L’Essentiel : Monsieur [N] [B] a subi un accident du travail le 21 septembre 2020, pris en charge par la CPAM des Bouches-du-Rhône. Le 2 décembre 2020, la CPAM a fixé la date de consolidation de ses lésions au 2 mars 2021, sans séquelles indemnisables. Contestant cette décision, Monsieur [N] [B] a demandé une expertise médicale. Le 28 février 2022, la CPAM a confirmé sa décision, entraînant un recours devant la commission de recours amiable, qui a été rejeté. Lors de l’audience du 12 novembre 2024, le tribunal a annulé l’expertise initiale et ordonné une nouvelle évaluation médicale.
|
Accident du travail et prise en chargeMonsieur [N] [B] a subi un accident du travail le 21 septembre 2020, qui a été pris en charge par la CPAM des Bouches-du-Rhône selon la législation sur les risques professionnels. Décision de la CPAMLe 2 décembre 2020, la CPAM a informé Monsieur [N] [B] que la date de consolidation de ses lésions était fixée au 2 mars 2021, sans séquelles indemnisables. Monsieur [N] [B] a contesté cette décision et a demandé une expertise médicale. Expertise médicale et contestationLe 28 février 2022, la CPAM a confirmé que, suite à une expertise médicale réalisée le 2 mars 2021, la date de consolidation restait le 2 mars 2021. Monsieur [N] [B] a alors contesté cette décision devant la commission de recours amiable. Recours contentieuxLe 13 juillet 2022, Monsieur [N] [B], assisté de son conseil, a saisi le tribunal judiciaire de Marseille d’un recours contre la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable. La commission a rejeté son recours le 26 juillet 2022. Demande au tribunalLors de l’audience du 12 novembre 2024, Monsieur [N] [B] a demandé au tribunal d’infirmer la décision de la CPAM, d’annuler l’expertise du 2 mars 2021, et de condamner la CPAM à lui verser 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Position de la CPAMLa CPAM, représentée par une inspectrice juridique, a exprimé son accord pour annuler l’expertise du Dr [K] [L] et a demandé la mise en œuvre d’une nouvelle expertise. Nullité de l’expertiseLe tribunal a constaté que l’expertise du Dr [K] [L] était nulle en raison de l’absence de communication de son rapport, ce qui constitue une violation du principe du contradictoire. Ordonnance d’une nouvelle expertiseLe tribunal a ordonné à la CPAM des Bouches-du-Rhône d’organiser une nouvelle expertise médicale pour évaluer l’état de santé de Monsieur [N] [B] en lien avec son accident du travail, précisant les modalités de cette expertise. Décision finaleLe tribunal a annulé l’expertise du 2 mars 2021, ordonné la mise en œuvre d’une nouvelle expertise aux frais de la CPAM, et réservé le surplus des demandes des parties. L’exécution provisoire de la décision a également été ordonnée. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la procédure d’expertise médicale en cas de contestation de l’état de santé d’un assuré ?La procédure d’expertise médicale en cas de contestation de l’état de santé d’un assuré est régie par l’article L.141-1 du code de la sécurité sociale. Cet article stipule que les contestations d’ordre médical relatives à l’état du malade ou à l’état de la victime, notamment concernant la date de consolidation en cas d’accident du travail, doivent donner lieu à une procédure d’expertise médicale. Cette procédure est précisée par les articles R.141-1 et suivants, qui établissent que les contestations sont soumises à un médecin expert désigné par le service du contrôle médical. Ce dernier doit préciser les questions posées. L’article R.141-4 précise que le médecin expert doit informer l’assuré des détails de l’examen, et qu’il doit procéder à l’examen dans un délai de huit jours suivant la réception du protocole. Il est également stipulé que le rapport du médecin expert doit être communiqué au service du contrôle médical et à l’assuré dans des délais précis, garantissant ainsi le respect du principe du contradictoire. En l’espèce, l’absence de communication du rapport du médecin expert a conduit à la nullité de l’expertise, ce qui souligne l’importance de ces formalités. Quelles sont les conséquences de la nullité de l’expertise médicale ?La nullité de l’expertise médicale a des conséquences significatives sur la procédure. Selon l’article