Conflit autour des contrats de travail maritime et de leur validité en droit international.

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Conflit autour des contrats de travail maritime et de leur validité en droit international.

L’Essentiel : M. [X] [C], ressortissant allemand, a acquis le navire CLIFFORD II le 2 octobre 2017. Un contrat de travail à durée indéterminée a été signé le 1er octobre 2017 entre M. [M] [T], capitaine, et M. [U] [D], mécanicien français. Le 10 novembre 2021, M. [X] [C] a cédé le navire à la société TWELVE, entraînant la rupture du contrat de M. [U] [D]. Ce dernier a saisi le conseil de prud’hommes pour licenciement sans cause réelle, mais a été débouté. En appel, il demande la requalification de ses contrats et des indemnités, tandis que les intimés contestent ses demandes.

Acquisition et Contrats de Travail

M. [X] [C], un ressortissant allemand, a acquis le navire CLIFFORD II le 2 octobre 2017, immatriculé aux îles Cook. Le 1er octobre 2017, M. [M] [T], capitaine du navire, a signé un contrat de travail à durée indéterminée avec M. [U] [D], un mécanicien français, stipulant que les activités professionnelles seraient régies par la loi maritime des îles Cook. Par la suite, M. [U] [D] a signé plusieurs contrats avec la société A.C.T YACHT SERVICES UNIPESSOAL LDA, créée par M. [M] [T], pour les années 2019 à 2021.

Cession du Navire et Rupture de Contrat

Le 10 novembre 2021, M. [X] [C] a cédé le navire à la société TWELVE, dirigée par M. [N] [R]. M. [U] [D] n’a pas été repris par la nouvelle société, et son avocat a informé M. [N] [R] de la rupture de son contrat de travail, soulignant l’absence de protection sociale et de déclarations d’embauche. M. [U] [D] a pris acte de cette rupture et a demandé une indemnisation pour ses préjudices.

Procédures Judiciaires

Le 21 janvier 2022, un juge a autorisé M. [U] [D] à saisir le navire EQUITY en garantie d’une créance. Le 22 février 2022, M. [U] [D] a saisi le conseil de prud’hommes pour licenciement sans cause réelle. Le jugement du 23 mai 2023 a déclaré recevables ses pièces, mais a débouté M. [U] [D] de ses demandes, le condamnant à payer des dommages et intérêts pour procédure abusive.

Appels et Conclusions

M. [U] [D] a interjeté appel le 16 juin 2023, demandant la requalification de ses contrats en CDI et des indemnités. Les intimés, M. [X] [C] et M. [N] [R], ont également fait appel, demandant la confirmation du jugement et des condamnations pour procédure abusive. Les débats ont été clôturés le 18 octobre 2024, et des conclusions ont été déposées par les parties.

Décision de la Cour

La cour a constaté que le jugement n’était pas contesté concernant la recevabilité des pièces en langues étrangères. Elle a infirmé le jugement sur la recevabilité des pièces en portugais, écartant celles non traduites. La cour a décidé de renvoyer l’affaire à une audience ultérieure pour permettre aux parties de prendre en compte les développements d’une autre cause liée à l’employeur de M. [U] [D].

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la loi applicable aux contrats de travail dans le cadre de la navigation maritime ?

La loi applicable aux contrats de travail dans le cadre de la navigation maritime est régie par l’article 8 du règlement CE n° 593/2008, dit « Rome I ». Cet article stipule que :

1. « Le contrat individuel de travail est régi par la loi choisie par les parties conformément à l’article 3. Ce choix ne peut toutefois avoir pour résultat de priver le travailleur de la protection que lui assurent les dispositions auxquelles il ne peut être dérogé par accord en vertu de la loi qui, à défaut de choix, aurait été applicable selon les paragraphes 2, 3 et 4 du présent article. »

2. « À défaut de choix exercé par les parties, le contrat individuel de travail est régi par la loi du pays dans lequel ou, à défaut, à partir duquel le travailleur, en exécution du contrat, accomplit habituellement son travail. »

3. « Si la loi applicable ne peut être déterminée sur la base du paragraphe 2, le contrat est régi par la loi du pays dans lequel est situé l’établissement qui a embauché le travailleur. »

4. « S’il résulte de l’ensemble des circonstances que le contrat présente des liens plus étroits avec un autre pays que celui visé au paragraphe 2 ou 3, la loi de cet autre pays s’applique. »

Dans le cas présent, bien que le contrat initial mentionne la législation des îles Cook, le travail de M. [U] [D] s’est effectué principalement en France, ce qui pourrait rendre la loi française applicable.

