L’Essentiel : M. [G] [N] a acquis deux lots d’un ensemble immobilier, dont un emplacement de stationnement, qu’il a découvert inexistant à la prise de possession. Il a donc assigné les vendeurs et le notaire pour résolution de la vente pour manquement à l’obligation de délivrance conforme. Le tribunal a constaté que les vendeurs n’avaient pas respecté cette obligation et a prononcé la résolution de la vente, condamnant les vendeurs à restituer le prix de vente. Le notaire a également été jugé responsable pour manquement à son devoir de conseil, entraînant des indemnités pour M. [N].
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Exposé du litigeM. [G] [N] a acquis, le 20 août 2015, deux lots d’un ensemble immobilier, dont un emplacement de stationnement, pour un montant de 171 000,00 €. À la prise de possession, il a constaté que cet emplacement n’existait pas, ayant été remplacé par une cour/jardin. En conséquence, il a assigné les vendeurs et le notaire pour résolution de la vente pour manquement à l’obligation de délivrance conforme et pour dol. Retrait du rôle et reprise de l’instanceLe 2 avril 2019, le juge a ordonné le retrait de l’affaire en attendant la justification de la publication au service de la publicité foncière. M. [N] a tenté de reprendre l’instance en avril 2021, mais sa demande a été rejetée pour absence de preuve de publication. Ce n’est qu’en janvier 2022 qu’il a pu justifier cette publication, permettant ainsi le rétablissement de l’affaire au rôle. Demandes de M. [N]M. [N] a demandé au tribunal de constater que ses diligences avaient interrompu la péremption de l’instance, de prononcer la résolution de la vente pour non-conformité, et de condamner les vendeurs à lui restituer le prix de vente ainsi que des dommages et intérêts. Il a également sollicité la responsabilité du notaire pour manquement à ses obligations. Réponses des vendeurs et du notaireLes vendeurs ont contesté la demande de M. [N], arguant que la clause relative à l’état des biens excluait toute action pour vices apparents. Ils ont également soutenu que le notaire avait correctement décrit le bien selon les documents en leur possession. Le notaire a, quant à lui, affirmé qu’il n’était pas responsable des erreurs de description. Analyse du tribunal sur la péremptionLe tribunal a rejeté la demande de péremption, considérant que les conclusions de reprise d’instance avaient interrompu le délai de péremption. Il a également noté que M. [N] avait justifié la publication des assignations dans les délais requis. Résolution de la vente pour non-conformitéLe tribunal a constaté que les vendeurs n’avaient pas respecté leur obligation de délivrance conforme, car l’emplacement de stationnement promis n’existait pas. Il a donc prononcé la résolution de la vente et condamné les vendeurs à restituer le prix de vente à M. [N]. Responsabilité du notaireLe tribunal a également retenu la responsabilité du notaire pour manquement à son devoir de conseil et à l’obligation de dresser un acte conforme à la réalité. Il a condamné le notaire à garantir les vendeurs pour les indemnités dues à M. [N]. Préjudices financiers et morauxM. [N] a été indemnisé pour son préjudice financier, chiffré à 9 746,00 €, ainsi que pour un préjudice moral de 1 500,00 €. Le tribunal a ordonné le paiement de ces sommes avec intérêts au taux légal. Décision finale du tribunalLe tribunal a prononcé la résolution de la vente, condamné les vendeurs et le notaire à indemniser M. [N], et a ordonné l’exécution provisoire de la décision. Les demandes des parties ont été rejetées dans leur ensemble, sauf celles qui ont été accueillies. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conséquences de la péremption de l’instance selon l’article 386 du code de procédure civile ?La péremption de l’instance est régie par l’article 386 du code de procédure civile, qui stipule que « l’instance est périmée lorsqu’aucune partie n’accomplit de diligences pendant deux ans. » Cette disposition implique que si aucune action n’est entreprise par les parties dans ce délai, l’instance est considérée comme éteinte. Dans le cas présent, M. [N] a contesté la péremption en arguant que des actes interruptifs avaient été réalisés, notamment la notification de conclusions aux fins de reprise d’instance. Il a été établi que ces actes avaient bien interrompu le délai de péremption, car ils avaient été effectués dans les deux ans suivant l’ordonnance de retrait du rôle. Ainsi, la demande de péremption formulée par M. [T], Mme [E], et Maître [C] a été rejetée, confirmant que l’instance n’était pas périmée. Comment se manifeste l’obligation de délivrance conforme selon les articles 1603 et 1615 du code civil ?L’obligation de délivrance conforme est clairement énoncée dans les articles 1603 et 1615 du code civil. L’article 1603 précise que « le vendeur est tenu d’expliquer clairement ce à quoi il s’oblige », tandis que l’article 1615 stipule que « l’obligation de délivrer la chose comprend ses accessoires et tout ce qui a été destiné à son usage perpétuel. » Dans le litige, M. [N] a soutenu que les vendeurs n’avaient pas respecté cette obligation en ne délivrant pas l’emplacement de stationnement prévu dans l’acte de vente. Le tribunal a constaté que le lot n°6, décrit comme un emplacement de stationnement, n’était