Retard de livraison et réserves : enjeux de preuve et force majeure dans une transaction immobilière.

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Retard de livraison et réserves : enjeux de preuve et force majeure dans une transaction immobilière.

L’Essentiel : M. [B] [I] a acquis un bien immobilier en état futur d’achèvement auprès de la SCI [Localité 4] le 17 décembre 2019. Le 26 mars 2024, il a assigné la SCI devant le Tribunal Judiciaire de Draguignan, demandant une diminution du prix de vente. Lors de l’audience du 13 novembre 2024, il a réclamé des condamnations financières pour retard de livraison et absence de levée des réserves. Cependant, le tribunal a jugé sa demande irrecevable en raison de la forclusion et a constaté que le retard était dû à des intempéries. M. [B] [I] a été condamné à payer les dépens.

Acquisition du bien immobilier

M. [B] [I] a acquis un bien immeuble en état futur d’achèvement (VFA) auprès de la SCI [Localité 4] par acte authentique en date du 17 décembre 2019.

Assignation en justice

Le 26 mars 2024, M. [B] [I] a assigné la SCI [Localité 4] devant le Tribunal Judiciaire de Draguignan, demandant une diminution du prix de vente sur la base des articles 1616 et 1617 du code civil.

Déroulement de l’audience

Lors de l’audience du 13 novembre 2024, les parties ont été représentées par leurs avocats respectifs. M. [B] [I] a demandé des condamnations financières pour retard de livraison, absence de levée des réserves, et une terrasse plus petite que prévu. La SCI [Localité 4] a contesté ces demandes et a demandé à ce que M. [B] [I] soit débouté.

Arguments des parties

M. [B] [I] a sollicité des condamnations financières totalisant 6 500 euros, tandis que la SCI [Localité 4] a demandé que la demande de M. [B] [I] soit jugée irrecevable et a demandé des frais irrépétibles à son encontre.

Irrecevabilité de la demande principale

Le tribunal a constaté que M. [B] [I] n’avait pas produit de preuves suffisantes concernant le défaut de superficie et que sa demande était irrecevable en raison de la forclusion, car l’action avait été introduite plus de trois ans après la remise des clés.

Retard de livraison et levée des réserves

Bien que la livraison ait été retardée, le tribunal a reconnu que ce retard était dû à des intempéries et à la force majeure liée à la pandémie de COVID-19. De plus, les réserves avaient été levées dans des délais raisonnables.

Dépens et frais irrépétibles

M. [B] [I], ayant perdu la procédure, a été condamné à payer les dépens. En outre, il a été condamné à verser 800 euros à la SCI [Localité 4] pour couvrir les frais irrépétibles.

Décision finale

Le tribunal a rejeté la demande principale de M. [B] [I], l’a débouté de toutes ses demandes et a ordonné le paiement des frais à la SCI [Localité 4].

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les obligations du vendeur en matière de délivrance d’un bien immobilier selon le Code civil ?

Selon l’article 1616 alinéa 1 du Code civil, le vendeur est tenu de délivrer la contenance telle qu’elle est portée au contrat, sous les modifications ci-après exprimées.

Cet article précise que le vendeur doit respecter les termes du contrat en ce qui concerne la superficie et les caractéristiques du bien vendu.

De plus, l’article 1617 du même code indique que si la vente d’un immeuble a été faite avec indication de la contenance, le vendeur est obligé de délivrer à l’acquéreur, s’il l’exige, la quantité indiquée au contrat.

Si cela n’est pas possible, ou si l’acquéreur ne l’exige pas, le vendeur doit accepter une diminution proportionnelle du prix.

Il est donc essentiel pour l’acquéreur de prouver que la contenance livrée ne correspond pas à celle stipulée dans le contrat pour pouvoir demander une diminution de prix.

Quels sont les délais pour intenter une action en diminution de prix selon le Code civil ?

L’article 1622 du Code civil prévoit que l’action en supplément de prix de la part du vendeur, et celle en diminution de prix ou en résiliation du contrat de la part de l’acquéreur, doivent être intentées dans l’année, à compter du jour du contrat, à peine de déchéance.

Cela signifie que l’acquéreur doit agir rapidement s’il souhaite contester la conformité du bien livré par rapport à ce qui a été convenu dans le contrat.

Dans le cas présent, M. [B] [I] a introduit son action le 26/03/2024, alors que la remise des clés a eu lieu le 30/04/2021, ce qui le place en dehors du délai légal pour agir.

Ainsi, sa demande principale est irrecevable en raison de la forclusion.

Quelles sont les conditions de la force majeure en matière contractuelle selon le Code civil ?

L’article 1218 du Code civil définit la force majeure en matière contractuelle comme un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat.

Cet article précise que si l’empêchement est temporaire, l’exécution de l’obligation est suspendue, sauf si le retard justifie la résolution du contrat.

