L’Essentiel : La société Clichy a assigné en référé la société B2 Villepinte pour faire constater la résolution d’un bail en raison de loyers impayés, demandant son expulsion et le paiement de 86.922,36 euros. Cependant, B2 Villepinte n’a pas comparu. Le juge, après examen, a noté que Clichy n’avait pas prouvé le non-paiement des loyers, se basant sur un commandement de payer sans décompte exhaustif. En conséquence, il a rejeté les demandes de Clichy, y compris celles relatives à l’expulsion et aux indemnités, et a condamné Clichy aux dépens, rendant la décision exécutoire par provision.
|
Contexte de l’affaireLa société Clichy, propriétaire de locaux commerciaux, a assigné en référé la société B2 Villepinte, héritière de la société B2 Dental, pour faire constater la résolution d’un bail en raison de loyers impayés. Elle a demandé l’expulsion de la société B2 Villepinte et le paiement d’une provision de 86.922,36 euros pour loyers dus, ainsi que d’autres indemnités. Absence de comparutionLa société B2 Villepinte n’a pas comparu à l’audience, bien que l’assignation ait été effectuée conformément aux règles de procédure. Le juge a donc examiné la demande de la société Clichy sur le fond, en se basant sur les éléments fournis. Conditions de la clause résolutoireSelon le code de commerce, une clause résolutoire ne peut être appliquée qu’un mois après un commandement de payer resté sans effet. La société Clichy a produit un commandement de payer, mais n’a pas fourni de décompte exhaustif pour la période postérieure à la signification de ce commandement. Évaluation des preuvesLe juge a constaté que la société Clichy n’a pas réussi à prouver que la société B2 Villepinte n’avait pas réglé ses dettes dans le délai imparti. Une simple impression d’écran d’un virement, sans détails suffisants, n’a pas été jugée probante. Décision du jugeEn l’absence de preuves suffisantes concernant le non-paiement des loyers, le juge a décidé qu’il n’y avait pas lieu à référé sur les demandes de la société Clichy, y compris celles concernant l’expulsion et les indemnités. La demande de provision a également été jugée insuffisamment établie. Conséquences financièresLa société Clichy a été condamnée aux dépens, et sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile a été rejetée. La décision a été rendue exécutoire par provision, et le jugement a été prononcé au Palais de Justice de Bobigny. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions de mise en œuvre d’une clause résolutoire dans un bail commercial ?La mise en œuvre d’une clause résolutoire dans un bail commercial est régie par l’article L145-41 du Code de commerce. Cet article stipule que : « Toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai. Les juges saisis d’une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l’article 1343-5 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n’est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l’autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge. » Ainsi, pour que la clause résolutoire soit applicable, il est impératif qu’un commandement de payer soit signifié au locataire, et que ce dernier n’ait pas régularisé sa situation dans le délai d’un mois suivant cette signification. Il est également important de noter que le juge peut suspendre les effets de la clause résolutoire si le locataire se conforme aux conditions fixées par lui. Quelles sont les conséquences du défaut de production de décompte de loyers par le bailleur ?Le défaut de production d’un décompte de loyers par le bailleur a des conséquences significatives sur la recevabilité de ses demandes. En effet, selon l’article 835 alinéa 2 du Code de procédure civile : « Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le juge des référés peut accorder une provision au créancier. » Dans le cas présent, la société Clichy n’a pas produit de décompte exhaustif des loyers dus après la signification du commandement de payer. Cela empêche le juge des référés de vérifier si la société B2 Villepinte a effectivement manqué à ses obligations de paiement dans le délai imparti. Sans un décompte clair et précis, le juge ne peut pas établir que le locataire est en défaut, ce qui conduit à un rejet des demandes de référé. Comment le juge des référés évalue-t-il la demande de provision en cas de litige sur les loyers ?Le juge des référés évalue la demande de provision en se basant sur la clarté et la solidité des preuves fournies par le créancier. L’article 835 alinéa 2 du Code de procédure civile, déjà cité, précise que le juge peut accorder une provision lorsque l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable. Dans cette affaire, la société Clichy a demandé une provision sans fournir les factures ou les appels de loyers pour la période concernée. De plus, elle n’a pas précisé le dernier terme inclus dans la période de recouvrement. Ces manquements rendent la demande insuffisamment établie, ce qui conduit le juge à ne pas faire droit à la demande de provision. Quelles sont les implications de l’absence de comparution du défendeur en référé ?L’absence de comparution du défendeur en référé n’empêche pas le juge de statuer sur le fond de l’affaire. L’article 472 du Code de procédure civile stipule que : « Si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée. » Cela signifie que même en l’absence du défendeur, le juge doit examiner la régularité et la recevabilité des demandes formulées par le demandeur. Cependant, si le demandeur ne parvient pas à établir ses prétentions de manière satisfaisante, comme c’est le cas ici avec la société Clichy, le juge peut rejeter les demandes, même en l’absence de contestation de la part du défendeur. |
-=-=-=-=-=-=-=-=-=-=-
Chambre 1/Section 5
