Hospitalisation sous contrainte : enjeux de régularité et de droits du patient

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Hospitalisation sous contrainte : enjeux de régularité et de droits du patient

L’Essentiel : [Z] [O], née le 4 septembre 1995, a été hospitalisée le 18 décembre 2024 pour soins psychiatriques en raison d’un péril imminent. Le 24 décembre, le directeur de l’EPS a saisi le tribunal pour valider cette mesure. L’appel interjeté par [Z] [O] a été jugé recevable, mais les arguments de la défense concernant des irrégularités ont été en grande partie rejetés. Le tribunal a confirmé que le certificat médical justifiait l’hospitalisation, considérant que les troubles mentaux de la patiente nécessitaient des soins immédiats. L’ordonnance a été maintenue, laissant les dépens à la charge du Trésor public.

Contexte de l’hospitalisation

[Z] [O], née le 4 septembre 1995, a été placée sous soins psychiatriques le 18 décembre 2024, avec une hospitalisation complète au centre hospitalier [3] de [Localité 5]. Cette décision a été prise par le directeur de l’établissement en raison d’un péril imminent, conformément à l’article L. 3212-1 du code de la santé publique. Elle a été transférée à l’EPS [7] le 20 décembre 2024.

Procédure judiciaire

Le 24 décembre 2024, le directeur de l’EPS [7] a saisi le tribunal judiciaire pour valider la mesure de soins. Le magistrat a ordonné le maintien de l’hospitalisation complète par ordonnance du 27 décembre 2024. [Z] [O] a interjeté appel le 6 janvier 2025, et une audience a eu lieu le 10 janvier 2025, où l’EPS [7] ne s’est pas présenté.

Arguments de la défense

Le conseil de [Z] [O] a soulevé plusieurs irrégularités, notamment la transmission partielle du dossier, la succession de mesures d’hospitalisation sans consentement, et des problèmes liés aux certificats médicaux. Il a également contesté la tardiveté de la notification à la Commission Départementale des Soins Psychiatriques (CDSP) et la notification des droits au patient.

Décisions judiciaires

Le tribunal a déclaré l’appel recevable. Concernant la transmission partielle du dossier, il a jugé que la procédure était régulière, car les conditions de l’article L. 3212-1 étaient remplies. Les arguments relatifs à l’irrégularité du certificat médical initial ont été rejetés, le médecin ayant respecté les exigences de neutralité.

Notification à la CDSP

Bien que la notification à la CDSP ait été tardive, le tribunal a estimé qu’aucun grief n’était démontré, car [Z] [O] avait été informée de ses droits et pouvait saisir la CDSP à tout moment. La tardiveté de la notification de la décision de maintien a également été jugée sans impact sur les droits de la patiente.

Évaluation du péril imminent

Le tribunal a conclu que le certificat médical initial justifiait la mesure d’hospitalisation, caractérisant un péril imminent pour [Z] [O]. Les troubles mentaux de la patiente nécessitaient des soins immédiats, et les restrictions à ses libertés étaient proportionnées à son état.

Conclusion

L’ordonnance du tribunal a été confirmée, maintenant la mesure de soins psychiatriques sous forme d’hospitalisation complète pour [Z] [O]. Les dépens ont été laissés à la charge du Trésor public.

Q/R juridiques soulevées :

Sur la recevabilité de l’appel

L’appel de [Z] [O] a été interjeté dans les délais légaux. Il doit être déclaré recevable.

En vertu de l’article 901 du Code de procédure civile, l’appel est recevable lorsqu’il est formé dans le délai imparti par la loi. Dans cette affaire, l’appel a été interjeté le 6 janvier 2025, soit dans le délai de 15 jours suivant la notification de l’ordonnance du 27 décembre 2024.

Ainsi, la recevabilité de l’appel est confirmée.

Sur l’irrégularité tirée de la transmission partielle du dossier

Il est constant que le 18 décembre 2024, la présente juridiction a infirmé l’ordonnance querellée, ordonné la mainlevée de l’hospitalisation de [Z] [O] et différé cette mainlevée de 24 heures afin qu’un programme de soins puisse être établi.

Le fait que ce programme n’ait pas été mis en place résulte uniquement d’une appréciation médicale de la situation de [Z] [O]. En conséquence, l’hôpital a pris une nouvelle mesure d’hospitalisation sous contrainte, justifiée par un péril imminent.

