Constitutionnalité des dispositions sur les congés payés en question

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Constitutionnalité des dispositions sur les congés payés en question

L’Essentiel : M. [K] a été engagé par Lidl en tant que chef de magasin le 3 mars 2014, promu directeur le 5 mars 2018. En arrêt de travail pour maladie du 2 décembre 2021 jusqu’à son licenciement le 11 octobre 2022, il a saisi la juridiction prud’homale le 9 novembre 2023 pour réclamer des rappels de salaire liés à ses congés payés. Le 13 novembre 2024, le conseil de prud’hommes a transmis une question prioritaire de constitutionnalité sur la conformité de l’article 37 de la loi n° 2024-364. Cependant, cette question a été jugée irrecevable par la Cour de cassation.

Engagement et Promotion de M. [K]

M. [K] a été engagé par la société Lidl en tant que chef de magasin le 3 mars 2014, et a été promu directeur de magasin le 5 mars 2018.

Arrêt de Travail et Licenciement

Le salarié a été en arrêt de travail pour maladie du 2 décembre 2021 jusqu’à son licenciement le 11 octobre 2022.

Saisine de la Juridiction Prud’homale

Le 9 novembre 2023, M. [K] a saisi la juridiction prud’homale pour demander le paiement de rappels de salaire au titre des congés payés dus pendant son arrêt de travail pour maladie.

Transmission de la Question Prioritaire de Constitutionnalité

Le 13 novembre 2024, le conseil de prud’hommes de Carcassonne a transmis une question prioritaire de constitutionnalité concernant la conformité des dispositions de l’article 37 de la loi n° 2024-364 et des arrêts de la Cour de cassation avec la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.

Demande de la Société Lidl

La société Lidl a demandé à la Cour de se prononcer sur la conformité des dispositions législatives et des articles du code du travail avec les droits et libertés garantis par la Constitution.

Examen de la Question Prioritaire de Constitutionnalité

La Cour a constaté que la disposition contestée était applicable au litige et n’avait pas encore été déclarée conforme à la Constitution.

Irrecevabilité de la Question

La question prioritaire de constitutionnalité a été jugée irrecevable, car il n’existait pas d’interprétation jurisprudentielle constante relative à l’article 37 de la loi n° 2024-364.

Caractère Non Sérieux de la Question

La question posée n’était pas nouvelle et ne présentait pas un caractère sérieux, l’article 37 se limitant à appliquer des dispositions précises de directives européennes sans remettre en cause l’identité constitutionnelle de la France.

Décision de la Cour de Cassation

La Cour de cassation a décidé de ne pas renvoyer la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la portée des dispositions de l’article 37 de la loi n° 2024-364 du 22 avril 2024 concernant les congés payés ?

L’article 37 de la loi n° 2024-364 du 22 avril 2024 traite des dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière de droit social, notamment en ce qui concerne les congés payés.

Cet article vise à mettre en conformité le droit français avec les exigences de la directive 2003/88/CE du Parlement européen, qui concerne certains aspects de l’aménagement du temps de travail.

Il est important de noter que cet article ne remet pas en cause les principes fondamentaux de la Constitution française, mais se limite à tirer les conséquences nécessaires des dispositions européennes.

Ainsi, il n’y a pas de violation des droits garantis par la Constitution, car l’article 37 ne contredit pas les principes de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.

Quelles sont les implications de la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la société Lidl ?

La question prioritaire de constitutionnalité (QPC) posée par la société Lidl concerne la conformité des dispositions de l’article 37 de la loi n° 2024-364 et des articles L. 3141-3 et L. 3141-5 du Code du travail avec les droits et libertés garantis par la Constitution.

L’article L. 3141-3 du Code du travail stipule que « tout salarié a droit à un congé payé d’une durée minimale de 2,5 jours ouvrables par mois de travail effectif ».

De plus, l’article L. 3141-5 précise que « les congés payés doivent être pris dans un délai de 12 mois suivant la fin de la période de référence ».

La société Lidl soutient que ces dispositions, interprétées par la jurisprudence, pourraient porter atteinte à la liberté d’entreprendre et à la souveraineté nationale.

Cependant, la Cour de cassation a jugé que la question n’était pas nouvelle et ne présentait pas un caractère sérieux, car les dispositions contestées ne remettent pas en cause l’identité constitutionnelle de la France.

Pourquoi la Cour de cassation a-t-elle déclaré la question prioritaire de constitutionnalité irrecevable ?

La Cour de cassation a déclaré la question prioritaire de constitutionnalité irrecevable pour plusieurs raisons.

Premièrement, la disposition contestée n’avait pas encore été déclarée conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel, ce qui est une condition préalable pour qu’une QPC soit recevable.

Deuxièmement, la question posée ne portait pas sur l’interprétation d’une disposition constitutionnelle, mais sur des dispositions législatives qui avaient déjà été appliquées par la jurisprudence.

Enfin, la Cour a noté qu’il n’existait pas d’interprétation jurisprudentielle constante relative à l’article 37 de la loi n° 2024-364, ce qui affaiblit la base de la contestation.

Ainsi, la Cour a conclu qu’il n’y avait pas lieu de renvoyer la question au Conseil constitutionnel.

SOC.

