Renouvellement de bail commercial : fixation du loyer et absence de modifications notables des locaux.

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Renouvellement de bail commercial : fixation du loyer et absence de modifications notables des locaux.

L’Essentiel : Le 1er janvier 2007, la SCI DU [Adresse 3] a renouvelé le bail commercial de la SARL AUX DELICES DE [Localité 7]-[Adresse 3] pour neuf ans, avec un loyer annuel de 14.735 euros. En 2016, la SARL a demandé un renouvellement, accepté par la SCI avec un loyer proposé de 34.500 euros. Cependant, en 2018, la SCI a réclamé un loyer de 42.600 euros, entraînant un litige. L’expertise a fixé la valeur locative à 48.200 euros, mais le juge a finalement retenu un loyer plafonné à 16.674,54 euros, confirmant le renouvellement du bail.

Contexte du Bail

Par acte sous-seing privé du 1er janvier 2007, la SCI DU [Adresse 3] a renouvelé le bail de locaux commerciaux à la SARL AUX DELICES DE [Localité 7]-[Adresse 3] pour une durée de neuf ans, avec un loyer annuel de 14.735 euros. Les locaux étaient destinés à un commerce de boulangerie, pâtisserie, confiserie, glaces et cuisine, excluant toute autre activité.

Demande de Renouvellement

Le 27 février 2016, la SARL AUX DELICES DE [Localité 7]-[Adresse 3] a demandé le renouvellement du bail à compter du 1er avril 2016 pour une nouvelle période de neuf ans. La SCI DU [Adresse 3] a accepté le principe du renouvellement, proposant un loyer annuel de 34.500 euros.

Litige sur le Montant du Loyer

Le 26 février 2018, la SCI DU [Adresse 3] a demandé la fixation du loyer à 42.600 euros par an, entraînant une assignation devant le juge des loyers commerciaux le 1er mars 2019 pour établir le montant du loyer à partir du 1er avril 2016. Le juge a ordonné une expertise pour évaluer les facteurs locaux de commercialité et la valeur locative.

Rapport d’Expertise

L’expert a rendu son rapport le 23 novembre 2023, établissant une valeur locative de 48.200 euros et un loyer plafonné à 16.674,54 euros. La SCI DU [Adresse 3] a alors demandé au juge de fixer le loyer à la valeur locative, de réajuster le dépôt de garantie et de condamner la SARL AUX DELICES DE [Localité 7]-[Adresse 3] à des intérêts et dépens.

Arguments de la SARL AUX DELICES

En réponse, la SARL AUX DELICES a contesté la preuve des modifications notables des locaux et des facteurs de commercialité, demandant que le loyer soit fixé au montant plafonné de 16.674,54 euros. Elle a soutenu que les modifications alléguées par la SCI n’étaient pas notables et que les facteurs de commercialité n’avaient pas changé de manière significative.

Décision du Juge

Le juge a confirmé le principe du renouvellement du bail et a fixé le loyer à 16.674,54 euros, rejetant la demande de déplafonnement. Il a également ordonné le partage des dépens entre les parties et a précisé que la décision était exécutoire à titre provisoire.

Conclusion

Le jugement a été rendu le 14 janvier 2025, établissant les droits respectifs des parties concernant le loyer et les dépens, tout en déboutant les parties de leurs demandes supplémentaires.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la procédure de renouvellement d’un bail commercial selon le Code de commerce ?

Le renouvellement d’un bail commercial est régi par les dispositions des articles L.145-1 et suivants du Code de commerce.

L’article L.145-1 stipule que :

« Le bail commercial est un contrat par lequel une personne, le bailleur, donne à une autre, le preneur, un local à usage commercial pour une durée déterminée, en contrepartie d’un loyer. »

En vertu de l’article L.145-34, le preneur a le droit de demander le renouvellement de son bail, sauf en cas de motifs légitimes de refus par le bailleur.

Le preneur doit notifier sa demande de renouvellement au bailleur au moins six mois avant l’expiration du bail.

Si le bailleur accepte le principe du renouvellement, il peut proposer un nouveau loyer, qui peut être contesté par le preneur.

En cas de désaccord sur le montant du loyer, le preneur peut saisir le juge des loyers commerciaux pour qu’il fixe le loyer.