L’article L. 3212-1 du Code de la santé publique précise que les soins psychiatriques peuvent être ordonnés lorsque les troubles mentaux rendent impossible le consentement et que l’état mental impose des soins immédiats.

Ainsi, la procédure examinée par cette juridiction est régulière et le moyen sera rejeté.

Sur l’irrégularité tirée du certificat médical initial

Aux termes de l’article L. 3212-1 du Code de la santé publique, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l’objet de soins psychiatriques que si deux conditions sont réunies :

1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;
2° Son état mental impose des soins immédiats.

Le certificat médical initial du 18 décembre 2024 a été établi par un médecin n’exerçant pas dans l’établissement accueillant le malade, respectant ainsi la condition d’extériorité.

La présence du tampon de l’hôpital [7] sur la décision d’admission ne signifie pas que ces deux entités se confondent. Le moyen sera donc rejeté.

Sur l’irrégularité tirée de la tardiveté de la saisine de la CDSP

L’article L. 3212-5 du Code de la santé publique stipule que le directeur de l’établissement doit transmettre sans délai toute décision d’admission à la commission départementale des soins psychiatriques (CDSP).

Il est établi que la CDSP a été prévenue tardivement, l’admission ayant eu lieu le 18 décembre 2024 et l’envoi des documents le 24 décembre 2024. Toutefois, selon l’article L. 3216-1, l’irrégularité n’entraîne la mainlevée de la mesure que si elle a porté atteinte aux droits de la personne.

En l’espèce, [Z] [O] a été informée de ses droits et a pu saisir la CDSP. Le moyen sera donc rejeté.

Sur l’irrégularité tirée de la notification tardive de la décision de maintien

L’article L. 3211-3 du Code de la santé publique impose que la personne faisant l’objet de soins psychiatriques soit informée le plus rapidement possible de la décision de maintien.

La décision de maintien a été notifiée à [Z] [O] le 23 décembre 2024, soit avec un certain retard. Cependant, le certificat médical du 21 décembre 2024 atteste que la patiente a été informée de la décision et a pu faire valoir ses observations.

Ainsi, aucun grief n’est caractérisé et le moyen sera rejeté.

Sur l’irrégularité tirée de la tardiveté de la notification des droits au patient

L’article L. 3211-3 du Code de la santé publique stipule que la personne doit être informée de ses droits dès l’admission ou aussitôt que son état le permet.

Contraire à ce qui est soutenu, [Z] [O] a reçu la notification de ses droits le 18 décembre 2024 et a signé l’imprimé correspondant.

Elle a également signé la notification de ses droits du 21 décembre 2024. Aucun grief n’étant caractérisé, le moyen sera rejeté.

Sur l’absence de péril imminent

L’article L. 3212-1 du Code de la santé publique précise que l’admission en soins psychiatriques peut se faire en cas de péril imminent pour la santé de la personne.

Le certificat médical initial du 18 décembre 2024 indique que [Z] [O] présente un état d’angoisse massive et des troubles délirants, ce qui caractérise un péril imminent.

Le moyen sera donc rejeté.

Sur le fond

L’article L. 3212-1 du Code de la santé publique exige que les troubles mentaux rendent impossible le consentement et que l’état mental impose des soins immédiats.

Les certificats médicaux établissent que [Z] [O] souffre de troubles nécessitant des soins psychiatriques.

Les restrictions à l’exercice des libertés individuelles sont justifiées et proportionnées à son état mental. L’ordonnance sera donc confirmée en ce qu’elle a maintenu la mesure de soins psychiatriques sous forme d’hospitalisation complète.

COUR D’APPEL

DE VERSAILLES

Chambre civile 1-7

Code nac : 14C

N° RG 25/00062 – N° Portalis DBV3-V-B7J-W55Z

(Décret n°2011-846 du 18 juillet 2011, Article L3211-12-4 du Code de la Santé publique)

Copies délivrées le : 13/01/2025

à :

Mme [O]

Me Guyot

Etablissement Public de Santé [7]

Le Min. Public

ORDONNANCE

Le 13 Janvier 2025

prononcée par mise à disposition au greffe,

Nous, Monsieur David ALLONSIUS, Président de chambre à la cour d’appel de Versailles, délégué par ordonnance de monsieur le premier président pour statuer en matière d’hospitalisation sous contrainte (décret n°2011-846 du 18 juillet 2011), assisté de Madame Rosanna VALETTE, Greffière, avons rendu l’ordonnance suivante :

