L’Essentiel : La SCEA des Bouquets, exploitant agricole, a rompu le contrat de travail de Mme [S] après un arrêt maladie. Engagée en CDD depuis le 3 janvier 2022, elle a demandé des dommages-intérêts pour rupture anticipée, saisissant le conseil de prud’hommes. Le jugement du 9 février 2024 a débouté ses demandes. En appel, Mme [S] conteste cette décision, tandis que la SCEA demande la confirmation du jugement initial. La cour a relevé une irrecevabilité de l’appel pour non-respect du délai, mais a ordonné la réouverture des débats pour permettre aux parties de s’exprimer sur cette question.
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Contexte de l’affaireLa SCEA des Bouquets, une exploitation agricole, employait moins de 11 salariés lors de la rupture du contrat de travail de Mme [U] [S]. Cette dernière a été engagée par la société à partir du 27 août 2015, à travers plusieurs contrats à durée déterminée saisonniers. Engagement et rupture du contratLe dernier contrat de Mme [S] était un CDD d’une durée minimale de 40 jours, débutant le 3 janvier 2022. Elle était rémunérée 10,57 euros de l’heure pour 35 heures de travail par semaine. À partir du 1er avril 2022, elle a été en arrêt de travail pour maladie et n’est pas revenue, son contrat prenant fin le 31 mai 2022. Procédure judiciaireMme [S] a demandé des dommages-intérêts pour rupture anticipée et mauvaise foi, saisissant le conseil de prud’hommes de Bourges le 1er février 2023. Le jugement du 9 février 2024 a débouté Mme [S] de ses demandes, tout en déboutant également la SCEA des Bouquets de ses prétentions. Appel et demandes de Mme [S]Le 2 avril 2024, Mme [S] a interjeté appel de la décision, demandant à la cour d’infirmer le jugement et de condamner la SCEA à lui verser des sommes pour dommages-intérêts, ainsi qu’à lui fournir divers documents administratifs. Réponse de la SCEA des BouquetsLa SCEA des Bouquets a demandé à la cour de confirmer le jugement initial et de condamner Mme [S] à lui verser des frais sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’à couvrir les dépens de première instance et d’appel. Irrecevabilité de l’appelLa cour a relevé d’office une fin de non-recevoir concernant l’irrecevabilité de l’appel de Mme [S], en raison du non-respect du délai d’un mois pour faire appel après la notification de la décision du conseil de prud’hommes. Réouverture des débatsLa cour a ordonné la réouverture des débats pour permettre aux parties de présenter leurs observations sur la question de l’irrecevabilité, fixant des délais pour les conclusions de chacune des parties avant de clore à nouveau la procédure. |
Q/R juridiques soulevées :
Quel est le délai d’appel applicable dans cette affaire ?Le délai d’appel applicable dans cette affaire est régi par les articles L. 1462-1 et R. 1461-1 du code du travail. Selon l’article L. 1462-1 du code du travail : « Le délai d’appel contre une décision rendue par un conseil de prud’hommes est d’un mois. » Cet article précise que le délai commence à courir à compter de la notification de la décision. En l’espèce, la décision du conseil de prud’hommes a été notifiée à Mme [S] le 15 février 2024. Ainsi, le délai d’un mois pour former appel expirait le 15 mars 2024. Mme [S] a formé appel le 2 avril 2024, soit après l’expiration de ce délai. Par conséquent, la cour a relevé d’office l’irrecevabilité de l’appel de Mme [S] en raison du non-respect du délai imparti. Quelles sont les conséquences de l’irrecevabilité de l’appel ?L’irrecevabilité de l’appel a pour conséquence que la cour d’appel ne peut pas examiner le fond de l’affaire. En vertu de l’article 914 du code de procédure civile, il est stipulé que : « Les parties ne peuvent plus invoquer la caducité ou l’irrecevabilité après la clôture de l’instruction, sauf si leur cause survient ou est révélée postérieurement. » Dans ce cas, la cour a relevé d’office l’irrecevabilité de l’appel, ce qui signifie que Mme [S] ne pourra pas obtenir une révision de la décision du conseil de prud’hommes. La cour a donc ordonné la