L’Essentiel : Le 8 novembre 2023, le conseil de prud’hommes de Fort-de-France a rendu un jugement défavorable à Mme [X] [H], déboutant ses demandes et accueillant la demande reconventionnelle de la société Accentys Audit Consultant. Mme [X] [H] a été condamnée à verser 2.500,01 euros pour indemnité compensatrice de préavis non effectué et 15.000,06 euros pour une clause de non-concurrence. En janvier 2025, elle a demandé la suspension de l’exécution provisoire du jugement, arguant des manquements de son employeur. Cependant, la société Accentys a contesté cette demande, et le tribunal a déclaré celle-ci sans objet.
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Jugement du Conseil de Prud’hommesLe 8 novembre 2023, le conseil de prud’hommes de Fort-de-France a rendu un jugement défavorable à Mme [X] [H], déclarant ses demandes non-fondées et la déboutant de l’ensemble de ses requêtes. En revanche, la demande reconventionnelle de la société Accentys Audit Consultant a été jugée fondée, entraînant des condamnations financières à l’encontre de Mme [X] [H]. Condamnations financièresMme [X] [H] a été condamnée à verser 2.500,01 euros à la société Accentys pour indemnité compensatrice de préavis non effectué, ainsi que 15.000,06 euros pour indemnité liée à une clause de non-concurrence. De plus, elle a été condamnée à payer 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et les parties ont été condamnées à leurs propres dépens. Appel et Assignations en RéféréLe 20 juin 2025, Mme [X] [H] a interjeté appel du jugement. Par la suite, elle a assigné la société Accentys en référé à deux reprises, pour des audiences respectivement prévues le 5 septembre et le 3 octobre 2024, devant le premier président de la cour d’appel de Fort-de-France. Demande de Suspension de l’Exécution ProvisoireDans ses conclusions notifiées le 2 janvier 2025, Mme [X] [H] a demandé la suspension de l’exécution provisoire du jugement du 8 novembre 2023, arguant que les manquements de son employeur justifiaient sa prise d’acte. Elle a évoqué des reproches injustifiés, une sanction disciplinaire, des menaces de licenciement et des falsifications de documents par son employeur. Réponse de la Société AccentysLa société Accentys a demandé le rejet de la demande de suspension, soutenant que les condamnations étaient exécutoires à titre provisoire et que Mme [X] [H] n’avait pas prouvé l’existence de conséquences excessives. Elle a également contesté les arguments de Mme [X] [H] concernant les manquements de l’employeur. Délibération et DécisionL’affaire a été débattue le 9 janvier 2025, et les parties ont convenu de la jonction des procédures. Le premier président a ensuite statué sur la demande de suspension de l’exécution provisoire, déclarant celle-ci sans objet, car les condamnations n’étaient pas visées par l’exécution provisoire de droit. Conclusion de la DécisionLa décision a ordonné la jonction des procédures, a déclaré sans objet la demande de suspension de l’exécution provisoire, et a laissé les dépens à la charge de Mme [X] [H], sans application de l’article 700 du code de procédure civile. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions pour suspendre l’exécution provisoire d’un jugement en appel ?La suspension de l’exécution provisoire d’un jugement en appel est régie par l’article 514-3 du Code de procédure civile. Cet article stipule que : « En cas d’appel, le premier président peut être saisi afin d’arrêter l’exécution provisoire de la décision lorsqu’il existe un moyen sérieux d’annulation ou de réformation et que l’exécution risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives. » Pour qu’une demande de suspension soit recevable, il faut donc : 1. **Un moyen sérieux d’annulation ou de réformation** : Ce moyen doit être pertinent et avoir des chances raisonnables de succès devant la juridiction d’appel. 2. **Des conséquences manifestement excessives** : Ces conséquences doivent être appréciées en fonction des capacités de paiement du débiteur et des possibilités de remboursement de la partie adverse en cas d’infirmation de la décision. Il est important de noter que la demande de suspension n’est recevable que si ces deux conditions sont remplies, et que les conséquences excessives doivent être survenues après la décision de première instance. Quelles sont les implications de l’exécution provisoire de droit selon le Code du travail ?L’exécution provisoire de droit est encadrée par les articles R. 1454-28 et R. 1454-14 du Code du travail. L’article R. 1454-28 précise que : « Les condamnations au paiement des rémunérations et indemnités mentionnées au 2° de l’article R.1454-14 sont de plein droit exécutoires par provision dans la limite maximum de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire. » L’article R. 1454-14, quant à lui, énonce que : « Lorsque l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable : Ces articles indiquent que l’exécution provisoire de droit s’applique uniquement aux sommes dues par l’employeur au salarié. Dans le cas présent, les condamnations imposées à Mme [X] [H] ne relèvent pas de cette exécution provisoire