Résiliation de bail et contestation d’occupation : enjeux et conséquences

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Résiliation de bail et contestation d’occupation : enjeux et conséquences

L’Essentiel : La société SVENSKASAGAX 3 a assigné E.S.P.A.C.E EURO SERVICES pour expulsion des locaux qu’elle occupe sans droit, ainsi que pour le paiement d’un arriéré locatif de 82 545,76 euros. Lors de l’audience du 11 décembre 2024, E.S.P.A.C.E EURO SERVICES n’a pas comparu, rendant la décision contradictoire. Le juge des référés a reconnu le trouble manifestement illicite de l’occupation, mais a rejeté la demande d’expulsion, faute de preuves suffisantes. SVENSKASAGAX 3 a été condamnée aux dépens, et sa demande d’indemnité a également été rejetée, rendant la décision exécutoire à titre provisoire.

Exposé du litige

La société anonyme [Localité 5] REALTY FUND a conclu un bail commercial le 26 mai 2016 avec la société par actions simplifiée L’ATELIER DES COMPAGNONS pour des locaux situés à [Adresse 2] à [Localité 4], avec un loyer annuel de 57 960 euros. Le 15 avril 2019, la société SVENSKASAGAX 3 a acquis ces locaux. Le 26 septembre 2023, le tribunal de commerce de Rouen a prononcé la liquidation judiciaire de L’ATELIER DES COMPAGNONS, entraînant la résiliation du bail par le liquidateur judiciaire le 17 octobre 2023.

Conflit avec E.S.P.A.C.E EURO SERVICES

La société SVENSKASAGAX 3 a assigné la société E.S.P.A.C.E EURO SERVICES, qui occupe les locaux sans droit ni titre, devant le tribunal judiciaire de Melun. Elle a demandé l’expulsion de cette société, le paiement d’un arriéré locatif de 82 545,76 euros, ainsi qu’une indemnité d’occupation provisionnelle. Le juge des référés a déclaré son incompétence et a renvoyé l’affaire devant le tribunal judiciaire de Meaux.

Audience et absence de comparution

L’affaire a été retenue pour audience le 11 décembre 2024, où SVENSKASAGAX 3 a maintenu ses demandes. E.S.P.A.C.E EURO SERVICES n’a pas comparu, et la décision a été réputée contradictoire. Le juge a renvoyé à l’acte introductif d’instance pour plus de détails sur les prétentions de la demanderesse.

Décision du juge des référés

Le juge a statué sur la demande d’expulsion, considérant que le maintien dans les locaux sans droit ni titre constitue un trouble manifestement illicite. Cependant, il a constaté qu’il n’y avait pas de preuve suffisante de l’occupation illégale par E.S.P.A.C.E EURO SERVICES, ce qui a conduit au rejet de la demande d’expulsion et des demandes accessoires.

Conséquences de la décision

La société SVENSKASAGAX 3, ayant succombé dans ses demandes, a été condamnée aux dépens. Sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile a également été rejetée. La décision est exécutoire à titre provisoire.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la nature des troubles manifestement illicites en matière d’occupation des locaux ?

L’occupation d’un immeuble sans droit ni titre, suite à la résiliation d’un bail, constitue un trouble manifestement illicite.

En effet, selon l’article 835, alinéa 1er du code de procédure civile, le président peut prescrire en référé des mesures conservatoires ou de remise en état pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Cela signifie que lorsque la résiliation d’un bail est effective, toute occupation subséquente des locaux par un tiers, sans autorisation, est considérée comme illégale.

Ainsi, le bailleur peut demander l’expulsion de l’occupant illégal, car cette situation crée un trouble à son droit de propriété.

Il est donc essentiel de prouver que l’occupant n’a pas de titre légal pour occuper les lieux afin de justifier une demande d’expulsion.

Quelles sont les conditions pour accorder une provision au bailleur en référé ?

L’article 835, alinéa 2 du code de procédure civile stipule que si l’existence et le montant de l’obligation ne sont pas sérieusement contestables, le juge des référés peut accorder une provision au bailleur.

Cela implique que le bailleur doit démontrer que les arriérés de loyer sont établis et que leur montant est incontestable.

Dans le cas présent, la société SVENSKASAGAX 3 a demandé une provision de 82 545,76 euros au titre de l’arriéré locatif.

Cependant, pour que cette demande soit acceptée, il faut que le juge constate que l’occupant n’a pas de contestation sérieuse sur le montant dû.

Si l’occupant conteste le montant ou l’existence de la dette, le juge peut refuser d’accorder la provision.

Quelles sont les conséquences de l’absence de comparution du défendeur en référé ?

