Responsabilité de l’employeur en matière de prévoyance complémentaire d’invalidité

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Responsabilité de l’employeur en matière de prévoyance complémentaire d’invalidité

L’Essentiel : M. [Y] a été embauché par EPSM en 2005, évoluant vers un contrat à durée indéterminée en tant qu’agent de sécurité mobile. Après plusieurs transferts de contrat, il a été placé en arrêt de travail pour maladie en 2019, suivi d’une déclaration d’inaptitude en 2021. Licencié pour inaptitude, il a saisi le conseil de prud’hommes, obtenant un jugement favorable en mars 2023. La société Gip sécurité a interjeté appel, contestant sa responsabilité. La cour a confirmé le jugement initial, augmentant les dommages et intérêts et condamnant l’employeur à verser des sommes supplémentaires à M. [Y].

Embauche et évolution de M. [Y]

M. [L] [Y] a été embauché par la société EPSM le 14 décembre 2005 en tant qu’agent d’exploitation, avec une succession de contrats à durée déterminée. À partir du 27 novembre 2006, il a été engagé en contrat à durée indéterminée comme agent de sécurité mobile. Les relations de travail étaient régies par la convention collective des entreprises de prévention et de sécurité. M. [Y] a également été élu au CSE et a exercé en tant que délégué syndical.

Transfert de contrat et arrêt de travail

Le contrat de travail de M. [Y] a été transféré à deux reprises : d’abord à la Sarl Gip Languedoc-Roussillon le 1er mars 2008, puis à la Sas Gip sécurité le 1er mai 2018. Le 26 août 2019, M. [Y] a été placé en arrêt de travail pour maladie non professionnelle, qui a été prolongé jusqu’au 2 février 2020. Le 18 février 2021, il a reçu un titre de pension d’invalidité à compter du 29 décembre 2020.

Inaptitude et licenciement

Le 30 mars 2021, le médecin du travail a déclaré M. [Y] inapte à son poste, indiquant que son état de santé ne permettait aucun reclassement. Après consultation, le CSE a donné un avis favorable au licenciement de M. [Y] le 19 avril 2021. Il a été convoqué à un entretien préalable au licenciement, mais ne s’est pas présenté. Le 21 septembre 2021, l’inspectrice du travail a autorisé son licenciement, qui a été notifié le 23 septembre 2021 pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Procédure judiciaire

M. [Y] a saisi le conseil de prud’hommes de Toulouse le 9 février 2022, demandant la condamnation de la société Gip sécurité au versement de la rente complémentaire d’invalidité. Le jugement du 1er mars 2023 a condamné la société à verser 9 241,28 euros bruts pour le rappel de la rente complémentaire, ainsi qu’à des dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de travail.

Appel de la société Gip sécurité

La société Gip sécurité a interjeté appel le 18 avril 2023, contestant plusieurs points du jugement, notamment la responsabilité de l’employeur dans le versement de la rente d’invalidité et la somme due à M. [Y]. Elle a soutenu que la garantie d’invalidité devait être fournie par les organismes de prévoyance, AG2R et GAN, et non par l’employeur.

Arguments de M. [Y]

M. [Y] a demandé à la cour d’infirmer le jugement en ce qui concerne le montant de la rente complémentaire et des dommages-intérêts, arguant que l’employeur était responsable de la bonne exécution des obligations de prévoyance. Il a également demandé la confirmation de la délivrance des documents de fin de contrat et la régularisation de sa situation auprès des organismes sociaux.

Décision de la cour

La cour a confirmé le jugement du conseil de prud’hommes concernant le versement de la somme de 9 241,28 euros bruts à M. [Y] pour le rappel de la rente complémentaire. Elle a également augmenté le montant des dommages et intérêts dus pour exécution fautive à 3 000 euros et a condamné la société à verser 9 367,09 euros bruts pour la période suivante. La société Gip sécurité a été condamnée aux dépens de l’appel et à verser 2 000 euros à M. [Y] au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la responsabilité de l’employeur en matière de versement de la rente complémentaire d’invalidité ?