En cas d’empêchement définitif, le contrat est résolu de plein droit et les parties sont libérées de leurs obligations.

Dans cette affaire, la SCI [Localité 4] a invoqué la force majeure en raison des intempéries et des restrictions liées à la pandémie de COVID-19, ce qui a retardé la livraison.

Le tribunal a jugé que ces circonstances constituaient une force majeure, justifiant le retard dans la livraison du bien.

Comment sont déterminés les dépens et les frais irrépétibles dans une procédure civile ?

L’article 696 alinéa 1 du Code de procédure civile stipule que la partie perdante est condamnée aux dépens, sauf décision motivée du juge.

Cela signifie que la partie qui succombe dans ses demandes doit généralement supporter les frais de la procédure.

En ce qui concerne les frais irrépétibles, l’article 700 du Code de procédure civile permet au juge de condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme pour couvrir les frais exposés et non compris dans les dépens.

Le juge tient compte de l’équité et de la situation économique de la partie condamnée.

Dans cette affaire, M. [B] [I] a été condamné à payer les dépens et une somme de 800 euros à la SCI [Localité 4] en application de l’article 700, en raison de l’inéquité de laisser à la SCI le montant des frais qu’elle a dû exposer pour défendre ses droits.

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE DRAGUIGNAN
4ème chambre civile
Contentieux civil général de proximité

JUGEMENT
Chambre 4
N° RG 24/03410 – N° Portalis DB3D-W-B7I-KH3I

MINUTE N°

JUGEMENT

DU 15 Janvier 2025

[B] c/ S.C.I. [Localité 4]

DÉBATS :
A l’audience publique du 13 Novembre 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 15 Janvier 2025, les parties ayant été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe

COMPOSITION DE LA JURIDICTION :

Lors des débats et qui a délibéré :

Président : M. Eric BONALDI, Magistrat à titre temporaire

assisté lors des débats par Madame Stéphanie STAINIER, Greffier
et lors du prononcé par Madame Stéphanie STAINIER qui a signé la minute avec le président

PRONONCÉ : par mise à disposition au greffe le 15 Janvier 2025

ENTRE :

DEMANDEUR:

Monsieur [I] [B]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 4]
Rep/assistant : Maître Laurent LATAPIE de la SELARL SELARL LAURENT LATAPIE AVOCAT, avocats au barreau de DRAGUIGNAN, substitué par Me BEN AMEUR

DEFENDERESSE:

S.C.I. [Localité 4]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Rep/assistant : Maître Laura CUERVO de l’AARPI MASQUELIER-CUERVO, avocats au barreau de DRAGUIGNAN

COPIES DÉLIVRÉES LE 15 Janvier 2025 :
1 copie exécutoire à ;
– Maître Laura CUERVO de l’AARPI MASQUELIER-CUERVO, Maître Laurent LATAPIE de la SELARL SELARL LAURENT LATAPIE AVOCAT

1 copie dossier

EXPOSE DU LITIGE

M. [B] [I] a acquis un bien immeuble en état futur d’achèvement (VFA) auprès de la SCI [Localité 4] par acte authentique du 17/12/2019 ;

Par acte introductif d’instance en date du 26/03/2024 M.[B] [I] a assigné la SCI [Localité 4] par devant le Tribunal Judicaire de DRAGUIGNAN sur le fondement des dispositions des articles 1616 al 1et 1617 du code civil en diminution du prix de vente ;

A l’audience initiale, les parties sont représentées par leurs conseils respectifs et le dossier renvoyé à plusieurs reprises à la demande d’au moins l’une d’entre elle pour être fixée à plaider à l’audience du 13/11/2024 ;

A cette dernière date le demandeur représenté par son avocat, indique s’en remettre à ses dernières écritures, au visa desquels il est expressément renvoyé pour de plus amples informations, et aux termes desquelles il est sollicité :

CONDAMNER la SCI LES ARCSSUR ARGENS à verse à Monsieur [B] la somme de 3500,00 € au titre du retard de livraison ;CONDAMNER la SCI[Localité 4] à verser à Monsieur [B] la somme de 1000,00 € au titre de l’absence de levée des réserves dans un délai raisonnable ;CONDAMNER la SCI [Localité 4] à payer la somme de 2000,00 € au titre de la terrasse plus petite que prévueCONDAMNER la même à la somme de 1.000 € en application de l’article 700 du code de procédure outre les entiers frais et dépens ;
La SCI [Localité 4] quant à elle par la voie de son conseil soutient ses dernières écritures, au visa desquels il est expressément renvoyé pour de plus amples informations, et au terme desquelles il est sollicité :

JUGER irrecevable la demande de Monsieur [B] au titre de la surface de la terrasseSur le fond,
DEBOUTER Monsieur [B] de l’ensemble de ses demandes fins et conclusionsA titre très subsidiaire
REDUIRE les demandes à de plus justes proportionsEn tout état de cause
CONDAMNER Monsieur [B] à payer à la SCI [Localité 4] la somme de 3 000€€au titre des frais irrépétibles, outre les entiers dépens
Compte tenu de la nature et montant du litige il sera statué par décision contradictoire et en premier ressort ; la date du délibéré est fixée au 15/12/2024 ;