en réalité qu’un « emplacement dans la cour », ce qui constitue un manquement à l’obligation de délivrance conforme. Les vendeurs ont donc été condamnés à restituer le prix de vente en raison de ce manquement. Quelles sont les implications de la responsabilité du notaire selon l’article 1382 du code civil ?La responsabilité du notaire est régie par l’article 1382 du code civil, qui stipule que « tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. » Dans cette affaire, M. [N] a allégué que le notaire avait manqué à son devoir de conseil en désignant le lot n°6 comme un emplacement de stationnement, alors qu’il ne l’était pas en réalité. Le tribunal a reconnu que le notaire avait effectivement commis une faute en ne vérifiant pas les informations contenues dans le règlement de copropriété et en ajoutant des éléments erronés dans l’acte de vente. En conséquence, le notaire a été condamné à indemniser M. [N] pour le préjudice financier résultant de ses erreurs, en plus de garantir les vendeurs de leur condamnation. Quels sont les droits à réparation en cas de préjudice financier et moral selon le code civil ?Le droit à réparation des préjudices est fondé sur le principe de la réparation intégrale, qui stipule que la victime doit être replacée dans une situation aussi proche que possible de celle qui aurait été la sienne si le fait dommageable ne s’était pas produit. L’article 1231-7 du code civil précise que « la réparation du préjudice doit être intégrale », ce qui signifie que M. [N] a droit à une indemnisation pour les pertes subies. Dans cette affaire, M. [N] a demandé une indemnisation de 13 300,00 € pour son préjudice financier, dont 9 746,00 € ont été justifiés par des documents. Le tribunal a également reconnu le préjudice moral de M. [N], causé par les démarches et les tracasseries liées au litige, et a ordonné une indemnisation de 1 500,00 €. Ces décisions illustrent l’application des principes de réparation intégrale des préjudices financiers et moraux dans le cadre des litiges contractuels. |
JUDICIAIRE
DE NANTERRE
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PÔLE CIVIL
2ème Chambre
JUGEMENT RENDU LE
16 Janvier 2025
N° RG 22/00507 –
N° Portalis
DB3R-W-B7G-XHFK
N° Minute : 25/
AFFAIRE
[G] [N]
C/
[L] [T], [V] [E] épouse [T], [R] [J] notaire associé de la SCP dénommée “[R] [C] et [A] [Y], notaires associés”
Copies délivrées le :
DEMANDEUR
Monsieur [G] [N]
[Adresse 5]
[Localité 6]
représenté par Me Anne-claire VIETHEL, avocat postulant au barreau de PARIS, vestiaire : G0270 et par la SCP NGUYEN PHUNG § ASSOCIES Avocats plaidant du Barreau de Montpellier
DEFENDEURS
Monsieur [L] [T]
[Adresse 2]
[Localité 9]
Madame [V] [E] épouse [T]
[Adresse 2]
[Localité 9]
représentés tous deux par Maître Florence GOMES de l’AARPI G.B.L AVOCATS, avocats au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : PN 314
Maître [R] [J] notaire associé de la SCP dénommée “[R] [C] et [A] [Y], notaires associés”
[Adresse 3]
[Localité 12]
représenté par Me Valérie TOUTAIN DE HAUTECLOCQUE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0848
L’affaire a été débattue le 14 Novembre 2024 en audience publique devant le tribunal composé de :
Timothée AIRAULT, Vice-Président, magistrat chargé du rapport
Thomas BOTHNER, Vice-Président
Elsa CARRA, Juge
qui en ont délibéré.
Greffier lors du prononcé : Sylvie MARIUS, Greffier.
JUGEMENT
prononcé en premier ressort, par décision contradictoire et mise à disposition au greffe du tribunal conformément à l’avis donné à l’issue des débats.
Suivant acte authentique formalisé le 20 août 2015, en l’étude de Maître [R] [C], notaire, M. [G] [N] a acquis auprès de M. [L] [T] et Mme [V] [E] les lots n° 1 et 6 d’un ensemble immobilier situé [Adresse 7] et [Adresse 8] à [Localité 12] (92). Ils sont décrits respectivement, dans l’acte, comme un appartement et un emplacement de stationnement. La vente a été conclue pour 171 000,00 €.
M. [G] [N] soutient que lors de la prise de possession des lieux, il s’est aperçu que le lot n°6, censé être un emplacement de stationnement, n’existait pas. Il soutient que cet emplacement a été remplacé par une cour/jardin.
Par acte régulièrement signifié les 19 et 27 octobre 2016, ainsi que le 25 novembre 2016, M. [N] a assigné M. [T], Mme [E], et Maître [C] devant ce tribunal aux fins de résolution de la vente pour manquement à l’obligation de délivrance conforme, ou d’annulation de celle-ci pour dol, et d’engagement de la responsabilité du notaire.
Selon ordonnance rendue par le juge de la mise en état le 2 avril 2019, l’affaire a fait l’objet d’un retrait du rôle, » dans l’attente de la justification de la publication au service de la publicité foncière ; sous réserve de son rétablissement à la demande de l’une des parties, notamment pour éviter la péremption. »
Le 1er avril 2021, le conseil de M. [N] a notifié par RPVA des conclusions aux fins de reprise de l’instance. Le 7 mai 2021, les conclusions ont reçu la réponse suivante de la part du juge de la mise en état : » rejet de la demande de reprise d’instance, la preuve de publication sollicitée n'[ayant] pas été apportée « . Le 3 janvier 2022, le conseil de M. [N] a notifié par RPVA les deux assignations publiées et enregistrées le 29 octobre 2019. Le 7 janvier 2022, l’affaire a fait l’objet d’un rétablissement au rôle.
