L’Essentiel : Le 12 juillet 2021, M. [S] [L] et la société [1] ont poursuivi M. [S] [W], directeur du Journal de l’île de La Réunion, pour diffamation et injure. Les accusations se fondent sur des éditoriaux publiés entre avril et juin 2021, où M. [W] critiquait M. [L] pour des conflits d’intérêts et des abus de biens sociaux. Le 2 décembre 2021, le tribunal a relaxé M. [W], rejetant les accusations. En réponse, M. [L] et la société [1] ont fait appel, contestant cette décision et cherchant réparation pour les propos jugés diffamatoires. Toutefois, les moyens d’appel n’ont pas été jugés suffisants.
|
Contexte de l’affaireLe 12 juillet 2021, M. [S] [L] et la société [1] ont engagé des poursuites contre M. [S] [W], directeur de publication du Journal de l’île de La Réunion, pour diffamation publique et injure envers un particulier. Les accusations reposent sur plusieurs éditoriaux publiés entre avril et juin 2021, dans lesquels M. [W] a formulé des critiques acerbes à l’encontre de M. [L] et de ses pratiques professionnelles. Propos diffamatoires et injurieuxLes éditoriaux en question contiennent des allégations concernant des conflits d’intérêts, des abus de biens sociaux, et des pratiques douteuses liées à des projets immobiliers. M. [W] évoque des montants d’argent non remboursés, des complicités entre M. [L] et des responsables politiques, ainsi que des transferts frauduleux de permis de construire. Ces propos ont été jugés suffisamment graves pour justifier une action en justice. Décision du tribunal correctionnelLe 2 décembre 2021, le tribunal correctionnel a rendu un jugement qui a rejeté l’exception d’irrecevabilité des constitutions de partie civile. M. [W] a été relaxé des accusations de diffamation et d’injure, et le tribunal a également statué sur les intérêts civils des parties. Appel des parties civilesSuite à cette décision, les parties civiles, M. [S] [L] et la société [1], ont décidé de faire appel du jugement rendu par le tribunal correctionnel, contestant ainsi la relaxe de M. [W] et cherchant à obtenir réparation pour les propos tenus dans les éditoriaux. Examen des moyens d’appelLes moyens d’appel soulevés par les parties civiles n’ont pas été jugés suffisants pour permettre l’admission du pourvoi, conformément à l’article 567-1-1 du code de procédure pénale. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les implications juridiques de la diffamation publique envers un particulier selon le Code pénal ?La diffamation publique envers un particulier est régie par l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse. Cet article stipule que : « La diffamation est l’allégation ou l’imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération d’une personne. » Dans le cas présent, les propos tenus par M. [S] [W] dans le Journal de l’île de La Réunion peuvent être considérés comme des allégations portant atteinte à l’honneur de M. [S] [L]. Il est important de noter que pour qu’il y ait diffamation, il faut que les propos soient publics et qu’ils soient susceptibles de nuire à la réputation de la personne visée. En outre, l’article 32 de la même loi précise que : « La diffamation commise par voie de presse est punie d’une amende de 12 000 euros. » Ainsi, si les propos tenus par M. [W] sont jugés diffamatoires, il pourrait être condamné à une amende, et M. [L] pourrait obtenir des dommages-intérêts pour le préjudice subi. Quels sont les recours possibles pour les parties civiles en cas de rejet de leur constitution de partie civile ?Le rejet de la constitution de partie civile peut être contesté par les parties civiles en vertu de l’article 2 du Code de procédure pénale, qui stipule que : « Toute personne qui se prétend victime d’une infraction peut se constituer partie civile. » Dans le cas présent, les parties civiles, M. [S] [L] et la société [1], ont le droit de faire appel de la décision du tribunal correctionnel qui a rejeté leur exception d’irrecevabilité. L’article 5 du Code de procédure pénale précise également que : « L’appel est ouvert contre les décisions rendues par les juridictions de première instance. » Cela signifie que les parties civiles peuvent contester la décision de relaxe de M. [W] et demander une réévaluation de leur constitution de partie civile. Il est essentiel pour les parties civiles de démontrer que les propos tenus par M. [W] ont causé un préjudice et que leur constitution de partie civile est fondée sur des éléments de preuve suffisants. Comment le tribunal évalue-t-il les éléments constitutifs de l’injure publique ?L’injure publique est définie par l’article 23 de la loi du 29 juillet 1881, qui indique que : « L’injure est toute expression outrageante, terme de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait. » Dans le cas présent, les propos tenus par M. [W] à l’égard de M. [L] peuvent être qualifiés d’injure publique, car ils contiennent des termes péjoratifs sans imputation d’un fait précis. Le tribunal doit donc examiner si les propos sont effectivement outrageants et s’ils ont été tenus dans un contexte public. L’article 33 de la même loi précise que : « L’injure publique est punie d’une amende de 12 000 euros. » Ainsi, si le tribunal conclut que les propos de M. [W] constituent une injure publique, il pourrait être condamné à une amende et M. [L] pourrait obtenir réparation pour le préjudice moral subi. Il est donc crucial pour le tribunal d’analyser le contexte et la portée des propos pour déterminer leur caractère injurieux. |
N° 00047
ODVS
21 JANVIER 2025
CASSATION
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 21 JANVIER 2025
M. [S] [W] a formé un pourvoi contre l’arrêt de la cour d’appel de Saint-Denis de La Réunion, chambre correctionnelle, en date du 13 février 2023, qui, dans la procédure suivie contre lui des chefs de diffamation et injures publiques envers un particulier, a prononcé sur les intérêts civils.
