par le salarié ou par l’employeur, la période d’essai à laquelle était soumis M. [H] pendant 12 mois, susceptibles de prolongation, pouvait être interrompue, y compris par lui-même, pendant toute sa durée sans indemnité. Même si à l’évidence, les deux clauses ne poursuivent pas le même but, la clause relative à la durée du contrat est bien contradictoire avec la clause de dédit-formation, laquelle prévoit au contraire que si le contrat de travail cesse trois mois après sa conclusion, notamment par l’effet, comme en l’espèce, d’une démission, le salarié devra à la SNCF une indemnité de dédit-formation.
Ces clauses ne peuvent s’analyser comme étant indépendantes l’une de l’autre dès lors qu’insérées dans un même contrat de travail, elles emportent des conséquences différentes en cas de rupture du contrat de travail par le salarié après une période de trois mois et jusqu’au terme de sa période d’essai de 12 mois, susceptible en outre de reconduction. Il en résulte que le montant et les modalités de remboursement de l’indemnité de dédit-formation à la charge du salarié, prévue en page 5 du contrat de travail, ne peuvent être compris clairement par celui-ci de sorte que la clause litigieuse est nulle.
Dès lors, la SNCF est mal fondée à en réclamer l’application et doit être déboutée de sa demande en paiement par infirmation du jugement déféré.
Arrêt du 17 janvier 2025 – page 6
2) Sur les autres demandes :
Partie succombante, la SNCF est condamnée aux dépens de première instance et d’appel et déboutée en conséquence de sa demande d’indemnité de procédure.
L’équité commande enfin de la condamner à payer à M. [H] la somme de 3 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
La cour, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition du greffe :
INFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
STATUANT À NOUVEAU DES CHEFS INFIRMÉS et AJOUTANT :
DIT que la clause de dédit-formation insérée dans le contrat de travail de M. [E] [H] est nulle ;
DÉBOUTE en conséquence la SA SNCF de sa demande en paiement d’une indemnité de dédit-formation ;
La CONDAMNE à payer à M. [H] la somme de 3 500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la SA SNCF aux dépens de première instance et d’appel et la déboute de sa propre demande d’indemnité de procédure.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus ;
En foi de quoi, la minute du présent arrêt a été signée par Mme VIOCHE, présidente de chambre, et Mme DELPLACE, greffière à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,
S. DELPLACE C. VIOCHE
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