L’Essentiel : M. [O] [R], né le 13 juillet 1995 en Algérie, est retenu au centre de rétention n°[1]. Il conteste la prolongation de sa rétention, arguant que la procédure n’a pas été respectée. En effet, le magistrat a été saisi après le délai légal de quatre jours, ce qui rend la requête de la préfecture irrecevable. La cour infirme donc l’ordonnance de prolongation et rappelle à M. [O] [R] son obligation de quitter le territoire français. Un pourvoi en cassation est possible dans un délai de deux mois pour les parties concernées.
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Identité de l’AppelantM. [O] [R], né le 13 juillet 1995 à [Localité 2] en Algérie, est retenu au centre de rétention administrative n°[1]. Il est assisté par Me Ruben Garcia, avocat au barreau de Paris, et par Mme [B] [Y], interprète en arabe. Identité de l’IntiméL’intimé dans cette affaire est le préfet de l’Essonne, représenté par Me Margaux Chikaoui, avocat au barreau de Paris. Le ministère public a également été avisé de la date et de l’heure de l’audience. Contexte de l’OrdonnanceL’ordonnance a été prononcée en audience publique et est contradictoire. Elle fait suite à un décret pris pour l’application de la loi sur l’immigration et l’intégration, constatant l’absence de salle d’audience disponible près du lieu de rétention. Placement en RétentionM. [O] [R] a été placé en rétention administrative par un arrêté préfectoral daté du 2 janvier 2025, notifié le 3 janvier 2025, sur la base d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF) émise le 24 juin 2024. La mesure a été prolongée le 8 janvier 2025 par un magistrat. Appel de M. [O] [R]Le 9 janvier 2025, M. [O] [R] a interjeté appel, demandant l’infirmation de l’ordonnance de prolongation de sa rétention. Il conteste la régularité de la procédure, arguant que l’avis au procureur a été donné avant son placement en rétention et que le juge a été saisi au-delà du délai légal. Arguments de la CourLa cour rappelle que les moyens nouveaux sont recevables en appel, sauf exceptions de procédure. Elle souligne que le délai d’action peut être invoqué à tout moment. Selon le code de l’entrée et du séjour des étrangers, la rétention peut être prolongée au-delà de quatre jours par le juge, mais seulement si la saisine a lieu dans les délais impartis. Analyse des DélaisLa cour examine la notification du placement en rétention, qui a eu lieu le 3 janvier 2025. Le délai de saisine du magistrat expirait le 6 janvier à minuit. Cependant, le magistrat a été saisi le 7 janvier à 8h31, ce qui dépasse le délai légal de quatre jours. Décision de la CourEn conséquence, la cour déclare la requête de la préfecture de l’Essonne irrecevable et infirme l’ordonnance de prolongation de la rétention. Elle rappelle à M. [O] [R] son obligation de quitter le territoire français et ordonne la remise immédiate de l’ordonnance au procureur général. Voies de RecoursL’ordonnance n’est pas susceptible d’opposition, mais un pourvoi en cassation est ouvert à l’étranger, à l’autorité administrative et au ministère public, avec un délai de deux mois pour le former. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions de la rétention administrative selon le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ?La rétention administrative est régie par plusieurs articles du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA). L’article L.741-1 stipule que l’autorité administrative peut placer en rétention un étranger pour une durée de quatre jours, lorsque cet étranger ne présente pas de garanties de représentation effectives. Ces garanties doivent prévenir un risque de soustraction à l’exécution de la décision d’éloignement. Il est également précisé que si aucune autre mesure n’est suffisante pour garantir l’exécution de cette décision, la rétention peut être ordonnée. Le risque est évalué selon les critères de l’article L.612-3, qui prend en compte la menace pour l’ordre public que représente l’étranger. Ainsi, la rétention administrative est une mesure exceptionnelle, justifiée par des critères précis et encadrée par la loi. Quels sont les délais de prolongation de la rétention administrative ?Le maintien en rétention au-delà de quatre jours est encadré par l’article L.742-1 du CESEDA. Cet article précise que le juge des libertés et de la détention peut autoriser la prolongation de la rétention, à condition d’être saisi par l’autorité administrative. La saisine doit intervenir dans les