Aux termes de ses conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 22 septembre 2022, M. [N] demande au tribunal de :
A titre liminaire
– DIRE ET JUGER que les différentes diligences entreprises par le requérant en vue de la publication de l’assignation au service de la publicité foncière sont des actes interruptifs de péremption ;
– DIRE ET JUGER que les écritures en reprise d’instance notifiées par RPVA le 1er avril 2021 constituent un acte interruptif de péremption ;
– CONSTATER que ces actes interruptifs de péremption sont intervenus au cours des deux années suivant l’ordonnance de retrait du rôle du 2 avril 2019 et donc avant péremption de l’instance ;
– En conséquence, DIRE ET JUGER l’instance non périmée ;
– REJETER toutes demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires ;
A titre principal, contre les époux [T],
– CONSTATER que les vendeurs n’ont pas rempli leur obligation de délivrance conforme, tel que les articles 1603 et suivants du code civil le leur imposent ;
– Par conséquent PRONONCER la résolution de la vente conclue le 20 août 2015 entre le requérant et Monsieur [L] [T] et Madame [V] [E] épouse [T], sur le fondement des articles combinés 1610 et 1184 du code civil ;
– Partant, CONDAMNER les vendeurs à payer au requérant :
– En principal, la somme de 171 000,00 € correspondant au prix de la vente résolue,
– A titre de dommages et intérêts pour préjudice financier, les frais d’acte d’un montant de 13 300,00 € (9746,00 € au titre des taxes fiscales, 408,00 € au titre des débours auprès des administrations, 2622,00 € au titre des émoluments du notaire instrumentaire, 524,00 € au titre de la TVA),
– Outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure recommandée avec accusé de réception du 8 juin 2016 ;
– Si PAR IMPOSSIBLE, la résolution n’était pas prononcée, CONDAMNER les vendeurs au paiement de dommages et intérêts, d’un montant équivalent à l’emplacement vendu et non livré, soit la somme de 25 000,00 €, ainsi que les frais d’acte pour la somme de 13 300,00 €, outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure recommandée avec accusé de réception du 8 juin 2016 ;
A titre subsidiaire contre les époux [T], si la délivrance non-conforme n’était pas retenue
– CONSTATER que les vendeurs se sont rendus coupables de manœuvres et réticences dolosives ayant incontestablement vicié le consentement du requérant ;
– DIRE ET JUGER que l’ensemble des éléments constitutifs du dol sont caractérisés ;
– Par conséquent PRONONCER la nullité de la vente conclue le 20 août 2015 entre le requérant et Monsieur [L] [T] et Madame [V] [E] épouse [T], sur le fondement des articles 1116 et 1117 du code civil ;
– Partant CONDAMNER les vendeurs à payer au requérant :
– En principal, la somme de 171 000,00 € correspondant au prix de la vente annulée,
– A titre de dommages et intérêts pour préjudice financier, les frais d’acte d’un montant de 13 300,00 € (9746,00 € au titre des taxes fiscales, 408,00 € au titre des débours auprès des administrations, 2622,00 € au titre des émoluments du notaire instrumentaire, 524,00 € au titre de la TVA),
– Outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure recommandée avec accusé de réception du 8 juin 2016 ;
– Si PAR IMPOSSIBLE, la nullité n’était pas prononcée, CONDAMNER les vendeurs au paiement de dommages et intérêts, d’un montant équivalent à l’emplacement vendu et non livré, soit la somme de 25 000 €, ainsi que les frais d’acte pour la somme de 13 300 €, outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure recommandée avec accusé de réception du 8 juin 2016 ;
A titre principal, contre le notaire Maître [C],
– CONSTATER que le notaire instrumentaire a manqué à ses obligations de conseil, vérifications élémentaires, et garantie de l’efficacité de l’acte juridique de vente dont il a été le rédacteur ;
– DIRE ET JUGER que le notaire instrumentaire a manqué à ses obligations contractuelles, de sorte qu’il engage sa responsabilité civile professionnelle ;
– PAR CONSEQUENT, DIRE ET JUGER que les manquement et faute des vendeurs ne sont pas de nature à l’exonérer de sa responsabilité en l’état de ses négligences et pièces en sa possession;
– DIRE ET JUGER qu’il a directement et nécessairement concouru aux préjudices du requérant;
– DIRE ET JUGER qu’il engage sa responsabilité civile professionnelle sur le fondement de l’article 1147 du code civil ;
– PARTANT, CONDAMNER in solidum les requis à payer au requérant la somme de
171 000,00€ en principal à titre de dommages et intérêts correspondant au prix de la vente, ainsi que la somme de 13 300 € relatif aux frais d’acte, soit une somme totale de 184 300,00 €, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure recommandée avec accusé de réception du 8 juin 2016 ;
A titre subsidiaire, contre le notaire si sa responsabilité contractuelle n’était pas retenue
– CONSTATER que le notaire instrumentaire a fait preuve de négligences en ne se comportant pas comme un professionnel normalement prudent, diligent et compétent ;
– PAR CONSEQUENT, DIRE ET JUGER que les manquement et faute des vendeurs ne sont pas de nature à l’exonérer de sa responsabilité en l’état de ses négligences et pièces en sa possession;
– DIRE ET JUGER qu’il a directement et nécessairement concouru aux préjudices du requérant;
– DIRE ET JUGER qu’il engage sa responsabilité civile professionnelle sur le fondement des articles 1382 et suivants du code civil ;
– PARTANT, CONDAMNER in solidum les requis à payer au requérant la somme de
171 000,00 € en principal à titre de dommages et intérêts correspondant au prix de la vente, ainsi que la somme de 13 300,00 € relatif aux frais d’acte, soit une somme totale de 184 300,00 €, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure recommandée avec accusé de réception du 8 juin 2016 ;
– Si, PAR IMPOSSIBLE, le tribunal de céans décidait de ne pas faire droit à la demande de résolution ni à celle de nullité de la vente, CONDAMNER in solidum les requis au paiement de dommages et intérêts d’un montant équivalent à l’emplacement vendu et non livré, soit la somme de 25 000,00 €, ainsi que les frais d’acte pour la somme de 13 300,00 €, outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure recommandée avec accusé de réception du 8 juin 2016 ;
– CONSTATER que le préjudice moral du requérant est caractérisé ;
– PAR CONSEQUENT, CONDAMNER in solidum les requis à payer au requérant la somme de 10 000,00 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral ;
En tout état de cause
– ORDONNER la capitalisation des intérêts ;
– REJETER les demandes indemnitaires infondées des requis, vendeurs et notaire ;
– CONDAMNER in solidum les requis au paiement de la somme de 4500,00 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance ;
– ORDONNER l’exécution provisoire de la décision à intervenir.