Quelles sont les conséquences d’une succession de contrats à durée déterminée (CDD) en France ?

En France, la succession de contrats à durée déterminée est régie par l’article L. 1242-1 du Code du travail, qui stipule que :

« Un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que dans les cas prévus par la loi. Il doit être établi par écrit et mentionner le motif de recours au CDD. »

De plus, l’article L. 1242-2 précise que :

« Le contrat à durée déterminée ne peut être renouvelé qu’une fois, et la durée totale de l’ensemble des contrats à durée déterminée conclus entre les mêmes parties ne peut excéder 18 mois, sauf exceptions. »

Dans le cas de M. [U] [D], la succession de CDD sans respect des conditions légales pourrait entraîner la requalification de ces contrats en un contrat à durée indéterminée (CDI). Cela est renforcé par l’article L. 1224-1, qui stipule que :

« En cas de changement d’employeur, le contrat de travail est transféré au nouvel employeur. »

Ainsi, si les CDD sont jugés illégaux, M. [U] [D] pourrait revendiquer un CDI et les droits qui en découlent.

Quels sont les droits des travailleurs en cas de travail dissimulé ?

Le travail dissimulé est réprimé par l’article L. 8221-1 du Code du travail, qui définit le travail dissimulé comme :

« Le fait pour un employeur de ne pas déclarer un salarié à l’administration ou de ne pas lui remettre les documents nécessaires à la preuve de son emploi. »

Les conséquences du travail dissimulé incluent des sanctions pénales et des obligations de régularisation. L’article L. 8221-5 précise que :

« Le fait de dissimuler une activité salariée est puni d’une amende et d’une peine d’emprisonnement. »

Dans le cas de M. [U] [D], l’absence de déclaration à l’administration de sécurité sociale et l’absence de bulletins de salaire constituent des éléments constitutifs de travail dissimulé. Cela lui permettrait de revendiquer des indemnités pour préjudice subi, ainsi que la régularisation de sa situation.

Quelles sont les implications de la cession d’un navire sur les contrats de travail des employés ?

La cession d’un navire peut avoir des implications sur les contrats de travail en vertu de l’article L. 1224-1 du Code du travail, qui stipule que :

« En cas de changement d’employeur, le contrat de travail est transféré au nouvel employeur. »

Cela signifie que si un navire est vendu, les employés peuvent voir leur contrat de travail transféré au nouvel acquéreur, sauf si des dispositions contraires sont stipulées dans le contrat de cession.

Dans le cas de M. [U] [D], la vente du navire CLIFFORD II à la société TWELVE pourrait impliquer que son contrat de travail soit transféré à cette société, à condition que les conditions légales soient respectées. Si cela n’a pas été fait, M. [U] [D] pourrait revendiquer des droits en tant qu’employé de la société TWELVE.

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-6

ARRÊT MIXTE

DU 17 JANVIER 2025

N°2025/010

Rôle N°23/08025

N° Portalis DBVB-V-B7H-BLOZ2

[U] [D]

C/

[X] [C]

[N] [R]

Société TWELVE

Copie exécutoire délivrée

le : 17/01/2025

à :

– Me Romain CHERFILS de la SELARL LX AIX EN PROVENCE, avocat au barreau d’AIX EN PROVENCE

– Me Jean MARTINEZ, avocat au barreau de MARSEILLE

– Me Serge AYACHE, avocat au barreau d’AIX EN PROVENCE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de FREJUS en date du 23 Mai 2023 enregistré au répertoire général sous le n° F 22/00042.