L’article 472 du code de procédure civile précise que lorsque le défendeur ne comparaît pas, le juge statue néanmoins sur le fond.

Cela signifie que le juge peut rendre une décision même en l’absence du défendeur, mais il doit s’assurer que la demande est régulière, recevable et fondée.

Dans le cas présent, bien que la société E.S.P.A.C.E EURO SERVICES n’ait pas comparu, le juge a examiné les demandes de la société SVENSKASAGAX 3.

Il a ainsi pu statuer sur la demande d’expulsion et les demandes accessoires, en se basant sur les éléments fournis par la partie demanderesse.

Cependant, l’absence de comparution peut également jouer en faveur du défendeur si les preuves présentées par le demandeur ne sont pas suffisantes pour justifier la demande.

Comment se détermine la charge des dépens en cas de rejet de la demande ?

L’article 491, alinéa 2 du code de procédure civile dispose que le juge statuant en référé statue sur les dépens.

De plus, l’article 696 précise que la partie perdante est condamnée aux dépens, sauf décision motivée du juge.

Dans cette affaire, la société SVENSKASAGAX 3, ayant vu sa demande d’expulsion rejetée, est considérée comme la partie perdante.

Par conséquent, elle est condamnée à supporter les dépens, conformément aux dispositions légales.

Cela signifie qu’elle devra payer les frais de justice engagés dans le cadre de cette procédure, ce qui inclut les frais d’assignation et d’huissier, entre autres.

Le juge a également rejeté la demande de la société SVENSKASAGAX 3 fondée sur l’article 700, ce qui signifie qu’elle ne pourra pas récupérer ses frais d’avocat auprès de la partie adverse.

– N° RG 24/00924 – N° Portalis DB2Y-W-B7I-CDW4R

Date : 15 Janvier 2025

Affaire : N° RG 24/00924 – N° Portalis DB2Y-W-B7I-CDW4R

N° de minute : 25/00016

Formule Exécutoire délivrée
le :

à :

Copie Conforme délivrée
le : 15-01-2025

à : Me Marie-Laure CHAROLLOIS + dossier

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MEAUX

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

Par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées, a été rendue, le QUINZE JANVIER DEUX MIL VINGT CINQ, par Monsieur Paul HUBER, Président du tribunal judiciaire de MEAUX au Tribunal judiciaire de MEAUX, assisté de Madame Béatrice BOEUF, Greffière lors des débats et du délibéré, l’ordonnance dont la teneur suit :

Entre :

DEMANDERESSE

S.A.S. SVENSKASAGAX 3
[Adresse 1]
[Localité 3]

représentée par Me Marie-Laure CHAROLLOIS, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

DEFENDERESSE

S.A.R.L. E.S.P.A.C.E EURO SERVICES
[Adresse 2]
[Localité 4]

non comparante

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Après avoir entendu les parties lors de l’audience de plaidoirie du 11 Décembre 2024 ;

EXPOSE DU LITIGE, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par contrat en date du 26 mai 2016, la société anonyme [Localité 5] REALTY FUND a donné à bail commercial à la société par actions simplifiée L’ATELIER DES COMPAGNONS (le preneur) des locaux situés [Adresse 2] à [Localité 4], moyennant un loyer annuel de 57 960 euros, hors charges et hors taxes, payable trimestriellement par avance.

Selon acte authentique en date du 15 avril 2019, la société par actions simplifiée SVENSKASAGAX 3 (le bailleur) a acquis de la société anonyme [Localité 5] REALTY FUND les locaux loués.

Par jugement du 26 septembre 2023, le tribunal de commerce de Rouen a prononcé la liquidation judiciaire de la société par actions simplifiée L’ATELIER DES COMPAGNONS.

Selon courrier du 17 octobre 2023, le liquidateur judiciaire de la société par actions simplifiée L’ATELIER DES COMPAGNONS a résilié le bail conclu avec la société anonyme [Localité 5] REALTY FUND.