Aux termes de leurs dernières écritures récapitulatives notifiées par voie électronique le 14 juin 2022, M. [T] et Mme [E] demandent au tribunal de :
– Les DECLARER recevables et bien fondés en leurs demandes, fins et conclusions ;
En conséquence, avant toute défense au fond
– DECLARER l’action de Monsieur [G] [N] irrecevable ;
– EN CONSEQUENCE, le DEBOUTER de l’ensemble de ses demandes ;
A titre principal, au fond,
– DIRE que la clause relative à l’état des biens exclut toute action pour vices apparents ou vices cachés contenue dans l’acte authentique du 20 août 2015 est opposable à Monsieur [G] [N] ;
– JUGER que les vendeurs ont respecté leur obligation de délivrance conforme des biens vendus;
– EN CONSEQUENCE, DEBOUTER Monsieur [G] [N] de l’ensemble de ses demandes;
A titre subsidiaire
– DIRE que le consentement de Monsieur [G] [N] n’a pas été vicié ;
– EN CONSEQUENCE, le DEBOUTER de l’intégralité de ses demandes ;
A titre infiniment subsidiaire
– LIMITER leur condamnation au paiement d’une somme correspondant à la valeur en août 2015 d’un emplacement de stationnement en extérieur et RAMENER le montant d’une éventuelle condamnation à ce titre à de plus justes proportions ;
En tout état de cause
– CONDAMNER Maître [R] [C], Notaire, à les garantir totalement ou partiellement de toutes condamnations de quelque nature qu’elles soient qui pourraient être prononcées par le tribunal contre eux ;
– CONDAMNER toute partie succombante à leur verser 4000 € au titre des frais irrépétibles;
– LES CONDAMNER aux entiers dépens dont distraction au profit de leur conseil, en application de l’article 699 du code de procédure civile ;
– ECARTER l’exécution provisoire de la décision à intervenir.
Aux termes de ses dernières écritures récapitulatives notifiées par voie électronique le 15 juin 2022, la SCP [C] et [Y] demande au tribunal de :
– JUGER Maître [R] [C], notaire, recevable et bien fondé en ses conclusions ;
Vu l’article 386 du code de procédure civile,
– JUGER l’instance menée par Monsieur [G] [N] irrecevable, compte tenu de la péremption de l’instance encourue ;
A titre subsidiaire, vu l’article 1240 du code civil,
– DIRE que Monsieur [G] [N] ne justifie pas de l’existence d’une faute, d’un préjudice et d’un lien de causalité entre cette faute et ce préjudice, susceptible d’engager la responsabilité du notaire ;
– DEBOUTER Monsieur [G] [N] de l’intégralité de ses demandes ;
– DIRE que Monsieur et Madame [T], seuls, ont manqué à leur obligation de délivrance et qui seront seuls tenus à réparation ;
– DEBOUTER Monsieur et Madame [T] de leur demande en garantie ;
– CONDAMNER la partie qui succombera au paiement d’une somme de 4000,00 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– CONDAMNER la même aux entiers dépens d’instance, dont distraction au profit de son conseil, en application de l’article 699 du code de procédure civile.
En application de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties quant à l’exposé détaillé de leurs prétentions et moyens.
La clôture de la présente procédure a été prononcée le 28 mars 2023.
Sur la demande tendant à voir retenir la péremption de l’instance
1. Sur le rappel des moyens soulevés par les parties
Sur le fondement de l’article 386 du code de procédure civile, M. [T], Mme [E], et Maître [C] soulèvent tous les trois la péremption de l’instance. Ils avancent les moyens suivants. Ils font valoir que par ordonnance du 2 avril 2019, le juge de la mise en état a ordonné le retrait du rôle jusqu’à ce que le demandeur justifie de la publication des assignations à la publicité foncière. Si par conclusions du 1er avril 2021, la veille du délai de péremption d’instance, le demandeur a signifié des conclusions de reprise d’instance, le 7 mai 2021, le juge de la mise en état a rejeté la demande de reprise d’instance au motif que la preuve de la publication sollicitée n’a pas été rapportée. Ils avancent qu’il n’a été in fine justifié de cette publication intervenue le 11 mars 2021 que le 3 janvier 2022, soit plus de 5 ans après la délivrance des assignations au fond et plus de deux ans après l’ordonnance de retrait du rôle rendue le 2 avril 2021.
