Contrôle de la légalité de la rétention administrative et respect des droits individuels

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Contrôle de la légalité de la rétention administrative et respect des droits individuels

L’Essentiel : Le juge a examiné la situation de M. [F] [Z] [Y], constatant une irrégularité dans la procédure en raison d’un avis tardif au procureur. En conséquence, il a décidé de lever la rétention administrative, soulignant son rôle de gardien de la liberté individuelle. La jonction des procédures a été ordonnée, rendant le recours de M. [F] [Z] [Y] recevable, tandis que la requête du Préfet de l’Essonne a été rejetée. Le juge a également rappelé à M. [F] [Z] [Y] son obligation de quitter le territoire national, précisant les modalités de notification de l’ordonnance.

Contexte de l’affaire

En présence d’un interprète assermenté pour la langue portugaise, la personne retenue a été informée de ses droits selon le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. L’audience a vu la participation de deux avocats, l’un représentant la personne retenue et l’autre le Préfet de l’Essonne.

Jonction des procédures

Le juge a décidé de joindre deux procédures distinctes pour une meilleure administration de la justice. Cela inclut la requête du Préfet de l’Essonne et le recours de la personne retenue, M. [F] [Z] [Y]. Le juge a également souligné son rôle en tant que gardien de la liberté individuelle, se prononçant sur la légalité de la rétention.

Conclusions des avocats

Le conseil de la personne retenue a soulevé des conclusions d’irrégularité et d’irrecevabilité, mais s’est désisté d’un moyen relatif au délai de transfert. L’argument principal concernait l’absence d’avis au procureur de la République concernant le placement en garde à vue.

Arguments sur l’irrégularité de la procédure

Le conseil de la personne retenue a soutenu que la procédure était irrégulière en raison d’un avis tardif ou inexistant au procureur. En revanche, le conseil de préfecture a affirmé que cette irrégularité ne relevait pas de la compétence du juge judiciaire, qui ne devait examiner que la procédure antérieure au placement.

Analyse des éléments du dossier

Le juge a examiné les pièces du dossier et a constaté que la mesure privative de liberté antérieure au placement était unique, ce qui justifiait le contrôle du juge. Il a noté que le procès-verbal de notification des droits en garde à vue indiquait un lien direct avec l’interpellation initiale.

Décision du juge

Le juge a conclu que la procédure était irrégulière, en raison de l’incertitude quant à la notification au procureur. Par conséquent, la rétention administrative de M. [F] [Z] [Y] a été levée, sans qu’il soit nécessaire d’examiner d’autres moyens d’irrégularité.

Ordonnances et obligations

Le juge a ordonné la jonction des procédures, déclaré le recours de M. [F] [Z] [Y] recevable, et a rejeté la requête du Préfet de l’Essonne. Il a rappelé à M. [F] [Z] [Y] son obligation de quitter le territoire national, tout en précisant les modalités de notification de l’ordonnance.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la procédure de jonction des procédures selon le Code de procédure civile ?

La jonction des procédures est régie par l’article 367 du Code de procédure civile, qui stipule :

« Le juge peut, d’office ou à la demande des parties, ordonner la jonction de plusieurs instances lorsque leur examen simultané est nécessaire à la bonne administration de la justice. »

Dans le cas présent, le juge a décidé de joindre les deux procédures, celle introduite par le préfet et celle introduite par M. [F] [Z] [Y], afin d’assurer une gestion efficace et cohérente des affaires en cours.

Cette décision de jonction permet d’éviter des décisions contradictoires et de garantir que toutes les questions soulevées soient examinées dans un cadre unifié, ce qui est essentiel pour la clarté et l’efficacité du processus judiciaire.

Quelles sont les obligations du juge concernant la légalité de la rétention ?

Le juge a l’obligation de se prononcer sur la légalité de la rétention, indépendamment de tout recours contre la décision de placement. Cette obligation est ancrée dans le principe de protection de la liberté individuelle, qui est un droit fondamental.

L’article L. 552-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile précise :

« La rétention administrative ne peut être ordonnée que si elle est nécessaire à l’exécution d’une mesure d’éloignement. »

Ainsi, le juge doit s’assurer que la rétention est justifiée et conforme aux dispositions légales, en vérifiant notamment que toutes les procédures ont été respectées et que les droits de la personne retenue ont été garantis.

Quelles sont les conséquences d’un avis tardif au procureur de la République ?