R.142-17-1 du code de la sécurité sociale, lorsque le litige révèle une difficulté d’ordre médical, la juridiction ne peut statuer qu’après la mise en œuvre de la procédure d’expertise médicale prévue à l’article L.141-1. Dans le cas présent, la nullité de l’expertise réalisée par le docteur [K] [L] a conduit le tribunal à ordonner une nouvelle expertise. Cela est nécessaire pour apprécier l’état de santé de l’assuré en lien avec son accident du travail. La décision du tribunal de déclarer nulle l’expertise du 2 mars 2021 implique que toutes les conclusions tirées de cette expertise ne peuvent être prises en compte. Ainsi, le tribunal a ordonné à la CPAM des Bouches-du-Rhône d’organiser une nouvelle mesure d’expertise, ce qui est essentiel pour garantir que les droits de l’assuré soient respectés et que la décision soit fondée sur des éléments probants. Quels sont les droits de l’assuré en matière d’expertise médicale ?Les droits de l’assuré en matière d’expertise médicale sont clairement établis par les articles du code de la sécurité sociale. L’article R.141-4, par exemple, stipule que l’assuré a le droit d’être informé des détails de l’examen et peut être accompagné par un médecin de son choix. De plus, l’assuré a le droit de recevoir une copie intégrale du rapport du médecin expert, ce qui est une formalité substantielle pour assurer le respect du principe du contradictoire. L’absence de communication de ce rapport constitue une violation des droits de l’assuré, entraînant la nullité de l’expertise. Cela souligne l’importance de la transparence et de l’information dans le cadre des procédures d’expertise médicale. En conséquence, l’assuré a le droit de contester les décisions prises sur la base d’une expertise nulle et de demander une nouvelle expertise, comme cela a été ordonné dans le présent litige. Quelles sont les implications de l’article 700 du code de procédure civile dans ce litige ?L’article 700 du code de procédure civile permet au juge de condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés pour la défense de ses droits. Dans le cadre de ce litige, Monsieur [N] [B] a demandé la condamnation de la CPAM des Bouches-du-Rhône à lui verser une somme de 1.500 € en application de cet article. Le tribunal, en statuant sur cette demande, doit prendre en compte les circonstances de l’affaire, notamment la complexité du litige et les frais engagés par l’assuré pour faire valoir ses droits. Il est important de noter que cette somme est destinée à couvrir les frais de justice et ne constitue pas une indemnisation pour le préjudice subi. Ainsi, l’article 700 permet de garantir un certain équilibre entre les parties en matière de frais de justice, ce qui est particulièrement pertinent dans les litiges liés aux accidents du travail et à la sécurité sociale. |
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE
POLE SOCIAL
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 2]
JUGEMENT N°25/00052 du 14 Janvier 2025
Numéro de recours: N° RG 22/01889 – N° Portalis DBW3-W-B7G-2H52
AFFAIRE :
DEMANDEUR
Monsieur [N] [B]
né le 10 Janvier 1980 à [Localité 6] (BOUCHES-DU-RHONE)
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 1]
représenté par Me Julie ANDREU, avocat au barreau de MARSEILLE
c/ DEFENDERESSE
Organisme CPAM 13
*
[Localité 3]
représentée par Mme [C] [M] (Autre) munie d’un pouvoir spécial
DÉBATS : À l’audience publique du 12 Novembre 2024
COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :
Président : PASCAL Florent, Vice-Président
Assesseurs : DEODATI Corinne
CASANOVA Laurent
L’agent du greffe lors des débats : RAKOTONIRINA Léonce,
À l’issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 14 Janvier 2025
NATURE DU JUGEMENT
Contradictoire et en premier ressort
Monsieur [N] [B] a été victime d’un accident du travail le 21 septembre 2020, qui a été pris en charge par la caisse primaire d’assurance maladie (ci-après la CPAM) des Bouches-du-Rhône au titre de la législation sur les risques professionnels.
Par courrier du 2 décembre 2020, la CPAM des Bouches-du-Rhône a informé Monsieur [N] [B] que, après avis du médecin conseil, la date de consolidation des lésions issues de l’accident du travail était fixée au 2 mars 2021 et qu’il ne subsistait pas de séquelles indemnisables.