M. [N], de son côté, conclut au rejet de la demande. Il avance, notamment et pour l’essentiel, les moyens suivants. Il fait valoir que par ordonnance du 2 avril 2019, il a été ordonné le retrait du rôle dans l’attente de la justification de la publication au service de la publicité foncière, sous réserve du rétablissement de l’instance à la demande de l’une des parties, notamment pour éviter la péremption. Le 1er avril 2021, soit moins de deux années plus tard, il a notifié par RPVA ses écritures en reprise d’instance, qui ont interrompu le délai. Il avance que le service de la publicité foncière de [Localité 12] avait néanmoins adressé une demande de renseignements complémentaires. Il attendait ainsi le retour du service de la publicité foncière de l’original de la publication. Il a toutefois obtenu le retour de l’original de la publication le 22 décembre 2021, qu’il a immédiatement communiqué dès son retour de congés, le 3 janvier 2022.
2. Sur l’analyse du dossier et la réponse du tribunal
Aux termes de l’article 386 du code civil, » l’instance est périmée lorsqu’aucune partie n’accomplit de diligences pendant deux ans. » Couvrent la péremption les conclusions déposées par un avocat sous réserve qu’elles ne tendent pas exclusivement à interrompre la péremption (Civ 3ème, 29 octobre 1979, n°78-13.282 & Civ 3ème, 28 février 1990, n° 88-11.574). En cas de retrait du rôle, le dépôt au greffe de conclusions sollicitant la réinscription interrompt le délai de péremption (Civ 2ème, 21 décembre 2023, n°21-23.816 & Civ 2ème, 19 novembre 2009, n° 08-19.781).
Sur ce et en l’espèce, il résulte de l’analyse du dossier que par acte régulièrement signifié les 19 et 27 octobre 2016, ainsi que le 25 novembre 2016, M. [N] a assigné M. [T], Mme [E], et Maître [C] devant ce tribunal, et a ainsi introduit la présente instance.
Selon ordonnance du juge de la mise en état du 2 avril 2019, l’affaire a fait l’objet d’un retrait du rôle, » dans l’attente de la justification de la publication au service de la publicité foncière; sous réserve de son rétablissement à la demande de l’une des parties, notamment pour éviter la péremption. »
Le 1er avril 2021, le conseil de M. [N] a notifié par RPVA des conclusions aux fins de reprise de l’instance. Le juge de la mise en état a, certes, rejeté alors la demande de reprise d’instance, la preuve de publication sollicitée n’étant, à ses yeux, pas rapportée. Il n’en demeure pas moins que la notification par RPVA des conclusions aux fins de reprise de l’instance constitue bien une cause d’interruption du délai de péremption de l’instance, lequel n’était pas encore atteint.
De surcroit, il doit être relevé que, s’agissant de la publication des assignations au service de la publicité foncière, le demandeur a justifié de leur transmission à la direction générale des finances publiques de [Localité 12] dès juillet 2018, c’est-à-dire avant même le retrait de l’affaire du rôle. L’aboutissement, particulièrement tardif, de cette démarche ne lui est donc en aucune façon imputable. Le 3 janvier 2022, le conseil de M. [N] a d’ailleurs et in fine notifié par RPVA les deux assignations publiées et enregistrées le 29 octobre 2019. Et le 7 janvier 2022, l’affaire a fait l’objet d’un rétablissement au rôle.
Dans ces conditions, la demande formulée en défense, tant par M. [T] et Mme [E] d’une part, que par le notaire Maître [C] d’autre part, tendant à voir juger l’action menée par le demandeur irrecevable pour cause de péremption de l’instance ne pourra qu’être rejetée.
Sur demande en résolution de la vente pour délivrance non-conforme
1. Sur le rappel des moyens soulevés par les parties
Sur le fondement des articles 1603 et suivants anciens du code civil d’une part, et 1184 ancien du même code d’autre part, M. [N] avance, notamment et pour l’essentiel, les moyens suivants au soutien de sa demande de résolution de la vente. Il fait valoir qu’en l’espèce, à défaut de délivrance de tout emplacement de stationnement, alors même que celui-ci était expressément prévu au contrat de vente, les vendeurs ont manqué à leur obligation de délivrance conforme. Les vendeurs ne pouvaient ignorer cet état de fait dans la mesure où ils résidaient, avant la vente, dans le bien vendu. Il avance que tenant la transformation de l’emplacement de stationnement, le changement de configuration des lieux, l’impossibilité matérielle et l’interdiction de stationner sur l’espace consacré au lot n° 6, confirmées par le syndic de copropriété, il est manifeste qu’il ne peut s’orienter vers la voie de l’exécution forcée de la délivrance.
M. [T] et Mme [E] avancent, de leur côté, les moyens suivants. Ils font valoir qu’ils n’ont jamais demandé à ce que cet emplacement accessoire soit désigné comme un emplacement de stationnement, et que c’est le notaire qui a donné la description du lot n°6 dans la promesse de vente puis l’acte authentique à partir de leur titre de propriété, eux-mêmes étant passés devant lui en 2013. Cette désignation ne correspond ni à celle contenue dans l’état descriptif de division qui décrit le lot 6 comme » un emplacement dans la cour » ni à celle visée dans l’annonce de vente. Enfin et surtout, ils avancent que la réception sans réserve couvre les défauts apparents. Cette réception vaut renonciation, selon eux, à l’exercice de l’action en délivrance conforme.
