L’Essentiel : X, connu sous le nom de [E] [M], est un ressortissant algérien incarcéré au Centre Pénitentiaire de [Localité 3] jusqu’au 25 octobre 2024. Le 23 octobre, le Préfet de la Haute-Garonne a émis un arrêté d’obligation de quitter le territoire, suivi d’un placement en centre de rétention. À sa sortie, [E] [M] a été placé au centre de rétention de [Localité 1], avec plusieurs prolongations de sa rétention administrative. Le 9 janvier 2025, il a formé un appel, mais la décision de prolongation a été confirmée, considérant sa situation précaire et son comportement comme une menace à l’ordre public.
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Contexte de l’affaireX, connu sous le nom de [E] [M], est un ressortissant algérien né le 20 novembre 2004 à [Localité 2] en Algérie. Il a été incarcéré au Centre Pénitentiaire de [Localité 3] du 24 juin 2023 au 25 octobre 2024, où il a purgé plusieurs peines d’emprisonnement. Arrêtés du PréfetLe 23 octobre 2024, le Préfet de la Haute-Garonne a émis un arrêté d’obligation de quitter le territoire, notifié le 25 octobre 2024. Le lendemain, un arrêté de placement en centre de rétention a également été pris et notifié le même jour. Prolongations de la rétention administrativeÀ sa sortie de détention, [E] [M] a été placé au centre de rétention administrative de [Localité 1]. Plusieurs ordonnances du tribunal judiciaire de Toulouse ont prolongé sa rétention administrative : 26 jours le 30 octobre 2024, 30 jours le 24 novembre 2024, 15 jours le 24 décembre 2024, et à nouveau 15 jours le 8 janvier 2025. Appel de la décisionLe 9 janvier 2025, [E] [M] a formé un appel par courriel, reçu par le greffe de la cour. Lors de l’audience du même jour, son conseil a présenté des explications, tandis que le préfet a demandé la confirmation de l’ordonnance de prolongation de la rétention. Cadre juridique de la rétentionSelon l’article L 742-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers, le magistrat peut prolonger la rétention au-delà de la durée maximale si certaines conditions sont remplies, notamment en cas d’obstruction à l’éloignement ou de menace pour l’ordre public. Évaluation de la menace à l’ordre publicBien que les infractions passées de [E] [M] ne suffisent pas à établir une menace actuelle persistante, sa situation précaire, son absence d’adresse et de ressources, ainsi que son refus d’être reconnu par les autorités consulaires algériennes, ont été considérés comme des éléments justifiant la prolongation de sa rétention. Conclusion de la décisionLa décision de prolongation de la rétention a été confirmée, considérant que la situation de [E] [M] et son comportement justifiaient une menace à l’ordre public. L’ordonnance a été notifiée aux parties concernées, y compris à la préfecture et au ministère public. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions de prolongation de la rétention administrative selon l’article L 742-5 ?L’article L 742-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, dans sa version issue de la loi n°2024-42 du 26 janvier 2024, stipule que : « À titre exceptionnel, le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l’article L 742-4 lorsque l’une des situations suivantes apparaît dans les quinze derniers jours : 1°/ L’étranger a fait obstruction à l’exécution d’office de la décision d’éloignement. 2°/ L’étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d’éloignement : a) une demande de protection contre l’éloignement au titre du 5° de l’article L 631-3, b) ou une demande d’asile dans les conditions prévues aux articles L 754-1 et L 754-3. 3°/ La décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé et qu’il est établi par l’autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai. Le juge peut également être saisi en cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public. L’étranger est maintenu en rétention jusqu’à ce que le juge ait statué. Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d’une durée maximale de quinze jours. Si l’une des circonstances mentionnées aux 1°, 2° ou 3° ou au septième alinéa du présent article survient au cours de la prolongation exceptionnelle ordonnée en application de l’avant-dernier alinéa, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions. La durée maximale de la rétention n’excède alors pas quatre-vingt-dix jours. » Ainsi, pour prolonger la rétention, il est nécessaire de justifier l’une des circonstances énoncées, notamment une menace à l’ordre public ou une obstruction à l’éloignement. Comment la jurisprudence interprète-t-elle la notion de menace à l’ordre public dans le cadre de la rétention administrative ?La jurisprudence a établi que pour justifier une prolongation de la rétention administrative, il doit être objectivement établi qu’une menace à l’ordre public persiste. Au stade de la quatrième prolongation, il est impératif de démontrer que l’une des circonstances mentionnées à l’article L 742-5 est survenue durant la première prolongation exceptionnelle. En l’espèce, bien que les faits délictueux de M. [M] soient anciens et que les peines d’emprisonnement aient été exécutées, la situation actuelle de précarité, l’absence d’attaches familiales et le refus d’être auditionné par les autorités consulaires algériennes constituent des éléments qui peuvent être interprétés comme une menace à l’ordre public. La décision de prolongation de la rétention peut donc être fondée sur un faisceau