ENTRE :

Madame [Z] [O]

actuellement hospitalisée à l’ EPS de [7]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

comparante, assistée de Me Marion GUYOT, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 41, commis d’office

APPELANTE

ET :

M. LE DIRECTEUR DE L’ETABLISSEMENT PUBLIC DE SANTE [7]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

non représenté

INTIMEE

ET COMME PARTIE JOINTE :

M. LE PROCUREUR GENERAL DE LA COUR D’APPEL DE VERSAILLES

non représenté à l’audience, ayant rendu un avis écrit

A l’audience publique du 10 Janvier 2025 où nous étions Monsieur David ALLONSIUS, Président de chambre, assisté de Madame [U] [S], Greffière stagiaire en préaffectation, avons indiqué que notre ordonnance serait rendue ce jour;

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

[Z] [O], née le 4 septembre 1995 à [Localité 6], fait l’objet depuis le 18 décembre 2024 d’une mesure de soins psychiatriques, sous la forme d’une hospitalisation complète, au centre hospitalier [3] de [Localité 5], sur décision du directeur d’établissement, en application des dispositions de l’article L. 3212-1 du code de la santé publique, en cas de péril imminent,

[Z] [O] a été transférée à l’EPS [7] le 20 décembre 2024.

Le 24 décembre 2024, Monsieur le directeur de l’EPS [7] a saisi le magistrat du siège du tribunal judiciaire afin qu’il soit saisi conformément aux dispositions des articles L. 3211-12-1 et suivants du code de la santé publique.

Par ordonnance du 27 décembre 2024, le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Nanterre a ordonné le maintien de la mesure de soins psychiatriques sous forme d’hospitalisation complète.

Appel a été interjeté le 6 janvier 2025 par [Z] [O].

Le 7 janvier 2025, l’établissement [Z] [O] et l’EPS [7] ont été convoqués en vue de l’audience.

Le procureur général représenté par Corinne MOREAU, avocate générale, a visé cette procédure par écrit le 9 janvier 2025, avis versé aux débats.

L’audience s’est tenue le 10 janvier 2025 en audience publique.

A l’audience, bien que régulièrement convoqué, l’EPS [7] n’a pas comparu.

Le conseil de [Z] [O], qui a déposé des conclusions, auxquelles il convient de se référer, a indiqué qu’elle renonçait au moyen tiré de l’irrégularité relative au défaut de pouvoir du signataire.

Elle indique :

Sur la transmission partielle du dossier et la succession de mesures d’hospitalisation sans consentement malgré une levée à effet différé : la mesure de soins sans consentement a été levée par ordonnance du premier président le 18 décembre 2024 avec un effet différé de 24 heures et [Z] [O], alors qu’elle devait sortir, a vu une nouvelle mesure de soins sous contrainte démarrer. La procédure ne mentionne pas le début réel de la privation de liberté de [Z] [O] ce qui la rend irrégulière.

Sur le certificat médical initial : le certificat médical initial du 18 décembre 2024 a été établi par le Dr [J], praticien en psychiatrie à l’hôpital [7] de [Localité 4]. Or la décision d’admission en hospitalisation complète du 18 décembre 2024, si elle est établie sous l’entête du CASH de [Localité 5], comporte à côté de la signature, le tampon de l’hôpital [7] de [Localité 4]. Madame [O] a ensuite été transférée le 20 décembre 2024 dans le secteur 92G05 à [Localité 5]. Il apparaît que la décision d’admission en hospitalisation complète de Madame [O] a été prise sur la base d’un certificat médical établi par un médecin de l’hôpital accueillant le patient, ce qui rend la mesure irrégulière.

Sur la tardiveté de la saisine de la CDSP : la notification à la CDSP de l’admission de Madame [O] n’est intervenue que le 24 décembre 2024, jour de la saisine du JLD, pour une admission au 18 décembre 2024. Ce retard de 6 jours dans la notification de l’admission à la CDSP n’est pas justifié, alors même que le code de la santé publique prévoit une information « sans délai ». Le retard dans l’information de la CDSP est préjudiciable au patient car la commission a un droit de regard sur le dossier et la mesure de soins sans consentement et rend la procédure irrégulière.