L’employeur a une obligation de garantir le versement de la rente complémentaire d’invalidité, comme le stipule l’article 14 de la convention collective des entreprises de prévention et de sécurité. Cet article précise que :

« Le régime de prévoyance est applicable au profit de l’ensemble des salariés cadres et non cadres des entreprises entrant dans le champ d’application de la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité.

Ce régime est applicable quels que soient la nature du contrat de travail et le nombre d’heures effectives.

Le droit aux garanties est ouvert pour tous les évènements survenant pendant la durée du contrat de travail, sous réserve des dispositions relatives à l’ancienneté requise ou pendant la durée de versement d’une prestation au titre du régime mis en œuvre par le présent article.

Les garanties prévues par le régime de prévoyance sont suspendues en cas de périodes non rémunérées. Toutefois, les garanties sont maintenues, moyennant paiement des cotisations, au salarié dont le contrat de travail est suspendu, dès lors que pendant cette période il bénéficie d’une rémunération partielle ou totale de l’employeur ou d’indemnités journalières ou rentes versées par la sécurité sociale en cas d’incapacité de travail ou d’invalidité.

Le droit à garantie cesse en cas de rupture du contrat de travail, sauf si le salarié bénéficie à cette date du versement de prestations complémentaires de prévoyance de l’organisme assureur désigné : dans ce cas, le droit à garantie est assuré jusqu’au terme du versement des prestations. »

Ainsi, l’employeur est tenu de s’assurer que les droits de ses salariés en matière de prévoyance sont respectés, et en cas de défaillance des organismes de prévoyance, il peut être tenu responsable du versement des rentes.

Quelles sont les conséquences d’une défaillance de l’employeur dans l’exécution de ses obligations de prévoyance ?

La défaillance de l’employeur dans l’exécution de ses obligations de prévoyance peut entraîner des conséquences financières significatives. En l’espèce, la société Gip Sécurité a été jugée responsable de la défaillance dans le traitement du dossier de M. [Y].

Le jugement du conseil de prud’hommes a confirmé que la société avait fait preuve d’une inertie fautive dans la déclaration de la situation d’invalidité de M. [Y] auprès de l’organisme de prévoyance.

Cette inertie a causé un préjudice à M. [Y], qui a été fondé à demander des dommages et intérêts. Le tribunal a ainsi condamné la société à verser une somme de 3 000 euros à M. [Y] pour exécution fautive et déloyale du contrat de travail.

L’article 14 de la convention collective, en précisant les obligations de l’employeur, implique que ce dernier doit non seulement souscrire à un contrat de prévoyance, mais également veiller à son bon fonctionnement. En cas de manquement, l’employeur peut être tenu de réparer le préjudice causé au salarié.

Comment se détermine le montant de la rente complémentaire d’invalidité ?

Le montant de la rente complémentaire d’invalidité est déterminé en fonction des dispositions de la convention collective applicable. Selon l’article 14.3 C de la convention collective des entreprises de prévention et de sécurité, il est stipulé que :

« À compter du 1er janvier 2021, le salarié en invalidité 2ème catégorie doit percevoir une rente complémentaire lui garantissant le maintien de sa rémunération à hauteur de 80%. »

Dans le cas de M. [Y], il avait une ancienneté supérieure à 12 mois, ce qui lui ouvrait droit à une rente complémentaire pendant 1 095 jours suivant l’invalidité.

La moyenne de ses salaires bruts étant de 1 849,59 euros, il a été établi qu’il devait percevoir une somme de 9 241,28 euros bruts à titre de rappel de rente complémentaire d’invalidité pour la période du 29 décembre 2020 au 31 octobre 2022.

Le tribunal a également statué sur le montant dû pour la période suivante, confirmant ainsi que le salarié a droit à une compensation financière adéquate en cas d’invalidité.

Quelles sont les obligations de l’employeur en matière de délivrance de documents sociaux ?

L’employeur a l’obligation de délivrer les documents sociaux nécessaires à la fin du contrat de travail, comme le stipule le Code du travail. En effet, l’article L1234-19 du Code du travail précise que :

« À la rupture du contrat de travail, l’employeur doit remettre au salarié un certificat de travail, un reçu pour solde de tout compte et un bulletin de paie. »

Dans le cas de M. [Y], le conseil de prud’hommes a ordonné la délivrance de ces documents sociaux, confirmant ainsi que l’employeur doit respecter cette obligation.