d’indices concordants, établissant que l’individu représente une menace persistante, même si les infractions passées ne suffisent pas à elles seules à caractériser cette menace. Quelles sont les implications de l’absence de papiers pour un étranger en situation de rétention ?L’absence de papiers pour un étranger en situation de rétention a des conséquences significatives sur sa situation juridique. En effet, selon l’article L 742-5, l’étranger doit être en mesure de justifier de son identité et de sa nationalité pour que les procédures d’éloignement puissent être mises en œuvre. Dans le cas de M. [M], son refus d’être auditionné par les autorités consulaires algériennes et le fait qu’il n’ait pas été reconnu par celles-ci compliquent sa situation. Cela signifie qu’il ne peut pas fournir les documents nécessaires pour son éloignement, ce qui peut justifier une prolongation de sa rétention. De plus, l’absence d’adresse, de ressources et d’attaches familiales sur le territoire français renforce l’argument selon lequel il constitue une menace à l’ordre public, car il est dépourvu de moyens de subsistance et d’un cadre de vie stable. Ainsi, l’absence de papiers ne fait pas seulement obstacle à l’éloignement, mais elle contribue également à la perception d’une menace pour l’ordre public, justifiant ainsi la prolongation de la rétention administrative. |
Minute 25/36
N° RG 25/00034 – N° Portalis DBVI-V-B7J-QXIZ
O R D O N N A N C E
L’an DEUX MILLE VINGT CINQ et le 10 janvier à 16H00
Nous A-M. ROBERT, Conseillère, magistrate déléguée par ordonnance de la première présidente en date du 12 Décembre 2024 pour connaître des recours prévus par les articles L. 743-21 et L.342-12, R.743-10 et suivants du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.
Vu l’ordonnance rendue le 08 janvier 2025 à 17H13 par le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Toulouse ordonnant la prolongation du maintien au centre de rétention de :
[E] [M]
né le 20 Novembre 2004 à [Localité 2] (ALGERIE)
de nationalité Algérienne
Vu l’appel formé le 09 janvier 2025 à 11 h 51 par courriel, par Me Anne-Cécile MUNOZ, avocat au barreau de TOULOUSE,
A l’audience publique du 09 janvier 2025 à 15h00, assistée de N.DIABY, greffier lors des débats et de C. KEMPENAR, adjoint faisant fonction de greffier pour la mise à disposition, avons entendu :
En l’absence du représentant du Ministère public, régulièrement avisé;
En présence de [D] [Y] représentant la PREFECTURE DE LA HAUTE GARONNE ;
avons rendu l’ordonnance suivante :
X se disant [E] [M] né le 20 novembre 2004 à [Localité 2] (Algérie), de nationalité algérienne, a été incarcéré du 24 juin 2023 au 25 octobre 2024 au Centre Pénitentiaire de [Localité 3] où il a exécuté plusieurs peines d’emprisonnement.
Le 23 octobre 2024, le Préfet de la Haute Garonne a pris le concernant un arrêté portant obligation de quitter le territoire. Cet arrêté lui a été notifié le 25 octobre 2024.
Le 24 octobre 2024 le Préfet de la Haute Garonne a pris le concernant un arrêté portant placement en centre de rétention. Cet arrêté lui a été notifié le 25 octobre 2024.
A sa sortie de détention, il a été pris en charge par le centre de rétention administrative de [Localité 1].
Vu l’ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Toulouse en date du 30 octobre 2024, confirmée par ordonnance de la cour d’appel de Toulouse du 4 novembre 2024 ayant ordonné la prolongation de la rétention administrative pour une durée de 26 jours,
Vu l’ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Toulouse en date du 24 novembre 2024, confirmée par ordonnance de la cour d’appel de Toulouse du 25 novembre 2024 ayant ordonné la prolongation de la rétention administrative pour une durée de 30 jours,
Vu l’ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Toulouse en date du 24 décembre 2024, confirmée par ordonnance de la cour d’appel de Toulouse du 26 décembre 2024 ayant ordonné la prolongation de la rétention administrative pour une durée de 15 jours,
Vu l’ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Toulouse en date du 8 janvier 2025 qui a prolongé pour une nouvelle durée de 15 jours la rétention de M. [M],
Vu l’appel formé par M. [M] par courriel de son conseil reçu au greffe de la cour le 9 janvier 2025 à 11h51,
Entendu les explications fournies par le conseil de l’appelant à l’audience du 9 janvier 2025 à 15 heures ;
En présence du préfet de la Haute-Garonne qui demande la confirmation de l’ordonnance dont appel,
Vu l’absence du ministère public, avisé de la date d’audience, qui n’a pas formulé d’observation,
Selon les dispositions de l’article L 742-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile dans sa version issue de la loi n°2024-42 du 26 janvier 2024 entrée en vigueur au 1er septembre 2024 :
«A titre exceptionnel, le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l’article L 742-4 lorsque l’une des situations suivantes apparaît dans les quinze derniers jours :
1°/ L’étranger a fait obstruction à l’exécution d’office de la décision d’éloignement
2°/ L’étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d’éloignement :
a)une demande de protection contre l’éloignement au titre du 5° de l’article L 631-3
b)ou une demande d’asile dans les conditions prévues aux articles L 754-1 et L 754-3,
3°/ la décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé et qu’il est établi par l’autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.