Sur la notification tardive de la décision de maintien : il semble que la décision de maintien du 21 décembre 2024 n’a été notifiée au patient que le 23 décembre 2024. La procédure ne comporte pas de trace de tentative de notification ou d’explication sur la raison de cette notification tardive qui fait grief à [Z] [O] dès lors que l’information doit être faite le plus rapidement possible et d’une manière appropriée à l’état du patient ce qui justifie la levée de la mesure de soins sans consentement

Sur la tardiveté de la notification des droits au patient : Madame [O] a refusé de signer la décision d’admission le 18 décembre 2024. Il n’y a pas de trace d’une tentative de notification des droits du patient. Ce n’est que le 23 décembre 2024, lors de la notification de la décision de maintien, qu’est établie une notification des droits et voies de recours, soit 6 jours après le début de la mesure de contrainte. Madame [O] est restée 6 jours sous une mesure privative de liberté sans connaître ses droits et voies de recours, ce qui lui cause nécessairement un grief, sans que l’hôpital ne justifie de ce retard.

Sur l’absence de péril imminent : les certificats médicaux de Madame [O] ne caractérisent aucunement le péril imminent « pour la santé de la personne », à savoir le patient lui-même. Le certificat médical initial du 18 décembre 2024 n’explique pas en quoi Madame [O] souffrirait de troubles à l’origine d’un risque ou péril imminent pour sa personne. Ce certificat se contente de constater un syndrome de persécution et un état d’angoisse massive ainsi qu’un déni des troubles pour caractériser un péril imminent alors que cette procédure doit rester exceptionnelle. Comme la mesure d’hospitalisation sous contrainte a été levée le 18 décembre 2024, il n’y a pas d’explication sur une nouvelle mesure le même jour alors qu’une sortie à effet différée était en préparation.

Compte tenu de l’ensemble de ces irrégularités, l’infirmation de l’ordonnance du juge est demandée de même que la mainlevée de la mesure d’hospitalisation complète de Madame [O].

Le conseil a déposé six pièces.

[Z] [O] a été entendue en dernier et a dit qu’elle n’avait rien à ajouter, indiquant, sur question du président, qu’elle avait pu se rendre à l’audience du juge des enfants concernant sa fille.

L’affaire a été mise en délibéré.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la recevabilité de l’appel

L’appel de [Z] [O] a été interjeté dans les délais légaux. Il doit être déclaré recevable.

Sur l’irrégularité tirée de la transmission partielle du dossier et la succession de mesures d’hospitalisation sans consentement malgré une levée à effet différé

Il est constant que le 18 décembre 2024, la présente juridiction a infirmé l’ordonnance querellée, ordonné la mainlevée de l’hospitalisation de [Z] [O] et différé cette mainlevée de 24 heures afin qu’un programme de soins puisse être établi. Le fait que ce programme n’ait pas été mis en place résulte uniquement d’une appréciation médicale de la situation de [Z] [O] en sorte qu’en l’espèce, l’hôpital, sur des critères exclusivement médicaux, a pris une nouvelle mesure d’hospitalisation sous contrainte de celle-ci au motif d’un péril imminent dès lors que les conditions de l’article L. 3212-1 II. 2 étaient remplies.

Il s’ensuit que la procédure examinée par cette juridiction, constituée des pièces utiles, est régulière. Le moyen sera donc rejeté.

Sur l’irrégularité tirée du certificat médical initial

Aux termes de l’article L. 3212-1 du code de la santé publique : I.-Une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l’objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d’un établissement mentionné à l’article L. 3222-1 que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :

1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;

2° Son état mental impose des soins immédiats assortis soit d’une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d’une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° du I de l’article L. 3211-2-1.

II.-Le directeur de l’établissement prononce la décision d’admission :

1° Soit lorsqu’il a été saisi d’une demande présentée par un membre de la famille du malade ou par une personne justifiant de l’existence de relations avec le malade antérieures à la demande de soins et lui donnant qualité pour agir dans l’intérêt de celui-ci, à l’exclusion des personnels soignants exerçant dans l’établissement prenant en charge la personne malade. Lorsqu’elle remplit les conditions prévues au présent alinéa, la personne chargée, à l’égard d’un majeur protégé, d’une mesure de protection juridique à la personne peut faire une demande de soins pour celui-ci.