délais prévus, et le juge statue par ordonnance. L’article L.743-4 précise que le juge doit rendre sa décision dans les quarante-huit heures suivant la saisine. Il est donc crucial que les délais soient respectés pour garantir la légalité de la mesure de rétention. En cas de non-respect de ces délais, la requête de prolongation peut être déclarée irrecevable. Quelles sont les conséquences d’une saisine tardive du juge des libertés et de la détention ?La saisine tardive du juge des libertés et de la détention a des conséquences directes sur la légalité de la rétention. Selon l’article L.742-1, le maintien en rétention doit être autorisé dans un délai de quatre jours suivant la notification du placement. Si le magistrat est saisi après ce délai, comme dans le cas de M. [O] [R], la requête est déclarée irrecevable. Cela signifie que la prolongation de la rétention ne peut pas être validée, et la mesure doit être levée. La jurisprudence rappelle que le respect des délais est fondamental pour protéger les droits des étrangers en rétention. Ainsi, une saisine tardive entraîne l’infirmation de l’ordonnance de prolongation et la libération de l’intéressé. Quels recours sont possibles après une décision de prolongation de la rétention administrative ?Après une décision de prolongation de la rétention administrative, plusieurs recours sont possibles. L’ordonnance n’est pas susceptible d’opposition, mais un pourvoi en cassation peut être formé. Ce pourvoi est ouvert à l’étranger, à l’autorité administrative ayant prononcé la rétention, ainsi qu’au ministère public. Le délai pour former ce pourvoi est de deux mois à compter de la notification de l’ordonnance. Le pourvoi doit être effectué par déclaration écrite remise au greffe de la Cour de cassation par un avocat. Ces recours permettent de contester la légalité de la mesure de rétention et de protéger les droits des étrangers concernés. |
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
L. 742-1 et suivants du Code de l’entrée et du séjour
des étrangers et du droit d’asile
ORDONNANCE DU 11 JANVIER 2025
(1 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général et de décision : B N° RG 25/00145 – N° Portalis 35L7-V-B7J-CKTAQ
Décision déférée : ordonnance rendue le 08 janvier 2025, à 16h59, par le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Meaux
Nous, Elise Thevenin-Scott, conseillère à la cour d’appel de Paris, agissant par délégation du premier président de cette cour, assistée de Camille Besson, greffière aux débats et au prononcé de l’ordonnance,
M. [O] [R]
né le 13 juillet 1995 à [Localité 2], de nationalité algérienne
RETENU au centre de rétention : [1]
assisté de Me Ruben Garcia, avocat au barreau de Paris – Mme [B] [Y] (interprète en arabe) tout au long de la procédure devant la cour et lors de la notification de la présente ordonnance, serment préalablement prêté
INTIMÉ :
LE PREFET DE L’ESSONNE
représenté par Me Margaux Chikaoui, du cabinet Centaure, avocat au barreau de Paris
MINISTÈRE PUBLIC, avisé de la date et de l’heure de l’audience
ORDONNANCE :
– contradictoire
– prononcée en audience publique
– Vu le décret n° 2024-799 du 2 juillet 2024 pris pour l’application du titre VII de la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration, relatif à la simplification des règles du contentieux ;
Constatant qu’aucune salle d’audience attribuée au ministère de la justice spécialement aménagée à proximité immédiate du lieu de rétention n’est disponible pour l’audience de ce jour ;
– Vu l’ordonnance du 08 janvier 2025 du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Meaux déclarant la requêtedu préfet de l’Essonne recevable et la procédure régulière et ordonnant la prolongation de la rétention de M. [O] [R] au centre de rétention administrative n°[1], ou dans tout autre centre ne dépendant pas de l’administration pénitentiaire pour une durée de vingt six jours à compter du 07 janvier 2025 10h43 ;
– Vu l’appel motivé interjeté le 09 janvier 2025, à 15h31, par M. [O] [R] ;
– Après avoir entendu les observations :
– de M. [O] [R], assisté de son avocat, qui demande l’infirmation de l’ordonnance ;
– du conseil du préfet de l’Essonne tendant à la confirmation de l’ordonnance ;
Monsieur [O] [R], né le 13 juillet 1995 à [Localité 2] (Algérie), a été placé en rétention administrative par arrêté préfectoral en date du 02 janvier 2025, notifié le 03 janvier 2025 sur la base d’un arrêté préfectoral portant OQTF du 24 juin 2024.