Ainsi, la procédure de renouvellement implique une demande formelle, une acceptation ou un refus du bailleur, et éventuellement une intervention judiciaire pour fixer le loyer.

Quelles sont les conditions de déplafonnement du loyer selon le Code de commerce ?

Le déplafonnement du loyer commercial est encadré par l’article L.145-34 du Code de commerce, qui précise les conditions dans lesquelles un loyer peut être révisé au-delà du plafond légal.

Cet article dispose que :

« A moins d’une modification notable des éléments mentionnés aux 1° à 4° de l’article L. 145-33, le taux de variation du loyer applicable lors de la prise d’effet du bail à renouveler ne peut excéder la variation de l’indice trimestriel des loyers commerciaux. »

Les éléments mentionnés dans l’article L.145-33 incluent :

1. La destination des locaux.
2. La surface des locaux.
3. Les caractéristiques de l’immeuble.
4. Les facteurs locaux de commercialité.

Pour qu’un loyer puisse être déplafonné, il faut donc prouver qu’il y a eu une modification notable de l’un de ces éléments.

En l’absence de telles modifications, le loyer doit rester plafonné, ce qui a été confirmé dans la décision du juge des loyers commerciaux.

Comment est déterminé le loyer plafond lors du renouvellement d’un bail commercial ?

Le loyer plafond lors du renouvellement d’un bail commercial est déterminé selon les dispositions de l’article L.145-34 du Code de commerce, qui précise les modalités de calcul.

L’article indique que :

« Le taux de variation du loyer applicable lors de la prise d’effet du bail à renouveler ne peut excéder la variation de l’indice trimestriel des loyers commerciaux. »

Pour calculer le loyer plafond, il faut prendre en compte :

– Le loyer initial.
– L’indice trimestriel des loyers commerciaux (ILC) entre la date de fixation initiale du loyer et la date de renouvellement.

Dans l’affaire en question, l’expert a appliqué les variations de l’ILC sur la période pertinente, ce qui a permis de déterminer un loyer plafond de 16.674,54 euros.

Ce montant est inférieur à la valeur locative, ce qui signifie que le loyer renouvelé doit être fixé à ce plafond, sauf preuve de modifications notables justifiant un déplafonnement.

Quelles sont les conséquences d’une demande de déplafonnement non justifiée ?

Lorsqu’une demande de déplafonnement du loyer est formulée sans justification valable, les conséquences peuvent être significatives pour le bailleur.

Selon l’article L.145-34 du Code de commerce, si le bailleur ne parvient pas à prouver une modification notable des caractéristiques des locaux ou des facteurs locaux de commercialité, la demande de déplafonnement sera rejetée.

Dans ce cas, le loyer sera fixé au montant du loyer plafond, comme cela a été décidé dans le jugement.

De plus, le bailleur peut être condamné à partager les dépens de la procédure, y compris les frais d’expertise, ce qui peut représenter un coût non négligeable.

Ainsi, une demande de déplafonnement non justifiée peut entraîner le maintien du loyer à un niveau inférieur à celui espéré, ainsi que des frais supplémentaires pour le bailleur.

Quelles sont les implications de l’article 700 du Code de procédure civile dans ce type de litige ?

L’article 700 du Code de procédure civile permet au juge de condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais non compris dans les dépens.

Cet article stipule que :

« Le juge peut, dans sa décision, condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme qui ne peut excéder 10 000 euros. »

Dans le cadre d’un litige relatif à un bail commercial, si l’une des parties a engagé des frais pour défendre ses droits, elle peut demander une indemnisation sur le fondement de cet article.

Cependant, le juge a une large appréciation pour décider de l’octroi ou non de cette indemnité.

Dans l’affaire en question, le juge a décidé de ne pas faire application de l’article 700, considérant que la procédure et l’expertise étaient nécessaires pour fixer les droits respectifs des parties, ce qui a conduit à un partage des dépens.

Cela souligne l’importance de la situation et des circonstances entourant chaque litige dans l’application de cet article.