La forme et le contenu de cette demande sont fixés par décret en Conseil d’Etat.

La décision d’admission est accompagnée de deux certificats médicaux circonstanciés datant de moins de quinze jours, attestant que les conditions prévues aux 1° et 2° du I du présent article sont réunies.

Le premier certificat médical ne peut être établi que par un médecin n’exerçant pas dans l’établissement accueillant le malade ; il constate l’état mental de la personne malade, indique les caractéristiques de sa maladie et la nécessité de recevoir des soins. Il doit être confirmé par un certificat d’un second médecin qui peut exercer dans l’établissement accueillant le malade. Les deux médecins ne peuvent être parents ou alliés, au quatrième degré inclusivement, ni entre eux, ni du directeur de l’établissement mentionné à l’article L. 3222-1 qui prononce la décision d’admission, ni de la personne ayant demandé les soins ou de la personne faisant l’objet de ces soins ;

2° Soit lorsqu’il s’avère impossible d’obtenir une demande dans les conditions prévues au 1° du présent II et qu’il existe, à la date d’admission, un péril imminent pour la santé de la personne, dûment constaté par un certificat médical établi dans les conditions prévues au troisième alinéa du même 1°. Ce certificat constate l’état mental de la personne malade, indique les caractéristiques de sa maladie et la nécessité de recevoir des soins. Le médecin qui établit ce certificat ne peut exercer dans l’établissement accueillant la personne malade ; il ne peut en outre être parent ou allié, jusqu’au quatrième degré inclusivement, ni avec le directeur de cet établissement ni avec la personne malade.

Dans le cadre de la mise en ‘uvre de l’article L. 3212-1 II 2° ci-dessus rappelé la condition d’extériorité du médecin doit s’interpréter strictement en ce qu’elle a pour objectif de garantir au patient des conditions de neutralité, d’impartialité et d’indépendance à l’égard du directeur d’établissement ».

En l’espèce, la présence du tampon de l’hôpital [7] sur la décision d’admission en hospitalisation complète de [Z] [O] du 18 décembre 2024 établie sur un document à en-tête de l’hôpital de [Localité 5] ne signifie pas que ces deux entités ont fusionné et se confondent. Il s’agit de deux hôpitaux distincts avec un personnel distinct, exerçant sur différents sites qui sont dans deux départements différents. Le Docteur [J], rédacteur du certificat médical initial, apparaît comme étant rattaché à l’établissement [7] ainsi qu’en atteste ledit certificat qui indique « Je soussigné, Docteur T. [J], Praticien hospitalier en Psychiatrie à l’hôpital [7] à [Localité 4], certifie avoir examiné ce jour [‘] ». Il ne ressort pas des pièces que ce médecin ait été à un moment associé à la prise en charge de la patiente, qui est hospitalisée depuis l’origine à l’hôpital [3] situé à [Localité 5] ce qu’elle a confirmé au cours de son audition devant la présente juridiction, le certificat médical du 23 décembre 2024 évoquant un transfert d’unité au sein de cet établissement.

La condition d’extériorité étant respectée le moyen sera rejeté.

Sur l’irrégularité tirée de la tardiveté de la saisine de la CDSP

Aux termes de l’article L. 3212-5 du code de la santé publique, le directeur de l’établissement d’accueil transmet sans délai au représentant de l’Etat dans le département ou, à [Localité 6], au préfet de police, et à la commission départementale des soins psychiatriques mentionnée à l’article L. 3222-5 toute décision d’admission d’une personne en soins psychiatriques en application du présent chapitre. Il transmet également sans délai à cette commission une copie du certificat médical d’admission, du bulletin d’entrée et de chacun des certificats médicaux mentionnés aux deuxième et troisième alinéas de l’article L. 3211-2-2.

L’article L. 3223-1 du même code dispose que « la commission prévue à l’article L. 3222-5 :

1° Est informée, dans les conditions prévues aux chapitres II et III du titre Ier du présent livre, de toute décision d’admission en soins psychiatriques, de tout renouvellement de cette décision et de toute décision mettant fin à ces soins ».

En l’espèce, il est établi que la CDSP a été prévenue tardivement, le texte prévoyant cette démarche sans délai, l’admission de [Z] [O] étant du 18 décembre 2024 et l’envoi des documents à la CDSP du 24 décembre 2024.