Le juge peut également être saisi en cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public.
L’étranger est maintenu en rétention jusqu’à ce que le juge ait statué.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d’une durée maximale de quinze jours.
Si l’une des circonstances mentionnées aux 1°, 2° ou 3° ou au septième alinéa du présent article survient au cours de la prolongation exceptionnelle ordonnée en application de l’avant-dernier alinéa, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions. La durée maximale de la rétention n’excède alors pas quatre-vingt-dix jours. »
Au stade de la 4° prolongation il doit en conséquence être justifié que l’une des circonstances mentionnées aux 1°, 2° ou 3° ou au septième alinéa de l’article susvisé soit survenue au cours de la 1ère prolongation exceptionnelle de la rétention. A tout le moins, s’agissant du seul critère de menace à l’ordre public qui peut être isolément pris en considération, il doit être objectivement établi, serait-ce par un faisceau d’indices concordants, que le retenu constitue une menace à l’ordre public persistante à la date de la requête en 4ème prolongation.
En l’espèce, M. [E] [M] a été condamné :
-le 12 septembre 2022 par le tribunal pour enfants de Toulouse à 4 mois d’emprisonnement avec sursis pour des faits d’infraction à la législation sur les stupéfiants ,
-le 25 mai 2023 par le tribunal pour enfants de Toulouse à 3 mois d’emprisonnement pour des faits d’infraction à la législation sur les stupéfiants,
-le 26 juin 2023 en comparution immédiate par le tribunal correctionnel de Toulouse à la peine de un an d’emprisonnement avec maintien en détention pour des faits de fourniture d’identité imaginaire pouvant provoquer des mentions erronées au casier judiciaire et violence avec usage ou menace d’une arme sans incapacité en état de récidive légale,
-le 14 décembre 2023 par le tribunal correctionnel de Toulouse à la peine de 4 mois d’emprisonnement et révocation partielle du sursis antérieur à hauteur de 2 mois pour des faits de recel de biens provenant d’un délit puni d’une peine n’excédant pas 5 ans d’emprisonnement et détention non autorisée de produits stupéfiants en état de récidive légale.
Si ces faits délictueux datant de plus d’un an à ce jour ne peuvent à eux seuls caractériser une menace actuelle persistante à l’ordre public, et ce alors que les peines d’emprisonnement ferme ont été exécutées et ont donné lieu à des décisions de réduction de peine ainsi que le révèle la fiche pénale figurant au dossier, établissant a minima un comportement en détention exempt d’incident, il n’en demeure pas moins que M. [M], sortant de prison, ne justifie ni d’une adresse ni de ressources ni d’attaches familiales sur le territoire français et qu’il est dépourvu de papiers l’autorisant à circuler ou séjourner en France.
Par ailleurs se disant algérien, il a refusé d’être auditionné par les autorités consulaires algériennes lesquelles à réception de ses empreintes ne l’ont pas reconnu.
Il résulte du tout que sa situation de précarité persistante, compte tenu des passages à l’acte qui en ont résulté, assortie de la volonté manifeste de faire obstacle à la mise en ‘uvre de la mesure d’éloignement du territoire, caractérise suffisamment une menace actuelle persistante à l’ordre public justifiant la prolongation exceptionnelle de rétention sollicitée par l’autorité préfectorale.
En conséquence la décision entreprise doit être confirmée.
Statuant par ordonnance mise à disposition au greffe après avis aux parties,
Confirmons l’ordonnance rendue le 8 janvier 2025 par le vice-président du tribunal judiciaire de Toulouse ;
Disons que la présente ordonnance sera notifiée à la PREFECTURE DE LA HAUTE GARONNE, service des étrangers, à [E] [M], ainsi qu’à son conseil et communiquée au Ministère Public.
LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE
C. KEMPENAR A-M. ROBERT.
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