Compétence du juge familial en matière de partage d’indivision et créances antérieures

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Compétence du juge familial en matière de partage d’indivision et créances antérieures

L’Essentiel : Mme [C] et M. [V], en concubinage, ont acquis un bien immobilier en indivision le 5 janvier 2016, avant de se séparer le 30 juin 2019. Le 18 décembre 2020, Mme [C] a assigné M. [V] pour obtenir le partage de l’indivision et réclamer 155 337 euros, correspondant à un gain au loto. Le tribunal a renvoyé l’affaire au juge aux affaires familiales, qui a confirmé sa compétence pour statuer sur la liquidation des intérêts patrimoniaux des concubins, en raison du différend sur la propriété du gain et son utilisation pour l’acquisition du bien.

Acquisition du bien immobilier

Mme [C] et M. [V], ayant vécu en concubinage, ont acquis en indivision un bien immobilier le 5 janvier 2016. Leur séparation a eu lieu le 30 juin 2019.

Demande en partage de l’indivision

Le 18 décembre 2020, Mme [C] a assigné M. [V] devant le tribunal judiciaire pour obtenir le partage de l’indivision et le paiement d’une somme de 155 337 euros, correspondant à un gain au loto réalisé le 24 décembre 2014.

Renvoi au juge aux affaires familiales

Le tribunal judiciaire a décidé de renvoyer le dossier au juge aux affaires familiales, conformément à l’article 82-1 du code de procédure civile.

Arguments de M. [V]

M. [V] a contesté la compétence du juge aux affaires familiales pour statuer sur la demande de Mme [C]. Il a soutenu que cette dernière ne pouvait pas considérer la somme de 155 337 euros comme une créance à réclamer à l’indivision, arguant que la cour d’appel avait dénaturé les termes du litige.

Réponse de la Cour

La cour a rappelé que, selon l’article L. 213-3 du code de l’organisation judiciaire, le juge aux affaires familiales est compétent pour la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des concubins. Elle a constaté qu’un différend existait entre Mme [C] et M. [V] concernant la propriété du gain au loto et son utilisation pour l’acquisition du bien indivis, justifiant ainsi la compétence du juge aux affaires familiales.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la compétence du juge aux affaires familiales en matière de partage des intérêts patrimoniaux des concubins ?

Le juge aux affaires familiales est compétent pour connaître de la liquidation et du partage des intérêts patrimoniaux des concubins, conformément à l’article L. 213-3 du code de l’organisation judiciaire.

Cet article stipule :

« Le juge aux affaires familiales connaît de la liquidation et du partage des intérêts patrimoniaux des concubins. »

Les intérêts patrimoniaux des concubins englobent tous leurs rapports pécuniaires, ce qui inclut les biens acquis en indivision et les créances qui peuvent en découler.

Dans le cas présent, la cour d’appel a constaté qu’un différend opposait Mme [C] et M. [V] concernant un gain au loto de 155 337 euros, réalisé en décembre 2014, et son utilisation pour l’acquisition d’un bien immobilier en indivision.

Il en résulte que le juge aux affaires familiales était matériellement compétent pour connaître de ce différend, qui s’inscrit dans le cadre du règlement et du partage de leurs intérêts patrimoniaux.

Comment le tribunal a-t-il interprété la demande de Mme [C] concernant le gain au loto ?

La cour d’appel a interprété la demande de Mme [C] comme une créance qu’elle pouvait réclamer à l’indivision, ce qui a conduit à la déclaration de compétence du juge aux affaires familiales.

M. [V] a contesté cette interprétation, arguant que Mme [C] demandait spécifiquement le paiement d’une somme au titre d’un bien propre constitué par les gains du loto.

Cependant, la cour a considéré que le différend sur la propriété de ce gain et son utilisation pour l’acquisition du bien indivis relevait des intérêts patrimoniaux des concubins.

Ainsi, la cour a estimé que la demande de Mme [C] était liée à la liquidation de l’indivision, ce qui justifiait la compétence du juge aux affaires familiales.

Quelles sont les implications des articles 815-13 du code civil et L. 213-3 du code de l’organisation judiciaire dans cette affaire ?

L’article 815-13 du code civil stipule que « chacun des indivisaires peut demander à tout moment le partage de l’indivision. » Cela signifie que les indivisaires ont le droit de demander la liquidation de l’indivision à tout moment.

Dans le contexte de cette affaire, cet article est pertinent car il souligne le droit de Mme [C] de demander le partage de l’indivision, y compris la prise en compte des apports respectifs des parties.

L’article L. 213-3 du code de l’organisation judiciaire, quant à lui, établit la compétence du juge aux affaires familiales pour traiter des questions relatives aux intérêts patrimoniaux des concubins.

La cour d’appel a donc appliqué ces articles pour justifier sa décision de renvoyer l’affaire au juge aux affaires familiales, considérant que le différend sur le gain au loto et son utilisation pour l’acquisition du bien indivis relevait de la liquidation des intérêts patrimoniaux des concubins.

