Résiliation de bail et indemnités en cas de loyers impayés

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Résiliation de bail et indemnités en cas de loyers impayés

L’Essentiel : La SCI ELIE 36 a engagé une procédure judiciaire contre la société PULCINO pour non-paiement des loyers d’un bail commercial. Après un commandement de payer resté sans effet, le juge a constaté la résiliation du bail au 25 octobre 2024. En l’absence de défense de PULCINO, l’expulsion a été ordonnée, accompagnée d’une indemnité d’occupation provisionnelle de 21 663,83 euros. La demande de clause pénale a été rejetée, mais PULCINO a été condamnée à verser 1 500 euros pour les frais de justice. Enfin, elle doit fournir des justificatifs d’assurance à la SCI ELIE 36.

Contexte de l’affaire

La SCI ELIE 36 a conclu un bail commercial avec la société PPT le 30 juin 2017 pour un local à [Adresse 2], avec un loyer annuel de 10 500 euros. En raison de loyers impayés, un commandement de payer a été délivré à la société PULCINO, successeur de PPT, le 24 septembre 2024, pour un montant de 15 320,61 euros.

Procédure judiciaire

Le 7 novembre 2024, la SCI ELIE 36 a cité la société PULCINO devant le juge des référés, demandant la résiliation du bail et l’expulsion de la société pour non-paiement des loyers. La requérante a également sollicité le paiement de diverses sommes, y compris des arriérés de loyers et des indemnités d’occupation.

Absence de défense

La société PULCINO, bien que régulièrement citée, n’a pas constitué avocat pour se défendre. En conséquence, le juge a examiné la demande de la SCI ELIE 36 en l’absence de contestation sérieuse de la part de la défenderesse.

Acquisition de la clause résolutoire

Le juge a constaté que le commandement de payer mentionnait un délai d’un mois pour régler les sommes dues, conformément à la clause résolutoire du bail. Étant donné que les loyers n’avaient pas été réglés dans ce délai, le bail a été résilié de plein droit le 25 octobre 2024.

Demande d’expulsion

Suite à la résiliation du bail, le juge a ordonné l’expulsion de la société PULCINO des locaux, sans astreinte, considérant que le concours de la force publique suffirait à contraindre le preneur à quitter les lieux.

Indemnité d’occupation

Le juge a également accordé une indemnité d’occupation provisionnelle à la SCI ELIE 36, équivalente au montant des loyers dus, jusqu’à la libération effective des lieux. La somme de 21 663,83 euros a été retenue à titre de provision pour les loyers et charges échus.

Clause pénale et frais

La demande de la SCI ELIE 36 concernant la clause pénale a été écartée, le juge la considérant comme sérieusement contestable. En revanche, la société PULCINO a été condamnée à payer 1 500 euros pour les frais non compris dans les dépens.

Obligations d’assurance

Il a été ordonné à la société PULCINO de fournir à la SCI ELIE 36 les justificatifs de ses polices d’assurance, sans astreinte.

Décision finale

Le juge a rendu une ordonnance enjoignant la société PULCINO de libérer les locaux, de payer les sommes dues et de communiquer ses justificatifs d’assurance, tout en condamnant la défenderesse aux dépens de la procédure.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions d’application de la clause résolutoire dans un bail commercial ?

La clause résolutoire dans un bail commercial est régie par l’article L.145-41 du Code de commerce, qui stipule que « toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux.

Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai ».

Dans le cas présent, l’article 8 du contrat de bail précise que « à défaut de paiement à l’échéance d’un seul terme de loyer ou ses accessoires, le contrat de bail sera résilié de plein droit un mois après la délivrance d’un commandement d’exécuter resté infructueux contenant déclaration du bailleur de se prévaloir de la clause résolutoire ».

Il est donc essentiel que le commandement de payer mentionne le délai d’un mois pour que la clause résolutoire puisse être appliquée.

Dans cette affaire, le commandement du 24 septembre 2024 mentionne effectivement ce délai, permettant ainsi de constater que le contrat de bail a été résilié de plein droit à compter du 25 octobre 2024, en raison de l’absence de paiement des loyers dus.

Quelles sont les conséquences de la résiliation du bail commercial ?

La résiliation du bail commercial entraîne plusieurs conséquences, notamment l’obligation pour le locataire de quitter les lieux.

