Prescription et indemnisation : enjeux d’une demande d’indemnités journalières non justifiée.

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Prescription et indemnisation : enjeux d’une demande d’indemnités journalières non justifiée.

L’Essentiel : Monsieur [M] [F] a soumis des arrêts de travail à la Caisse Primaire d’assurance maladie de [Localité 6] pour la période du 15 au 22 janvier 2018. Le 3 mai 2022, la Caisse a refusé son indemnisation, invoquant un dépassement de délai pour fournir les pièces justificatives. En réponse, Monsieur [M] [F] a saisi la Commission de recours Amiable, puis le Tribunal Judiciaire de Paris. Lors de l’audience, il a affirmé n’avoir perçu aucune indemnité et a contesté le montant reçu en août 2024. Le Tribunal a finalement débouté ses demandes, constatant l’absence de preuve d’un préjudice.

Transmission des arrêts de travail

Monsieur [M] [F] a soumis à la Caisse Primaire d’assurance maladie de [Localité 6] des arrêts de travail couvrant la période du 15 au 22 janvier 2018.

Refus d’indemnisation

Le 3 mai 2022, la Caisse a informé Monsieur [M] [F] de son refus d’indemnisation, invoquant le dépassement du délai de deux ans pour fournir les pièces justificatives nécessaires, notamment les bulletins de paie pour la période du 1er janvier 2017 au 31 juillet 2017.

Recours auprès de la Commission de recours Amiable

En réponse à ce refus, Monsieur [M] [F] a saisi la Commission de recours Amiable le 22 juin 2022 pour contester la décision de la Caisse concernant le paiement des indemnités journalières.

Saisine du Tribunal Judiciaire

Face à l’absence de réponse de la Commission, Monsieur [M] [F] a déposé une requête auprès du Pôle Social du Tribunal Judiciaire de Paris le 27 décembre 2022, reçue le 29 décembre 2022.

Audience et déclarations de Monsieur [M] [F]

Les parties ont été convoquées à une audience le 24 avril 2024, qui a été renvoyée au 30 octobre 2024. Lors de cette audience, Monsieur [M] [F] a affirmé qu’il n’avait pas perçu d’indemnités journalières pour son arrêt de travail et a mentionné des difficultés à obtenir les attestations de salaire de son employeur.

Demandes de Monsieur [M] [F]

Monsieur [M] [F] a finalement reçu 163,90 euros en août 2024 pour des indemnités journalières, mais conteste ce montant, le jugeant insuffisant. Il réclame 205,10 euros pour les indemnités journalières, 230,76 euros pour les indemnités de prévoyance, 1.500 euros pour préjudice, et 1.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Position de la Caisse

La Caisse, représentée par son conseil, a demandé le rejet des demandes de Monsieur [M] [F], arguant de la prescription biennale et de l’absence de preuve d’un préjudice. Elle a également contesté le calcul des indemnités journalières réclamées par Monsieur [M] [F].

Décision du Tribunal

Le Tribunal a statué sur la demande principale en paiement, rappelant que l’action pour le paiement des prestations se prescrit par deux ans. Il a constaté que Monsieur [M] [F] avait transmis l’attestation de salaire hors délai, entraînant le rejet de ses demandes de paiement.

Demande de dommages-intérêts

Concernant la demande de dommages-intérêts, le Tribunal a noté qu’aucune faute de la Caisse n’avait été prouvée, puisque celle-ci ne pouvait pas traiter la demande sans l’attestation de salaire. Monsieur [M] [F] a donc été débouté de sa demande de dommages-intérêts.

Décision sur les dépens

Le Tribunal a décidé que chaque partie conserverait la charge de ses dépens, conformément à l’équité, et a débouté Monsieur [M] [F] de sa demande d’indemnisation au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Exécution provisoire

Enfin, le Tribunal a jugé qu’aucune circonstance particulière ne justifiait l’exécution provisoire de sa décision.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la durée de la prescription pour l’action en paiement des prestations de l’assurance maladie ?