Toutefois, en application de l’article L. 3216-1 alinéa 2 du même code, l’irrégularité affectant une décision administrative prise en application des chapitres II à IV du titre 1er n’entraîne la mainlevée de la mesure que s’il en est résulté une atteinte aux droits de la personne.

En l’espèce, il ressort du dossier que la décision d’admission du 18 décembre 2024 a bien été notifiée à [Z] [O] le même jour, que dans les droits expressément notifiés à cette dernière, figure le droit pour elle de saisir la CDSP dont l’adresse est en outre expressément indiquée. Le droit de saisir la CDSP figure également dans la liste des droits qui apparaît dans la décision de poursuite des soins du 21 décembre 2024 qui a été présentée à [Z] [O] qui en a pris connaissance et l’a signée le 23 décembre 2024.

De plus, [Z] [O] a été également informée lors de cette notification qu’elle pouvait faire un recours devant le juge des libertés et de la détention, dont les coordonnées sont également indiquées, copie de cette notification de la décision d’admission et des droits du patient lui ayant été remise. Ce recours peut se faire à tout moment, indépendamment du contrôle obligatoire dudit juge dès le début de la mesure.

S’il est exact que le juge ne contrôle que la procédure et ne peut en aucun cas se substituer à l’avis médical, le patient peut à tout moment saisir le juge pour demander à ce que ce dernier ordonne une expertise médicale, ce que ce dernier peut également faire d’office, expertise pouvant suivant les conclusions de l’expert aboutir à la mainlevée de la mesure.

En conséquence, il n’est démontré aucun grief pour [Z] [O]. Le moyen sera rejeté.

Sur l’irrégularité tirée de la notification tardive de la décision de maintien

L’article L. 3211-3 du code de la santé publique dispose qu’ ‘ avant chaque décision prononçant le maintien des soins en application des articles L. 3212-4, L. 3212-7 et L. 3213-4 ou définissant la forme de la prise en charge en application des articles L. 3211-12-5, L. 3212-4, L. 3213-1 et L. 3213-3, la personne faisant l’objet de soins psychiatriques est, dans la mesure où son état le permet, informée de ce projet de décision et mise à même de faire valoir ses observations, par tout moyen et de manière appropriée à cet état.

En outre, toute personne faisant l’objet de soins psychiatriques en application des chapitres II et III du présent titre ou de l’article 706-135 du code de procédure pénale est informée :

a) Le plus rapidement possible et d’une manière appropriée à son état, de la décision d’admission et de chacune des décisions mentionnées au deuxième alinéa du présent article, ainsi que des raisons qui les motivent ;

b) Dès l’admission ou aussitôt que son état le permet et, par la suite, à sa demande et après chacune des décisions mentionnées au même deuxième alinéa, de sa situation juridique, de ses droits, des voies de recours qui lui sont ouvertes et des garanties qui lui sont offertes en application de l’article L. 3211-12-1. (…) ‘.

Les dispositions combinées des articles L. 3211-3 et L. 3216-1 du code de la santé publique imposent une information du patient sur la décision le concernant, les raisons qui motivent cette décision, le plus rapidement possible, d’une manière appropriée à son état et dans la mesure où son état le permet. Le défaut d’information du patient sur sa situation affecte la régularité de la procédure et peut, si l’irrégularité constatée porte atteinte à ses droits, entraîner la mainlevée de la mesure.

Par ailleurs, l’irrégularité affectant une décision administrative n’entraîne la mainlevée de la mesure que s’il en est résulté une atteinte aux droits de la personne qui en faisait l’objet, conformément aux dispositions de l’article L. 3216-1 du code de la santé publique, cette atteinte devant être appréciée in concreto.

La décision de maintien en hospitalisation sous contrainte de [Z] [O] du 21 décembre 2024 a été portée à sa connaissance le 23 décembre, l’intéressée l’ayant signée et écrit qu’elle refusait la contrainte. Ce délai est tardif. Toutefois, il ressort du certificat médical des 72 heures du 21 décembre 2024 que le médecin « certifie que le patient a été informé ce jour de ma décision mentionnée dans le présent certificat ainsi que des raisons qui la motivent, d’une manière adaptée à son état, et a été mis à même de faire valoir ses observations par tout moyen adapté » étant précisé que la mention sur ledit certificat par le médecin que la patiente « demande d’une manière récurrente sa sortie définitive de l’hôpital » indique clairement qu’elle avait alors eu l’information de la proposition de maintien de son hospitalisation complète.

