Réparation du préjudice suite à une détention provisoire

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Réparation du préjudice suite à une détention provisoire

L’Essentiel : Le 13 janvier 2025, la décision a été prononcée par la présidente Sophie BARBAUD et le greffier Florence CHUPIN. [O] [Z] a demandé réparation pour une détention provisoire de 6 mois et 12 jours, réclamant 50 494,16 € pour préjudice moral, matériel, frais d’avocat et indemnité. L’Agent Judiciaire a proposé 8 500 € pour le préjudice moral, tandis que le procureur a suggéré une réduction des montants. La requête a été jugée recevable, et le préjudice moral a été fixé à 12 000 €, le préjudice matériel à 1 620 €, avec une indemnité de procédure de 1 000 €.

Prononcé de la décision

Le prononcé de la décision a été effectué par mise à disposition au greffe le 13 janvier 2025, de manière contradictoire, et a été signé par la présidente Sophie BARBAUD et le greffier Florence CHUPIN.

Demande de réparation

Par requête reçue le 7 février 2024, [O] [Z] a demandé réparation pour un préjudice résultant d’une détention provisoire de 6 mois et 12 jours, du 26 décembre 2021 au 7 juillet 2022. Il a réclamé un total de 50 494,16 €, réparti entre préjudice moral, préjudice matériel, frais d’avocat et indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Conclusions des parties

L’Agent Judiciaire de l’État a proposé d’allouer 8 500 € pour le préjudice moral et 1 200 € pour les frais d’avocat, tout en rejetant la demande de préjudice économique. Le procureur général a également suggéré une réduction des montants demandés pour le préjudice moral et l’article 700, tout en acceptant le remboursement des frais d’avocat et en rejetant la demande de préjudice matériel.

Recevabilité de la requête

La requête a été jugée recevable, ayant été formulée dans le délai légal conformément aux articles R 26 et 149-2 du code de procédure pénale.

Fondement de la demande

Selon l’article 149 du code de procédure pénale, une personne ayant subi une détention provisoire peut demander réparation si la procédure a abouti à un non-lieu, une relaxe ou un acquittement. [O] [Z] a obtenu un non-lieu le 31 juillet 2023, ce qui lui permet de solliciter réparation pour la détention subie.

Préjudice matériel

[O] [Z] a demandé 12 874,16 € pour le préjudice matériel et 1 620 € pour les frais d’avocat. Les frais d’avocat ont été justifiés et acceptés, tandis que la demande de préjudice économique a été rejetée, car il n’a pas prouvé avoir subi une perte de salaire durant sa détention.

Préjudice moral

Le préjudice moral a été évalué à 12 000 €, tenant compte de l’âge de [O] [Z] et de son casier judiciaire. Aucune preuve n’a été fournie concernant des liens avec un enfant ou des demandes de parloirs, ce qui a conduit à l’absence de facteurs aggravants.

Frais irrépétibles

Il a été jugé inéquitable de laisser [O] [Z] supporter les frais irrépétibles de la procédure, qui ont été fixés à 1 000 €.

Décision finale

La requête de [O] [Z] a été déclarée recevable. Le préjudice moral a été fixé à 12 000 €, le préjudice matériel à 1 620 €, et l’indemnité de procédure à 1 000 €. Les dépens ont été laissés à la charge du Trésor public.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions pour obtenir réparation suite à une détention provisoire selon le Code de procédure pénale ?

La réparation du préjudice causé par une détention provisoire est régie par l’article 149 du Code de procédure pénale. Cet article stipule que :

« Sans préjudice de l’application des dispositions des articles L. 141-2 et L. 141-3 du code de l’organisation judiciaire, la personne qui a fait l’objet d’une détention provisoire au cours d’une procédure terminée à son égard par une décision de non-lieu, de relaxe ou d’acquittement devenue définitive a droit, à sa demande, à réparation intégrale du préjudice moral et matériel que lui a causé cette détention. »

Il est important de noter que la réparation n’est pas due dans certains cas, notamment lorsque la décision de non-lieu ou de relaxe repose sur la reconnaissance de l’irresponsabilité pénale, une amnistie, ou la prescription de l’action publique.

De plus, l’article précise que « le préjudice est évalué par expertise contradictoire réalisée dans les conditions des articles 156 et suivants. »

Ainsi, pour obtenir réparation, il faut que la détention ait été suivie d’une décision favorable, et que le préjudice soit dûment justifié.

Comment est évalué le préjudice matériel et moral dans le cadre d’une demande de réparation ?