Le tribunal a également noté qu’il était inéquitable de ne pas prononcer d’astreinte pour le non-respect de cette obligation, ce qui souligne l’importance de la délivrance des documents sociaux pour le salarié.

Ainsi, l’employeur doit veiller à ce que ces documents soient remis en temps et en heure, sous peine de sanctions financières.

17/01/2025

ARRÊT N°25/16

N° RG 23/01425

N° Portalis DBVI-V-B7H-PMM5

ND/NB

Décision déférée du 01 Mars 2023

Conseil de Prud’hommes

Formation paritaire de TOULOUSE

(22/00221)

Mme CHOULET

SECTION ACTIVITES DIVERSES

SASU GIP SECURITE

C/

[L] [Y]

CONFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

4eme Chambre Section 2

***

ARRÊT DU DIX SEPT JANVIER DEUX MILLE VINGT CINQ

***

APPELANTE

SASU GIP SECURITE

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Gilles SOREL, avocat postulant au barreau de TOULOUSE et par Me Mathias JOURDAN de la SELAS DELOITTE SOCIETE D’AVOCATS, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIM »

Monsieur [L] [Y]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représenté par Me Yannick MAMODABASSE, avocat au barreau de MONTPELLIER

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 18 Octobre 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant N. BERGOUNIOU, magistrate honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, chargée du rapport. Cette magistrate a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. DARIES, conseillère, faisant fonction de présidente

AF. RIBEYRON conseillère

N.BERGOUNIOU, magistrate honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles,

Greffière, lors des débats : M. TACHON

Greffière, lors du prononcé : C. DELVER

ARRET :

– CONTRADICTOIRE

– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

– signé par M. DARIES, conseillère, faisant fonction de présidente, et par C. DELVER, greffière de chambre

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [L] [Y] a été embauché par la société EPSM à compter du 14 décembre 2005 en qualité d’agent d’exploitation selon une succession de contrats de travail à durée déterminée. A compter du 27 novembre 2006, M [Y] a été embauché selon contrat de travail à durée indéterminée en qualité d’agent de sécurité mobile par cette même société.

Les relations contractuelles entre les parties étaient régies par la convention collective des entreprises de prévention et de sécurité.

M. [Y] était élu du CSE et délégué syndical au sein de cette même structure.

Le contrat de travail de M.[Y] a été transféré une première fois à la Sarl Gip Languedoc-Roussillon le 1er mars 2008, puis, une seconde fois à la Sas Gip sécurité le 1er mai 2018.

Le 26 août 2019, M. [Y] a été placé en arrêt de travail pour maladie non professionnelle jusqu’au 2 février 2020. Cet arrêt a été renouvelé.

Par décision du 18 février 2021, la caisse primaire d’assurance maladie de Vendée a notifié à M. [Y] un titre de pension d’invalidité à compter du 29 décembre 2020.

Le 30 mars 2021, le médecin du travail a déclaré M. [Y] inapte à son travail avec la mention : « l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi ».

Suite à cette notification, la société employeur a interrogé la médecine du travail afin de déterminer si les postes en sa possession pouvaient convenir à M. [Y]. Le 9 avril 2021, le médecin du travail a répondu : « l’état de santé du salarié doit respecter les restrictions détaillées sur l’attestation remise lors de la consultation confirmant l’inaptitude à tout poste dans l’entreprise »

Consulté sur le projet de licenciement de M. [Y], le CSE de l’entreprise a émis, le 19 avril 2021, rendu un avis favorable au licenciement.

Par courrier du 4 mai 2021, M.[Y] a été convoqué à un entretien préalable au licenciement fixé au 17 mai 2021. Il ne s’y est pas présenté.

Le 21 septembre 2021, l’inspectrice du travail a autorisé le licenciement de M.[Y].

Par courrier du 23 septembre 2021, la société Gip sécurité a notifié M.[Y] son licenciement pour inaptitude non professionnelle et impossibilité de reclassement.