réouverture des débats pour permettre aux parties de présenter leurs observations sur cette fin de non-recevoir. Cela implique que les parties doivent se conformer aux délais fixés par la cour pour soumettre leurs arguments concernant l’irrecevabilité. Quels articles du code de procédure civile sont pertinents dans cette décision ?Les articles pertinents du code de procédure civile dans cette décision sont les articles 16 et 914. L’article 16 dispose que : « Le juge doit veiller au bon déroulement de la procédure et à la protection des droits des parties. » Cet article souligne l’importance de garantir un procès équitable, ce qui inclut le respect des délais de procédure. L’article 914, quant à lui, précise les conditions d’irrecevabilité des appels : « La cour d’appel peut, d’office, relever la fin de non-recevoir tirée de l’irrecevabilité de l’appel ou la caducité de celui-ci, dès lors qu’aucune décision du conseiller de la mise en état n’est intervenue sur ce point. » Ces articles montrent que la cour a le pouvoir d’agir pour garantir le respect des règles de procédure, y compris les délais d’appel. Ainsi, la cour a agi conformément à ces dispositions en relevant l’irrecevabilité de l’appel de Mme [S]. |
N° RG 24/00323
N° Portalis DBVD-V-B7I-DUIU
Décision attaquée :
du 09 février 2024
Origine : conseil de prud’hommes – formation paritaire de Bourges
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Mme [U] [S]
C/
S.C.E.A. DES BOUQUETS
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Expéd. – Grosse
Me ILLY 10.1.25
Me TANTON 10.1.25
COUR D’APPEL DE BOURGES
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 10 JANVIER 2025
Pages
APPELANTE :
Madame [U] [S]
[Adresse 1]
Ayant pour avocate Me Estelle ILLY, du barreau de BOURGES
(bénéficie d’une aide juridictionnelle totale numéro C-18033-2024-1063 du 15/03/2024 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de BOURGES)
INTIMÉE :
S.C.E.A. DES BOUQUETS
[Adresse 2]
18110 SAINT-PALAIS
Représentée par Me Alain TANTON de la SCP AVOCATS CENTRE, avocat au barreau de BOURGES
COMPOSITION DE LA COUR
Lors des débats :
PRÉSIDENT : Mme VIOCHE, présidente de chambre, rapporteur
en l’absence d’opposition des parties et conformément aux dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme DELPLACE
Lors du délibéré : Mme VIOCHE, présidente de chambre
Mme de LA CHAISE, présidente de chambre
Mme CHENU, conseillère
ARRÊT : Contradictoire – Prononcé publiquement le 10 janvier 2025 par mise à disposition au greffe.
Arrêt du 10 janvier 2025 – page 2
La SCEA des Bouquets exploite un domaine agricole et employait moins de 11 salariés au moment de la rupture.
Suivant plusieurs contrats de travail à durée déterminée à caractère saisonnier, Mme [U] [S] a été embauchée par cette société à compter du 27 août 2015.
En dernier lieu, Mme [S] a été engagée selon contrat de travail à durée déterminée d’une durée minimum de 40 jours en qualité de travailleur occasionnel à compter du 3 janvier 2022 jusqu’à la fin des travaux de saison. Elle percevait une rémunération horaire brute 10,57 euros contre 35 heures de travail effectif par semaine.
À compter du 1er avril 2022, Mme [S] a été placée en arrêt de travail pour maladie et n’a plus repris son poste. Son contrat de travail a pris fin le 31 mai 2022.
La convention collective nationale des exploitations agricoles du Cher s’est appliquée à la relation de travail.
Sollicitant le paiement de dommages-intérêts pour rupture anticipée et exécution de mauvaise foi de son contrat de travail, Mme [S] a saisi le conseil de prud’hommes de Bourges, section agricole, le 1er février 2023.
Par jugement en date du 9 février 2024, auquel il est renvoyé pour plus ample exposé, le conseil de prud’hommes a débouté Mme [S] de l’ensemble de ses demandes.
Il a, par ailleurs, débouté la SCEA des Bouquets de ses prétentions et dit que chacune des parties conserverait la charge de ses propres dépens.
Le 2 avril 2024, par voie électronique, Mme [S] a relevé appel de cette décision, qui lui avait été notifiée le 15 février 2024.