N° du dossier : N° RG 24/01700 – N° Portalis DB3S-W-B7I-ZZCL
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ DU 17 JANVIER 2025
MINUTE N° 25/00052
—————-
Nous, Madame Mechtilde CARLIER, Juge, au Tribunal judiciaire de BOBIGNY, statuant en référés, assistée de Madame Fatma BELLAHOYEID, Greffière,
Après avoir entendu les parties à notre audience du 18 Novembre 2024 avons mis l’affaire en délibéré et avons rendu ce jour, par mise à disposition au greffe du tribunal en application des dispositions de l’article 450 du Code de procédure civile, la décision dont la teneur suit :
ENTRE :
LA SOCIETE CLICHY, dont le siège social est sis [Adresse 2] / France
représentée par Me Anne COLONNA DURAN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E0257
ET :
LA SOCIETE B2 VILLEPINTE, dont le siège social est sis [Adresse 1] / France
non comparante, ni représentée
EXPOSE DU LITIGE
Par exploit du 15 octobre 2024, la société Clichy, propriétaire de locaux commerciaux donnés à bail à la société B2 Villepinte (venant aux droits de la société B2 Dental), a assigné en référé cette dernière pour faire constater la résolution dudit bail par l’effet d’une clause résolutoire à la suite du défaut de paiement des loyers, obtenir son expulsion et sa condamnation à lui payer une provision de 86.922,36 euros à valoir sur loyers impayés au jour de la résiliation du bail, les intérêts au taux légal majoré de 2 points à compter du 27 août 2024, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, une indemnité d’occupation de 11.997,90 euros TTC à compter du 1er octobre 2024, 8.692,23 euros au titre de la clause pénale et une indemnité de 2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile outre les dépens incluant le commandement de payer d’un montant de 397,53 euros.
Assignée selon les formes prévues à l’article 654 du code de procédure civile, la société B2 Villepinte n’a pas comparu.
Conformément à l’article 446-1 du code de procédure civile, pour plus ample informé de l’exposé et des prétentions des parties, il est renvoyé à l’assignation introductive d’instance et aux écritures déposées et développées oralement à l’audience.
Selon l’article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.
Aux termes de l’article L145-41 du code de commerce, « toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai. Les juges saisis d’une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l’article 1343-5 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n’est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l’autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge. »
Par ailleurs, les dispositions de l’article 835 alinéa 2 du code de procédure civile prévoient que, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le juge des référés peut accorder une provision au créancier.
En l’espèce, la société Clichy produit un commandement de payer signifié le 27 août 2024 d’où il ressort que la preneuse était débitrice de la somme de 105.492,36 euros au titre des loyers et charges du bail.
La société Clichy produit en outre un décompte pour la période du 1er janvier au 26 août 2024.
Par suite, aucun décompte n’est produit pour la période allant du 27 août au 28 septembre 2024, date à laquelle le commandement de payer prenait son plein effet.
Le juge des référés, juge de l’évidence n’est donc pas en mesure de vérifier les conditions dans lesquelles la société B2 Villepinte a réagi suite à la signification du commandement de payer.
La production d’une impression d’écran de téléphone portable portant mention d’un virement entre deux entités qui ne figurent pas comme des parties à l’instance et pour un montant dont le détail n’est pas établi n’est pas probant.
Sans inverser la charge de la preuve, il appartient à la bailleresse demanderesse à l’acquisition de la clause résolutoire, de caractériser la défaillance de la preneuse et le défaut de paiement des loyers et charges dans le mois de la signification du commandement de payer.
Faute pour la bailleresse de produire un décompte exhaustif arrêté postérieurement à l’expiration du délai d’un mois de la signification du 27 août 2024, le juge n’est pas en mesure de s’assurer que la preneuse ne s’est pas acquittée de ces sommes dans le mois du commandement et il ne peut être fait droit à ses demandes.
En l’état des pièces produites, il n’y a pas lieu à référé sur la demande d’acquisition de la clause résolutoire de la société Clichy ni sur les demandes d’expulsion, de condamnation au paiement d’une indemnité d’occupation et de la clause pénale.
Quant à la demande de paiement d’une provision à valoir sur les loyers et charges, force est de constater que la société Clichy ne produit pas les factures ou appels de loyers pour toute la période dont elle demande le paiement. La société Clichy forme en outre une demande de provision sans préciser le dernier terme inclus à la période de recouvrement. La demande parait insuffisamment établie dans les faits. Il n’y a donc pas lieu à référé sur les demandes en paiement tant de la provision des loyers et charges que des intérêts, de l’astreinte et de la clause pénale.
Les dépens ainsi que les frais irrépétibles seront laissés à la charge de la société Clichy.
Statuant en référé, par remise au greffe le jour du délibéré, après débats en audience publique, par décision réputée contradictoire et en premier ressort,
Dit n’y avoir lieu à référé sur l’ensemble des demandes de la société Clichy;
Condamne la société Clichy aux dépens ;
Déboute la société Clichy de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Rappel que la présente décision est exécutoire par provision.
AINSI JUGÉ AU PALAIS DE JUSTICE DE BOBIGNY, LE 17 JANVIER 2025.
LA GREFFIÈRE
Fatma BELLAHOYEID
LA JUGE DES RÉFÉRÉS
Mechtilde CARLIER
Laisser un commentaire