Tribunal judiciaire de Marseille, 16 janvier 2025, RG n° 23/11802
Tribunal judiciaire de Marseille, 16 janvier 2025, RG n° 23/11802

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Marseille

Thématique : État civil et nationalité : exigences de preuve et conformité des documents.

Résumé

Présentation de Monsieur [Y] [D]

Monsieur [Y] [D] est né le 8 décembre 1984 à [Localité 2] en Tunisie. Il a épousé Madame [I] [P] le 11 novembre 2017 à [Localité 2]. Leur mariage a été enregistré le 24 janvier 2018 au service central de l’état civil du ministère des affaires étrangères.

Demande de nationalité française

Le 21 avril 2022, Monsieur [D] a soumis une déclaration de nationalité française, qui a été refusée par le ministre de l’Intérieur le 15 juin 2023. En réponse, il a assigné le procureur de la République par acte de commissaire de justice le 21 novembre 2023, et a reçu un récépissé le 12 janvier 2024.

Arguments de Monsieur [D]

Dans ses conclusions du 31 mai 2024, Monsieur [D] demande l’enregistrement de sa déclaration de nationalité française, affirmant qu’il justifie d’un état civil certain grâce à son acte de naissance. Il souligne également que son épouse a été inscrite au registre des Français établis hors de France et qu’il a produit des preuves de leur communauté de vie entre 2017 et 2023.

Réponse du procureur de la République

Le procureur de la République a conclu le 29 août 2024 au rejet des demandes de Monsieur [D], arguant que son acte de naissance ne respecte pas la loi tunisienne, notamment en raison de l’absence de mentions essentielles. Il a également noté que la preuve de la nationalité de Madame [P] n’était pas établie et que les documents fournis ne démontraient pas une communauté de vie suffisante.

Ordonnance de clôture et demande de révocation

L’ordonnance de clôture a été rendue le 3 septembre 2024. Monsieur [D] a ensuite demandé la révocation de cette ordonnance pour produire de nouvelles pièces, mais le tribunal a statué qu’aucune cause grave n’avait été justifiée pour cette révocation.

Analyse des preuves d’état civil

Le tribunal a rappelé que la charge de la preuve incombe à Monsieur [D], qui doit fournir des pièces d’état civil fiables. Les actes de naissance qu’il a présentés ne respectent pas les exigences de la loi tunisienne, notamment en ce qui concerne les mentions obligatoires et la qualité du déclarant.

Décision du tribunal

Le tribunal a décidé de ne pas révoquer l’ordonnance de clôture, a constaté que les diligences avaient été respectées, et a débouté Monsieur [D] de ses demandes. Il a déclaré que Monsieur [D] n’était pas français et a ordonné la mention de cette décision dans les registres. Monsieur [D] a été condamné aux dépens.

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

PREMIERE CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT N° 25/ DU 16 Janvier 2025

Enrôlement : N° RG 23/11802 – N° Portalis DBW3-W-B7H-4FP2

AFFAIRE : M. [Y] [D] (AARPI GIOVANNANGELI COLAS)
C/ M. LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DE MARSEILLE

DÉBATS : A l’audience Publique du 14 Novembre 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : SPATERI Thomas, Vice-Président (juge rapporteur)
Assesseur : BERGER-GENTIL Blandine, Vice-Présidente
Assesseur : BERTHELOT Stéphanie, Vice-Présidente

Greffier lors des débats : BESANÇON Bénédicte

En présence de PORELLI Emmanuelle, Vice-Procureure, Procureur de la République

Vu le rapport fait à l’audience

A l’issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 16 Janvier 2025

Jugement signé par SPATERI Thomas, Vice-Président et par ALLIONE Bernadette, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

NATURE DU JUGEMENT

contradictoire et en premier ressort

NOM DES PARTIES

DEMANDEUR

Monsieur [Y] [D]
né le 08 Décembre 1984 à [Localité 2] (TUNISIE)
de nationalité Tunisienne, demeurant [Adresse 1]

représenté par Maître Valérie COLAS de l’AARPI GIOVANNANGELI COLAS, avocat au barreau de DRAGUIGNAN substituée par Maître TOSCANO

C O N T R E

DEFENDEUR

M. LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DE MARSEILLE PRES LE TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE
en son Parquet sis [Adresse 3]

dispensé du ministère d’avocat

EXPOSÉ DU LITIGE :

Monsieur [Y] [D] est né le 8 décembre 1984 à [Localité 2] (Tunisie).