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

Loyers commerciaux

N° RG 19/02849
N° Portalis 352J-W-B7D-CPJIQ

N° MINUTE : 1

Assignation du :
01 Mars 2019

Jugement de fixation

[1]

[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :

JUGEMENT
rendu le 14 Janvier 2025

DEMANDERESSE

S.C.I. DU [Adresse 3]
[Adresse 2]
[Localité 4]

représentée par Maître Jean-Luc MATHON, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #A0458

DEFENDERESSE

S.A.R.L. AUX DELICES DE [Localité 7]-[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 5]

représentée par Maître Caroline JEANNOT, avocate au barreau de PARIS, avocate plaidante, vestiaire #B0594

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Jean-Christophe DUTON, Vice-président, Juge des loyers commerciaux
Siégeant en remplacement de Monsieur le Président du Tribunal judiciaire de Paris, conformément aux dispositions de l’article R.145-23 du code de commerce ;

assisté de Manon PLURIEL, Greffière lors des débats et de Camille BERGER, Greffière lors de la mise à disposition

DEBATS

A l’audience du 02 Octobre 2024 tenue publiquement

JUGEMENT

Rendu publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort

FAITS ET PROCEDURE

Par acte sous-seing privé du 1er janvier 2007, la SCI DU [Adresse 3] a donné à bail en renouvellement à la SARL AUX DELICES DE [Localité 7]-[Adresse 3], des locaux à usage commercial sis [Adresse 3] dans le [Localité 5], pour une durée de neuf ans, à compter du 1er janvier 2007, moyennant un loyer annuel principal de 14.735 euros en principal.

La destination est la suivante : « commerce de boulangerie, pâtisserie, confiserie, glaces et cuisine à l’exception de toute autre commerce « .

Par courrier recommandé avec avis de réception en date du 27 février 2016, la SARL AUX DELICES DE [Localité 7]-[Adresse 3], a adressé à la SCI DU [Adresse 3] une demande de renouvellement du bail, à compter du 1er avril 2016, pour une durée de neuf ans.

Par acte extrajudiciaire du 1er avril 2016, la SCI DU [Adresse 3] a accepté le principe du renouvellement, en proposant un loyer annuel à la somme de 34.500 euros hors taxes.

Par mémoire en demande notifié le 26 février 2018 à la SARL AUX DELICES DE [Localité 7]-[Adresse 3], la SCI DU [Adresse 3] a sollicité la fixation du loyer du bail à la somme annuelle de 42.600 euros en principal hors taxes et hors charges, à compter du 1er avril 2016.

Par acte d’huissier du 1er mars 2019 se référant à son mémoire préalable, la SCI DU [Adresse 3] a fait assigner devant le juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire de Paris, la SARL AUX DELICES DE [Localité 7]-[Adresse 3] aux fins principales de fixer le montant du loyer des locaux loués à compter du 1er avril 2016 à la somme de 42.600 euros par an hors charges, hors taxes, prestations et fourniture. Subsidiairement, elle sollicite la fixation du loyer provisoire à 42.600 euros, pour le cas où il serait ordonné une mesure d’instruction.

Par jugement du 25 octobre 2019, le juge des loyers commerciaux a constaté le principe du renouvellement du bail liant la SCI DU [Adresse 3] à la SARL AUX DELICES DE [Localité 7]-[Adresse 3], à compter du 1er avril 2016 et ordonné une mesure d’expertise confiée à Monsieur [O] [G] afin de donner son avis sur une éventuelle modification notable des facteurs locaux de commercialité et de rechercher la valeur locative. Le loyer provisionnel a été fixé au montant du loyer contractuel indexé au principal, outre les charges.

L’expert judiciaire a déposé son rapport le 23 novembre 2023, retenant une valeur locative au 1er avril 2016 de 48.200 euros et un loyer plafonné égal à la somme en principal de 16.674,54 euros.

Par mémoire régulièrement notifié le 1er février 2024, la SCI DU [Adresse 3] demande au juge des loyers commerciaux de :

– fixer le loyer du bail renouvelé à compter du 1er avril 2016 à la valeur locative, soit à la somme annuelle de 48.200 euros hors taxes et hors charges, prestations et fournitures, majorée de la TVA au taux applicable ;
– dire que le dépôt de garantie sera réajusté ;
– condamner la SARL AUX DELICES DE [Localité 7]-[Adresse 3] aux intérêts aux taux légal à compter du 1er avril 2016 et leur capitalisation, ainsi qu’au paiement d’une somme de 6.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner la SARL AUX DELICES DE [Localité 7]-[Adresse 3] aux entiers dépens, en ce compris les frais d’expertise ;
– rappeler que la jugement à intervenir sera assorti de l’exécution provisoire.