Le notaire de son côté ne conclut pas sur ce point spécifiquement.
2. Sur l’analyse du dossier et la réponse du tribunal
Aux termes des articles 1602, 1603 et 1615 du code civil, » le vendeur est tenu d’expliquer clairement ce à quoi il s’oblige « , et » il a deux obligations principales, celle de délivrer et celle de garantir la chose qu’il vend « , » l’obligation de délivrer la chose [comprenant] ses accessoires et tout ce qui a été destiné à son usage perpétuel. »
L’article 1184 dispose en outre : » La condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l’une des deux parties ne satisfera point à son engagement. Dans ce cas, le contrat n’est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l’engagement n’a point été exécuté, a le choix ou de forcer l’autre à l’exécution de la convention lorsqu’elle est possible, ou d’en demander la résolution avec dommages et intérêts. La résolution doit être demandée en justice, et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances. »
Il résulte d’une jurisprudence constante que la renonciation de l’acheteur à se prévaloir de la résolution d’une vente ne peut résulter que d’une manifestation claire de volonté, la réception et l’usage des biens n’étant pas suffisants à engendrer une fin de non-recevoir contre l’action en résolution fondée sur le manquement à l’obligation de délivrance conforme.
Sur ce et en l’espèce, il convient de noter que l’acte authentique formalisé le 20 août 2015, par lequel la vente objet du présent litige a été conclue entre d’une part M. [T] et Madame [E], vendeurs, et d’autre part M. [N], acquéreur, stipule bien en pages 3 et 4 les données suivantes : » Identification du bien. Le vendeur vend à l’acquéreur qui accepte le bien dont la désignation suit : un ensemble immobilier situé à [Localité 12] (Hauts-de-Seine) [Adresse 7] et [Adresse 8] avec accès sur la [Adresse 13] : […] Lot n°1 : un appartement […]. Lot n°6 : un emplacement de stationnement situé dans le bâtiment A, dans la cour. »
Or il résulte bien de la lecture des différents écrits et attestations produits par le demandeur, de l’analyse des photographies versées aux débats, mais aussi et surtout, tout simplement, de la lecture du règlement de copropriété que le lot n°6, décrit dans l’acte de vente comme étant un emplacement de stationnement, n’est en réalité qu’un » emplacement dans la cour « , sur lequel il n’est pas possible de stationner un véhicule. Il résulte de ce qui précède qu’il y a bien eu manquement par les vendeurs à leur obligation de délivrance conforme, en ce qu’il n’y a pas eu délivrance d’un emplacement de stationnement, pourtant explicitement prévu dans l’acte.
Les arguments avancés en défense ne pourront qu’être écartés, car insuffisamment fondés aussi bien en droit qu’en fait. Il ne demeure ni justifié ni même allégué l’existence d’une manifestation claire de volonté de la part de l’acheteur, M. [N], de renoncer à se prévaloir de la résolution de la vente pour délivrance non-conforme. Les données du présent cas d’espèce demeurent en outre insuffisantes à caractériser l’existence d’une réception sans réserves du bien. De la même manière, il ne saurait être fait grief à M. [N] de ne pas avoir réalisé une visite spécifique de l’emplacement ou d’avoir posé des questions à ce sujet.
Dans ces conditions, il convient :
> de prononcer la résolution de la vente pour manquement des vendeurs à leur obligation de délivrance conforme, de condamner au titre des restitutions M. [T] et Mme [E] in solidum à payer à M. [N] la somme de 171 000,00 € et ce avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure par courrier recommandé avec accusé de réception conformément à l’article 1231-6 du code civil c’est-à-dire le 8 juin 2016;
> et d’ordonner la restitution du bien immobilier au profit de M. [T] et Mme [E] ;
Sur demande tendant à voir engager la responsabilité du notaire
1. Sur le rappel des moyens soulevés par les parties
Sur le fondement de la responsabilité contractuelle à titre principal, et à titre subsidiaire sur celui de la responsabilité délictuelle, M. [N] avance, notamment et pour l’essentiel, les moyens suivants au soutien de ses prétentions. Il fait valoir que le notaire a désigné le lot n°6 comme » un emplacement de stationnement situé dans le bâtiment A de la cour « , et que le règlement de copropriété précise pour ce même lot un simple » emplacement de la cour « . Outre ce rajout de sa propre initiative et en dépit de ce qui ressortait du règlement de copropriété, il note que les vendeurs avaient matérialisé l’emplacement de parking dans la cour du bâtiment B, autre élément qui aurait dû attirer son attention. Enfin, la servitude de passage pour piétons, instaurée dans le règlement de copropriété et rendant manifestement impossible la mise en place à l’endroit en question d’un emplacement de stationnement, constitue encore une autre incohérence que le notaire aurait dû relever s’il avait été suffisamment attentif. Il avance que tout notaire normalement diligent et compétent aurait procédé à ces vérifications. M. [T] et Mme [E], s’ils concluent à titre principal au rejet de la demande en résolution de la vente, s’associent en revanche aux moyens ainsi développés concernant la responsabilité du notaire.