M. [Y] a saisi le 9 février 2022 le conseil de prud’hommes de Toulouse afin d’entendre condamner la société Gip sécurité au versement de la rente complémentaire d’invalidité.

Par jugement du 1er mars 2023, le conseil de prud’hommes de Toulouse ‘ section activités diverses a :

– jugé qu’il revient à l’employeur d’assurer le paiement d’invalidité de la rente 2ème catégorie,

-condamné la Sasu Gip sécurité, prise en la personne de son représentant légal, ès qualités, au paiement de la somme de 9241,28 euros bruts (neuf mille deux cent quarante et un euro et vingt huit centimes) au titre du rappel de la rente complémentaire,

-condamné la Sasu Gip sécurité, prise en la personne de son représentant légal, ès qualités au paiement de la somme de 1000,00 euros (mille euros) à titre de dommages et intérêts pour exécution fautive et déloyale du contrat de travail,

-ordonné la délivrance des documents sociaux, sans qu’il y ait lieu d’ordonner d’astreinte,

-ordonné la régularisation auprès des organismes sociaux sans astreinte,

– condamné la Sasu Gip sécurité, prise en la personne de son représentant légal, ès qualités au paiement de la somme de 1500,00 euros (mille cinq cent euros) sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

-débouté les deux parties des autres demandes .

La Sasu Gip sécurité a interjeté appel de ce jugement le 18 avril 2023, en énonçant dans à sa déclaration d’appel les chefs du jugement critiqués.

Dans ses dernières écritures reçues au greffe par RPVA le 23 septembre 2024, auxquelles il est fait expressément référence, la Sasu Gip sécurité demande à la cour de :

-infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Toulouse le 1er mars 2023 en ce qu’il a :

– jugé qu’il revient à l’employeur d’assurer le paiement d’invalidité de la rente 2ème catégorie ;

-condamné la Sasu Gip sécurité prise en la personne de son représentant légal, ès qualités, au paiement de la somme de 9.241,28 euros brut au titre de rappel de la rente complémentaire ;

-condamné la Sasu Gip sécurité, prise en la personne de son représentant légal, ès qualités au paiement de la somme de 1000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution fautive et déloyale du contrat de travail ;

-ordonné la délivrance des documents sociaux, sans qu’il y ait lieu d’ordonner d’astreinte ;

-ordonné la régularisation auprès des organismes sociaux sans astreinte ;

-condamné la Sasu Gip sécurité, prise la personne de son représentant légal, ès qualités au paiement de la somme de 1500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens ;

Et statuant à nouveau :

-déclarer que le présent litige est sans objet puisqu’il devrait opposer M. [Y] aux organismes de prévoyance Gan et Ag2r La Mondiale ;

-déclarer que la société Gip sécurité a exécuté de bonne foi le contrat de travail ;

En conséquence :

-mettre hors de cause la société Gip sécurité du présent litige ;

-débouter M. [Y] de l’ensemble de ses demandes afférentes au paiement de la rente complémentaire d’invalidité et de délivrance de documents rectifiés ;

-débouter M. [Y] de sa demande de dommages et intérêts au titre de l’exécution fautive et déloyale du contrat de travail ;

-débouter M. [Y] du surplus de ses demandes ;

-condamner M. [Y] à lui payer une somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

La société Gip Sécurité fait valoir, pour l’essentiel, que la garantie d’invalidité à laquelle M. [Y] est en droit de prétendre est due par les deux organismes de prévoyance qui se sont succédé, AG2R jusqu’au 31 décembre 2019, puis GAN à compter du 1er janvier 2020, que M. [Y] n’a pas appelés dans la cause ; qu’il ne peut être reproché à la société un quelconque défaut de mise en ‘uvre de ses obligations en matière de prévoyance complémentaire, ni défaut d’accompagnement du salarié ; que l’employeur ne saurait être tenu de se substituer à l’organisme de prévoyance dans le versement de la rente complémentaire.