APPELANT

Monsieur [U] [D], demeurant [Adresse 1]

comparant en personne, assisté de Me Lionel BUDIEU, avocat au barreau de NICE et de Me Romain CHERFILS de la SELARL LX AIX EN PROVENCE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE,

INTIMES

Monsieur [X] [C], demeurant [Adresse 5]

[Localité 2] – ALLEMAGNE

représenté par Me Jean MARTINEZ, avocat au barreau de MARSEILLE

Monsieur [N] [R], demeurant [Adresse 7]

représenté par Me Marilyne DEFERI, avocat au barreau de NICE

et par Me Serge AYACHE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE,

Société TWELVE, sise [Adresse 4]

représentée par Me Marilyne DEFERI, avocat au barreau de NICE

et par Me Serge AYACHE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE,

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 19 Novembre 2024 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Pascal MATHIS, Président de chambre, et Madame Ursula BOURDON-PICQUOIN, Conseiller.

Monsieur Pascal MATHIS, Président de chambre, a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Pascal MATHIS, Président de chambre

Madame Ursula BOURDON-PICQUOIN, Conseiller

Madame Raphaelle BOVE, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Pascale ROCK.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 Janvier 2025.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 Janvier 2025.

Signé par Monsieur Pascal MATHIS, Président de chambre et Mme Suzie BRETER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*-*-*-*-*

EXPOSÉ DU LITIGE

[1] M. [X] [C], ressortissant allemand, a acquis un navire dénommé CLIFFORD II le 2’octobre 2017. Ce navire était immatriculé au registre international des îles Cook. Le 1er’octobre’2017, M.'[M] [T], capitaine du navire CLIFFORD II et ressortissant français, avait signé, comme représentant de [X] [C], un contrat de travail à durée indéterminée avec M. [U] [D], ressortissant français, afin que ce dernier exerce sur le navire les fonctions de mécanicien. Ce contrat de travail, rédigé en français à [Localité 8] (France) indiquait être établi conformément à la législation des îles Cook. Il précisait en son article troisième que le navire privé sur lequel se dérouleraient les activités professionnelles était régi par la loi maritime des îles Cook.

[2] Le 25 octobre 2018, M. [M] [T] a créé une société A.C.T YACHT SERVICES UNIPESSOAL LDA, immatriculée à [Localité 3]. Le 1er janvier 2019, M. [U] [D] a conclu un contrat dénommé «’crew agreement’» avec la société A.C.T YACHT SERVICES, UNIPESSOAL LDA, en qualité de mécanicien sur le navire CLIFFORD II, contrat signé par M.'[M] [T]. M. [U] [D] a encore signé deux autres contrats similaires avec la Société A.C.T YACHT SERVICES, UNIPESSOAL LDA pour les années 2020 et 2021 dont le dernier expirait le 31 décembre 2021.

[3] Le 10 novembre 2021, M. [X] [C] a cédé le navire CLIFFORD II à la société civile particulière monégasque TWELVE, dirigée par M. [N] [R], sujet luxembourgeois résidant monégasque, et a mis fin à ses relations commerciales avec la société A.C.T YACHT SERVICES. Le navire a été alors renommé EQUITY par son acquéreur. M. [U] [D] n’a pas été repris par la société TWELVE et son conseil écrivait à M. [N] [R] le 18’janvier’2022 en ces termes’:

«’PRISE D’ACTE DE LA RUPTURE DU CONTRAT DE TRAVAIL

Monsieur,

1. Vous êtes le propriétaire du Motor Yacht CLIFFORD II, lequel a battu pavillon des Îles Cook puis à partir de 2019 de [Localité 3] et lequel est armé au privé, ce qui signifie qu’il est réservé à votre seul usage. J’interviens aux intérêts de M. [U] [D] que vous avez recruté en qualité de chef mécanicien, aux conditions suivantes’:

 »1er contrat’: contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er octobre 2017, salaire’: 5’500’€’;

 »2e contrat (par l’intermédiaire de la société ACT que vous avez constitué à [Localité 3] et dont vous avez nommé votre propre capitaine, [M] [Z] comme gérant, alors même que vous-même et M. [B] [P] l’avaient toujours dirigée): contrat de travail à durée déterminée du 1er’janvier au 31 décembre 2019, salaire’: 5’500’€’;