De son côté, la SCP [C] et [Y] avance, notamment et pour l’essentiel, les moyens suivants au soutien de sa position. La défenderesse entend rappeler que la responsabilité du notaire relève du régime des responsabilités délictuelles, celui-ci étant requis d’instrumenter et ainsi de dresser un acte aussi bien régulier que pourvu de l’efficacité requise, et tenu d’un devoir de conseil. Il s’agit toutefois d’une obligation de moyens et sa responsabilité ne peut être engagée que sur le fondement d’une faute prouvée. Elle fait valoir que le demandeur était accompagné de son père, avec lequel le notaire s’est entretenu à maintes reprises, en particulier sur les conditions de la vente. M. [N], qui avait visité les lieux, n’a pas cru devoir user de sa faculté de rétractation, une fois la promesse de vente obtenue avec les documents de copropriété. Les parties ont signé l’acte de vente sans jamais évoquer l’absence de l’emplacement de stationnement ni même l’absence physique de ce lot. La défenderesse soutient qu’aucun élément du dossier ne permettait de douter de l’existence de cet emplacement de stationnement. Il est affirmé qu’en tant que notaire, Maître [C] n’était pas tenu de procéder sur place à une vérification.
2. Sur l’analyse du dossier et la réponse du tribunal
Aux termes de l’article 1382 du code civil, dans sa rédaction applicable jusqu’au 1er octobre 2016, » tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer « .
Sur ce et en l’espèce, il convient de noter que l’acte authentique formalisé le 20 août 2015, par Maître [C], par lequel la vente objet du présent litige a été conclue, stipule bien en pages 3 et 4 les données suivantes : » Identification du bien. Le vendeur vend à l’acquéreur qui accepte le bien dont la désignation suit : un ensemble immobilier situé à [Localité 12] (Hauts-de-Seine) [Adresse 7] et [Adresse 8] avec accès sur la [Adresse 13] : […] Lot n°1 : un appartement […]. Lot n°6 : un emplacement de stationnement situé dans le bâtiment A, dans la cour. » Or il résulte bien de la lecture du règlement de copropriété que le lot n°6, décrit dans l’acte de vente comme étant un emplacement de stationnement, n’est en réalité qu’un » emplacement dans la cour « , sur lequel il n’est pas possible de stationner un véhicule.
Il demeure soutenu par M. [T] et Mme [E], et non-contesté par Maître [C], que l’ajout dans l’acte de vente de ce que l’emplacement serait » de stationnement « , alors qu’il ne l’est pas en réalité, est le fait du notaire. Cette donnée ressort bien, en tout état de cause, de la simple comparaison entre le contenu de l’acte authentique et le contenu de l’annonce immobilière postée par les vendeurs. L’annonce immobilière postée par M. [T] et Mme [E] ne comprend en effet nulle mention d’un quelconque emplacement de stationnement, alors qu’il s’agissait pourtant d’un argument de vente dont ils auraient pu fort opportunément se prémunir pour vendre leur bien immobilier. C’est en outre à juste titre que le demandeur, M. [N], se prévaut des autres distorsions et incohérences, concernant la localisation de l’emplacement dans la cour du bâtiment A et non du bâtiment B, ainsi que la servitude de passage pour les piétons, lesquelles auraient dû amener le notaire à procéder à plus de vérifications.
Ces données demeurent suffisantes pour engager la responsabilité du notaire, pour manquement à son devoir de conseil et manquement à son obligation de dresser un acte régulier et pourvu de l’efficacité requise, en l’occurrence conforme à la réalité du bien immobilier objet de la vente.
Dans ces conditions, il convient :
> tout d’abord de rejeter la demande de M. [N] tendant à voir condamner le notaire in solidum à lui rembourser le prix de vente, ce remboursement n’étant que la conséquence de la résolution ci-dessus prononcée, et l’intéressé n’alléguant ni ne justifiant d’aucune insolvabilité avérée de M. [T] et Mme [E] ;
> et ensuite de condamner en revanche le notaire : d’une part au paiement in solidum avec M. [T] et Mme [E] de l’indemnité due à M. [N] au titre de son préjudice financier, et d’autre part à les en relever et garantir entièrement ; rien ne justifie en revanche d’étendre cette garantie pour le surplus des condamnations mises en à la charge de M. [T] et Mme [E], en particulier s’agissant des frais irrépétibles et des dépens.
Sur les demandes formulées par le demandeur au titre de ses préjudices financier et moral
La personne qui a subi un préjudice a droit à la réparation de celui-ci, en ce sens qu’elle doit être replacée dans une situation aussi proche que possible de celle qui aurait été la sienne si le fait dommageable ne s’était pas produit. L’auteur d’un dommage est tenu à la réparation intégrale du préjudice, de telle sorte qu’il ne puisse y avoir pour la victime ni perte ni profit.
Aux termes de l’article 1961 du code général des impôts : » Les droits d’enregistrement ou la taxe de publicité foncière lorsqu’elle tient lieu de ces droits et la contribution prévue à l’article 879, ne sont pas sujets à restitution dès l’instant qu’ils ont été régulièrement perçus sur les actes ou contrats ultérieurement révoqués ou résolus par application des articles 954 à 958, 1224 à 1230, 1304 et 1304-7, 1654 et 1659 du code civil. »
En l’espèce, M. [N] sollicite la condamnation de M. [T], de Mme [E] et in fine de Maître [C], in solidum, à lui verser la somme de 13 300,00 € au titre de son préjudice financier, et 1500,00 € au titre de son préjudice moral. Les défendeurs de leur côté sollicitent tous le rejet de l’ensemble des prétentions formulées par le demandeur, mais sans émettre de critique particulière concernant le chiffrage de ce préjudice.