de droit, car elles concernent des indemnités que le salarié doit payer à l’employeur. Quels sont les effets de la décision du conseil de prud’hommes sur l’exécution provisoire ?Le jugement du conseil de prud’hommes du 8 novembre 2023 a condamné Mme [X] [H] à verser des sommes à la société Accentys. Cependant, il est précisé que : « Le jugement du conseil de prud’hommes querellé n’ordonne pas l’exécution provisoire et l’exécution provisoire de droit n’est pas applicable en l’espèce, s’agissant de condamnations non visées par l’exécution provisoire de droit. » Cela signifie que, bien que Mme [X] [H] ait été condamnée à payer des indemnités, ces condamnations ne sont pas exécutoires à titre provisoire, car elles ne relèvent pas des dispositions du Code du travail concernant l’exécution provisoire de droit. Ainsi, la demande de Mme [X] [H] visant à suspendre l’exécution provisoire est déclarée sans objet, car il n’y a pas d’exécution provisoire applicable à ces condamnations. Quelles sont les conséquences de la décision sur les dépens et l’article 700 du Code de procédure civile ?La décision du premier président a également des implications sur les dépens et l’application de l’article 700 du Code de procédure civile. Selon l’article 700 : « La partie qui perd le procès peut être condamnée à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. » Dans ce cas, le premier président a décidé de : « Laisser les dépens à la charge de Mme [X] [H]. Il ne sera pas fait application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile. » Cela signifie que Mme [X] [H] devra supporter les frais de la procédure, et qu’aucune indemnité ne sera accordée à la société Accentys au titre des frais non compris dans les dépens. Cette décision souligne la responsabilité de la partie perdante dans le cadre des frais de justice. |
DE [Localité 7]
AUDIENCE DU
21 Janvier 2025
N° RG 24/00058 – N° Portalis DBWA-V-B7I-CPGD
N°RG 24/00063 – N° Portalis
DBWA-V-B7I-CPJZ
MINUTE N°25/02
[X] [H]
C/
SAS ACCENTYS AUDIT CONSULTANT
ORDONNANCE DE REFERE
ENTRE
Mme [X] [H]
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Me Isabelle OLLIVIER de la SELARL AGORALEX, avocat au barreau de MARTINIQUE
DEMANDERESSE EN REFERE
SAS ACCENTYS AUDIT CONSULTANT
[Adresse 3] [Localité 5] [Adresse 6]
[Adresse 8]
[Localité 1]
Représentée par Me Pascale BERTE de la SELARL BERTE & ASSOCIES, avocat au barreau de MARTINIQUE
DEFENDEUR EN REFERE
L’affaire a été appelée à l’audience publique du NEUF JANVIER DEUX MILLE VINGT CINQ à la Cour d’Appel DE FORT DE FRANCE par Premier Président assisté de Madame Sandra DE SOUSA, Greffier, présent aux débats et lors du prononcé, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues aux deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile que le prononcé de l’ordonnance serait rendu le VINGT ET UN JANVIER DEUX MILLE VINGT CINQ par mise à disposition au greffe de la Cour.
Par jugement du 8 novembre 2023, le conseil de prud’hommes de Fort-de-France a statué comme suit :
– Dit et juge les demandes de Mme [X] [H] non-fondées,
– Déboute Mme [X] [H] de l’ensemble de ses demandes,
– Dit et juge fondée la demande reconventionnelle de la société Accentys Audit Consultant,
En conséquence,
– Condamne Mme [X] [H] à payer 2.500,01 euros à la société Accentys Audit Consultant au titre de l’indemnité compensatrice de préavis non effectué,
– Condamne Mme [X] [H] à payer 15.000,06 euros à la société Accentys Audit Consultant au titre de l’indemnité pour clause de non concurrence,
– Condamne Mme [X] [H] à payer 1.000 euros à la société Accentys Audit Consultant au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– Condamne les parties à leurs propres dépens,
– Dit n’y avoir lieu à exécution provisoire.
Par déclaration du 20 juin 2025, Mme [X] [H] a interjeté appel du jugement.
Par exploit d’huissier du 12 août 2024, déposé en étude, Mme [X] [H] a assigné en référé (procédure RG n°24-58), devant le premier président de la cour d’appel de Fort-de-France, la société Accentys Audit Consultant (ci-après la société « Accentys ») pour l’audience du 5 septembre 2024 à 10 heures à la cour d’appel de Fort-de-France.
Par exploit d’huissier du 10 septembre 2024, Mme [X] [H] a assigné en référé (procédure RG n°24-63), devant le premier président de la cour d’appel de Fort-de-France, la société Accentys Audit Consultant (ci-après la société « Accentys ») pour l’audience du 3 octobre 2024 à 10 heures à la cour d’appel de Fort-de-France.
Aux termes de ses dernières conclusions, notifiées le 2 janvier 2025, Mme [X] [H] demande à la présente juridiction de suspendre le bénéfice de l’exécution provisoire attaché au jugement du 8 novembre 2023.
A l’appui de ses prétentions, Mme [X] [H] fait valoir des moyens de réformation du jugement en ce que le conseil a jugé à tort que les manquements de son employeur n’étaient pas suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail. Elle indique que sa prise d’acte est justifiée en raison des reproches intempestifs de son employeur, d’une sanction disciplinaire injustifiée, de la menace de licenciement pour faute grave et d’un licenciement verbal.