Par mémoire après expertise notifié le 14 mai 2024 par lettre recommandée avec avis de réception, la SARL AUX DELICES DE [Localité 7]-[Adresse 3] demande au juge des loyers commerciaux de :

– dire et juger que la bailleresse ne rapporte pas la preuve de la date des travaux qui auraient modifié les caractéristiques des lieux loués, et qu’en tout état de cause, les modifications intervenues n’ont pas un caractère notable et ne présentent pas d’intérêt pour la société preneuse ;
– dire et juger que la bailleresse ne rapporte pas la preuve d’une modification notable des facteurs locaux de commercialité au cours du bail expiré ;
– entériner les conclusions du rapport d’expertise de Monsieur [O] [G] en ce qu’il a conclu à l’absence de modifications notables des caractéristiques des lieux loués ainsi que des facteurs locaux de commercialité ;
– débouter en conséquence la bailleresse de sa demande de déplafonnement et de fixation du loyer à la valeur locative ;
– fixer le montant du loyer du bail renouvelé au titre des locaux dépendant de l’immeuble sis à [Localité 5] [Adresse 3] au 1er avril 2018 à la somme annuelle en principal de 16.674,54 euros ;
– condamner la bailleresse à tous les dépens de l’instance, en ce compris les frais et honoraires d’expertise judiciaire.

Par note en délibéré notifiée par RPVA le 22 octobre 2024, la SCI DU [Adresse 3] rappelle que les travaux réalisés par le preneur constituent une modification notable des locaux justifiant le déplafonnement, il en va ainsi notamment :

– de l’adjonction d’un local pour installer des moteurs frigorifiques par avenant au bail 2007 qui a un intérêt pour le preneur ;
– de l’adjonction de l’arrière-boutique qui porte la surface de vente de 18 à 33 m² ;
– de l’agrandissement de la cuisine ;
– de l’agrandissement et l’aménagement du ½ niveau dit mezzanine en chambre avec salle d’eau et WC ; et
– du changement d’affectation du dépôt de farine/réserve.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre liminaire, le juge des loyers rappelle qu’en application de l’article 4 du code de procédure civile, les demandes tendant à « dire », « juger » et « constater » ne constituent pas des prétentions en ce qu’elles ne confèrent pas de droit à la partie qui les requiert hormis les cas prévus par la loi, ces demandes n’étant que le rappel des moyens invoqués.

Il sera rappelé en outre que par jugement du 25 octobre 2019, le juge des loyers commerciaux a constaté le principe du renouvellement du bail liant les parties à compter du 1er avril 2016, le loyer plafond et la valeur locative, le cas échéant, doivent donc être appréciés à cette date.

Sur le loyer plafond

L’article L.145-34 du code de commerce dispose en substance que : A moins d’une modification notable des éléments mentionnés aux 1° à 4° de l’article L. 145-33, le taux de variation du loyer applicable lors de la prise d’effet du bail à renouveler, si sa durée n’est pas supérieure à neuf ans, ne peut excéder la variation, intervenue depuis la fixation initiale du loyer du bail expiré, de l’indice trimestriel des loyers commerciaux ou de l’indice trimestriel des loyers des activités tertiaires men-tionnés aux premier et deuxième alinéas de l’article L.112-2 du code monétaire et financier, publiés par l’Institut national de la statistique et des études économiques. A défaut de clause contractuelle fixant le trimestre de référence de cet indice, il y a lieu de prendre en compte la variation de l’indice trimestriel des loyers commerciaux ou de l’indice trimestriel des loyers des activités tertiaires, calculée sur la période de neuf ans antérieure au dernier indice publié. En cas de renouvellement postérieur à la date initialement prévue d’expiration du bail, cette variation est calculée à partir du dernier indice publié, pour une période d’une durée égale à celle qui s’est écoulée entre la date initiale du bail et la date de son renouvellement effectif.