Des mémoires ont été produits, en demande et en défense.
Sur le rapport de M. Dary, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. [S] [W], les observations de la SAS Buk Lament-Robillot, avocat de la société [1] et M. [S] [L], et les conclusions de M. Dureux, avocat général référendaire, après débats en l’audience publique du 10 décembre 2024 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Dary, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l’article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
1. Il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. Le 12 juillet 2021, M. [S] [L] et la société [1] ont fait citer M. [S] [W] en qualité de directeur de publication du Journal de l’île de La Réunion, d’une part, des chefs de diffamation publique envers un particulier, à raison des propos suivants : Edito du 17 avril 2021 : « Pendant que le Parquet, les sections financières des pandores et autres perdreaux ne s’occupent que des élus, les souris en mode [L] dansent sur le fromage… » ; « Comment se fait-il que depuis des lustres, [S] [L] rafle quasiment tous les projets au nez et à la barbe de ses petits camarades promoteurs ? C’est assez simple et pas franchement courant. Le suppôt de [V]-[R], le soutien financier de [U] sait y faire. Avec la complicité de l’ancien patron de la [7], [O] [Z], le privé [L] s’est tout simplement associé avec ce bailleur, en mission de service public, filiale de la caisse des dépôts, avec avis favorable des collectivités et du ministère des Outre-mer. Pourquoi s’emmerder ? » ; « Association qui permet au [L] de rouler carrosse, de se la faire belle, de se friser avec le pognon de la [7] qui lui accorde, pour chaque projet, des avances en compte courant qu’il a parfois du mal à rembourser. On croit rêver. . » ; « À [Localité 3], par exemple, le projet îlot a permis au [L] de se goinfrer 10 millions d’euros avancés par la [7]. 10 millions qu’il n’a toujours pas remboursés. Pour moins que cela, un élu serait en garde à vue… » ; Edito du 8 mai 2021 : « Après vous avoir rappelé que c’est le [L] qui en premier a cherché la bagarre, je vous raconte cette histoire de promoteur politique qui renifle les conflits d’intérêts comme s’il en pleuvait, l’abus de bien social, le financement de partis politiques mais pas seulement. Question : que fait la police ? » ; « Dans la foulée [F] [N] négociait peinardement avec [L] pour le compte de sa société [4] un accord de principe interdisant à tout autre opérateur immobilier de s’installer dans le coin sauf accord de [F] [N], alors maire et parrain de [Localité 6]. En échange de quoi et pour ce qui peut se raconter aujourd’hui, la société [4] sponsorisait la mairie, le club de foot du bled, L'[8], celle de [Localité 5] aussi. » ; «les transferts frauduleux des permis de construire pour le compte de [L] et de la [7] » ; « Preuve s’il en était encore besoin de la promiscuité financière et immobilière entre la mairie de [Localité 3] et la fine équipe [7]-[L]-[Z]… » ; Edito du 15 mai 2021 : « Pour le cas où le Parquet de Saint-Denis viendrait à imaginer faire taquiner le [L] et ses sociétés, [4], [2]. par les pandores spécialisés pourtant surchargés de boulot. il serait judicieux d’aller gratter du côté de la présidence d'[4]. » ; Edito du 5 juin 2021 : « Sachant tout cela et encore, j’oublie les magouilles immobilières liées à [S] [L], les perquisitions, les mises en examen passées et à venir. », d’autre part, du chef injure publique envers un particulier à raisons des propos suivants : Edito du 15 mai 2021 : « Un petit mot encore au sujet de [S] [L], promoteur, fayot et financier de ces dames, [V] et [U] [D] mais aussi du clan [N] ».
3. Par jugement du 2 décembre 2021, le tribunal correctionnel a rejeté l’exception d’irrecevabilité des constitutions de partie civile, a relaxé M. [W] et a prononcé sur les intérêts civils.
4. Les parties civiles ont relevé appel de cette décision.
Sur les premier et deuxième moyens
Laisser un commentaire