L’article 472 du Code de procédure civile précise que lorsque le défendeur ne comparaît pas, le juge fait droit à la demande s’il l’estime régulière, recevable et bien fondée.

Dans le cas présent, la résiliation du bail a été constatée, ce qui rend l’obligation de la société PULCINO de quitter les lieux incontestable.

Le juge des référés a donc ordonné l’expulsion de la société PULCINO ainsi que de tous occupants de son chef, sans astreinte, considérant que le concours de la force publique était suffisant pour contraindre le preneur à quitter les lieux volontairement.

Quelles sont les conditions pour obtenir une provision en cas de loyers impayés ?

L’article 835 du Code de procédure civile stipule que dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire peut accorder une provision au créancier.

Dans cette affaire, la société PULCINO a occupé les lieux sans droit ni titre depuis l’acquisition de la clause résolutoire, causant un préjudice au propriétaire.

Le juge a examiné le décompte annexé au commandement et a constaté que la créance n’apparaissait pas sérieusement contestable.

Ainsi, la société PULCINO a été condamnée à payer la somme de 21 663,83 euros à titre de provision, correspondant aux loyers, charges et indemnités d’occupation échus, pour le quatrième trimestre 2024 inclus.

Quelles sont les implications de la clause pénale dans le contrat de bail ?

La clause pénale est une disposition contractuelle qui prévoit une indemnité en cas de non-respect des obligations contractuelles.

Dans cette affaire, le contrat de bail stipule qu’en cas de défaut de paiement du loyer, « les sommes dues seront automatiquement majorées de 5% à titre d’indemnité forfaitaire ».

Cependant, cette clause s’analyse en une clause pénale, susceptible d’être modérée ou supprimée par le juge du fond.

Le juge a donc écarté la demande de condamnation au paiement de la somme de 1 583 euros au titre de la clause pénale, la considérant comme sérieusement contestable tant dans son principe que dans son quantum.

Quelles sont les obligations de la société PULCINO en matière d’assurance ?

L’article 10 du contrat de bail commercial impose à la société PULCINO de fournir au bailleur une photocopie certifiée conforme de ses polices d’assurance.

Cette obligation est essentielle pour protéger les intérêts du bailleur en cas de sinistre.

Le juge a ordonné à la société PULCINO de communiquer à la société SCI ELIE 36 ses justificatifs d’assurance du local commercial.

Il a été décidé qu’il n’était pas nécessaire d’assortir cette obligation d’une astreinte, considérant que la demande était suffisamment claire et précise.

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

N° RG 24/57924 –
N° Portalis 352J-W-B7I-C6GMK

N° : 3

Assignation du :
07 Novembre 2024

[1]

[1] 1 Copie exécutoire
délivrée le:

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 22 janvier 2025

par Claire BERGER, 1ere Vice-présidente adjointe au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,

Assistée de Daouia BOUTLELIS, Greffier
DEMANDERESSE

S.C.I. ELIE 36
[Adresse 1]
[Localité 4]

représentée par Me Brigitte DE CASAS, avocat au barreau de PARIS – #A0752

DEFENDERESSE

S.A.S. PULCINO
[Adresse 2]
[Localité 3]

non représentée

DÉBATS

A l’audience du 24 Décembre 2024, tenue publiquement, présidée par Claire BERGER, 1ere Vice-présidente adjointe, assistée de Daouia BOUTLELIS, Greffier,

Nous, Président,

Après avoir entendu les conseils des parties,

Aux termes d’un acte sous seing privé signé le 30 juin 2017, la SCI ELIE 36 a donné à bail commercial à la société PPT [Adresse 2] un local situé [Adresse 2] à [Localité 3], moyennant le paiement d’un loyer annuel de 10 500 euros hors taxes et hors charges.

Aux termes d’un jugement rendu le 24 mai 2024 par le tribunal de commerce de Paris, un plan de cession de la société PPT [Adresse 2] a été arrêté et le transfert judiciaire du bail commercial à la SARL DA VICENZO a été ordonné, avec autorisation de substitution de cette dernière au profit de la société PULCINO.

Des loyers étant demeurés impayés, le bailleur a délivré au preneur, la société PULCINO, par acte d’huissier du 24 septembre 2024, un commandement de payer la somme de 15 320,61 euros au titre des loyers échus à cette date et du coût du commandement.