 »3e contrat (toujours par l’intermédiaire de la société ACT)’: contrat de travail à durée déterminée du 1er janvier au 31 décembre 2020 salaire’: 5’500’€’;

 »4e contrat (toujours par l’intermédiaire de la société ACT)’: contrat de travail à durée déterminée du 1er janvier au 31 décembre 2021 salaire’: 5’500’€’;

2. Hormis le premier, qui vise le droit des Îles Cook, ces contrats prévoient l’application du droit portugais et la compétence des juridictions de Madère. Or, le navire est amarré en permanence au sein du [6] et/ou à [Localité 8] et n’effectue que de la navigation méditerranéenne. Le travail de M. [D] est donc intégralement accompli en France. Dès lors, ces clauses sont totalement inopposables à mon client.

3. En outre, malgré un travail intégralement accompli en France, l’emploi salarié de M. [D] n’a pas été déclaré comme il aurait dû l’être auprès des services de l’administration de sécurité sociale de Madère en application de l’article 11-4 du règlement européen 883-2004, ni auprès d’aucune autre administration de sécurité sociale. De même, alors même que le navire battait pavillon des Îles Cook entre 2017 et 2019, mon client n’a bénéficié d’aucun type de protection sociale légale. Aucun bulletin de salaire n’a jamais été remis à mon client. Aucune déclaration préalable à l’embauche n’a été acceptée. En d’autres termes, vous avez clairement commis à son préjudice les faits constitutifs de travail dissimulé qui sont en France, réprimés pénalement.

4. En outre, le navire CLIFFORD Il aurait été cédé courant novembre 2021 sans que personne n’en soit informé. Mon client ne s’est vu remettre aucun nouveau contrat de travail et il ignore qui est son employeur à ce jour. Quoi qu’il en soit, il est évident que celui-ci se trouve en contrat de travail à durée indéterminée dans la mesure où une telle succession de CDD est totalement illégale en France.

5. Pour l’ensemble de ces raisons, M. [D] prend acte par la présente de la rupture de son contrat de travail et saisi sans tarder les juridictions compétentes pour obtenir l’indemnisation de ses entiers préjudices.

Je vous mets d’ores et déjà en demeure de m’adresser’: son solde de tout compte, un certificat de travail, l’ensemble des documents qui lui permettront de faire valoir ses droits au chômage. Conformément à mes obligations déontologiques, je vous informe que vous pouvez remettre une copie de la présente à votre conseil habituel qui pourra utilement se mettre en contact avec mon cabinet.’»

[4] Par ordonnance du 21 janvier 2022, le juge de l’exécution près le tribunal judiciaire de Draguignan a autorisé M. [U] [D] à saisir à titre conservatoire l’EQUITY en garantie d’une créance évaluée provisoirement à la somme de 162’177,90’€.

[5] Se plaignant notamment d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, M. [U] [D] a saisi le 22 février 2022 le conseil de prud’hommes de Fréjus, section activité diverses, lequel, par jugement rendu le 23 mai 2023, a’:

déclarées recevables les pièces de M. [U] [D], écrites en langues étrangères’;

dit qu’il n’y a pas lieu de rejeter les pièces produites en portugais’;

dit le droit français applicable aux contrats de travail de M. [U] [D]’;

mis hors de cause M. [X] [C], M. [N] [R] et la société civile particulière monégasque TWELVE’;

débouté M. [U] [D] de l’ensemble de ses demandes’;

condamné M. [U] [D] à payer les sommes suivantes’:

500’€ à M. [N] [R] au titre de dommages et intérêts pour procédure abusive’;

500’€ à M. [X] [C] au titre des frais irrépétibles’;

500’€ à M. [N] [R] et à la société civile particulière monégasque TWELVE au titre des frais irrépétibles’;

débouté les parties défenderesses du surplus de leurs demandes’;

condamné M. [U] [D] aux entiers dépens.

[6] Cette décision a été notifiée le 24 mai 2023 à M. [U] [D] qui en a interjeté appel suivant déclaration du 16 juin 2023. L’instruction a été clôturée par ordonnance du 18 octobre 2024.