En l’espèce, l’expert a déterminé le loyer plafond par application des variations de l’indice des loyers commerciaux (ILC) entre le 1er janvier 2007 et le 31 mars 2016, soit 37 trimestres, ce qui donne :

14.735 € x 108,41 [(4ème T 2015 – JO 24/03/2016)/ (3ème T 2006 – JO 20/11/2014)] = 16.674,54 €.

Les parties sont en accord avec ce calcul. En conséquence, il convient de fixer le loyer plafonné à 16.674,54 euros.

Les parties s’accordent sur le fait que le loyer plafond est inférieur à la valeur locative, dès lors il n’y aura lieu de déterminer la valeur locative qu’en cas de déplafonnement du loyer.

Sur les motifs de déplafonnement

Sur l’évolution des caractéristiques des locaux

Selon le rapport d’expertise, les locaux se trouvent au sein d’un immeuble ancien sis [Adresse 3] et [Adresse 6], élevé sur sous-sol d’un rez-de-chaussée, 4 étages droit et un 5ème étage en retrait. La façade est en maçonnerie enduite dans un état correct de ravalement.

Les locaux considérés sont au [Adresse 6]. Ils sont occupés par une boutique d’angle disposant d’un linéaire de façade de 10 mètres environ (soit un pan coupé de 5 mètres à l’angle des deux voies, et 5 mètres sur le [Adresse 6]). Il est noté un accès surélevé d’une marche sur chaque pan de façade protégé par une porte vitrée coulissante. Il y a des vitrines de part et d’autre des accès. Il y a un droit de terrasse non couverte sur le trottoir sur une surface d’environ 10 mètres.

Les locaux sont caractérisés comme suit :

– Au rez-de chaussée : la boutique jouit d’une configuration pouvant s’inscrire dans un triangle d’une surface de 33 m². Au fond à gauche de la boutique, il est noté la présence d’un accès vers un local aménagé en cuisine équipée, éclairée par deux fenêtres donnant sur cour. Il existe également un accès vers le hall d’entrée de l’immeuble. On note la présence d’un monte-charge et d’un escalier desservant le sous-sol. Au fond, il est relevé la présence d’un dégagement desservant successivement sur la gauche, des WC et une petite réserve donnant accès vers un local également accessible depuis la cour de l’immeuble. Sont également présents : un bureau aveugle, et une salle de repos en façade arrière, éclairée par deux fenêtres, un escalier en bois dessert une chambre avec salle d’eau et WC situés en mezzanine ; Accessible depuis la 1ère cour et le passage sous porche de l’immeuble, est relevé la présence d’un local attenant divisé verticalement par la création d’un plancher ayant permis en haut la création d’une chambre accessible depuis la salle de repos précé-demment indiquée, et en bas, un local contenant plusieurs équipements de gros électroménagers ;

– Au sous-sol (relié par un escalier étroit situé dans la cuisine) : on distingue à mi-niveau, un local à usage de réserve, aménagé en chambre froide, des laboratoires, cuisine et fournil. Un escalier accolé à la façade arrière donne accès en contre haut à un palier desservant des vestiaires avec une douche et des WC. Il dessert également la cour. Depuis cette cour, est noté un accès à une cave ouverte dans laquelle se trouvent des moteurs de chambres froides. Il est également constaté la présence de deux caves indépendantes des locaux.

L’expert fait état en substance d’une impression d’ensemble correcte caractérisée notamment par :

– une configuration  » étriquée  » de la boutique, de configuration sensiblement triangulaire, compensée par un linéaire de façade de l’ordre de 10 m ;
– une boutique entièrement aménagée en espace de vente, comportant des aménagements en état correct ;
– une absence de chauffage central pour tous les autres locaux (chauffage électrique par convecteurs) ;
– une bonne hauteur utile générale des locaux, réduite au sein du local accessible depuis la 1ère cour ;
– un accès au sous-sol médiocre, desservi par un escalier de largeur faible.

L’expert conclut à une surface utile de 278,3 m² et à une surface pondérée de 94,45 m².

S’appuyant sur un comparatif entre le descriptif contractuel et le constat des lieux de l’expert, ainsi qu’un schéma comparatif, le bailleur invoque les modifications notables suivantes au cours du bail expiré :

– l’adjonction d’un local pour installer des moteurs frigorifiques par avenant au bail 2007 ;
– l’adjonction de l’arrière-boutique qui porte la surface de vente de 18 à 33 m² ;
– l’agrandissement de la cuisine ;
– l’agrandissement et l’aménagement du ½ niveau dit mezzanine en chambre avec salle d’eau et WC ;
– le changement d’affectation du dépôt de farine/réserve ;
– la transformation de deux chambres et une salle de bains en un bureau et une salle de repos.