COUR DE CASSATION

JL10

______________________

QUESTION PRIORITAIRE
de
CONSTITUTIONNALITÉ
______________________

Audience publique du 22 janvier 2025

NON-LIEU A RENVOI

M. SOMMER, président

Arrêt n° 151 FS-B

Affaire n° H 24-40.030

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 22 JANVIER 2025

Le conseil de prud’hommes de Carcassonne (section encadrement) a transmis à la Cour de cassation, suite au jugement rendu le 13 novembre 2024, la question prioritaire de constitutionnalité, reçue le 21 novembre 2024, dans l’instance mettant en cause :

d’une part,

la société Lidl, société en nom collectif, dont le siège est [Adresse 1],

d’autre part,

M. [O] [K], domicilié [Adresse 2].

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Thomas-Davost, conseiller référendaire, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société Lidl, et l’avis de Mme Molina, avocat général référendaire, après débats en l’audience publique du 15 janvier 2025 où étaient présents M. Sommer, président, Mme Thomas-Davost, conseiller référendaire rapporteur, Mme Monge, conseiller doyen, Mme Cavrois, M. Flores, Mmes Deltort, Le Quellec, conseillers, Mmes Laplume, Rodrigues, Segond, conseillers référendaires, Mme Molina, avocat général référendaire, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l’article R. 431-5 du code de l’organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. M. [K] a été engagé en qualité de chef de magasin par la société Lidl le 3 mars 2014, puis promu le 5 mars 2018 directeur de magasin.

2. Le salarié a été placé en arrêt de travail pour maladie du 2 décembre 2021 au 11 octobre 2022, date de son licenciement.

3. Il a saisi la juridiction prud’homale, le 9 novembre 2023, afin de solliciter la condamnation de son employeur à lui payer des rappels de salaire au titre des congés payés dus pendant son arrêt de travail pour maladie.

Enoncé de la question prioritaire de constitutionnalité

4. Par jugement du 13 novembre 2024, le conseil de prud’hommes de Carcassonne a transmis une question prioritaire de constitutionnalité ainsi rédigée :

« Ordonne la transmission du mémoire présenté par la société Lidl à la Cour de cassation afin que celle-ci procède à l’examen qui lui incombe en vue de sa transmission au Conseil constitutionnel de la question prioritaire de constitutionnalité tirée de ce que les dispositions de l’article 37 de la loi n° 2024-364 du 22 avril 2024 et les arrêts du 13 septembre 2024 [2023] rendus par la chambre sociale de la Cour de cassation sous les pourvois n° 22-17.340 à 22-17.242, 22-17.638, 22-17.529 et 22-11.106 portant sur le régime des congés payés sont contraires aux dispositions des articles 2, 4, 15 et 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République et de l’article 3 de la Constitution de 1958. »

5. Devant la Cour, la société Lidl demande que soit posée la question suivante :

« Les dispositions des I et II de l’article 37 de la loi n° 2024-364 du 22 avril 2024 ainsi que celles des articles L. 3141-3 et L. 3141-5 du code du travail, telles qu’interprétées de façon constante par la Cour de cassation, sont-elles conformes aux droits et libertés garantis par la Constitution, notamment au principe de la liberté d’entreprendre, à la garantie des droits et au principe de souveraineté nationale ? »

6. Si la question peut être reformulée par le juge à l’effet de la rendre plus claire ou de lui restituer son exacte qualification, il ne lui appartient pas d’en modifier l’objet ou la portée, de sorte que ne peuvent être examinés ni le grief d’inconstitutionnalité des articles L. 3141-3 et L. 3141-5 du code du travail, tels qu’interprétés de façon constante par la Cour de cassation, ni la méconnaissance par les dispositions contestées du principe de la liberté d’entreprendre, à la garantie des droits et au principe de souveraineté nationale qui n’ont pas été soumis au conseil de prud’hommes.

7. Il y a donc lieu pour la Cour de cassation de se prononcer sur le renvoi de la question prioritaire de constitutionnalité telle qu’elle a été posée par la juridiction qui la lui a transmise et soulevée dans le mémoire distinct produit devant celle-ci.

Examen de la question prioritaire de constitutionnalité

8. La disposition contestée est applicable au litige.

9. Elle n’a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel.

10. Cependant, si tout justiciable a le droit de contester la constitutionnalité de la portée effective qu’une interprétation jurisprudentielle constante confère à une disposition législative, sous la réserve que cette jurisprudence ait été soumise à la Cour suprême compétente, il n’existe pas, en l’état, d’interprétation jurisprudentielle constante relative à l’article 37 de la loi n° 2024-364 du 22 avril 2024, les jurisprudences visées par la question ne portant pas sur cette disposition législative.

11. La question prioritaire de constitutionnalité est donc, sur ce point, irrecevable.

12. Par ailleurs, d’une part, la question posée, ne portant pas sur l’interprétation d’une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n’aurait pas encore eu l’occasion de faire application, n’est pas nouvelle.

13. D’autre part, la question posée ne présente pas un caractère sérieux, dès lors que l’article 37 de la loi n° 2024-364 du 22 avril 2024, portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière d’économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole, se borne à tirer les conséquences nécessaires de dispositions inconditionnelles et précises de l’article 7 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail et de l’article 31, paragraphe 2, de la Charte des droits fondamentaux et ne met en cause aucune règle ni aucun principe inhérent à l’identité constitutionnelle de la France.

14. En conséquence, il n’y a pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

DIT N’Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux janvier deux mille vingt-cinq.


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