[7] Vu les dernières conclusions déposées et notifiées le 3 octobre 2024 aux termes desquelles M. [U] [D] demande à la cour de’:

confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a reçu les pièces produites en langue anglaise’;

l’infirmer en ce qu’il a admis les pièces produites en langue portugaise qu’aucune partie ne comprend’;

rejeter lesdites pièces des débats’;

infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a mis hors de cause MM [N] [R] et [X] [C] ainsi que la société TWELVE et en ce qu’il a été débouté de l’ensemble de ses demandes’;

dire que’:

M. [X] [C] a été son employeur jusqu’à la vente du CLIFFORD II’;

la société TWELVE et M. [N] [R] sont devenus ses employeurs par application des dispositions des articles L. 1224-1 et suivants du code du travail’;

dire le droit français applicable à la relation de travail’;

dire que la moyenne de salaire s’élève à la somme de 7’144,50’€ bruts’;

requalifier les contrats de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée’;

dire qu’à compter de la vente du CLIFFORD II, la société TWELVE est devenue son employeur par application des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail’;

condamner la SCI TWELVE, M. [N] [R] à titre principal ou subsidiairement solidairement avec M. [X] [C], à lui verser les sommes suivantes’:

indemnité de requalification des CDD en CDI’: 14’289’€’;

indemnité compensatrice de préavis’: 14’289’€’;

congés payés y afférant’: 1’428,90’€’;

indemnité légale de licenciement’: 7’144,50’€’;

dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse’: 35’722,50’€’;

indemnité forfaitaire de travail dissimulé’: 42’867’€’;

réparation du préjudice distinct’: 36’437’€’;

frais irrépétibles’: 10’000’€’;

condamner l’employeur à régulariser sa situation depuis l’embauche ainsi qu’à lui remettre des bulletins de salaire, un certificat de travail et une attestation destinée à Pôle Emploi, le tout sous astreinte comminatoire de 100’€ par jour de retard à compter de la notification de l’arrêt’;

condamner la SCI TWELVE à titre principal ou subsidiairement solidairement avec M.'[X] [C] aux entiers dépens, ceux d’appel distraits au profit de Maître Romain CHERFILS, membre de la SELARL LX AIX-EN-PROVENCE, avocats associés aux offres de droit.

[8] Vu les dernières conclusions déposées et notifiées le 17 octobre 2024 aux termes desquelles M. [X] [C] demande à la cour de’:

confirmer le jugement entrepris’;

débouter le requérant de toutes ses demandes’;

condamner le requérant à la somme de 5’000’€ au titre des frais irrépétibles’;

condamner le requérant aux entiers dépens d’instance’;

subsidiairement, cantonner les condamnations au minimum légal dû sur la base d’un salaire de 5’000’€.

[9] Vu les dernières conclusions déposées et notifiées le 17 octobre 2024 aux termes desquelles M. [N] [R] et la société civile particulière monégasque TWELVE demandent à la cour de’:

les déclarer recevables et bien fondés en leur appel incident’;

infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a jugé applicable le droit français aux contrats de travail de M. [U] [D]’;

le confirmer pour le surplus en ses dispositions non contraires à leurs conclusions’;

débouter M. [U] [D] de l’ensemble de ses demandes à leur égard’;

condamner M. [U] [D] à leur verser la somme de 1’000’€ à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive’;

condamner M. [U] [D] aux entiers dépens ainsi qu’à leur verser la somme de 10’000’€ au titre des frais irrépétibles.

MOTIFS DE LA DÉCISION

[10] Il sera tout d’abord relevé que le jugement n’est pas contesté en ce qu’il a déclaré recevables les pièces produites par M. [U] [D] et écrites en langues étrangères.

1/ Sur la recevabilité des pièces rédigées en portugais

[11] M. [U] [D] demande à la cour d’enjoindre aux intimés de faire traduire les pièces rédigées en portugais ou de les retirer des débats. La société TWELVE et M.'[N] [R] ne produisent qu’une pièce rédigée uniquement en portugais, mais ils y joignent sa traduction française. Elle n’encourt dès lors pas la critique. M. [X] [C] produit un extrait du journal officiel de la région autonome de [Localité 3] du 11 janvier 2019. Cette pièce n’étant pas traduite, elle sera écartée des débats.