En défense, le preneur fait valoir :

– que les moteurs frigorifiques étaient initialement entreposés dans une cave, et qu’à la suite de plusieurs dégâts des eaux les ayant endommagés, ils ont été déplacés sur proposition du bailleur dans un local de 6 m², surface quantitativement marginale et ayant un simple usage de stockage de moteurs frigorifiques ;
– que les modifications prétendument faites n’ont pas eu lieu au cours du bail expiré ; que le bailleur n’en rapporte pas la preuve, avec un simple comparatif du descriptif contractuel des locaux et un croquis très schématique et non daté ; que le descriptif contractuel correspond rarement au fil du temps à la configuration effective des lieux ;
– que s’agissant de l’extension de la boutique, alors qu’une demande de travaux est nécessaire, la seule demande retrouvée date de 1992, de sorte que la modification alléguée a sans doute eu lieu en dehors de la période du bail expiré ;
– que s’agissant de l’agrandissement de la cuisine, il n’existe aucun élément permettant d’établir la date dudit agrandissement ; que par ailleurs, cet agrandissement découle d’une adaptation des locaux à l’activité et ne saurait être qualifié de modification des locaux ;
– que s’agissant du demi-niveau avec une chambre, salle de bains et WC au-dessus du local anciennement  » entrepôt à sacs « , le plan faisant état de l’existence de ce local disparu date de 1955, de sorte qu’il n’est pas possible de conclure à ce que sa disparition ait eu lieu au cours du bail expiré ;
– que s’agissant du local initialement destiné au stockage des farines, il a été réattribué au stockage des poubelles, en raison de l’adaptation à l’activité, les farines étant désormais re-çues pour l’activité, en temps réel ;
– que s’agissant de l’aménagement de la mezzanine au-dessus de la réserve, la création d’un escalier d’accès et d’une fenêtre en façade avant et arrière, il ressort du rapport d’expertise que ce niveau existait avant 1955 et était aménagé en chambre selon le plan ancien.

L’expert conclut à une absence de modification notable des caractéristiques des locaux au cours du bail expiré, soit en raison d’un caractère non notable, soit d’une incertitude sur la date de réalisation des travaux.

Sur ce, s’agissant de la modification des caractéristiques des locaux concernant la cave, il n’est pas contesté qu’une cave accueillant les moteurs frigorifiques ait été ajoutée à l’assiette du bail en 2011. Il est cependant relevé que sa surface brute fait 7,5m², que sa surface utile pondérée est nulle et qu’elle ne sert qu’à l’entreposage de moteurs frigorifiques. En conséquence, la modification doit être constatée, mais celle-ci ne saurait revêtir un caractère notable, en raison de la nullité de sa surface utile pondérée. La circonstance qu’il y ait eu un avenant, au demeurant non signé par le preneur, donnant acte de l’inclusion dudit local dans l’assiette du bail, ne saurait suffire à qualifier de notable la modification considérée.

S’agissant de l’agrandissement de la boutique par réunion avec l’arrière-boutique, il ressort de l’expertise que la dernière demande d’autorisation de travaux autorisée concernant la boutique date du 24 mars 1992. Le preneur produit quatre attestations d’employés qui font état de l’existence d’une arrière-boutique avant novembre 2007, et pour l’une, avant janvier 2003, mais aucune ne permet de déterminer la date précise de la disparition de celle-ci. Le bailleur fait état de cette arrière-boutique dans la désignation contractuelle au moment du renouvellement, mais ne produit aucun état des lieux contradictoire ou constat permettant de donner date certaine à la configuration des lieux au moment de la conclusion du bail renouvelé.

Par la seule désignation contractuelle de l’arrière-boutique dans le bail expiré et un croquis comparatif opéré à partir d’un schéma n’ayant pas date certaine, en l’absence de constat, autorisation contractuelle ou demandes administratives de travaux, le bailleur n’a pas rapporté la preuve que les travaux d’agrandissement de la boutique auraient eu lieu au cours du bail expiré, qui plus est, en violation des règles d’urbanisme. En conséquence, il n’est pas établi que la modification relative à l’agrandissement de la boutique a eu lieu au cours du bail expiré.