MOTIFS

Sur la demande principale

L’article 9 du code de procédure civile dispose qu’il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

L’article 1616 al 1 du code civil dispose que le vendeur est tenu de délivrer la contenance telle qu’elle est portée au contrat, sous les modifications ci-après exprimées.
L’article 1617 du code précité indique que si la vente d’un immeuble a été faite avec indication de la contenance, à raison de tant la mesure, le vendeur est obligé de délivrer à l’acquéreur, s’il l’exige, la quantité indiquée au contrat ;Et si la chose ne lui est pas possible, ou si l’acquéreur ne l’exige pas, le vendeur est obligé de souffrir une diminution proportionnelle du prix.

L’article 1622 du même code prévoit que l’action en supplément de prix de la part du vendeur, et celle en diminution de prix ou en résiliation du contrat de la part de l’acquéreur, doivent être intentées dans l’année, à compter du jour du contrat, à peine de déchéance. ;

En l’espèce :

D’une part, M. [B] [I], ne produit aucun document justifiant du défaut de superficie du jardin et de  » l’empiétement  » sur ce dernier ; ainsi aucune pièce versée ne permet d’établir l’origine et l’étendue du désordre simplement allégué, étant par ailleurs précisé que la différence de métrés ainsi que la date de la connaissance de ce même désordre ne sont nullement précisées par le demandeur ;

D’autre part, il demeure constant que M. [B] [I], a acquis le bien par acte authentique du 17/09/2019 et que, s’agissant d’une vente  » VFA  » la remise des clefs a été réalisée le 30/04/2021 alors que son action a été introduite le 26/03/2024, par suite sa demande principale, en l’état de la forclusion, est irrecevable ;

Sur la livraison et levée des réserves tardive

L’article 1218 du code civil prévoit qu’il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu’un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l’exécution de son obligation par le débiteur.

Si l’empêchement est temporaire, l’exécution de l’obligation est suspendue à moins que le retard qui en résulterait ne justifie la résolution du contrat. Si l’empêchement est définitif, le contrat est résolu de plein droit et les parties sont libérées de leurs obligations dans les conditions prévues aux articles 1351 et 1351-1.

En l’espèce il n’est pas contestable que la livraison contractuelle prévue initialement  » au plus tard  » pour le 30/09/2020 par l’acte de vente n’a été effectuée que le 30/04/2021; toutefois, le retard ainsi accusé trouve son origine, d’une part, dans les 24 journées d’intempéries cumulées au cours du construction s’agissant de l’année 2019/2020, telles que rappelées par le président de la société DOMUS dans son attestation en date du 24/02/2020 , et surtout ,principalement, par l’arrêt complet du chantier dicté par les dispositions légales et règlementaires  » covid19  » ; par suite la force majeure dont se prévaut la SCI [Localité 4], débitrice de l’obligation, étant manifeste, M. [B] [I] sera débouté de ses demandes ;

S’agissant enfin des réserves émises au moment de la réception du bien, la défenderesse produit 2 quitus de levées de réserves contradictoirement établis le 12/04/2021 et le 09/07/2021 ; compte tenu de la remise des clefs intervenues le 30/04/2021et la date des interventions diligentées des différents professionnels, il ne peut être valablement fait grief à la défenderesse d’un retard ou manquement sur ce point ; par suite la demande n’est pas fondée ;

Sur les demandes accessoires :

Sur les dépens

En vertu de l’article 696 alinéa 1 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

Aux termes de l’article L.111-8 alinéa 2 du code des procédures civiles d’exécution, les frais de recouvrement entrepris sans titre exécutoire restent à la charge du créancier, sauf s’ils concernent un acte dont l’accomplissement est prescrit par la loi au créancier.

Toute stipulation contraire est réputée non écrite, sauf disposition législative contraire.

En l’espèce, M. [B] [I], partie succombant à la procédure, supportera la charge des dépens;

Sur les frais irrépétibles

En application de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la SCI [Localité 4] le montant des frais irrépétibles qu’elle a été contrainte d’exposer pour faire valoir ses droits.

Il convient de condamner M. [B] [I] à lui payer la somme de 800 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Juridiction, statuant publiquement par jugement mis à disposition au greffe, par décision contradictoire et en premier ressort,

REJETTE la demande principale ;

DEBOUTE M. [B] [I] de l’ensemble de ses demandes ;

CONDAMNE M. [B] [I] à payer à la SCI [Localité 4] la somme de 800 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNE M. [B] [I] aux entiers dépens de l’instance ;

Ainsi jugé aux jour, mois et date susmentionnés ;

LE GREFFIER LE JUGE


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