La mesure a été prolongée pour la première fois le 08 janvier 2025 par le magistrat du siège en charge du contrôle des mesures restrictives et privatives de liberté de Meaux.
Monsieur [O] [R] a interjeté appel et demande à la cour de déclarer la requête de l’administration irrecevable au motif que :
– L’avis au procureur de la République a été antérieur au placement en rétention
– Le premier juge a été saisi au-delà du délai de quatre jours, prévu par l’article L.742-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.
Réponse de la cour
Rappelons que, sauf s’ils constituent des exceptions de procédure, au sens de l’article 74 du code de procédure civile, les moyens nouveaux sont recevables en cause d’appel (article 563 du CPC)
Le délai d’action constitue une fin de non-recevoir pouvant être invoquée à tout stade de la procédure.
Il ressort de la lecture de l’article L.741-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile que l’autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quatre jours, l’étranger qui se trouve dans l’un des cas prévus à l’article L. 731-1 lorsqu’il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l’exécution de la décision d’éloignement et qu’aucune autre mesure n’apparaît suffisante à garantir efficacement l’exécution effective de cette décision.
Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l’article L. 612-3 ou au regard de la menace pour l’ordre public que l’étranger représente.
L’article L.742-1 du même code ajoute que le maintien en rétention au-delà de quatre jours à compter de la notification de la décision de placement initiale peut être autorisé, dans les conditions prévues au présent titre, par le juge des libertés et de la détention saisi à cette fin par l’autorité administrative.
L’article L.743-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile énonce, enfin, que le juge des libertés et de la détention statue, par ordonnance, dans les quarante-huit heures suivant l’expiration du délai fixé au premier alinéa de l’article L. 741-10 ou sa saisine en application des articles L. 742-1 et L. 742-4 à L. 742-7.
Le 07 janvier 2025, la 1ère chambre civile de la Cour de cassation a rendu l’avis suivant sur la computation des délais en matière de rétention administrative et de saisine du magistrat du siège en charge du contrôle des mesures restrictives et privatives de liberté aux fins de prolongation:
« – d’une part, que, conformément aux articles L. 742-1 et R. 742-1 du CESEDA et les articles 641 et 642 du code de procédure civile n’étant pas applicables, le délai de rétention de quatre jours court à compter de la notification du placement en rétention, de sorte que le premier jour doit être décompté;
– d’autre part, qu’exprimé en jours, ce délai expire le dernier jour à vingt-quatre heures, sans que ne soit applicable la prolongation du délai expirant un dimanche ou un jour férié.
Ainsi, pour un placement en rétention notifié le 1er janvier à quinze heures, le délai de quatre jours s’achèvera le 4 janvier à vingt-quatre heures. »
En l’espèce, l’arrêté de placement en rétention concernant Monsieur [O] [R] a été notifié le 03 janvier 2025 à 10h33. Le délai de saisine du magistrat du siège en charge du contrôle des mesures restrictives et privatives de liberté expirait donc le 06 janvier à 24h00.
Or, le magistrat du siège en charge du contrôle des mesures restrictives et privatives de liberté a été saisi le 07 janvier 2025 à 08h31, au-delà du délai de quatre jours. La requête est donc irrecevable et la décision sera infirmée.
INFIRMONS l’ordonnance
Statuant à nouveau,
DECLARONS irrecevable la requête de la préfecture de l’Essonne,
DISONS n’y a voir lieu à prolongation de la mesure de rétention administrative de Monsieur [O] [R]
RAPPELONS à Monsieur [O] [R] qu’il a l’obligation de quitter le territoire français
ORDONNONS la remise immédiate au procureur général d’une expédition de la présente ordonnance.
Fait à Paris le 11 janvier 2025 à
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
REÇU NOTIFICATION DE L’ORDONNANCE ET DE L’EXERCICE DES VOIES DE RECOURS : Pour information : L’ordonnance n’est pas susceptible d’opposition.
Le pourvoi en cassation est ouvert à l’étranger, à l’autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d’attente ou la rétention et au ministère public.
Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.
Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l’avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.
Le préfet ou son représentant L’intéressé L’avocat de l’intéressé
L’interprète
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