Elle relève que l’employeur a falsifié des documents et a trompé le conseil de prud’hommes afin de ne pas lui payer sa rémunération variable.
Elle soutient que l’exécution du jugement risque d’entrainer des conséquences manifestement excessives au regard de sa situation financière.
En réplique, la société Accentys demande à la présente juridiction de :
A titre principal :
– débouter Mme [X] [H] de sa demande de suspension du bénéfice de l’exécution provisoire attachée au jugement du 8 novembre 2023,
A titre subsidiaire :
– Condamner Mme [X] [H] à lui verser la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– Condamner Mme [X] [H] aux entiers dépens.
A l’appui de ses prétentions, elle soutient que les condamnations au paiement de l’indemnité compensatrice de préavis et de l’indemnité pour la clause de non-concurrence sont exécutoires à titre provisoire. Elle fait valoir que Mme [X] [H] n’a formulé aucune demande portant sur l’exécution provisoire en première instance et n’apporte pas la preuve de l’existence de conséquences manifestement excessives survenues postérieurement à la décision de première instance. Elle conteste les moyens sérieux de réformation du jugement soulevés par Mme [X] [H], indiquant que celle-ci n’apportait pas la preuve de l’existence d’un avertissement injustifié ou qu’elle avait fait l’objet d’un licenciement verbal le 16 octobre 2020.
Renvoyée à plusieurs reprises, l’affaire a été débattue contradictoirement à l’audience du 9 janvier 2025.
A l’audience du 9 janvier 2025les parties ont indiqué ne pas s’opposer à la jonction des procédures RG n°24/00058 et n°24/00063.
Les débats clos la présente décision a été mise en délibéré au 21 janvier 2025.
Il convient de prononcer la jonction des procédures 24/58 et 24/63 .
L’article 514-3 du code de procédure civile dispose qu’en cas d’appel, le premier président peut être saisi afin d’arrêter l’exécution provisoire de la décision lorsqu’il existe un moyen sérieux d’annulation ou de réformation et que l’exécution risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives.
La demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d’observations sur l’exécution provisoire n’est recevable que si, outre l’existence d’un moyen sérieux d’annulation ou de réformation, l’exécution provisoire risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance.
Un moyen sérieux d’annulation ou de réformation est un moyen qui, compte tenu de son caractère très pertinent, sera nécessairement pris en compte par la juridiction d’appel, avec des chances suffisamment raisonnables de succès.
Les conséquences manifestement excessives s’apprécient en ce qui concerne les condamnations pécuniaires par rapport aux facultés de paiement du débiteur et aux facultés de remboursement de la partie adverse en cas d’infirmation de la décision assortie de l’exécution provisoire.
En vertu de l’article R. 1454-28 du code du travail, les condamnations au paiement des rémunérations et indemnités mentionnées au 2° de l’article R.1454-14 sont de plein droit exécutoires par provision dans la limite maximum de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire.
Aux termes de l’article R.1454-14 2° précité, lorsque l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable :
a) Le versement de provisions sur les salaires et accessoires du salaire ainsi que les commissions ;
b) Le versement de provisions sur les indemnités de congés payés, de préavis et de licenciement ;
En l’espèce, le conseil de prud’hommes de Fort-de-France a condamné Mme [X] [H] à verser à la société Accentys la somme de 2.500,01 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis non effectué ainsi que la somme de 15.000,06 euros au titre de l’indemnité pour clause de non-concurrence.
Toutefois, il résulte de la combinaison des articles R.1454-28 et R.1454-14 du code du travail que l’exécution provisoire de droit n’est applicable qu’à des sommes dues par l’employeur au salarié.
Le jugement du conseil de prud’hommes querellé n’ordonne pas l’exécution provisoire et l’exécution provisoire de droit n’est pas applicable en l’espèce, s’agissant de condamnations non visées par l’exécution provisoire de droit.
La demande formulée par Mme [X] [H] tendant à faire suspendre l’exécution provisoire des condamnations mises à sa charge est ainsi inopérante. Elle sera donc déclarée sans objet.
Il convient de laisser les dépens à la charge de Mme [X] [H]. Il ne sera pas fait application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Le premier président statuant par délégation en matière de référé, publiquement, par décision contradictoire et par mise à disposition :
Ordonne la jonction des procédures 24/58 et 24/63,
Déclare sans objet la demande d’arrêt de l’exécution provisoire du jugement rendu le 8 novembre 2023 par le conseil de prud’hommes de Fort-de-France formulée par Mme [X] [H],
Dit n’y avoir lieu à l’application de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne Mme [X] [H] aux dépens.
La présente ordonnance a été signée par Madame Christine PARIS, présidente de chambre délégataire de Monsieur le premier président et Madame Sandra DE SOUSA, greffière, à laquelle la minute a été remise.
LA GREFFIÈRE P/ LE PREMIER PRÉSIDENT
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