Dès lors, [Z] [O] ayant été, à l’occasion de cet examen médical du 21 décembre 2024, informée de ses droits et mise à même de faire valoir ses observations, aucun grief de nature à justifier la mainlevée de la mesure d’hospitalisation complète n’est caractérisé.

Le moyen sera rejeté.

Sur l’irrégularité tirée de la tardiveté de la notification des droits au patient

L’article L. 3211-3 du code de la santé publique dispose qu’ ‘ avant chaque décision prononçant le maintien des soins en application des articles L. 3212-4, L. 3212-7 et L. 3213-4 ou définissant la forme de la prise en charge en application des articles L. 3211-12-5, L. 3212-4, L. 3213-1 et L. 3213-3, la personne faisant l’objet de soins psychiatriques est, dans la mesure où son état le permet, informée de ce projet de décision et mise à même de faire valoir ses observations, par tout moyen et de manière appropriée à cet état.

En outre, toute personne faisant l’objet de soins psychiatriques en application des chapitres II et III du présent titre ou de l’article 706-135 du code de procédure pénale est informée :

a) Le plus rapidement possible et d’une manière appropriée à son état, de la décision d’admission et de chacune des décisions mentionnées au deuxième alinéa du présent article, ainsi que des raisons qui les motivent ;

b) Dès l’admission ou aussitôt que son état le permet et, par la suite, à sa demande et après chacune des décisions mentionnées au même deuxième alinéa, de sa situation juridique, de ses droits, des voies de recours qui lui sont ouvertes et des garanties qui lui sont offertes en application de l’article L. 3211-12-1. (…) ‘.

Contrairement à ce qui est soutenu par le conseil de [Z] [O], celle-ci a reçu le 18 décembre 2024 la décision d’admission de la directrice de l’hôpital du même jour et la notification de ses droits et voies de recours, l’intéressée ayant signé l’imprimé qui porte la date du 18 décembre 2024.

Elle a également signé la notification de ses droits et voies de recours du 21 décembre 2024 qui lui a été présentée le 23 décembre laquelle inclut la même énumération de droits qui lui a été présentée et dont elle a pris connaissance le 18 décembre 2024.

Aucun grief n’étant caractérisé, le moyen sera rejeté.

Sur l’absence de péril imminent

Aux termes de l’article L. 3212-1 du code de la santé publique : I.-Une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l’objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d’un établissement mentionné à l’article L. 3222-1 que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :

1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;

2° Son état mental impose des soins immédiats assortis soit d’une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d’une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° du I de l’article L. 3211-2-1.

II.-Le directeur de l’établissement prononce la décision d’admission :

1° Soit lorsqu’il a été saisi d’une demande présentée par un membre de la famille du malade ou par une personne justifiant de l’existence de relations avec le malade antérieures à la demande de soins et lui donnant qualité pour agir dans l’intérêt de celui-ci, à l’exclusion des personnels soignants exerçant dans l’établissement prenant en charge la personne malade. Lorsqu’elle remplit les conditions prévues au présent alinéa, la personne chargée, à l’égard d’un majeur protégé, d’une mesure de protection juridique à la personne peut faire une demande de soins pour celui-ci.

La forme et le contenu de cette demande sont fixés par décret en Conseil d’Etat.

La décision d’admission est accompagnée de deux certificats médicaux circonstanciés datant de moins de quinze jours, attestant que les conditions prévues aux 1° et 2° du I du présent article sont réunies.

Le premier certificat médical ne peut être établi que par un médecin n’exerçant pas dans l’établissement accueillant le malade ; il constate l’état mental de la personne malade, indique les caractéristiques de sa maladie et la nécessité de recevoir des soins. Il doit être confirmé par un certificat d’un second médecin qui peut exercer dans l’établissement accueillant le malade. Les deux médecins ne peuvent être parents ou alliés, au quatrième degré inclusivement, ni entre eux, ni du directeur de l’établissement mentionné à l’article L. 3222-1 qui prononce la décision d’admission, ni de la personne ayant demandé les soins ou de la personne faisant l’objet de ces soins ;

2° Soit lorsqu’il s’avère impossible d’obtenir une demande dans les conditions prévues au 1° du présent II et qu’il existe, à la date d’admission, un péril imminent pour la santé de la personne, dûment constaté par un certificat médical établi dans les conditions prévues au troisième alinéa du même 1°. Ce certificat constate l’état mental de la personne malade, indique les caractéristiques de sa maladie et la nécessité de recevoir des soins. Le médecin qui établit ce certificat ne peut exercer dans l’établissement accueillant la personne malade ; il ne peut en outre être parent ou allié, jusqu’au quatrième degré inclusivement, ni avec le directeur de cet établissement ni avec la personne malade.

