L’Essentiel : Le litige entre Mme [X] [W] et Mme [C] [J] découle d’un bail signé le 11 juillet 2018, avec un loyer mensuel de 800 € et des charges de 70 €. En août 2023, le juge a ordonné l’expulsion de Mme [C] pour une dette locative de 12.513,21 €, tout en lui accordant un délai de trois mois pour quitter les lieux. Mme [X] a été condamnée à verser 1.200 € à Mme [C] pour préjudice de jouissance. En décembre 2024, la demande de délais supplémentaires de Mme [C] a été rejetée, le juge considérant son état de dette incompatible avec la bonne foi.
|
Contexte du litigePar un bail daté du 11 juillet 2018, Mme [X] [W] a loué un logement à Mme [C] [J] pour un loyer mensuel de 800 €, accompagné de 70 € de provisions sur charges. Décisions judiciairesLe 10 août 2023, le juge du contentieux de la protection a constaté l’acquisition de la clause résolutoire, ordonné l’expulsion des locataires, et fixé la dette locative à 12.513,21 €, ainsi qu’une indemnité d’occupation de 900 €. La demande de délai de paiement de la locataire a été rejetée, mais un délai de trois mois a été accordé pour quitter les lieux. Indemnisation pour préjudice de jouissanceMme [X] [W] a été condamnée à verser 1.200 € à Mme [C] [J] pour préjudice de jouissance, en raison de travaux non réalisés entre le 18 janvier et le 30 août 2021. Prolongation de délaiLe 13 juin 2024, un jugement a accordé un délai supplémentaire de trois mois à Mme [C] [J] pour quitter le logement. Un commandement de quitter les lieux a été délivré le 7 août 2024. Demande de délais supplémentairesLe 19 septembre 2024, Mme [C] [J] a demandé des délais supplémentaires pour quitter les lieux, et a maintenu cette demande lors de l’audience du 5 décembre 2024. Mme [X] [W] s’est opposée à cette demande et a sollicité 1.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Arguments des partiesMme [C] [J] a expliqué que sa dette locative était due à la suspension de ses APL, causée par un surpeuplement du logement, et a justifié son impossibilité de relogement par des démarches administratives en cours. Elle vit avec ses sept enfants, dont un est autiste, et bénéficie d’une aide à la gestion de son budget. Situation financière de la bailleresseMme [X] [W] a indiqué que la dette locative s’élevait à 6.588,43 € au 1er novembre 2024, et a souligné l’importance de l’indemnité d’occupation pour son équilibre budgétaire, étant donné ses propres charges financières. Décision finale du jugeLe juge a rejeté la demande de délai de Mme [C] [J], considérant que l’état de sa dette ne permettait pas de caractériser la bonne foi nécessaire pour accorder de nouveaux délais. Mme [C] [J] a été condamnée aux dépens, et la demande de Mme [X] [W] au titre de l’article 700 a également été rejetée. Le jugement a été déclaré exécutoire de plein droit. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions pour accorder des délais de paiement aux occupants d’un logement ?L’article L412-3 du code des procédures civiles d’exécution stipule que « le juge peut accorder des délais renouvelables aux occupants de lieux habités ou de locaux à usage professionnel, dont l’expulsion a été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales. » Pour accorder ces délais, le juge doit prendre en compte plusieurs éléments, notamment la bonne ou mauvaise volonté de l’occupant à respecter ses obligations, ainsi que les situations respectives du propriétaire et de l’occupant. L’article L412-4 précise que « la durée des délais prévus à l’article L. 412-3 ne peut, en aucun cas, être inférieure à un mois ni supérieure à un an. » Il est également important de considérer des facteurs tels que l’âge, l’état de santé, la situation familiale et financière de chacun, ainsi que les diligences justifiées par l’occupant pour son relogement. Comment la situation financière de la locataire influence-t-elle la décision du juge ?Dans le cas présent, la situation financière de Mme [C] [J] a été un élément déterminant dans la décision du juge. Bien qu’elle ait une situation familiale précaire, avec sept enfants dont un autiste, la dette locative accumulée a été jugée trop importante pour justifier un délai supplémentaire. L’article L412-4 mentionne que le juge doit tenir compte de la « bonne ou mauvaise volonté manifestée par l’occupant dans l’exécution de ses obligations. » Mme [C] [J] a accumulé une dette locative de 12.513,21 €, ce qui a conduit le juge à conclure que sa situation ne permettait pas de caractériser la bonne foi nécessaire pour l’attribution de nouveaux délais. De plus, la perception d’allocations familiales et d’autres aides financières a été prise en compte, mais n’a pas suffi à compenser l’ampleur de la dette. Quelles sont les implications de l’article 700 du code de procédure civile dans ce litige ?L’article 700 du code de procédure civile permet à une partie de demander le remboursement de ses frais de justice par l’autre partie, lorsque celle-ci est perdante. Dans cette affaire, Mme [X] [W] a sollicité une indemnité de 1.000 € au titre de cet article. Cependant, le juge a décidé de ne pas faire droit à cette demande, en considérant l’équité de la situation. Il a été noté que Mme [C] [J] bénéficie de l’aide juridictionnelle totale, ce qui a également influencé la décision du juge. Ainsi, le juge a statué que « l’équité commande de ne pas faire droit aux demandes formulées au titre de l’article 700 du code de procédure civile. » Quelles sont les conséquences de l’exécution provisoire dans ce jugement ?L’article R121-21 du code des procédures civiles d’exécution stipule que « la décision du juge est exécutoire de plein droit par provision. » Cela signifie que le jugement rendu par le juge de l’exécution est immédiatement applicable, même si une partie souhaite faire appel. Dans ce cas, le juge a rappelé que le jugement bénéficie de l’exécution provisoire de droit, ce qui permet à Mme [X] [W] de procéder à l’expulsion de Mme [C] [J] sans attendre l’issue d’un éventuel appel. Cette disposition vise à protéger les droits du propriétaire tout en garantissant que les décisions judiciaires soient mises en œuvre rapidement. |
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE
JUGE DE L’EXECUTION
DOSSIER : N° RG 24/10530 – N° Portalis DBW3-W-B7I-5PAX
MINUTE N° : 25/
Copie exécutoire délivrée le
à
Copie certifiée conforme délivrée le 16/01/2025
à Me DESCHANEL, Me AMSELLEM
Copie aux parties délivrée le 16/01/2025
JUGEMENT DU 16 JANVIER 2025
COMPOSITION DU TRIBUNAL
PRESIDENT : Madame PHILIPS, Vice Présidente
GREFFIER : Madame RAMONDETTI, Greffière
L’affaire a été examinée à l’audience publique du 05 Décembre 2024 du tribunal judiciaire DE MARSEILLE, tenue par Madame PHILIPS, Vice Présidente juge de l’exécution par délégation du président du tribunal judiciaire de Marseille, assistée de Madame RAMONDETTI, Greffière.
L’affaire oppose :
DEMANDERESSE
Madame [C] [J]
née le 08 Juillet 1985 à [Localité 5] (ALGERIE), demeurant [Adresse 1]
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro C-13055-2024015502 du 17/10/2024 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Marseille)
représentée par Maître Cécile DESCHANEL, avocat au barreau de MARSEILLE
DEFENDERESSE
Madame [X] [Y] [K] [W]
née le 29 Mars 1966 à [Localité 4] (13), demeurant [Adresse 3]
représentée par Maître Frédéric AMSELLEM, avocat au barreau de MARSEILLE
Al’issue des débats, l’affaire a été mise en délibéré. Le président a avisé les parties que le jugement serait prononcé le 16 Janvier 2025 par mise à disposition au greffe de la juridiction.
NATURE DE LA DECISION : contradictoire et en premier ressort
Par bail du 11 juillet 2018, Mme [X] [W] a consenti à Mme [C] [J] un bail à usage d’habitation, sis [Adresse 2], moyennant le paiement d’un loyer de 800 € outre 70 € de provisions sur charges.
Par ordonnance du 10 août 2023, signifiée le 19 juillet 2024, le juge du contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Marseille a constaté l’acquisition de la clause résolutoire au 11 juillet 2018, ordonné l’expulsion des locataires, fixé la dette locative à 12.513,21 €, fixé une indemnité d’occupation à 900 €, rejeté la demande de délai de paiement formées par la locataire et accordé un délai de 3 mois pour quitter les lieux.
En outre, Mme [X] [W] a été condamnée à payer à Mme [C] [J] la somme de 1.200 € au titre du préjudice de jouissance pour la période du 18 janvier au 30 août 2021 en raison de ce que des travaux nécessaire n’avaient pas été réalisés.
