Conditions de nationalité et résidence des ascendants

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Conditions de nationalité et résidence des ascendants

L’Essentiel : M. [L] [J], né en Algérie, a vu sa demande de certificat de nationalité française rejetée, entraînant une action déclaratoire de nationalité. Le ministère public a contesté cette demande, invoquant la désuétude selon l’article 30-3 du code civil. M. [J] a soutenu qu’il pouvait prouver sa nationalité par filiation, arguant que son grand-père paternel avait résidé en France. La cour d’appel a statué qu’il n’avait pas prouvé sa nationalité et qu’il avait perdu celle-ci en 2012. Cependant, elle a été jugée en violation du code civil en ne tenant pas compte de la résidence de son grand-père.

Contexte de l’affaire

M. [L] [J], né le 28 juillet 1990 en Algérie, a vu sa demande de certificat de nationalité française rejetée. Il a alors engagé une action déclaratoire de nationalité, affirmant qu’il était français par filiation paternelle.

Opposition du ministère public

Le ministère public a contesté la demande de M. [J] en invoquant la désuétude selon l’article 30-3 du code civil, qui stipule des conditions spécifiques concernant la nationalité française par filiation.

Arguments de M. [J]

M. [J] a contesté la décision de la cour d’appel, soutenant qu’il devait être admis à prouver sa nationalité française par filiation. Il a fait valoir que la condition de résidence à l’étranger de ses ascendants n’était pas remplie, car son grand-père paternel avait résidé en France pendant la période requise.

Décision de la cour d’appel

La cour d’appel a statué que M. [J] n’était pas en mesure de prouver sa nationalité française par filiation et qu’il était présumé avoir perdu cette nationalité le 4 juillet 2012. Elle a précisé que la condition d’absence de résidence en France devait être appréciée uniquement en fonction de l’ascendant direct de M. [J].

Violation du code civil

La cour a conclu que la condition de résidence à l’étranger des ascendants ne se limitait pas aux ascendants directs. En ne tenant pas compte de la résidence du grand-père paternel de M. [J], la cour d’appel a été jugée en violation de l’article 30-3 du code civil.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la portée de l’article 30-3 du code civil concernant la nationalité française par filiation ?

L’article 30-3 du code civil stipule que lorsqu’un individu réside ou a résidé habituellement à l’étranger, il ne pourra pas prouver qu’il a, par filiation, la nationalité française si ses ascendants, dont il tient cette nationalité, ont demeuré fixés à l’étranger pendant plus d’un demi-siècle.

Ce texte précise que cette condition de résidence à l’étranger ne se limite pas uniquement aux ascendants directs, mais s’applique également aux ascendants indirects.

Ainsi, pour qu’un individu puisse revendiquer sa nationalité française par filiation, il doit démontrer que lui-même et l’un de ses parents, susceptibles de lui transmettre cette nationalité, ont eu la possession d’état de Français.

En l’espèce, la cour d’appel a jugé que M. [J] ne pouvait pas prouver sa nationalité française par filiation, en se basant sur la résidence de son ascendant direct, ce qui a été contesté.

Comment la cour d’appel a-t-elle interprété la condition de résidence à l’étranger ?

La cour d’appel a interprété la condition de résidence à l’étranger en se concentrant uniquement sur l’ascendant direct de M. [J], né avant le 3 juillet 1962.

Elle a retenu que, dans ce cas, la condition d’absence de résidence en France pendant plus d’un demi-siècle devait être appréciée uniquement par rapport à cet ascendant direct.

Cela signifie que la cour a estimé que la résidence éventuelle en France du grand-père paternel de M. [J] n’était pas pertinente pour l’évaluation de la nationalité française par filiation.

Cette interprétation a conduit à la conclusion que M. [J] était présumé avoir perdu sa nationalité française, car son père, né en 1960, remplissait la condition de résidence à l’étranger pendant plus de cinquante ans.

Cependant, cette approche a été critiquée, car elle ne tenait pas compte de la possibilité que d’autres ascendants, même indirects, aient pu résider en France, ce qui aurait pu influencer la décision.

Quelles sont les conséquences de la décision de la cour d’appel sur la nationalité de M. [J] ?

La décision de la cour d’appel a eu pour conséquence directe que M. [J] n’est pas admis à prouver qu’il a, par filiation, la nationalité française.

En effet, la cour a déclaré qu’il était présumé avoir perdu sa nationalité française le 4 juillet 2012, en raison de l’interprétation restrictive de l’article 30-3 du code civil.