L’absence ou le retard dans la notification de l’avis au procureur de la République peut entraîner l’irrégularité de la procédure. Selon l’article 63-1 du Code de procédure pénale :

« La personne placée en garde à vue doit être informée sans délai des faits qui lui sont reprochés et des droits qui lui sont reconnus. »

Dans le cas présent, le conseil du retenu a soutenu que l’avis au procureur était tardif, ce qui a conduit le juge à conclure que la procédure était irrégulière.

Cette irrégularité a des conséquences directes sur la légalité de la rétention, car elle empêche le procureur d’exercer son contrôle sur la qualification des faits, ce qui est essentiel pour garantir le respect des droits de la personne retenue.

Quels sont les droits de la personne retenue en matière de rétention administrative ?

La personne retenue bénéficie de plusieurs droits, tels que le droit à l’assistance d’un avocat, d’un interprète, et à la communication avec son consulat. L’article L. 552-4 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile énonce :

« La personne retenue a le droit d’être assistée par un avocat et de communiquer avec un médecin. »

De plus, elle peut contacter toute organisation compétente pour visiter les lieux de rétention. Ces droits sont cruciaux pour garantir que la personne retenue puisse défendre ses intérêts et obtenir l’assistance nécessaire durant la période de rétention.

Quelles sont les implications d’une ordonnance mettant fin à la rétention ?

Lorsqu’une ordonnance met fin à la rétention, elle doit être notifiée au procureur de la République. Selon les dispositions applicables, notamment l’article L. 552-11 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile :

« L’étranger est maintenu à la disposition de la justice pendant un délai de vingt-quatre heures à compter de la notification de l’ordonnance. »

Ce délai permet au procureur de décider s’il souhaite faire appel de la décision. Si un appel est formé, l’étranger reste sous la garde de la justice jusqu’à ce que la cour d’appel statue sur la demande.

Cette procédure vise à équilibrer les droits de l’individu avec les intérêts de l’État en matière de contrôle des étrangers sur le territoire national.

Dossier N° RG 25/00186

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MEAUX
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CONTENTIEUX DE LA RETENTION ADMINISTRATIVE
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Annexe du palais de Justice de Meaux – [Adresse 12]

Ordonnance statuant sur la contestation de l’arrêté de placement en rétention et sur la première requête en prolongation d’une mesure de rétention administrative

Ordonnance du 16 Janvier 2025
Dossier N° RG 25/00186

Nous, Virginie BARRAUD, magistrat du siège au tribunal judiciaire de Meaux, assisté de Romane HUAN, greffier ;

Vu les articles L742-1 à L 742-3, L 741-10, L 743-3, L 743-19, L 743-20, R 741-1 à R 743-9 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

Vu l’arrêté pris le 12 janvier 2025 par le préfet de l’Essonne faisant obligation à M. [F] [Z] [Y] de quitter le territoire français ;

Vu la décision de placement en rétention administrative prise le 11 janvier 2025 par le PRÉFET DE L’ESSONNE à l’encontre de M. [F] [Z] [Y], notifiée à l’intéressé le 12 janvier 2025 à 15h35 ;

Vu le recours de M. [F] [Z] [Y] daté du 15 janvier 2025, reçu et enregistré le 15 janvier 2025 à 23h05 au greffe du tribunal, par lequel il demande au tribunal d’annuler la décision de placement en rétention administrative pris à son encontre ;

Vu la requête du PRÉFET DE L’ESSONNE datée du 15 janvier 2025, reçue et enregistrée le 15 janvier 2025 à 10h01 au greffe du tribunal, tendant à la prolongation de la rétention administrative pour une durée de vingt six jours de :

Monsieur [F] [Z] [Y], né le 15 Août 1960 à [Localité 20], de nationalité Portugaise

Vu l’extrait individualisé du registre prévu par l’article L. 744-2 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

En l’absence du procureur de la République régulièrement avisé par le greffier, dès réception de la requête, de la date, de l’heure, du lieu et de l’objet de la présente audience ;

En présence de Madame [G] [X], interprète inscrit sur la liste établie par le procureur de la République près le tribunal judiciaire de Meaux, assermenté pour la langue portugaise déclarée comprise par la personne retenue à l’inverse du français ;