L’article L.332-1 du Code de la sécurité sociale stipule que « l’action de l’assuré pour le paiement des prestations en espèces de l’assurance maladie se prescrit par deux ans, à compter du premier jour du trimestre suivant celui auquel se rapportent lesdites prestations ».

Cette prescription biennale commence à courir à partir du 1er avril 2018 pour les prestations dues à Monsieur [F] pour son arrêt de travail du 15 janvier 2018.

Ainsi, le délai de prescription a expiré le 1er avril 2020.

Monsieur [F] a transmis son attestation de salaire le 22 décembre 2021, soit bien après l’expiration de ce délai.

Par conséquent, la Caisse a pu légitimement refuser l’indemnisation en raison de la prescription.

Quelles sont les conditions pour obtenir des dommages-intérêts en cas de litige avec la Caisse ?

Selon l’article 1240 du Code civil, « tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».

Pour obtenir des dommages-intérêts, il est donc nécessaire de prouver l’existence d’une faute, d’un préjudice et d’un lien direct entre la faute et le préjudice.

Dans le cas présent, Monsieur [F] reproche à la Caisse de ne pas avoir fait droit à sa demande d’indemnisation.

Cependant, il n’a pas pu prouver que la Caisse avait commis une faute, car l’absence d’attestation de salaire ne permettait pas à la Caisse de traiter sa demande.

Ainsi, Monsieur [F] ne peut pas obtenir de dommages-intérêts.

Quelles sont les conséquences de la décision sur les dépens et les frais de justice ?

L’article 696 du Code de procédure civile précise que « la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie ».

Dans cette affaire, le tribunal a décidé que chacune des parties conservera la charge de ses dépens.

Cela signifie que Monsieur [F] et la Caisse devront assumer leurs propres frais de justice, sans que l’un soit condamné à payer les frais de l’autre.

De plus, Monsieur [F] a été débouté de sa demande de condamnation au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, qui permet de demander le remboursement des frais d’avocat.

Quelles sont les conditions pour ordonner l’exécution provisoire d’une décision judiciaire ?

L’article R142-10-6 al 1 du Code de la sécurité sociale stipule que « le tribunal peut ordonner l’exécution par provision de ses décisions ».

Cependant, cette exécution provisoire n’est pas systématique et doit être justifiée par des circonstances particulières.

Dans le cas présent, le tribunal a estimé qu’aucune circonstance particulière ne justifiait le prononcé de l’exécution provisoire.

Ainsi, la décision rendue par le tribunal ne sera pas exécutée de manière provisoire, et Monsieur [F] ne pourra pas obtenir de paiement immédiat des sommes réclamées.

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] 2 Expéditions exécutoires délivrées aux parties en LRAR le :
1 Expédition délivrée à Maître TABOURE en LS le :

PS ctx protection soc 3

N° RG 22/03312 – N° Portalis 352J-W-B7G-CYWOP

N° MINUTE :

Requête du :

27 Décembre 2022

JUGEMENT
rendu le 15 Janvier 2025
DEMANDEUR

Monsieur [M] [F]
[Adresse 1]
[Localité 2]

Comparant

DÉFENDERESSE

ASSURANCE MALADIE DE [Localité 6] DIRECTION CONTENTIEUX ET LUTTE CONTRE LA FRAUDE
POLE CONTENTIEUX GENERAL
[Adresse 5]
[Localité 3]

Représentée par Maître Amy TABOURE, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame RANDOULET, Magistrate
Monsieur GALANI, Assesseur
Madame SORDET, Assesseur

assistés de Marie LEFEVRE, Greffière

Décision du 15 Janvier 2025
PS ctx protection soc 3
N° RG 22/03312 – N° Portalis 352J-W-B7G-CYWOP

DEBATS

A l’audience du 30 Octobre 2024 tenue en audience publique, avis a été donné aux parties que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 15 Janvier 2025.