L’évaluation du préjudice matériel et moral est essentielle dans le cadre d’une demande de réparation. Selon l’article 149 du Code de procédure pénale, la personne ayant subi une détention provisoire a droit à une réparation intégrale de son préjudice.

Pour le préjudice matériel, le requérant doit justifier les montants réclamés. Dans le cas présent, [O] [Z] a demandé 12 874,16 € au titre du préjudice matériel, dont 1 620 € pour les frais d’avocat.

Ces frais ont été justifiés par une facture datée du 2 février 2024, ce qui a conduit à l’accueil de cette demande. En revanche, pour le préjudice économique lié à la perte de salaires, le tribunal a constaté que le requérant était en disponibilité et ne percevait pas de traitement, ce qui a conduit à un rejet de cette demande.

Concernant le préjudice moral, le tribunal a fixé l’indemnisation à 12 000 €, tenant compte de l’âge du requérant et de son casier judiciaire.

Il est donc crucial de fournir des preuves tangibles pour justifier les demandes de réparation, tant pour le préjudice matériel que moral.

Quels sont les frais irrépétibles et comment sont-ils pris en compte dans la décision de réparation ?

Les frais irrépétibles, selon l’article 700 du Code de procédure civile, sont des frais engagés par une partie dans le cadre d’une procédure judiciaire qui ne peuvent pas être récupérés. Cet article stipule que :

« Le juge peut, dans sa décision, condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais irrépétibles. »

Dans le cas de [O] [Z], le tribunal a reconnu qu’il était inéquitable de laisser à sa charge les frais irrépétibles qu’il a dû exposer dans la présente procédure.

Ainsi, une somme de 1 000 € a été fixée pour couvrir ces frais. Cela montre que le tribunal prend en compte les dépenses engagées par le requérant pour faire valoir ses droits, en plus des préjudices matériel et moral.

Il est donc essentiel pour les parties de bien documenter leurs frais afin de maximiser leurs chances d’obtenir une indemnisation adéquate.

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Indemnisation de la détention provisoire

DECISION AU FOND

DU 13 JANVIER 2025

N° 2025/ 8

N° RG 24/00009 – N° Portalis DBVB-V-B7I-BMQ4W

[O] [Z]

C/

LE PROCUREUR GENERAL

AGENT JUDICIAIRE DE L’ETAT

copie exécutoire délivrée

le 13 janvier 2025

à Me SEGUIN, avocat

Décision déférée à la Cour :

Décision en matière de réparation du préjudice subi à raison d’une détention provisoire rendue le 13 janvier 2025 prononcée sur requête déposée le 7 février 2024.

DEMANDEUR A LA REQUÊTE

Monsieur [O] [Z]

né le [Date naissance 1] 1987 à [Localité 4], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Marie-france SEGUIN, avocat au barreau de NICE substitué par Me Alice DINAHET, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

DEFENDEUR A LA REQUÊTE

AGENT JUDICIAIRE DE L’ETAT, demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Alexandra BEAUX, administratrice provisoire de la SELAS VILLEPIN et Associés, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

En présence de monsieur le procureur général, en la personne de madame Stéphanie BATLLE, substitut général, laquelle a été entendue en ses réquisitions.

*-*-*-*-*

DÉBATS ET DÉLIBÉRÉ

L’affaire a été débattue le 9 décembre 2024 en audience publique devant Sophie BARBAUD, présidente de chambre déléguée par ordonnance de monsieur le premier président.

En présence de monsieur le procureur général, auquel l’affaire a été régulièrement communiquée, en la personne de madame Stéphanie BATLLE, substitut général, laquelle a été entendue en ses réquisitions.

Greffier lors des débats : Florence CHUPIN faisant fonction et assermentée

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 13 janvier 2025.
DECISION

Contradictoire,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 13 janvier 2025,

Signée par Sophie BARBAUD, présidente et Florence CHUPIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

***

*

Par requête parvenue le 7 février 2024, [O] [Z] a sollicité la réparation du préjudice subi à la suite d’une détention provisoire d’une durée de 6 mois 12 jours, du 26 décembre 2021 au 7 juillet 2022.

Il sollicite la somme de 50 494,16 € se décomposant comme suit :

– 35 000 € au titre du préjudice moral

– 12 874,16 € au titre du préjudice matériel

– 1 620 € au titre des frais d’avocat

– 1 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile

Vu les conclusions de l’Agent Judiciaire de l’Etat en date du 27 juin 2024 proposant d’allouer la somme de 8 500 € au titre du préjudice moral, 1 200 € au titre des frais d’avocat, réduire la demande au titre de l’article 700 et rejeter la demande au titre du préjudice économique

Vu les conclusions du procureur général en date du 21 octobre 2024 tendant à la réduction de la somme réclamée au titre du préjudice moral et de l’article 700, faire droit au remboursement des frais d’avocat et rejeter la demande au titre du préjudice matériel ;

Vu les observations des parties à l’audience du 9 décembre 2024 ;

EN LA FORME

Formulée dans le délai légal, la requête est recevable en application des articles R 26 et 149-2 du code de procédure pénale.

