Tribunal judiciaire de Marseille, 14 janvier 2025, RG n° 19/01870
Tribunal judiciaire de Marseille, 14 janvier 2025, RG n° 19/01870

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Marseille

Thématique : Imputabilité des Lésions et Durée des Arrêts de Travail : Clarifications Juridiques

Résumé

Contexte de l’accident

Monsieur [W] [G], employé en tant que coffreur dans la société [8], a subi un accident du travail le 4 décembre 2013. Cet incident a été pris en charge par la caisse primaire d’assurance maladie des Bouches-du-Rhône (CPAM). Selon la déclaration d’accident, le salarié a trébuché en portant un morceau de bastaing, qui lui est tombé sur la main, entraînant des lésions au pouce et à l’index droit.

Évaluation médicale et prise en charge

Un certificat médical établi le 6 décembre 2013 a confirmé une fracture du doigt. La CPAM a notifié à l’employeur, le 13 décembre 2013, la prise en charge de l’accident, notification qui n’a pas été contestée. Les symptômes de la fracture ont persisté, entraînant des prolongations d’arrêt de travail et de soins jusqu’à la date de consolidation fixée au 20 juillet 2016.

Contestation de la prise en charge

Le 3 juillet 2018, la société [8] a contesté la prise en charge des arrêts de travail de Monsieur [W] [G] auprès de la commission de recours amiable de la CPAM. Cette contestation a été rejetée par la commission le 18 décembre 2018. Par la suite, la société a introduit un recours contentieux devant le tribunal judiciaire de Marseille.

Demandes de la société [8]

La société [8] a demandé au tribunal d’ordonner une expertise médicale pour déterminer les arrêts de travail et les lésions imputables à l’accident, ainsi que d’évaluer si d’autres pathologies étaient à l’origine de certains arrêts. Elle a également demandé que la CPAM communique le dossier médical du salarié et que les frais d’expertise soient à la charge de la CPAM.

Position de la CPAM

La CPAM a demandé le rejet de la demande d’expertise de la société [8], affirmant que la présomption d’imputabilité des lésions à l’accident s’étendait à toute la durée d’incapacité de travail. Elle a soutenu que l’employeur devait prouver le contraire pour contester cette présomption.

Décision du tribunal

Le tribunal a statué en faveur de la CPAM, confirmant que la présomption d’imputabilité s’appliquait à l’ensemble des soins et arrêts de travail consécutifs à l’accident. La société [8] a été déboutée de ses demandes, et le tribunal a déclaré opposables à celle-ci tous les arrêts de travail de Monsieur [W] [G]. De plus, la société a été condamnée à verser 800 € à la CPAM au titre des frais de justice.

REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 6]
[Adresse 6]
[Localité 4]

JUGEMENT N°25/00043 du 14 Janvier 2025

Numéro de recours: N° RG 19/01870 – N° Portalis DBW3-W-B7D-WCAR

AFFAIRE :
DEMANDERESSE
S.A.S. [8]
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Me Laurence LEVETTI, avocat au barreau de MARSEILLE

c/ DEFENDERESSE
Organisme CPAM13
[Adresse 5]
[Localité 3]
représentée par Mme [E] [S] (Autre) munie d’un pouvoir spécial

DÉBATS : À l’audience publique du 12 Novembre 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Président : PASCAL Florent, Vice-Président

Assesseurs : DEODATI Corinne
CASANOVA Laurent

L’agent du greffe lors des débats : RAKOTONIRINA Léonce,

À l’issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 14 Janvier 2025

NATURE DU JUGEMENT

Contradictoire et en premier ressort

EXPOSÉ DU LITIGE :

Monsieur [W] [G], coffreur au sein de la société [8], a été victime d’un accident le 4 décembre 2013 pris en charge au titre de la législation sur les risques professionnels par la caisse primaire d’assurance maladie des Bouches-du-Rhône (ci-après la CPAM ou la caisse).

La déclaration d’accident du travail établie le 5 décembre 2013 par la société [8] mentionne les circonstances suivantes : « Le salarié a trébuché alors qu’il portait un morceau de bastaing pour réaliser un coffrage. Le bastaing lui est retombé sur la main ».
Le siège des lésions sont le pouce et l’index droit.

Le certificat médical initial établi le 6 décembre 2013 par le centre hospitalier régional [Localité 7] Conception, fait état des lésions suivantes : fracture D2 droit.