Le 11 novembre 2017 il a épousé à [Localité 2] madame [I] [P], née le 19 juin 1989 à [Localité 4]. Ce mariage a été transcrit sur les registres du service central de l’état civil du ministère des affaires étrangères le 24 janvier 2018.

Il a souscrit le 21 avril 2022 une déclaration de nationalité française sur le fondement de l’article 21-2 du code civil, dont l’enregistrement a été refusé par le ministre de l’Intérieur le 15 juin 2023.

Par acte de commissaire de justice du 21 novembre 2023 monsieur [D] a fait assigner le procureur de la République. Le récépissé prévu à l’article 1040 du code de procédure civile a été délivré le 12 janvier 2024.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 31 mai 2024 monsieur [D] demande au tribunal d’ordonner l’enregistrement de sa déclaration de nationalité française et de dire qu’il est français.
Au soutien de ses demandes il fait valoir qu’il justifie d’un état civil certain par la production de son acte de naissance, que son épouse a été inscrite au registre des français établis hors de France de Tunis du 31 mars 2016 au 15 juin 2019 et de Montréal du 17 juin 2019 au 20 novembre 2020, que la communauté de vie est démontrée entre 2017 et 2023 à l’aide d’attestations, de photographies et d’avis d’imposition qu’il produit, et qu’il possède une connaissance suffisante de la langue française.

Le procureur de la République a conclu le 29 août 2024 au rejet des demandes et à la constatation de l’extranéité de monsieur [D] aux motifs que l’acte de naissance produit n’est pas conforme à la loi tunisienne du 1er août 1957 en ce qu’il ne mentionne pas l’heure de naissance de l’enfant, les date et lieu de naissance, profession et domicile du père, ni ceux du déclarant identifiée comme étant « l’hôpital de [Localité 2] » ce qui ne permet pas de vérifier que la naissance a été déclarée par une personne habilitée à le faire. Il ajoute que cet acte est incomplet dans la mesure où il n’est pas accompagné de l’expédition du jugement du tribunal de première instance de Tunis du 17 mai 1994 en exécution duquel il a été dressé. Le procureur de la République fait encore observer qu’un second exemplaire de l’acte de naissance est produit, portant des mentions marginales différentes du premier, ce qui est de nature à ôter toute force probante à chacune de ces pièces.
Il expose encore que la preuve de la nationalité de madame [P] n’est pas rapportée, celle-ci ne pouvant pas résulter de sa seule naissance en France, que les document produits sont insuffisants à établir une communauté de vie tant matérielle qu’affective entre le 11 novembre 2017 et le 21 avril 2022, les attestations et photographies n’étant relatives qu’à des moments festifs avant l’année 2020, et que les extraits de casiers judiciaires produits sont postérieurs à la déclaration de nationalité alors que l’article 8 du décret du 30 décembre 1993 impose de vérifier cette condition à la date de la souscription de cette déclaration.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 3 septembre 2024.

Le demandeur a par la suite sollicité la révocation de l’ordonnance de clôture afin de produire de nouvelles pièces.

PAR CES MOTIFS :

Le tribunal, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort :

Dit n’y avoir lieu à révocation de l’ordonnance de clôture ;

Constate qu’il a été satisfait aux diligences de l’article 1040 du code de procédure civile ;

Déboute monsieur [Y] [D] de ses demandes ;

Dit que monsieur [Y] [D], né le 8 décembre 1984 à [Localité 2] (Tunisie), n’est pas français ;

Ordonne la mention prévue à l’article 28 du code civil ;

Condamne monsieur [Y] [D] aux dépens.

AINSI JUGÉ, PRONONCÉ ET MIS À DISPOSITION AU GREFFE DE LA PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE LE SEIZE JANVIER DEUX MILLE VINGT CINQ.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

 


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