Dans ses dernières écritures reçues au greffe par RPVA le 16 septembre 2024, auxquelles il est fait expressément référence, M. [Y] demande à la cour de :

Sur la rente complémentaire due à M. [Y] au titre de son invalidité 2ème catégorie,

À titre principal,

-infirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Toulouse du 1er mars 2023, en ce qu’il a limité la condamnation de la Sasu Gip sécurité à payer à M. [Y] la somme de 9.241,28 euros bruts à titre de rappel de rente complémentaire d’invalidité 2ème catégorie au titre de la période du 29 décembre 2020 au 31 octobre 2022 et ce en application de l’article 14 de la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité, et statuant à nouveau,

-condamner la Sasu Gip sécurité à payer à M. [Y] la somme de 19.097,52 euros bruts à titre de rappel de rente complémentaire d’invalidité 2ème catégorie au titre de la période du 29 décembre 2020 au 30 juin 2024 et ce en application de l’article 14 de la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité.

À titre subsidiaire,

-condamner la Sasu Gip sécurité à payer à M. [Y] la somme de 19.097,52 euros nets à titre de dommages-intérêts ayant vocation à réparer le préjudice subi du fait du non-paiement de la rente complémentaire d’invalidité 2ème catégorie au titre de la période du 29 décembre 2020 au 30 juin 2024 et ce en application de l’article 14 de la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité,

Sur les dommages et intérêts pour exécution fautive et déloyale du contrat de travail,

-confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Toulouse du 1er mars 2023, en ce qu’il a condamné la Sasu Gip sécurité à des dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

-infirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Toulouse du 1er mars 2023, en ce qu’il a limité la condamnation de la Sasu Gip sécurité à payer à M. [Y] la somme de 1.000 euros nets à titre de dommages-intérêts pour exécution fautive et déloyale du contrat de travail, et statuant à nouveau,

-condamner la Sasu Gip sécurité à payer à M. [Y] la somme de 5.000 euros nets à titre de dommages-intérêts pour exécution fautive et déloyale du contrat de travail,

Sur la délivrance des documents de fin de contrat et bulletins de paie conformes,

-confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Toulouse du 1er mars 2023, en ce qu’il a ordonné à la Sasu Gip sécurité de délivrer à M. [Y] des bulletins de paie, un certificat de travail, ainsi qu’une attestation France travail conformes,

-infirmera le jugement du conseil de prud’hommes de Toulouse, en ce qu’il a refusé de prononcer une astreinte, et statuant à nouveau,

-condamner la Sasu Gip sécurité à remettre ces éléments sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir ; la cour se réservant expressément le droit de liquider ladite astreinte,

Sur la régularisation de la situation auprès des organismes sociaux,

-confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Toulouse du 1er mars 2023, en ce qu’il a ordonné à la Sasu Gip sécurité de régulariser la situation de M. [Y] auprès des organismes sociaux compétents,

-infirmer le jugement, en ce qu’il a refusé de prononcer une astreinte, et statuant à nouveau,

-condamner la Sasu Gip sécurité à régulariser cette situation sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir ; la cour se réservant expressément le droit de liquider ladite astreinte,

Sur les frais irrépétibles et les dépens,

-confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Toulouse du 1er mars 2023, en ce qu’il a condamné la Sasu Gip sécurité à payer à M. [Y] la somme de 1.500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de première instance, et y ajoutant,

-condamner la Sasu Gip sécurité à payer à M. [Y] la somme de 2.500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d’appel, ainsi qu’aux entiers dépens d’appel.

M. [Y] soutient que l’employeur tenu d’appliquer un régime de protection sociale complémentaire est responsable de la bonne exécution de son obligation ; que la Sasu Gip sécurité a fait preuve d’inertie fautive dans la déclaration de la situation d’invalidité de M. [Y] auprès de l’organisme de prévoyance ; qu’en cas de défaillance de l’organisme de prévoyance ou d’assurance, c’est l’employeur qui doit lui-même assurer le versement des prestations, disposant d’une action récursoire contre l’organisme d’assurance ou de prévoyance ; qu’il est tenu en dernier ressort de l’exécution des garanties conventionnelles au titre de la prévoyance.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 24 septembre 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la garantie de versement du complément de ente d’invalidité :

L’article 14 de la convention collective des entreprises de prévention et de sécurité prévoit que : « Le régime de prévoyance est applicable au profit de l’ensemble des salariés cadres et non cadres des entreprises entrant dans le champ d’application de la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité.