Par notification du 13 décembre 2013, non contestée, la CPAM des Bouches-du-Rhône a informé l’employeur de la prise en charge de l’accident au titre de la législation sur les risques professionnels.

La persistance des symptômes de la fracture a donné lieu à des prolongations de l’arrêt initial et des soins, sans interruption jusqu’à la date de consolidation fixée au 20 juillet 2016.

Par courrier du 3 juillet 2018, la société [8] a saisi la commission de recours amiable de la CPAM des Bouches-du-Rhône d’une contestation de la prise en charge de l’intégralité des arrêts de travail de Monsieur [W] [G] au titre de la législation sur les risques professionnels.

Par décision du 18 décembre 2018, la commission de recours amiable de la CPAM a rejeté la contestation de la société [8].

Par requêtes expédiées les 18 octobre 2018 et 15 février 2019, la société [8], représentée par son conseil, a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Marseille d’un recours contentieux à l’encontre des décisions implicite puis explicite de rejet de la commission de recours amiable.

Après mise en état, l’affaire a été appelée à l’audience du 12 novembre 2024.

La société [8], s’en rapportant à ses écritures, demande au tribunal :
d’ordonner avant dire droit une expertise médicale judiciaire sur pièce avec pour mission notamment d’établir quels sont les arrêts de travail et lésions imputables à l’accident du travail du 4 décembre 2013, de déterminer si une pathologie évoluant pour son propre compte et indépendante de l’accident du travail du 4 décembre 2013 est à l’origine d’une partie des arrêts de travail, et de fixer la durée des arrêts de travail et des soins en relation directe et certaine avec l’accident du travail, et la date de consolidation ; d’ordonner à la CPAM des Bouches-du-Rhône de communiquer à son médecin-conseil l’entier dossier médical du salarié et de mettre à la charge de la CPAM des Bouches-du-Rhône les frais d’expertise ;
débouter la CPAM des Bouches-du-Rhône aux de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient essentiellement que la durée des arrêts de travail est disproportionnée compte tenu de la nature de l’accident et des lésions initialement constatées ; que l’employeur n’a pas accès au dossier médical de son salarié, le privant de toute possibilité de recours effectif ; que le seul moyen de concilier l’intérêt de toutes les parties réside dans l’expertise judiciaire.

La CPAM des Bouches-du-Rhône, représentée par une inspectrice juridique soutenant ses conclusions, demande pour sa part au tribunal de :
rejeter la demande d’expertise de la société [8] ; déclarer opposable à la société [8] l’ensemble des arrêts de travail et soins du salarié entre le 4 décembre 2013 et la date de consolidation du 20 juillet 2016 ; condamner la société [8] à lui payer la somme de 1.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient essentiellement que, conformément à une jurisprudence constante de la Cour de Cassation, la présomption d’imputabilité au travail des lésions apparues à la suite d’un accident du travail, s’étend à toute la durée d’incapacité de travail précédant la guérison ou la consolidation de l’état de santé de la victime et qu’il appartient à l’employeur qui conteste cette présomption d’en rapporter la preuve contraire.

Elle fait valoir qu’en l’espèce la présomption d’imputabilité des soins et arrêts de travail suite à l’accident du travail du 4 décembre 2013 est avérée, tandis que l’absence d’élément versé aux débats par la société [8] ne justifie pas que soit ordonnée une expertise médicale.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer aux pièces et conclusions déposées par les parties à l’audience, reprenant l’exposé complet de leurs moyens et prétentions.

L’affaire a été mise en délibéré au 14 janvier 2025.

PAR CES MOTIFS,

Le tribunal, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort,

DÉBOUTE la société [8] de l’ensemble de ses demandes ;

DÉCLARE opposables à la société [8] l’ensemble des soins et arrêts de travail consécutifs à l’accident du travail de Monsieur [W] [G] survenu le 4 décembre 2013 ;

CONDAMNE société [8] à verser à la caisse primaire centrale d’assurance maladie des Bouches-du-Rhône la somme de 800 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société [8] aux dépens ;

DIT que tout appel de la présente décision, doit, à peine de forclusion, être formé dans le mois de la réception de sa notification.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe le 14 janvier 2025.

L’AGENT DU GREFFE LE PRÉSIDENT

 


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