Sur la somme de 13 300,00 € sollicitée par M. [N] au titre de son préjudice financier, il convient cependant de noter tout d’abord que les sommes de 408,00 € au titre des débours auprès des administrations, 2622,00 € au titre des émoluments du notaire instrumentaire et 524,00 € au titre de la TVA, demandées à titre d’indemnité par le demandeur, ne sont justifiées en leur existence et montants respectifs par aucune pièce probante régulièrement versée aux débats.
En revanche, la somme de 9746,00 € au titre des taxes fiscales, sollicitée à titre d’indemnité par le demandeur, demeure valablement justifiée par les pièces qu’il produit : taxe départementale de 7425,00 €, taxe communale de 1980,00 €, frais d’assiette de 176,00 € et contribution de sécurité immobilière de 165,00 €. En outre, conformément aux dispositions précitées de l’article 1961 du code général des impôts, le demandeur, qui subit pourtant le préjudice, n’est pas en mesure d’en solliciter le remboursement auprès de l’administration fiscale.
Enfin et s’agissant du préjudice moral invoqué par M. [N], celui-ci est bien caractérisé et demeure constitué en l’espèce par les multiples démarches et tracasseries générées par la survenance du présent litige, lequel a pour cause les erreurs commises dans la rédaction des actes notariés.
Sur ce, il convient de noter que la résolution de la vente et les fautes commises par le notaire sont bien à l’origine d’un préjudice financier. Celui-ci est en lien de causalité direct et certain avec les faits dommageables ci-dessus évoqués. Au vu des pièces du dossier, le notaire a également causé, par les fautes qu’il a commises, le préjudice moral ci-dessus évoqué subi par M. [N].
Dans ces conditions et au vu de ce qui précède, il convient de chiffrer le préjudice financier imputable subi par M. [N] des suites de la résolution de la vente et des fautes commises par le notaire à la somme de 9746,00 €. Il convient de condamner in solidum M. [T], Mme [E] et Maître [C] à verser cette somme à M. [N], et ce avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement conformément à l’article 1231-7 du code civil. Il convient enfin de condamner le notaire, Maître [C], à verser à M. [N] la somme de 1500,00 € au titre de son préjudice moral, également avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement.
Sur les demandes accessoires
Il convient également de dire et juger que les intérêts échus des capitaux produiront intérêts dans les conditions fixées par l’article 1343-2 du code civil.
M. [T], Mme [E] et Maître [C], qui succombent en la présente instance, seront déboutés de leurs demandes formulées au titre de l’article 700 du code de procédure civile d’une part, et d’autre part condamnés in solidum aux dépens. En outre, ils devront supporter in solidum les frais irrépétibles engagés par M. [N] dans la présente instance et que l’équité commande de réparer à raison de la somme de 3000,00 €.
L’ancienneté du présent litige justifie que soit ordonnée l’exécution provisoire, et ce pour l’ensemble du dispositif de la présente décision, celle-ci demeurant nécessaire et compatible avec la nature de la présente affaire, conformément aux dispositions de l’article 515 du code de procédure civile dans sa rédaction applicable aux instances introduites avant le 1er janvier 2020.
Le tribunal,
Déboute M. [L] [T], Mme [V] [E] et Maître [R] [C] de leur demande au titre de la péremption de l’instance et de l’irrecevabilité de l’action intentée par M. [G] [N];
Prononce la résolution de la vente conclue selon acte authentique du 20 août 2015 devant Maître [R] [C], entre M. [G] [N], acquéreur, né le 15 juin 1981 à [Localité 11] (34), d’une part, et M. [L] [T], né le 6 juin 1986 à [Localité 14] (92), et Mme [V] [E], née le 5 août 1987 à [Localité 10] (Argentine), vendeurs, d’autre part, des lots n° 1 et 6 d’un ensemble immobilier situé [Adresse 7] et [Adresse 8] à [Localité 12] (92) et cadastré section CN n°[Cadastre 4] et [Cadastre 1], pour manquement des vendeurs à leur obligation de délivrance conforme ;
Condamne M. [L] [T] et Mme [V] [E] in solidum à payer à M. [G] [N] la somme de 171 000,00 €, à titre de restitution du prix de vente, et ce avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure par courrier recommandé avec accusé de réception c’est-à-dire le 8 juin 2016 ;
Ordonne la restitution du bien immobilier ci-dessus décrit au profit de M. [L] [T] et Mme [V] [E] ;
Condamne in solidum M. [L] [T], Mme [V] [E] et Maître [R] [C] à payer à M. [G] [N], au titre de son préjudice financier, la somme de 9746,00 €, et ce avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;
Condamne Maître [R] [C] à relever et garantir entièrement M. [L] [T] et Mme [V] [E] de leur condamnation à indemniser M. [G] [N] au titre de son préjudice financier ;
Condamne Maître [R] [C] à payer à M. [G] [N] la somme de 1500,00 € au titre de son préjudice moral, cette somme avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement;
Dit que les intérêts échus des capitaux produiront intérêts dans les conditions fixées par l’article 1343-2 du code civil ;
Condamne in solidum M. [L] [T], Mme [V] [E] et Maître [R] [C] aux dépens, et in solidum à payer à M. [G] [N] la somme de 3000,00 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, cette somme avec intérêts au taux légal à compter de ce jour;
Ordonne l’exécution provisoire du présent jugement pour la totalité de son dispositif ;
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
signé par Timothée AIRAULT, Vice-Président et par Sylvie MARIUS, Greffier présent lors du prononcé .
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
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