JUGEMENT

Rendu par mise à disposition au greffe
Contradictoire
en dernier ressort

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Monsieur [M] [F] a transmis à la Caisse Primaire d’assurance maladie de [Localité 6] (ci-après la Caisse) des arrêts de travail du 15 janvier 2018 au 22 janvier 2018.

Par courrier en date du 03 mai 2022, la Caisse a informé Monsieur [M] [F] du refus d’indemnisation de l’arrêt de travail au motif que l’assuré dépassé le délai de deux ans pour lui envoyer les pièces justificatives de sa demande à savoir ses bulletins de paie pour la période du 01/01/2017 au 31/07/2017.

Par courrier en date du 22 juin 2022, Monsieur [M] [F] a saisi la Commission de recours Amiable pour contester ce refus de paiement des indemnités journalières pour l’arrêt de travail du 15 janvier 2018.

En l’absence de réponse de la Commission de Recours Amiable et par requête en date du 27 décembre 2022 reçue au greffe le 29 décembre 2022, Monsieur [M] [F] a saisi le Pôle Social du Tribunal Judiciaire de Paris.

Les parties ont été convoquées à l’audience du 24 avril 2024. Après un renvoi, l’affaire a été retenue à l’audience du 30 octobre 2024 à laquelle les parties ont formulées leurs demandes et observations.

Monsieur [M] [F], comparant, déclare avoir été en arrêt maladie du 15 au 22 janvier 2018 et ne pas avoir perçu d’indemnités journalières sur cette période. Il fait valoir que la Caisse lui a demandé des attestations de salaire que son employeur n’a pas voulu lui remettre. Il indique qu’après un litige devant le Conseil des Prud’hommes, il a transmis lesdites attestations mais que la Caisse lui a alors indiqué que la transmission avait été réalisée hors délai.

Il indique avoir finalement perçu la somme de 163,90 euros au mois d’août 2024 au titre des indemnités journalières du 01/01/2017 au 31/07/2017. Il conteste le montant versé qu’il évalue à la somme de 205,10 euros et demande la condamnation de la Caisse à lui verser :
205,10 euros au titre des indemnités journalières, 230,76 euros au titre des indemnités de prévoyance [4], 1.500 euros au titre du préjudice subi 1.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
Il sollicite également que le Tribunal dise que les sommes susvisées porteront intérêts à compter de sa requête ainsi que la condamnation de la Caisse aux dépens.

La Caisse, représentée par son conseil, reprenant partiellement les termes de ses conclusions déposées à l’audience du 18 septembre 2024 et oralement, demande au Tribunal de :
Débouter Monsieur [F] de l’ensemble de ses demandes du fait de l’application de la prescription biennale, Débouter Monsieur [F] de sa demande d’indemnisation en l’absence de preuve d’un préjudice,
A titre subsidiaire, elle soulève que Monsieur [F] ne justifie pas du calcul du montant d’indemnités journalières qu’il réclame et qu’ainsi le Tribunal ne peut que retenir la somme régularisée par la CPAM dont le détail de calcul est détaillé dans les conclusions.

L’affaire a été mise en délibéré au 15 janvier 2025.

MOTIFS

Sur la demande principale en paiement

Selon l’article L.332-1 du code de la sécurité sociale, “’L’action de l’assuré pour le paiement des prestations en espèces de l’assurance maladie se prescrit par deux ans, à compter du premier jour du trimestre suivant celui auquel se rapportent lesdites prestations ; pour le paiement des prestations en espèces de l’assurance maternité, elle se prescrit par deux ans à partir de la date de la première constatation médicale de la grossesse.
L’action des ayants droit de l’assuré pour le paiement du capital prévu à l’article L. 361-1 se prescrit par deux ans à partir du jour du décès.
Cette prescription est également applicable, à compter du paiement des prestations entre les mains du bénéficiaire, à l’action intentée par un organisme payeur en recouvrement des prestations indûment payées, sauf en cas de fraude ou fausse déclaration”.