Par jugement du 13 juin 2024, le juge de l’exécution a accordé un délai supplémentaire de 3 mois à Mme [C] [J] pour quitter les lieux.
Un commandement de quitter les lieux a été délivré le 07 août 2024.
Par requête du 19 septembre 2024, Mme [C] [J] a sollicité des délais pour quitter les lieux.
A l’audience du 05 décembre 2024, Mme [C] [J] maintient ses demandes.
Mme [X] [W] s’oppose à la demande de délai et sollicite la somme de 1.000 au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Mme [C] [J] bénéficie de l’aide juridictionnelle totale.
L’article L412-3 du code des procédures civiles d’exécution prévoit que « le juge peut accorder des délais renouvelables aux occupants de lieux habités ou de locaux à usage professionnel, dont l’expulsion a été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales. »
L’article L412-4 du même code précise que « La durée des délais prévus à l’article L. 412-3 ne peut, en aucun cas, être inférieure à un mois ni supérieure à un an. Pour la fixation de ces délais, il est tenu compte de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l’occupant dans l’exécution de ses obligations, des situations respectives du propriétaire et de l’occupant, notamment en ce qui concerne l’âge, l’état de santé, la qualité de sinistré par faits de guerre, la situation de famille ou de fortune de chacun d’eux, les circonstances atmosphériques, ainsi que des diligences que l’occupant justifie avoir faites en vue de son relogement. Il est également tenu compte du droit à un logement décent et indépendant, des délais liés aux recours engagés selon les modalités prévues aux articles L. 441-2-3 et L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l’habitation et du délai prévisible de relogement des intéressés. »
En l’espèce, Mme [C] [J] fait valoir que la dette locative a été générée par une suspension des APL de 732 € en raison d’un surpeuplement du logement. Mme [C] [J] est, en effet, mère de 7 enfants âgés de 4 à 12 ans. La CAF a ensuite versé à la bailleresse le montant des APL qui avaient été suspendues. Les APL ont à nouveau été suspendues en mars 2024, ce qui a généré à nouveau une dette.
Elle justifie de l’impossibilité de se reloger dans des conditions normales en ce qu’elle a déposé une demande de logement social le 14 janvier 2021 et une requête DALO le 07 avril 2022. Par ordonnance du 24 février 2023, le tribunal administratif a enjoint le Préfet de reloger Mme [C] [J] dans un délai de 4 mois. Une nouvelle requête DALO a été déposée le 02 août 2023.
S’agissant de sa situation personnelle et familiale, elle vit avec ses sept enfants mineurs, dont l’un est autiste, et son concubin. Elle bénéficie d’une mesure judiciaire d’aide à la gestion du budget familial. Le foyer perçoit des allocations pour un montant d’environ 2600 € par mois (pièce 15 et 16).
Mme [X] [W] fait valoir que la dette locative est de 6.588,43 € au 1er novembre 2024. Elle perçoit 1500 € par mois et expose qu’elle rembourse chaque mois 734 € au titre du remboursement du prêt nécessaire à l’acquisition du bien loué et qu’elle payer 200 € par mois au titre des charges de l’appartement. La perception de l’indemnité d’occupation est ainsi indispensable à l’équilibre de son budget.
Ainsi, en dépit de la situation familiale extrêmement précaire de Mme [C] [J], l’état et l’ancienneté de sa dette, ne permettent pas de caractériser la bonne foi nécessaire à l’attribution de nouveaux délais pour quitter les lieux et causent un préjudice disproportionné à la propriétaire.
La demande de délai sera donc rejetée.
Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile :
Mme [C] [J] partie perdante conservera la charge de ses dépens.
L’équité commande de ne pas faire droit aux demandes formulées au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Sur l’exécution provisoire :
En vertu de l’article R121-21 du code des procédures civiles d’exécution, la décision du juge est exécutoire de plein droit par provision.
Le juge de l’exécution, statuant par jugement contradictoire prononcé par mise à disposition du public au greffe, en premier ressort :
DEBOUTE Mme [C] [J] de sa demande délais pour quitter les lieux ;
DEBOUTE Mme [X] [W] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE Mme [C] [J] aux dépens de la procédure ;
REJETTE tous autres chefs de demandes ;
RAPPELLE que le présent jugement bénéficie de l’exécution provisoire de droit ;
La juge de l’exécution a signé avec le greffier ayant reçu la minute.
LE GREFFIER LE JUGE DE L’EXÉCUTION
Laisser un commentaire