Après avoir, en audience publique, rappelé à la personne retenue les droits qui lui sont reconnus par le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, puis entendu en leurs observations, moyens et arguments :
– Me Raphael GOMES, avocat au barreau de PARIS, choisi par la personne retenue pour l’assister, régulièrement avisé ;
– Me Elif ISCEN (cab Centaure), avocat représentant le PRÉFET DE L’ESSONNE ;
– M. [F] [Z] [Y] ;

MOTIFS DE LA DÉCISION

SUR LA JONCTION DES PROCÉDURES:

Attendu qu’il convient en application de l’article 367 du code de procédure civile et pour une bonne administration de la justice de joindre les deux procédures à savoir, celle introduite par la requête de PRÉFET DE L’ESSONNE enregistrée sous le N° RG 25/00172 et celle introduite par le recours de M. [F] [Z] [Y] enregistré sous le N° RG 25/00186 ;

Attendu qu’indépendamment de tout recours contre la décision de placement, le juge doit se prononcer en tant que gardien de la liberté individuelle sur la légalité de la rétention ;

Attendu qu’après examen des éléments du dossier tels que complétés ou éclairés à l’audience contradictoirement, la procédure contrôlée est recevable et régulière ;

SUR LES CONCLUSIONS

Attendu que le conseil du retenu a déposé et plaidé des conclusions d’irrégularité et d’irrecevabilité ; que le conseil du retenu s’est désisté à l’audience du moyen relatif au délai de transfert (moyen E des conclusions) ;

Sur le moyen tiré de l’absence d’avis au procureur de la République

Attendu que le conseil du retenu soutient que la procédure serait irrégulière en ce que l’avis au procureur de la République du placement en garde à vue serait tardif et même inexistant puisqu’il ressort de deux procès-verbaux figurant au dossier que ledit procureur a pu indiquer n’avoir pas reçu le billet de garde à vue et qu’un procès -verbal de carence établit qu’il n’a pu être retrouvé ;

Attendu que le conseil de préfecture soutient que l’examen de cette irrégularité échappe à la compétence du juge judiciaire qui ne serait saisi que de l’examen de la procédure immédiatement antérieure au placement, ce qui ne serait pas le cas de ladite garde à vue laquelle aurait pris fin le 11 janvier à 11 heures 45 ;

Attendu que la lecture des pièces du dossier permet de vérifier que la mesure privative de liberté immédiatement antérieure au placement en rétention est bien une mesure unique puisque le procès-verbal de notification des droits en garde à vue du 11 janvier 2025 à 15 heures 35 reprend bien comme point de départ l’horaire d’interpellation initial et la durée initiale de la mesure (16 heures) qui est imputée sur la nouvelle durée de la mesure ; qu’il s’agit donc d’une reprise de garde à vue et non d’une mesure distincte ; que cette mesure unique ressortit bien au contrôle du juge du siège ;

Attendu qu’il y a lieu de constater que si le procès-verbal établi le 10 janvier 2025 à 23 heures 40 (ce qui n’est pas tardif, l’intéressé ayant été présenté à l’OPJ à 23 heures 35), mention un avis au procureur réalisé à cet horaire, force est de constater que par une procès-verbal établi le même jour à 11 heures 18, les policiers prennent acte de ce que le procureur de la république se plaint de n’avoir pas reçu le billet de garde à vue ; qu’un procès verbal établi dans les minutes suivante acte de la carence de la justification de la transmission de ce billet ; attendu en conséquence qu’il n’est pas possible de vérifier si le procureur a eu connaissance de la qualification des faits pour lesquels M. [F] [Z] [Y] était placé en garde à vue alors qu’il doit exercer son contrôle sur cette qualification et éventuellement procéder à une requalification ; que dans ces condition la procédure doit être jugée irrégulière et la rétention administrative de M. [F] [Z] [Y] levée sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens d’irrégularité et le moyen d’irrecevabilité et le recours en contestation de l’arrêté de placement ;

PAR CES MOTIFS,

ORDONNONS la jonction de la procédure introduite par le recours de M. [F] [Z] [Y] enregistré sous le N° RG 25/00186 et celle introduite par la requête de PRÉFET DE L’ESSONNE enregistrée sous le N° RG 25/00172 ;

DÉCLARONS le recours de M. [F] [Z] [Y] recevable ;

DÉCLARONS la procédure irrégulière ;

REJETONS la requête du PRÉFET DE L’ESSONNE.