Les autres modifications alléguées par le bailleur reposant sur la même approche probatoire jugée insuffisante à établir la preuve que les faits allégués ayant eu lieu au cours du bail expiré, en l’absence d’état des lieux contradictoire, de constat, autorisation contractuelle ou demandes administratives de travaux, le bailleur n’a pas rapporté la preuve de ce que les modifications de l’agrandissement de la cuisine, de l’agrandissement et l’aménagement du ½ niveau dit mezzanine en chambre avec salle d’eau et WC et la transformation de deux chambres et une salle de bains en un bureau et une salle de repos, ont eu lieu au cours du bail expiré.

S’agissant de la réaffectation du local dédié à la farine en local à poubelles, elle doit être qualifiée d’adaptation à l’activité considérée, étant relevé du rapport d’expertise contradictoire que la farine du boulanger est désormais livrée en temps réel, de sorte que son stockage n’est plus nécessaire.

En conséquence, la demande de déplafonnement du loyer au titre d’une modification notable des caractéristiques des locaux doit être rejetée.

Sur l’évolution des facteurs locaux de commercialité

Aux termes de l’article R.145-6 du code de commerce, les facteurs locaux de commercialité dépendent principalement de l’intérêt que présente, pour le commerce considéré, l’importance de la ville, du quartier ou de la rue où il est situé, du lieu de son implantation, de la répartition des diverses activités dans le voisinage, des moyens de transport, de l’attrait particulier ou des sujétions que peut présenter l’emplacement pour l’activité considérée et des modifications que ces éléments subissent d’une manière durable ou provisoire.

En l’espèce, s’agissant de l’évolution de la population dans l’arrondissement considéré, l’expert constate une variation de -0.65% de la population du [Localité 1] au cours du bail écoulé (2007/2016), alors que la variation de la population de [Localité 7] a été de -0,12%. S’agissant plus particulièrement de l’approche par Ilots regroupés pour l’Information Statistique (IRIS), l’IRIS Picpus 17 où se trouvent les locaux a connu, selon l’expert, une variation de sa population sur la période considérée de -2,20%. L’expert conclut à l’absence de modification notable des facteurs de commercialité tenant à l’évolution de la population.

Les parties ne contestent pas la position de l’expert sur ce point. La conclusion de l’expert doit en conséquence être confirmée sur ce point.

S’agissant de la fréquentation du métro, l’expert constate une évolution notable de ladite fréquentation sur la station Reuilly Diderot (+26,27%), soit une fréquentation en apparence supérieure à celle du métro parisien (+10,4%). L’expertise indique cependant que cette augmentation fait suite à une fréquentation anormalement basse en 2007, due à une fermeture de la station pendant deux mois, ce qui ressort d’une analyse des chiffres 2002 à 2006. L’expert propose une correction pour neutraliser cette période de fermeture et estime, après correction, l’évolution de la fréquentation à +5,22%, soit moins que l’évolution de la fréquentation parisienne. Il conclut donc en l’absence de modification notable des facteurs de commercialité tenant à l’évolution de la fréquentation du métro.

Le preneur adhère aux conclusions de l’expert sur ce point. Le bailleur s’oppose à ce que des données extérieures à la période du bail écoulé soit prise en compte (données préalables à 2007 et données postérieures à mars 2016).
En cas d’anomalie ou d’événement majeur créant un biais statistique dans la période considérée, il est loisible à l’expert de proposer une méthode visant à neutraliser le biais statistique. Il est relevé que l’expert a procédé par analogie avec une période antérieure, puis a proposé un nouveau traitement statistique sur une période plus étendue, pour neutraliser le biais statistique et déterminer la réalité objective de l’évolution de la fréquentation sur la période considérée.

En l’absence de méthode alternative proposée par la partie contestataire, cette méthode sera validée. En conséquence, la conclusion de l’expert doit être confirmée sur ce point.