AU FOND

Aux termes des dispositions de l’article 149 du code de procédure pénale ‘Sans préjudice

de l’application des dispositions des articles L. 141-2 et L. 141-3 du code de l’organisation judiciaire, la personne qui a fait l’objet d’une détention provisoire au cours d’une procédure terminée à son égard par une décision de non-lieu, de relaxe ou d’acquittement devenue définitive a droit, à sa demande, à réparation intégrale du préjudice moral et matériel que lui a causé cette détention. Toutefois, aucune réparation n’est due lorsque cette décision a pour seul fondement la reconnaissance de son irresponsabilité au sens de l’article 122-1 du code pénal, une amnistie postérieure à la mise en détention provisoire, ou la prescription de l’action publique intervenue après la libération de la personne, lorsque la personne était dans le même temps détenue pour une autre cause, ou lorsque la personne a fait l’objet d’une détention provisoire pour s’être librement et volontairement accusée ou laissé accuser à tort en vue de faire échapper l’auteur des faits aux poursuites.A la demande de l’intéressé, le préjudice est évalué par expertise contradictoire réalisée dans les conditions des articles 156 et suivants.

Lorsque la décision de non-lieu, de relaxe ou d’acquittement lui est notifiée, la personne est avisée de son droit de demander réparation, ainsi que des dispositions des articles 149-1 à 149-3 ( premier alinéa)

Ayant subi une détention provisoire à l’occasion d’une procédure pénale du chef de violence en réunion ayant entraîné la mort sans intention de la donner le requérant, qui a bénéficié le 31 juillet 2023 d’un non-lieu du juge d’instruction du tribunal de Nice, est bien fondé à solliciter la réparation du préjudice directement causé par cette privation de liberté d’une durée de 6 mois 12 jours

Préjudice matériel

Le requérant sollicite la somme de 12 874,16 € au titre du préjudice matériel et 1 620 € au titre des frais d’avocat.

Concernant les frais d’avocat, ces derniers sont justifiés à hauteur de 1620 € ( facture en date du 2 février 2024 ) de sorte que cette demande sera accueillie.

Concernant le préjudice économique liée à la perte de salaires, il est établi que [O] [Z] était tiulaire de la fonction publique territoriale en qualité d’adjoint technique à la mairie de [Localité 4]. Il se trouvait depuis 18 mois en situation de disponibilité au moment de son incarcération et ne percevait manifestement pas de traitement ( dernier bulletin de salaire en date du mois de novembre 2019). Il ne justifie d’aucune démarche tendant à démontrer qu’il avait effectivement demandé sa mutation à la mairie de [Localité 5]. Il ne justifie par ailleurs d’aucune reprise de travail.

Ainsi en l’absence de tout bulletin de salaire antérieur à sa détention provisoire ou de reprise d’activité à l’issue de cette période il ne peut être fait droit à la demande présentée .

Préjudice moral

Le préjudice moral subi par [O] [Z] sera justement réparé par l’allocation de la somme de 12 000 € tant au regard de son âge (34 ans) au moment de son placement en détention pour 6 mois 12 jours que de son casier judiciaire qui porte trace de 5 condamnations étant précisé qu’il avait déjà été incarcéré.

Preuve n’est pas rapportée de que [O] [Z] a un enfant de 9 ans ( pas de livret de famille ) qu’il ait eu des liens avec cet enfant avant son incarcération ni que des parloirs aient été demandés pendant la durée de son incarcération de sorte que rien ne permet de caractériser des facteurs d’aggravation.

Frais irrépétibles

Il est inéquitable de laisser à la charge de [O] [Z] le montant des frais irrépétibles qu’il a dû exposer dans la présente procédure et qui seront évalués à la somme de

1 000 €.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par décision contradictoire et en premier ressort;

Déclare la requête en réparation du préjudice causé suite à la détention provisoire subie par [O] [Z] , recevable.

Fixe à la somme de 12 000 € (douze mille euros) le préjudice moral subi par [O] [Z]

Fixe à la somme de 1 620 € (mille six cent vingt euros) le préjudice matériel subi [O] [Z]

Fixe à la somme de 1 000 € (mille euros) l’indemnité de procédure

Laisse les dépens à la charge du Trésor public.

Le greffier, La présidente,


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