Vu les dernières conclusions notifiées par voie électronique le 25 juin 2024 aux termes desquelles Mme [S] demande à la cour d’infirmer le jugement entrepris et statuant à nouveau, de’:
– condamner la SCEA des Bouquets à lui régler les sommes suivantes :
– 4 809,46 euros au titre de dommages-intérêts pour rupture anticipée et abusive du contrat de travail à durée déterminée,
– 10 000 euros au titre de dommages-intérêts pour exécution de mauvaise foi,
– 2 000 euros au titre des honoraires et frais de procédure, qui se substitueront à la rétribution versée au titre de l’aide juridictionnelle en application de l’article 37 de la Loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique,
– ordonner à la SCEA des Bouquets de lui remettre un certificat de travail, une attestation France Travail et des fiches de paies conformes à la décision à intervenir et ce, dans un délai de quinzaine à compter de la notification de celle-ci et, passé ce délai, sous astreinte de 100 euros par jour de retard,
– condamner la SCEA des Bouquets aux entiers dépens ;
Vu les dernières conclusions notifiées par voie électronique le 16 septembre 2024 aux termes desquelles la SCEA des Bouquets demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions en ce qu’il a débouté Mme [S] de l’ensemble de ses prétentions et statuant à nouveau, de condamner Mme [S] à lui payer la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance, comme d’appel.
Vu l’ordonnance de clôture en date du 23 octobre 2024,
Arrêt du 10 janvier 2025 – page 3
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et de l’argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux conclusions déposées.
1) Sur la fin de non-recevoir relevée d’office tirée de l’inobservation du délai d’appel :
Selon l’article 914 du code de procédure civile, dans sa version issue du décret n°2017-891 du 6 mai 2017, applicable au jour de l’appel ayant saisi la cour, si les parties ne sont plus recevables à invoquer devant la cour d’appel la caducité ou l’irrecevabilité après la clôture de l’instruction, à moins que leur cause ne survienne ou ne soit révélée postérieurement, la cour d’appel peut, d’office, relever la fin de non-recevoir tirée de l’irrecevabilité de l’appel ou la caducité de celui-ci, dès lors qu’aucune décision du conseiller de la mise en état n’est intervenue sur ce point.
En application des articles L. 1462-1 et R. 1461-1 du code du travail, le délai d’appel contre une décision rendue par un conseil de prud’hommes est d’un mois.
En l’espèce, la décision du conseil de prud’hommes de Bourges en date du 9 février 2024 a été notifiée à Mme [S] le 15 février 2024, tel que cela résulte de l’accusé de réception signé présent au dossier transmis par cette juridiction.
Mme [S] ayant formé appel par RPVA le 2 avril 2024, soit dans un délai supérieur à 1 mois à compter de la notification de la décision déférée, la cour relève d’office qu’elle encourt l’irrecevabilité de son appel.
Dès lors, il convient d’ordonner la réouverture des débats afin de recueillir les observations des parties sur ce point, dans les délais précisés au dispositif.
Dans cette attente, les demandes et les dépens sont réservés.
La cour, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition du greffe :
AVANT-DIRE DROIT,
Vu les articles 16, 914 du code de procédure civile et L. 1462-1 et R. 1461-1 du code du travail,
ORDONNE la réouverture des débats et RÉVOQUE l’ordonnance de clôture à cette fin ;
INVITE les parties à présenter leurs observations sur la fin de non-recevoir tirée du non-respect du délai d’appel par Mme [U] [S], relevée d’office par la cour au visa des dispositions précitées ;
DIT que Mme [S] conclura avant le 24 janvier 2025 ;
DIT que la SCEA des Bouquets conclura avant le 7 février 2025 ;
DIT que la procédure sera à nouveau clôturée le 12 février 2025 ;
RENVOIE cette affaire à l’audience du 14 février 2025 à 9h00 et DIT que la présente décision vaut convocation à cette audience ;
RÉSERVE les autres demandes des parties et les dépens.
Arrêt du 10 janvier 2025 – page 4
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus ;
En foi de quoi, la minute du présent arrêt a été signée par Mme VIOCHE, présidente de chambre, et Mme DELPLACE, greffière à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,
S. DELPLACE C. VIOCHE
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