L’intéressé a contesté cette décision et sollicité la mise en œuvre d’une expertise médicale.
Par courrier du 28 février 2022, la CPAM des Bouches-du-Rhône a informé Monsieur [N] [B] que, après expertise médicale réalisée par le docteur [K] [L] le 2 mars 2021 en application des dispositions de l’article L.141-1 du code de la sécurité sociale, la date de consolidation de lésions issues de l’accident du travail du 21 septembre 2020 était repoussée à la date du 2 mars 2021.
Monsieur [N] [B] a contesté cette décision devant la commission de recours amiable de la CPAM des Bouches-du-Rhône par courrier du 23 mars 2022.
Par requête expédiée le 13 juillet 2022, Monsieur [N] [B], représenté par son conseil, a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Marseille d’un recours contentieux à l’encontre de la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable de la CPAM saisie de sa contestation de la date de guérison.
Par décision du 26 juillet 2022, la commission de recours amiable a rejeté le recours de M. [N] [B].
Après une phase de mise en état, l’affaire a été appelée à l’audience du 12 novembre 2024.
Monsieur [N] [B], représenté par son conseil soutenant oralement ses écritures, demande au tribunal de :
– déclarer recevable et bien fondé son recours ;
– infirmer la décision de la commission de recours amiable de la CPAM des Bouches-du-Rhône ;
À titre principal,
– annuler l’expertise réalisée le 2 mars 2021 par le docteur [K] [L] ;
– annuler les notifications de guérison en date des 2 décembre 2020 et 28 février 2022 ;
– condamner la CPAM des Bouches-du-Rhône à lui verser la somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
À titre subsidiaire,
– ordonner à la CPAM de diligenter une nouvelle mesure d’expertise médicale technique en application de l’ancien article L.141-1 du code de la sécurité sociale, avec pour mission confiée à l’expert de dire si l’état de santé de M. [N] [B] en lien avec son accident du travail du 21 septembre 2020 peut être considéré comme guéri ou consolidé et, dans l’affirmative, d’en préciser la date;
– ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir.
En réplique, la CPAM des Bouches-du-Rhône, représentée par une inspectrice juridique, indique ne pas s’opposer à l’annulation de l’expertise du Dr [L], dont le rapport n’a jamais été reçu, et demande au tribunal d’ordonner la mise en œuvre d’une nouvelle expertise en application des dispositions de l’article L.141-1 du code de la sécurité sociale.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile il est renvoyé aux pièces et conclusions déposées par les parties à l’audience pour un exposé plus ample de leurs moyens et prétentions.
L’affaire a été mise en délibéré au 14 janvier 2025.
Sur la nullité de l’expertise du docteur [K] [L]
L’article L.141-1 du code de la sécurité sociale, dans sa version en vigueur jusqu’au 1er janvier 2022, prévoit que les contestations d’ordre médical relatives à l’état du malade ou à l’état de la victime, et notamment à la date de consolidation en cas d’accident du travail et de maladie professionnelle, donnent lieu à une procédure d’expertise médicale dans les conditions fixées par décret en Conseil d’Etat.
En application de cette disposition, les articles R.141-1 et suivants du même code, dans leur version applicable au litige, prévoient que les contestations sont soumises à un médecin expert désigné par le service du contrôle médical qui doit préciser l’énoncé des questions qui lui sont posées.
Et l’article R.141-4 de préciser :
» Le médecin expert, informe immédiatement l’assuré, des lieu, date et heure de l’examen. Il en informe également le service du contrôle médical fonctionnant auprès de la caisse, dont la décision est contestée, qui peut être représenté par un médecin-conseil pour assister à l’expertise.
Il procède à l’examen de l’assuré, dans les huit jours suivant la réception du protocole mentionné à l’article R. 141-3, au cabinet de l’expert ou à la résidence de l’assuré si celui-ci ne peut se déplacer. L’assuré peut être accompagné du médecin de son choix.
Il peut toutefois, compte tenu de la nature du litige, du rapport mentionné à l’article L.142-6 et des pièces communiquées par l’assuré ou par le service médical, décider qu’il n’y a pas lieu de procéder à l’examen clinique de l’assuré, auquel cas il statue sur pièces.