S’agissant de l’évolution des catégories socio-professionnelles, l’expert note une augmentation du nombre d’artisans (+10%) et de cadres (+6%) sachant que ces deux populations, disposant d’un bon pouvoir d’achat, représentent environ 30% de celle de l’arrondissement. Il note qu’à [Localité 7] l’augmentation des artisans et cadres supérieures a été de 23% et que cet accroissement en nombre ne représente que 1,94% de la population 2016 du [Localité 1]. Il conclut que l’évolution des catégories socio-professionnelles composant la population du [Localité 1] n’est pas de nature à entraîner une modification notable des facteurs de commercialité.

Le preneur adhère aux conclusions expertales faisant observer qu’il ne faut pas confondre l’augmentation du nombre avec l’augmentation des proportions d’une catégorie socio-professionnelle. Le bailleur considère que la comparaison avec l’ensemble de [Localité 7] n’enlève rien à l’augmentation des catégories socio-professionnelles d’artisans et de cadre dans le [Localité 1].

Il est relevé que l’accroissement en nombre de ces catégories socio-professionnelles n’est que de 1,94% dans le [Localité 1]. Cette augmentation marginale d’une population déjà présente en de larges proportions ne saurait caractériser une modification notable des facteurs de commercialité tenant à l’évolution des catégories socio-professionnelles.

S’agissant des constructions nouvelles ou assimilées, l’expertise constate 67 logements nouveaux (dont un par changement de destination), aucun nouveau bureau, 93 m² nouveaux de commerces et 3.920 m² d’autres constructions, soit au total : 497 m² d’extension, 3.193 m² de construction neuve et 323 m² de changement de destination. Il conclut à l’absence de modification notable des facteurs de commercialité tenant à des constructions nouvelles.

Le preneur adhère aux conclusions de l’expert. Le bailleur ne fait valoir aucune observation particulière sur ce point. En conséquence, la conclusion de l’expert doit être confirmée sur ce point.

Il ne résulte de ce qui précède aucune évolution notable des facteurs de commercialité. Il n’y a dès lors pas lieu d’analyser leur éventuelle incidence sur le commerce considérée.

Il appert de l’examen qu’aucun motif de déplafonnement n’a prospéré. Dès lors, le loyer du bail renouvelé doit être fixé au loyer plafonné, la valeur locative étant de l’accord des parties, supérieure celui-ci.

Sur la demande de réajustement du dépôt de garantie

Il sera rappelé au preneur que la compétence du juge des loyers commerciaux est limitée à la fixation du loyer renouvelé ou révisé en application des dispositions de l’article R.145-23 du code de commerce et qu’il ne lui appartient donc de  » dire que le dépôt de garantie sera réajusté « .

Sur les dépens et les frais d’expertise

La procédure et l’expertise ont été nécessaires pour fixer les droits respectifs des parties. Il convient en conséquence d’ordonner le partage des dépens, en ce inclus les frais d’expertise.

L’équité commande de ne pas faire application de l’article 700 du code de procédure civile.

Il sera rappelé que la présente décision est de droit exécutoire à titre provisoire en vertu de l’article 514 du code de procédure civile dans sa rédaction issue du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019.

PAR CES MOTIFS

Le juge des loyers commerciaux, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort,

Fixe à la somme en principal de 16.674,54 euros, à compter du 1er avril 2016, le montant du loyer du bail renouvelé entre la SCI DU [Adresse 3] et la SARL AUX DELICES DE [Localité 7]-[Adresse 3], pour les locaux situés [Adresse 3] dans le [Localité 5] ;

Dit qu’ont couru des intérêts au taux légal sur le différentiel entre les loyers effectivement acquittés et les loyers finalement dûs, à compter du 1er mars 2019 (date de l’assignation) pour les loyers échus avant cette date, puis à compter de chaque échéance contractuelle pour les loyers échus après cette date ;

Dit que les intérêts échus et dus au moins pour une année entière produiront des intérêts ;

Condamne la SCI DU [Adresse 3] d’une part, et la SARL AUX DELICES DE [Localité 7]-[Adresse 3], d’autre part, à prendre en charge chacun par moitié les dépens qui incluront les frais de l’expertise judiciaire ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes plus amples ou contraires.

Fait et jugé à PARIS, le 14 janvier 2025.

LA GREFFIERE LE PRESIDENT
C. BERGER J-C. DUTON


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