Ce régime est applicable quels que soient la nature du contrat de travail et le nombre d’heures effectives.

La catégorie de personnel « salariés non cadres » vise les agents de maîtrise, les agents d’exploitation, les employés administratifs et techniciens tels que définis à l’annexe II relative à la classification des postes d’emploi de la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité du 15 février 1985.

Le droit aux garanties est ouvert pour tous les évènements survenant pendant la durée du contrat de travail, sous réserve des dispositions relatives à l’ancienneté requise ou pendant la durée de versement d’une prestation au titre du régime mis en ‘uvre par le présent article.

Les garanties prévues par le régime de prévoyance sont suspendues en cas de périodes non rémunérées. Toutefois, les garanties sont maintenues, moyennant paiement des cotisations, au salarié dont le contrat de travail est suspendu, dès lors que pendant cette période il bénéficie d’une rémunération partielle ou totale de l’employeur ou d’indemnités journalières ou rentes versées par la sécurité sociale en cas d’incapacité de travail ou d’invalidité.

Le droit à garantie cesse en cas de rupture du contrat de travail, sauf (‘) si le salarié bénéficie à cette date du versement de prestations complémentaires de prévoyance de l’organisme assureur désigné : dans ce cas, le droit à garantie est assuré jusqu’au terme du versement des prestations. »

En application de la loi n 89-1009 du 31 décembre 1998 dite loi Evin, la mise en ‘uvre des garanties de prévoyance et de retraite complémentaire doit être confiée à des organismes externes avec lesquels l’employeur conclut un contrat d’assurance: société d’assurances, institution de prévoyance ou mutuelle. Les contrats souscrits avec les sociétés d’assurances sont des contrats d’assurance de groupe relevant de l’assurance-vie (risque décès-retraite) ou de l’assurance non vie (incapacité-invalidité, remboursement des frais médicaux).

En l’espèce, la société Gip Sécurité a souscrit auprès de l’organisme AG2R La Mondiale un contrat d’assurance couvrant le régime de prévoyance garanti par la convention collective jusqu’au 31 décembre 2019. A compter du 1er janvier 2020, elle a résilié ce contrat et souscrit un nouveau contrat d’assurance auprès du GAN.

La demande formée par M. [Y] concerne le versement de la garantie complémentaire invalidité 2ème catégorie pour la période du 29 décembre 2020 au 30 juin 2024.

Il résulte des pièces versées aux débats que :

Par courrier recommandé du 23 février 2021, M. [Y] a demandé à la société employeur de faire valoir ses droits auprès de l’organisme de prévoyance (pièce n° 11 de l’appelante) ;

Par mail du 17 mai 2021, la responsable des ressources humaines a informé M. [Y] du fait que son dossier était en cours de traitement auprès du GAN (pièce n° 12) ;

Quelques semaines plus tard, le 25 juin 2021, la responsable des ressources humaines a préparé un dossier destiné à la prévoyance à adresser à la société AG2R (pièce n° 13) ;

Les deux organismes de prévoyance ont été défaillants, le GAN estimant que le fait générateur de l’invalidité de M. [Y] était antérieur au 1er janvier 2020, alors que la société AG2R considérait que l’attribution de la pension d’invalidité prenant effet à compter du 29 décembre 2020, elle n’était redevable d’aucune somme, la Sasu Gip Sécurité ayant résilié le contrat de prévoyance à compter du 31 décembre 2019.

L’article 14 de la convention collective est muet sur le débiteur de la rente complémentaire d’invalidité en cas de réalisation du risque, et la société employeur s’est, sur demande du salarié, substituée à ce dernier dans l’élaboration du dossier de demande de versement de la garantie complémentaire.

Elle a saisi dans un premier temps la société GAN pour finalement constituer un dossier, quelques semaines plus tard, auprès de la société AG2R dont le contrat était rompu depuis le 31 décembre 2019, antérieurement à la déclaration d’invalidité 2ème catégorie de M. [Y].