En l’espèce, Monsieur [F] a été placé en arrêt de travail du 15/01/2018 au 22/01/2018. A ce titre, il n’a pas bénéficié d’indemnités journalières initialement en l’absence de transmission d’une attestation de salaire permettant de traiter sa demande.

Il ressort de la pièce n°6 transmis par Monsieur [F] que celui-ci a transmis à la Caisse une attestation de salaire seulement le 22/12/2021.

Or, s’agissant du paiement d’une prestation du 15/01/2018, le délai de prescription biennal a commencé à courir à compter du 1er avril 2018 jusqu’au 1er avril 2020.

Dès lors, et nonobstant les difficultés qu’a pu rencontrer Monsieur [F] auprès de son employeur pour récupérer son attestation de salaire, le délai de prescription était bien acquis au 22/12/2021 date de la transmission de ladite attestation permettant le calcul de ses indemnités journalières.

Par conséquent, Monsieur [F] sera débouté de ses demandes principales en paiement.

Sur les dommages-intérêts

Il convient de rappeler que l’allocation de dommages-intérêts suppose l’existence d’une faute, d’un préjudice et d’un lien direct et certain entre la faute et le préjudice subi.

Ainsi, en application de l’article 1240 du Code civil, il appartient en conséquence à celui qui sollicite une indemnisation d’apporter la preuve de ces éléments.

En l’espèce, Monsieur [F] demande la condamnation de la Caisse à lui verser des dommages et intérêts. Néanmoins, s’il reproche à la Caisse de ne pas avoir fait droit à sa demande, force est de constater qu’en l’absence d’attestation de salaire cette dernière ne pouvait effectivement pas légalement y faire droit.

Dès lors, Monsieur [F] ne démontre pas que la Caisse aurait commis une faute dans le traitement de son dossier et que celle-ci lui aurait causé un préjudice, ceci étant rappelé que la CPAM a, malgré la prescription biennale tout de même versée à ce dernier la somme de 163,90 euros.

Par conséquent, Monsieur [F] sera débouté de sa demande de dommages et intérêts.

Sur les demandes accessoires

Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.
En l’espèce, l’équité commande de dire que chacune des parties conservera la charge de ses dépens.

Par ailleurs, Monsieur [F], partie perdante, sera débouté de sa demande de condamnation au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Sur l’exécution provisoire

Aux termes de l’article R142-10-6 al 1 du code de la sécurité sociale, le tribunal peut ordonner l’exécution par provision de ses décisions.

En l’espèce, aucune circonstance particulière ne justifie le prononcé de l’exécution provisoire.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement par jugement contradictoire et en dernier ressort mis à disposition au greffe,

DEBOUTE Monsieur [M] [F] de l’ensemble de ses demandes,

DIT que chacune des parties conservera la charge de ses dépens,

Fait et jugé à Paris le 15 Janvier 2025.

La Greffière La Présidente

N° RG 22/03312 – N° Portalis 352J-W-B7G-CYWOP

EXPÉDITION exécutoire dans l’affaire :

Demandeur : M. [M] [F]

Défendeur : ASSURANCE MALADIE DE [Localité 6] DIRECTION CONTENTIEUX ET LUTTE CONTRE LA FRAUDE

EN CONSÉQUENCE, LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE mande et ordonne :

A tous les huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ladite décision à exécution,
Aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux judiciaires d`y tenir la main,
A tous commandants et officiers de la force publique de prêter main forte lorsqu`ils en seront légalement requis.

En foi de quoi la présente a été signée et délivrée par nous, Directeur de greffe soussigné au greffe du Tribunal judiciaire de Paris.

P/Le Directeur de Greffe

6ème page et dernière


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