2/ Sur le droit applicable aux relations contractuelles alléguées par l’appelant à l’encontre des intimés

[12] L’article 8 du règlement CE n°’593/20081 du 17 juin 2008 dit «’Rome I’» dispose que’:

«’1. Le contrat individuel de travail est régi par la loi choisie par les parties conformément à l’article 3. Ce choix ne peut toutefois avoir pour résultat de priver le travailleur de la protection que lui assurent les dispositions auxquelles il ne peut être dérogé par accord en vertu de la loi qui, à défaut de choix, aurait été applicable selon les paragraphes 2, 3 et 4 du présent article.

2. À défaut de choix exercé par les parties, le contrat individuel de travail est régi par la loi du pays dans lequel ou, à défaut, à partir duquel le travailleur, en exécution du contrat, accomplit habituellement son travail. Le pays dans lequel le travail est habituellement accompli n’est pas réputé changer lorsque le travailleur accomplit son travail de façon temporaire dans un autre pays.

3. Si la loi applicable ne peut être déterminée sur la base du paragraphe 2, le contrat est régi par la loi du pays dans lequel est situé l’établissement qui a embauché le travailleur.

4. S’il résulte de l’ensemble des circonstances que le contrat présente des liens plus étroits avec un autre pays que celui visé au paragraphe 2 ou 3, la loi de cet autre pays s’applique.’»

Pour l’application de ce texte aux marins du yachting, il convient de retenir que le lieu habituel d’accomplissement du travail est le où le navire est réellement exploité.

[13] Le premier contrat de travail produit par M. [U] [D] vise la législation des îles Cook dont l’application n’est demandée par aucune partie alors que les contrats conclus avec la société A.C.T YACHT SERVICES visent la législation portugaise dont se prévaut la société TWELVE et son dirigeant. Il convient dès lors, pour déterminer la loi applicable de se prononcer préalablement sur la validité des contrats portugais. Cette dernière est contestée par l’appelant qui soutient qu’ils ne constituent qu’une apparence trompeuse dès lors que le dirigeant de la société portugaise était en réalité salarié de M. [X] [C] et que c’est bien ce dernier qui l’a embauché en qualité de capitaine. M. [X] [C] conteste avoir salarié le capitaine du navire expliquant avec simplement conclu un contrat de prestation de service avec la société dirigée par ce dernier aux termes duquel cette société mettait à sa disposition un équipage.

[14] La cour estime que la solution du présent litige, et en premier lieu la détermination de la loi applicable, nécessite qu’il soit statué sur l’éventuel salariat du capitaine du navire par le propriétaire de ce dernier, point qui doit être tranché dans la cause opposant M. [M] [T] à MM [X] [C] et [N] [R] ainsi qu’à la société TWELVE. Or cette dernière cause a été renvoyée à l’audience du 11 février 2025 dans le cadre d’une vérification d’écriture. Il apparaît ainsi nécessaire de renvoyer la présente affaire à cette même audience pour permettre aux parties de prendre en compte, autant que de besoin, son déroulement.

3/ Sur les autres demandes

[15] Il y a lieu de surseoir à statuer sur les autres demandes et de réserver les dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Constate que le jugement n’est pas contesté en ce qu’il a déclaré recevables les pièces produites par M. [U] [D] et écrites en langues étrangères.

Infirme le jugement entrepris en ce qu’il a dit qu’il n’y a pas lieu de rejeter les pièces produites en portugais.

Statuant à nouveau sur ce point,

Écarte des débats, faute de traduction, le seul extrait du journal officiel de la région autonome de [Localité 3] du 11’janvier 2019 produit par M. [X] [C].

Avant dire droit sur les autres demandes,

Ordonne la réouverture des débats et le rabat de l’ordonnance de clôture afin de permettre aux parties de prendre en compte les développements du dossier opposant M. [M] [T] à MM [X] [C] et [N] [R] ainsi qu’à la société TWELVE.

Renvoie la cause à l’audience du mardi 11 février 2025 à 14’heures pour y être conféré.

Sursoit à statuer sur les autres demandes.

Réserve les dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


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