Se prévalant de l’acquisition de la clause résolutoire stipulée au contrat de bail, la société SCI ELIE 36 a, par exploit délivré le 7 novembre 2024, fait citer la société PULCINO devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris demandant à celui-ci de :
Juger recevable et bien fondée en ses demandes la SCI ELIE 36, bailleresse. Juger acquise la clause résolutoire insérée au bail et rappelée dans le commandement de payer délivré. Juger résilier le bail consenti par la requérante à la SAS PULCINO venant aux droits de la SARL PPT [Adresse 2]. Fixer une indemnité d’occupation mensuelle égale au montant actuel des loyers et charges qui sera due jusqu’à la libération effective des lieux par la remise des clés et ce à compter du premier trimestre 2025. Juger que le bailleur poursuivra l’expulsion des lieux de la SAS PULCINO ainsi que celle de tous occupants de son chef avec l’assistance de la Force Publique s’il y a lieu. Condamner à titre provisionnel la SAS PULCINO au paiement de la somme de 31.663,83 € au titre des arriérés de loyers, indemnités d’occupation et charges arrêtés au quatrième trimestre 2024 inclus. Condamner la SAS PULCINO sous astreinte de 300 € par jour de retard à compter de l’ordonnance à intervenir à fournir à la SCI ELIE 36, bailleresse, le justificatif des polices d’assurance souscrites dans le cadre de son activité dans les lieux loués. Condamner la SAS PULCINO au paiement d’une indemnité d’occupation due à compter du premier trimestre 2025 jusqu’à la libération effective des lieux. Condamner la SAS PULCINO au paiement de la somme de 1.583 € au titre de la clause pénale. Condamner la SAS PULCINO au paiement de la somme de 4.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile. Condamner la SAS PULCINO aux entiers dépens qui comprendront le coût du commandement de payer en date du 24 septembre 2024.
A l’audience, la requérante sollicite le bénéfice de son acte introductif d’instance, précisant néanmoins qu’un paiement à hauteur de 10 000 euros étant intervenu depuis l’assignation, elle sollicite à présent le paiement, à titre provisionnel, de la somme de 21 663,83 euros, 4ème trimestre inclus.

La défenderesse, bien que régulièrement citée, n’a pas constitué avocat.

Conformément aux dispositions des articles 455 et 446-1 du code de procédure civile, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens, il est renvoyé à l’acte introductif d’instance et aux notes d’audience.

MOTIFS

En vertu de l’article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, le juge fait droit à la demande s’il l’estime régulière, recevable et bien fondée.

Sur l’acquisition de la clause résolutoire

Aux termes de l’article 834 du code de procédure civile, dans tous les cas d’urgence, le président du tribunal judiciaire peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.

Le juge des référés n’est toutefois pas tenu de caractériser l’urgence, au sens de l’article 834 du code de procédure civile, pour constater l’acquisition de la clause résolutoire et la résiliation de droit d’un bail.

L’article L.145-41 du code de commerce dispose que « toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai ».

En l’espèce, l’article 8 du contrat de bail stipule qu’à défaut de paiement à l’échéance d’un seul terme de loyer ou ses accessoires, notamment le dépôt de garantie ou ses compléments, les frais de commandement, les rappels de loyers à la suite d’une révision légale, contractuelle ou judiciaire, le contrat de bail sera résilié de plein droit un mois après la délivrance d’un commandement d’exécuter resté infructueux contenant déclaration du bailleur de se prévaloir de la clause résolutoire.

Il résulte des pièces versées aux débats que le commandement du 24 septembre 2024 mentionne le délai d’un mois pour régler ses causes et vise la clause résolutoire. Il reprend les dispositions des articles L.145-41 et L.145-17 du code de commerce. Un décompte des sommes dues y est joint permettant au locataire d’en contester la régularité.

L’examen du décompte locatif permet d’établir, sans contestation sérieuse, que les causes du commandement de payer n’ont pas été réglées dans le délai d’un mois, de sorte que le contrat de bail s’est trouvé résilié de plein droit à la date du 25 octobre 2024 par l’effet de l’acquisition de la clause résolutoire.