DISONS n’y avoir lieu à statuer sur la requête de M. [F] [Z] [Y] ;

RAPPELONS à M. [F] [Z] [Y] qu’il devra se conformer à l’obligation de quitter le territoire national ;

Prononcé publiquement au palais de justice du Mesnil-Amelot, le 16 Janvier 2025 à 12h 37.

Le greffier, Le juge,

qui ont signé l’original de l’ordonnance.

Pour information :

– Lorsqu’une ordonnance met fin à la rétention, elle doit être notifiée au procureur de la République. A moins que ce dernier n’en dispose autrement, l’étranger est alors maintenu à la disposition de la justice pendant un délai de vingt quatre heures à compter de la notification de l’ordonnance au procureur. Durant cette période, l’étranger peut, s’il le souhaite, contacter son avocat ou un tiers, rencontrer un médecin et s’alimenter. Dans le cas où, dans ce délai de vingt quatre heures le procureur de la République décide de former appel en demandant que son recours soit déclaré suspensif, l’intéressé reste maintenu à la disposition de la justice jusqu’à ce le premier président de la cour d’appel ou son délégué statue sur la demande du procureur, voire sur le fond s’il apparaît justifié de donner un effet suspensif à l’appel du ministère public.
– Le préfet peut aussi faire appel mais, en ce cas, son recours n’est pas suspensif.
– L’appel du procureur de la République ou du préfet est transmis par tout moyen au greffe de la Cour d’appel de Paris (Service des étrangers – Pôle 1 Chambre 11), notamment par télécopie au n° : [XXXXXXXX03]. ou par courriel à l’adresse mail [Courriel 18] .
– Tant que la rétention n’a pas pris fin, la personne retenue peut demander l’assistance d’un interprète, d’un avocat ainsi que d’un médecin, et communiquer avec son consulat ou toute personne de son choix.
– La personne retenue bénéficie également du droit de contacter toute organisation et instance nationale, internationale ou non gouvernementale compétente pour visiter les lieux de rétention, notamment :
• le Contrôleur général des lieux de privation de liberté ([Adresse 13] ; www.cglpl.fr ; tél. : [XXXXXXXX05] ; fax : [XXXXXXXX02]) ;
• le Défenseur des droits ([Adresse 16] ; tél. : [XXXXXXXX08]) ;
• France Terre d’Asile ([Adresse 14] ; tél. : [XXXXXXXX04]) ;
• Forum Réfugiés Cosi ([Adresse 15] ; tél. : [XXXXXXXX07]) ;
• Médecins sans frontières – MSF ([Adresse 17] ; tél. : [XXXXXXXX01]).
– France Terre d’Asile association indépendante de l’administration présente dans chacun des centres de rétention du [Localité 19] (Tél. France Terre d’Asile CRA2 : [XXXXXXXX010] / [XXXXXXXX011] – Tél. France Terre d’Asile CRA 3 : [XXXXXXXX09] / [XXXXXXXX06]), est à la disposition des retenus, sans formalité, pour les aider dans l’exercice effectif de leurs droits, aux heures d’accueil précisées par le règlement intérieur.
– A tout moment, la personne retenue peut demander que sa privation de liberté prenne fin, par simple requête, motivée et signée, adressée au magistrat du siège par tout moyen, accompagnée de toutes les pièces justificatives.
– L’ordonnance qui met fin à la rétention ne fait pas disparaître l’obligation de quitter le territoire français imposée par l’autorité administrative tant que la personne concernée n’en est pas relevée. Si celle-ci n’a pas quitté la France en exécution de la mesure d’éloignement ou si elle revient en France alors que cette mesure est toujours exécutoire, elle peut faire l’objet d’une nouvelle décision de placement en rétention, à l’expiration d’un délai de 7 jours à compter du terme de sa rétention ou d’un délai de 48 heures en cas de circonstances nouvelles de fait ou de droit.

Reçu le 16 janvier 2025, dans une langue comprise, notification de la présente ordonnance avec remise d’une copie intégrale, information du délai d’appel et des modalités d’exercice de cette voie de recours, ainsi que le rappel des droits en rétention.
La personne retenue, L’interprète ayant prêté son concours

Copie intégrale de la présente ordonnance a été transmise par l’intermédiaire d’un moyen de télécommunication comportant un accusé de réception, le 16 janvier 2025, à l’avocat du PRÉFET DE L’ESSONNE, absent au prononcé de la décision.
Le greffier,

Reçu copie intégrale de la présente ordonnance le 16 janvier 2025.
L’avocat de la personne retenue,


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