Exposant que la société à responsabilité limitée E.S.P.A.C.E EURO SERVICES occupe, sans droit ni titre, les locaux antérieurement loués à la société L’ATELIER DES COMPAGNONS, la société SVENSKASAGAX 3 a, par acte de commissaire de justice du 10 juin 2024, fait assigner la société E.S.P.A.C.E EURO SERVICES devant la juridiction des référés du tribunal judiciaire de Melun aux fins de :
– ordonner l’expulsion de la société à responsabilité limitée E.S.P.A.C.E EURO SERVICES et celle de tous occupants de son chef des lieux loués avec le concours de la force publique et d’un serrurier si besoin est, sous astreinte de 500 euros par jour de retard,
– condamner la société à responsabilité limitée E.S.P.A.C.E EURO SERVICES à lui payer la somme provisionnelle de 82 545,76 euros au titre de l’arriéré locatif arrêté au 3 mai 2024,
– condamner la société à responsabilité limitée E.S.P.A.C.E EURO SERVICES à lui payer une indemnité d’occupation provisionnelle égale au montant du loyer augmenté des charges, jusqu’à la libération des locaux qui se matérialisera par la remise des clés ou l’expulsion du défendeur,
– débouter la société à responsabilité limitée E.S.P.A.C.E EURO SERVICES de ses demandes,
– condamner la société à responsabilité limitée E.S.P.A.C.E EURO SERVICES au paiement d’une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance du 28 août 2024, le juge des référés du tribunal judiciaire de Melun s’est déclaré incompétent au profit du juge des référés du tribunal judiciaire de Meaux, a renvoyé les parties devant cette juridiction et a réserver les dépens.

L’affaire a été retenue à l’audience du 11 décembre 2024 à laquelle la société par actions simplifiée SVENSKASAGAX 3 a maintenu ses demandes.

Bien que régulièrement assignée selon les dispositions de l’article 659 du code de procédure civile, la société à responsabilité limitée E.S.P.A.C.E EURO SERVICES n’a pas comparu. La décision étant susceptible d’appel, elle sera réputée contradictoire.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé à l’acte introductif d’instance pour un plus ample exposé des moyens et prétentions de la demanderesse.

L’affaire a été mise en délibéré au 15 janvier 2025.

SUR CE,

En application de l’article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.

– Sur la demande relative à l’expulsion et les demandes qui en découlent :

Aux termes de l’article 835, alinéa 1er du code de procédure civile, le président peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Le maintien dans un immeuble, sans droit ni titre du fait de la résiliation du bail, constitue un trouble manifestement illicite.

Selon l’article 835, alinéa 2, du code de procédure civile, si l’existence et le montant de l’obligation ne sont pas sérieusement contestables, le juge des référés peut accorder une provision au bailleur à valoir sur le passif locatif du preneur.

– N° RG 24/00924 – N° Portalis DB2Y-W-B7I-CDW4R
En l’espèce, il résulte de l’extrait du registre national des entreprises et de l’historique des inscriptions modificatives du greffe du tribunal de commerce de Meaux relatifs à la société à responsabilité limitée E.S.P.A.C.E EURO SERVICES que le siège social de cette dernière est le [Adresse 2] à [Localité 4] depuis le 15 décembre 2016.

Toutefois, il ne résulte d’aucun document que la société à responsabilité limitée E.S.P.A.C.E EURO SERVICES a la qualité de preneur à bail ou de sous-locataire de la société L’ATELIER DES COMPAGNONS, ni même qu’elle occupe encore les locaux litigieux.

En effet, aucun document ne vient constater l’occupation litigieuse et il résulte du procès-verbal de recherches conforme à l’article 659 du code de procédure civile, que le commissaire de justice a constaté que la société à responsabilité limitée E.S.P.A.C.E EURO SERVICES n’avait ni domicile, ni résidence ni établissement à l’adresse de son siège, que le gardien et le voisinage déclarait que la société n’avait plus d’activité et avait quitté les lieux, que l’employée contactée a confirmé que l’ensemble de salariés était en télétravail faute de locaux.

En conséquence, il n’est pas démontré, avec l’évidence requise en matière de référé que la société à responsabilité limitée E.S.P.A.C.E EURO SERVICES est occupante sans droit ni titre des locaux litigieux.

Dès lors, il y aura lieu de rejeter la demande d’expulsion formée ainsi que les demandes qui en découlent.

– Sur les demandes accessoires :

L’article 491, alinéa 2 du code de procédure civile dispose que le juge statuant en référé statue sur les dépens. L’article 696 du même code précise que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

La société par actions simplifiée SVENSKASAGAX 3, qui succombe, supportera la charge des dépens, conformément aux dispositions sus-visées et sa demande formée sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile sera rejetée.

PAR CES MOTIFS

Statuant en référé, par décision réputée contradictoire et en premier ressort, remise au greffe le jour du délibéré, après débats en audience publique,

Rejetons la demande d’expulsion formée par la société par actions simplifiée SVENSKASAGAX 3 ainsi que les demandes en découlant,

Condamnons la société par actions simplifiée SVENSKASAGAX 3 aux dépens,

Rejetons la demande de la société par actions simplifiée SVENSKASAGAX 3 formée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Rejetons les autres demandes,

Rappelons que la présente décision est exécutoire à titre provisoire.

Le Greffier Le Président


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