Cette situation signifie que M. [J] ne peut pas revendiquer les droits et protections associés à la nationalité française, ce qui peut avoir des implications significatives sur sa vie personnelle et professionnelle.

De plus, cette décision souligne l’importance de la résidence des ascendants dans l’appréciation de la nationalité par filiation, et la nécessité de prouver la possession d’état de Français pour revendiquer cette nationalité.

Ainsi, la cour d’appel a renforcé l’idée que la nationalité française par filiation est soumise à des conditions strictes, notamment en ce qui concerne la résidence des ascendants, ce qui peut rendre difficile l’accès à cette nationalité pour certains individus.

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 22 janvier 2025

Cassation partielle

Mme CHAMPALAUNE, président

Arrêt n° 46 F-D

Pourvoi n° A 23-16.330

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [J].
Admission du bureau d’aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 10 octobre 2023.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 22 JANVIER 2025

M. [L] [J], domicilié [Adresse 3] (Algérie), a formé le pourvoi n° A 23-16.330 contre l’arrêt rendu le 11 octobre 2022 par la cour d’appel de Paris (pôle 3, chambre 5), dans le litige l’opposant au procureur général près la cour d’appel de Paris, domicilié en son parquet général, [Adresse 1], défendeur à la cassation.

Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Corneloup, conseiller, les observations de la SCP Le Guerer, Bouniol-Brochier, avocat de M. [J], après débats en l’audience publique du 26 novembre 2024 où étaient présentes Mme Champalaune, président, Mme Corneloup, conseiller rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Paris, 11 octobre 2022), M. [L] [J], né le 28 juillet 1990 à [Localité 2] (Algérie), auquel un certificat de nationalité française a été refusé, a engagé une action déclaratoire de nationalité en soutenant être français par filiation paternelle.

2. Le ministère public lui a opposé la désuétude prévue par l’article 30-3 du code civil.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. M. [J] fait grief à l’arrêt de dire qu’il n’est pas admis à faire la preuve de ce qu’il a, par filiation, la nationalité française, qu’il est réputé avoir perdu la nationalité française le 4 juillet 2012, et de le débouter de l’intégralité de ses demandes, alors « qu’il résulte de l’article 30-3 du code civil que la condition de résidence à l’étranger de l’un des ascendants dont l’intéressé tient la nationalité française pendant la période de cinquante ans prévue par l’article 30-3 du code civil n’est pas remplie si l’un de ses ascendants, même indirect, a résidé habituellement en France pendant cette période ; qu’en retenant, pour juger que M. [J] n’est pas admis à faire la preuve qu’il a par filiation la nationalité française et qu’il est réputé l’avoir perdue le 4 juillet 2012, que « lorsque l’ascendant direct de l’intéressé est né avant le 3 juillet 1962, la condition d’absence de résidence en France pendant plus d’un demi siècle ne doit être appréciée que dans la personne de l’ascendant direct de l’intéressé », cependant que cette condition devait être appréciée au regard de la résidence habituelle en France du grand-père paternel de M. [J], dont il tient la nationalité française, pendant le délai cinquantenaire, la cour d’appel a violé l’article 30-3 du code civil. »

Réponse de la Cour

4. Vu l’article 30-3 du code civil :

5. Aux termes de ce texte, lorsqu’un individu réside ou a résidé habituellement à l’étranger, où les ascendants dont il tient par filiation la nationalité sont demeurés fixés pendant plus d’un demi-siècle, cet individu ne sera pas admis à faire la preuve qu’il a, par filiation, la nationalité française si lui-même et celui de ses père et mère qui a été susceptible de la lui transmettre n’ont pas eu la possession d’état de Français.

6. La condition de résidence à l’étranger des ascendants, énoncée par cette disposition, n’est pas limitée aux ascendants directs.

7. Pour dire que M. [J] n’est pas admis à faire la preuve de ce qu’il a, par filiation, la nationalité française et qu’il est présumé avoir perdu la nationalité française le 4 juillet 2012, l’arrêt retient, d’abord, que, lorsque l’ascendant direct de l’intéressé est né avant le 3 juillet 1962, la condition d’absence de résidence en France pendant plus d’un demi-siècle ne doit être appréciée que dans la personne de l’ascendant direct. Il énonce, ensuite, qu’il n’y a pas lieu de prendre en compte la résidence éventuelle en France du grand-père paternel de M. [J], son père étant né le 10 juin 1960, la condition de résidence à l’étranger pendant plus d’un demi-siècle est remplie en sa personne.

8. En statuant ainsi, la cour d’appel a violé le texte susvisé.


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