La société employeur avait seule connaissance des conditions générales du contrat d’assurance groupe souscrit et signé par elle, et du changement d’assureur à la date du 1er janvier 2020, alors que M. [Y], bénéficiaire du contrat, avait pour seule interlocutrice la Sasu Gip Sécurité ; les errements de cette dernière sur le destinataire du dossier de prévoyance de M. [Y] caractérisent une défaillance fautive, de sorte que comme l’a justement considéré le conseil de prud’hommes de Toulouse, M. [Y] est fondé à demander la condamnation de la Sasu Gip Sécurité à lui payer les sommes qui lui sont dues au titre de la garantie complémentaire invalidité.

Sur le quantum de la rente complémentaire d’invalidité :

A compter du 1er janvier 2021, M. [Y] aurait dû percevoir une rente complémentaire lui garantissant le maintien de sa rémunération à hauteur de 80%, conformément à l’article 14.3 C de la convention collective applicable.

Il comptait en outre dans l’entreprise, au moment de son placement en invalidité 2ème catégorie, une ancienneté supérieure à 12 mois lui ouvrant droit au bénéfice d’une rente complémentaire pendant 1 095 jours suivant l’invalidité (trois ans).

La moyenne de ses salaires bruts était de 1 849,59 euros.

A compter du 29 décembre 2020, M. [Y] a perçu une pension d’invalidité d’un montant mensuel brut de 920,84 euros ; il est donc fondé à recevoir une somme de 9 241,28 euros bruts à titre de rappel de rente complémentaire d’invalidité 2ème catégorie au titre de la période du 29 décembre 2020 au 31 octobre 2022, et de 9 367,09 euros bruts pour la période allant du 1er novembre 2022 au 31 mai 2024 (sur laquelle le conseil de prud’hommes n’a pas statué, l’audience de jugement ayant eu lieu le 22 novembre 2022) étant précisé qu’aucune somme n’est due au salarié pour la période comprise entre le 1e mai 2021 et le 30 septembre 2021, au cours de laquelle la société employeur a repris le versement des salaires de M. [Y].

La carence fautive de la société employeur dans l’exécution du contrat de travail a causé à M. [Y] un préjudice qu’il convient de réparer par la condamnation de la société Gip Sécurité à lui payer une somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Sur les autres demandes :

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a ordonné la délivrance des documents sociaux, la régularisation auprès des organismes sociaux, le tout sans astreinte, et condamné la Sasu Gip sécurité au paiement de la somme de 1500,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens de première instance.

La Sasu Gip sécurité, qui succombe, sera condamnée aux dépens de l’appel et déboutée de sa demande formée au titre des frais irrépétibles.

Il serait en l’espèce inéquitable de laisser à la charge de M. [Y] les frais exposés non compris dans les dépens ; il y a lieu de faire droit, en cause d’appel, à sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile à hauteur d’une somme de 2 000 euros.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement et en dernier ressort,

Confirme le jugement rendu le 20 mars 2023 par le conseil de prud’hommes de Toulouse, notamment en ce qu’il a condamné la société Gip sécurité à verser à M. [L] [Y] une somme de 9.241,28 euros bruts à titre de rappel de rente complémentaire d’invalidité 2ème catégorie au titre de la période du 29 décembre 2020 au 31 octobre 2022.

L’infirme sur le montant des dommages et intérêts pour exécution fautive et déloyale du contrat de travail ;

Et, statuant de nouveau sur le point infirmé et y ajoutant :

Porte à la somme de 3 000 euros le montant des dommages et intérêts dus par la Sasu Gip sécurité à M. [Y] pour exécution fautive et déloyale du contrat de travail ;

Condamne la Sasu Gip sécurité à verser à M. [Y] une somme de 9 367,09 euros bruts à titre de rappel de rente complémentaire d’invalidité pour la période allant du 1er novembre 2022 au 31 mai 2024 ;

Condamne la Sasu Gip sécurité aux dépens de l’appel ;

Condamne la Sasu Gip sécurité à payer à M. [Y], en cause d’appel, une somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

La déboute de sa demande formée à ce même titre.

Le présent arrêt a été signé par M. DARIES, conseillère, faisant fonction de présidente, et par C. DELVER, greffière.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

C. DELVER M. DARIES

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