En conséquence de la résiliation du bail, l’obligation de la défenderesse de quitter les lieux n’étant dès lors pas contestable, il convient d’accueillir la demande d’expulsion sans l’assortir d’une astreinte, le concours de la force publique étant suffisamment comminatoire pour contraindre le preneur à quitter les lieux volontairement.

Sur la provision

Aux termes de l’article 835 du code de procédure civile, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.

En occupant sans droit ni titre les lieux loués depuis l’acquisition de la clause résolutoire le 25 octobre 2024, la défenderesse cause un préjudice au propriétaire, résultant de l’indisponibilité du bien et de la perte des loyers et charges.

Ce préjudice sera réparé jusqu’au départ définitif du preneur par l’octroi d’une indemnité d’occupation provisionnelle équivalente au montant non sérieusement contestable du loyer, des charges et des taxes applicables.

Après examen du décompte annexé au commandement et du décompte actualisé, la créance n’apparaît pas sérieusement contestable et la défenderesse sera condamnée au paiement de la somme de 21 663,83 euros, à titre de provision à valoir sur les loyers, charges et indemnités d’occupation échus, 4ème trimestre 2024 inclus.

Par ailleurs, si le contrat de bail stipule qu’à défaut de paiement du loyer, « (…) les sommes dues seront automatiquement majorées de 5% à titre d’indemnité forfaitaire », cette clause s’analyse en une clause pénale, susceptible d’être modérée ou supprimée par le juge du fond. Dès lors, la demande de condamnation au paiement de la somme de 1 583 euros au titre de la clause pénale sera écartée comme étant sérieusement contestable en ses principe et quantum.

Enfin, la société défenderesse étant tenue aux termes de l’article 10 du contrat de bail commercial souscrit d’adresser au bailleur une photocopie certifiée conforme de ses polices d’assurance, il lui sera donc ordonné de communiquer à la société demanderesse ses justificatifs d’assurance.

A ce stade, il n’est pas nécessaire d’assortir cette obligation d’une astreinte.

Sur le surplus des demandes

Il n’apparaît pas inéquitable de condamner la défenderesse au paiement de la somme de 1500 euros au titre de ses frais non compris dans les dépens, en vertu de l’article 700 du code de procédure civile.

Partie perdante, la défenderesse sera condamnée au paiement des dépens, en ce compris le coût du commandement, dans les conditions de l’article 696 du même code.

PAR CES MOTIFS

Nous, Juge des référés, par ordonnance réputée contradictoire, rendue publiquement et en premier ressort,

Renvoyons les parties à se pourvoir au fond ainsi qu’elles en aviseront, mais dès à présent par provision, tous les moyens des parties étant réservés :

Constatons l’acquisition de plein droit de la clause résolutoire stipulée au contrat de bail à compter du 25 octobre 2024,

Disons que la société PULCINO devra libérer les locaux situés [Adresse 2] à [Localité 3] et, faute de l’avoir fait, ordonnons son expulsion ainsi que celle de tous occupants de son chef, avec le cas échéant, le concours de la force publique,

Rappelons que le sort des meubles sera réglé conformément aux dispositions des articles L.433-1 et suivants et R.433-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution,

Condamnons la société PULCINO à payer à la société SCI ELIE 36 :
* à compter du 25 octobre 2024, une indemnité d’occupation provisionnelle équivalente au montant du loyer, des charges et des taxes applicables, dûment justifiées au stade de l’exécution, et ce, jusqu’à la libération effective des lieux,
* en conséquence, et d’ores et déjà, la somme de 21 663,83 euros à titre de provision à valoir sur les loyers, charges et indemnités d’occupation échus au 24 décembre 2024, dernier trimestre 2024 inclus ;
* la somme de 1500 euros au titre des frais irrépétibles ;

Ordonnons à la société PULCINO de communiquer à la société demanderesse ses justificatifs d’assurance du local commercial ;

Disons n’y avoir lieu à astreinte ;

Disons n’y avoir lieu à référé sur le surplus des demandes, et en particulier sur la demande relative à la clause pénale ;

Condamnons la société PULCINO au paiement des dépens, en ce compris le coût du commandement de payer ;

Rappelons que la présente ordonnance bénéficie de plein droit de l’exécution provisoire.

Ainsi ordonné et mis à disposition au greffe le 22 janvier 2025.

Le Greffier, Le Président,

Daouia BOUTLELIS Claire BERGER


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