En conclusion, ces articles législatifs encadrent la compétence du juge et les droits des parties dans le cadre de l’indivision et des demandes de partage.

CIV. 1

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 15 janvier 2025

Cassation partielle

Mme CHAMPALAUNE, président

Arrêt n° 22 F-D

Pourvoi n° F 22-22.518

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 15 JANVIER 2025

M. [I] [V], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° F 22-22.518 contre l’arrêt rendu le 20 septembre 2022 par la cour d’appel de Bordeaux (3e chambre civile), dans le litige l’opposant à Mme [G] [C], domiciliée [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Agostini, conseiller, les observations de Me Laurent Goldman, avocat de M. [V], de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de Mme [C], et l’avis de Mme Picot-Demarcq, avocat général, après débats en l’audience publique du 19 novembre 2024 où étaient présentes Mme Champalaune, président, Mme Agostini, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Ben Belkacem, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Bordeaux, 20 septembre 2022), Mme [C] et M. [V], qui ont vécu en concubinage, ont acquis en indivision, le 5 janvier 2016, un bien immobilier. Ils se sont séparés le 30 juin 2019.

2. Le 18 décembre 2020, Mme [C] a assigné M. [V] devant le tribunal judiciaire en partage de l’indivision et en paiement d’une somme de 155 337 euros correspondant à un gain au loto, tiré le 24 décembre 2014.

3. Le tribunal judiciaire a renvoyé le dossier au juge aux affaires familiales en application de l’article 82-1 du code de procédure civile.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. M. [V] fait grief à l’arrêt de rejeter sa demande tendant à voir déclarer le juge aux affaires familiales incompétent pour statuer sur la demande en paiement de la somme de 155 337 euros formée à son encontre par Mme [C], alors :

« 1°/ que dans le dispositif de son assignation, Mme [C] demandait au tribunal de  »condamner Monsieur [I] [V] à [lui] payer la somme de 155.337 euros au titre du bien propre constitué par les gains du loto en date du 24 décembre 2014 » ; qu’en retenant néanmoins, pour déclarer le juge aux affaires familiales compétent, que la requérante voyait dans cette somme une créance qu’elle pouvait réclamer à l’indivision, la cour d’appel a dénaturé les termes du litige et ainsi violé l’article 4 du code de procédure civile ;

2°/ que, subsidiairement, le juge qui se prononce sur la compétence doit trancher la question de fond dont dépend cette compétence ; qu’en s’en tenant néanmoins au constat, pour déclarer le juge aux affaires familiales compétent, que Mme [C] voyait dans la somme de 155 337 euros une créance qu’elle pouvait réclamer à l’indivision et que M. [V] la contestait, la cour d’appel, qui s’est abstenue de trancher la question de fond dont dépendait la compétence, a violé les articles 12 et 79 du code de procédure civile et l’article L. 213-3 du code de l’organisation judiciaire ;

3°/ que, en tout état de cause, une indivision ne peut être tenue pour débitrice d’une créance, née avant elle, liée à l’acquisition du bien indivis ; qu’en retenant néanmoins, pour dire que la demande en paiement de la somme de 155 337 euros s’analysait en une créance réclamée par Mme [C] sur l’indivision et déclarer en conséquence le juge aux affaires familiales compétent pour en connaître, qu’elle arguait que les fonds apportés par chacun pour l’acquisition du bien immobilier provenaient de son gain du loto, la cour d’appel a violé les articles 815-13 du code civil et L. 213-3 du code de l’organisation judiciaire ;

4°/ qu’en retenant également, pour statuer comme elle l’a fait, que le litige devait d’autant plus être examiné dans le cadre de la saisine du juge aux affaires familiales sur la liquidation de l’indivision que celui-ci devrait statuer sur d’éventuelles récompenses dues par l’indivision en raison du financement de l’immeuble indivis survenu pendant la période de concubinage qui s’est fait notamment au moyen d’apports respectifs de la part des parties, la cour d’appel a violé les articles 815-13 du code civil et L. 213-3 du code de l’organisation judiciaire. »

Réponse de la Cour

5. Aux termes de l’article L. 213-3 du code de l’organisation judiciaire, le juge aux affaires familiales connaît de la liquidation et du partage des intérêts patrimoniaux des concubins.

6. Les intérêts patrimoniaux des concubins s’entendent de tous leurs rapports pécuniaires.

7. La cour d’appel a constaté qu’un différend opposait Mme [C] et M. [V] sur la propriété d’un gain au loto d’un montant de 155 337 euros, réalisé en décembre 2014, et sur l’utilisation de cette somme pour l’acquisition du bien indivis.

8. Il en résulte que le juge aux affaires familiales était matériellement compétent pour connaître de ce différend qui entrait dans le règlement et le partage de leurs intérêts patrimoniaux.

9. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, l’arrêt se trouve légalement justifié de ce chef.


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