Le rapport du médecin comporte l’exposé des constatations qu’il a faites au cours de son examen, clinique ou sur pièces, la discussion des points qui lui ont été soumis et ses conclusions motivées.
Le médecin expert communique son rapport au service du contrôle médical fonctionnant auprès de la caisse, dont la décision est contestée, avant l’expiration du délai de quinze jours à compter de l’examen clinique ou, en l’absence de celui-ci, dans un délai de vingt jours à compter de la réception du protocole mentionné à l’article R. 141-3.
Le service du contrôle médical fonctionnant auprès de la caisse dont la décision est contestée adresse immédiatement une copie intégrale du rapport à l’assuré. »
Suite à la transmission de l’avis de l’expert par le service du contrôle médical fonctionnant auprès d’elle, la caisse dont la décision est contestée prend une nouvelle décision conforme à cet avis et la notifie à l’assuré dans un délai maximum de quinze jours suivant la réception de l’avis.
Dans ces conditions, la communication d’une copie intégrale du rapport du médecin expert à l’assuré constitue une formalité substantielle permettant d’assurer le respect du principe du contradictoire de la décision qui doit nécessairement suivre l’avis de l’expert.
L’omission par l’expert d’adresser ses conclusions motivées et son rapport au service du contrôle médical entraîne la nullité du rapport d’expertise.
En l’espèce, le docteur [K] [L] a procédé à l’examen de Monsieur [N] [B] le 2 mars 2021, en concluant seulement : » Non, l’état de l’assuré victime d’un accident de travail le 21/9/20 ne peut être considéré comme guéri le 15/10/2020 – Guéri le 2/3/2021 date expertise « .
Le médecin expert, malgré les relances du service de contrôle médical et de M. [B], n’a jamais fait parvenir son rapport.
En conséquence, en l’absence de communication de tout rapport, l’expertise médicale technique réalisée le 2 mars 2021 par le docteur [K] [L] doit être déclarée nulle et de nul effet.
L’ancien article R.142-17-1 du code de sécurité sociale dispose que lorsque le litige fait apparaître en cours d’instance une difficulté d’ordre médical relative à l’état de l’assuré, du bénéficiaire ou de la victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, notamment à la date de la consolidation ou de la guérison, la juridiction ne peut statuer qu’après mise en œuvre de la procédure d’expertise médicale prévue à l’article L141-1.
La solution du présent litige dépend bien de l’appréciation de l’état de santé de l’assuré en lien avec son accident du travail du 21 septembre 2020.
Dès lors, il y a lieu d’ordonner la mise en œuvre par la CPAM des Bouches-du-Rhône d’une nouvelle expertise médicale technique conformément aux dispositions de l’article L.141-1 susvisé.
Les demandes plus amples des parties seront réservées.
Le tribunal, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort,
ANNULE l’expertise médicale technique du docteur [K] [L] en date du 2 mars 2021 ;
AVANT DIRE DROIT :
ORDONNE à la CPAM des Bouches-du-Rhône d’organiser une mesure d’expertise conformément aux dispositions des articles L.141 1 et R.141 1 et suivants du code de la sécurité Sociale, la mission confiée à l’expert étant de :
– convoquer les parties ;
– entendre les parties en leurs observations ;
– se faire remettre l’ensemble des certificats médicaux et tous documents administratifs médicaux qui pourraient être utiles ;
– dire si l’état de l’assuré, victime d’un accident du travail le 21 septembre 2020, pouvait être considéré comme guéri le 15 octobre 2020 ;
– dans la négative, préciser la date à laquelle l’état de santé de M. [N] [B], en lien avec son accident du travail du 21 septembre 2020, peut être considéré comme guéri ou consolidé ;
DIT que l’expertise aura lieu aux frais avancés de la CPAM des Bouches du Rhône ;
RÉSERVE le surplus des demandes des parties ;
ORDONNE l’exécution provisoire de la présente décision.
Conformément aux dispositions de l’article 538 du code de procédure civile, tout appel de la présente décision doit être formé, à peine de forclusion, dans le délai d’un mois à compter de la réception de sa notification.
Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe le 14 janvier 2025.
L’AGENT DU GREFFE LE PRÉSIDENT
Notifié le :
Laisser un commentaire