Dans ce cas, le directeur de l’établissement d’accueil informe, dans un délai de vingt-quatre heures sauf difficultés particulières, la famille de la personne qui fait l’objet de soins et, le cas échéant, la personne chargée de la protection juridique de l’intéressé ou, à défaut, toute personne justifiant de l’existence de relations avec la personne malade antérieures à l’admission en soins et lui donnant qualité pour agir dans l’intérêt de celle-ci [‘] ».

En l’espèce, le certificat médical initial du Docteur [J] indique « patiente qui présente un épisode persécutif. Le contact est très tendu, l’humeur est très exaltée, son discours est incohérent avec des thématiques persécutives vis-à-vis de sa famille à mécanisme interprétatif, associé à des composantes thymiques, qui sont à mettre en rapport avec un probable syndrome de persécution chronique. Elle présente un état d’angoisse massive, tableau clinique évocateur d’une décompensation des troubles délirant avec un syndrome de persécution. Elle est dans le déni de ses troubles. NB : la recherche de tiers est infructueuse ».

Ces éléments caractérisent bien un péril imminent pour [Z] [O], ce qui est d’ailleurs indiqué par le médecin dans son certificat, ledit péril imminent n’étant pas uniquement constitué par une menace auto-agressive pour le patient mais peut aussi être constitué d’une personne délirante, tenant des propos incohérents et massivement angoissé.

Le moyen sera donc rejeté.

Sur le fond

Aux termes du I de l’article L. 3212-1 du code de la santé publique, « une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l’objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d’un établissement mentionné à l’article L. 3222-1 du même code que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies : 1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ; 2° Son état mental impose des soins immédiats assortis soit d’une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d’une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° de l’article L. 3211-2-1 ».

Le certificat médical initial du 18 décembre 2024 et les certificats suivants des 19 et 21 décembre 2024 détaillent avec précision les troubles dont souffre [Z] [O].

Le certificat du 8 janvier 2025 du docteur [J] indique « Patiente âgée de 29 ans, connue du secteur d'[Localité 2] avec notion de plusieurs hospitalisations dont la dernière remonte à avril 2024. Admise pour rupture avec son état antérieur à type de claustration au domicile inhibition sociale et rupture du lien thérapeutique avec le SAMSAH, le psychiatre et la psychologue. Ce tableau clinique est survenu à la suite du prolongement de la mesure du placement de sa fille à la pouponnière.

Ce jour le contact est lisse mais reste de bonne qualité, la patiente est calme sur le plan psychomoteur, le discours est structuré dans sa forme sans troubles perceptifs, il véhicule cependant un déni de ses troubles et une banalisation des éléments qui ont motivé son hospitalisation. La patiente se montre très évasive sur les troubles du comportement, elle estime que cette hospitalisation n’a jamais été justifiée même au paroxysme de son épisode dépressif. Elle ne manifeste aucune autocritique ou remise en question ».

Il conclut que les soins psychiatriques doivent être maintenus à temps complet.

Cet avis médical est suffisamment précis pour justifier les restrictions à l’exercice des libertés individuelles de [Z] [O], qui demeurent adaptées, nécessaires et proportionnées à son état mental et à la mise en ‘uvre du traitement requis, les troubles mentaux dont souffre [Z] [O] nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l’ordre public.

Pour l’ensemble de ces raisons, l’ordonnance sera donc confirmée en ce qu’elle a maintenu la mesure de soins psychiatriques de [Z] [O] sous la forme d’une hospitalisation complète.

PAR CES MOTIFS

Statuant par ordonnance réputée contradictoire,

Déclarons l’appel de [Z] [O] recevable,

Rejetons les moyens d’irrégularité soulevés,

Confirmons l’ordonnance entreprise,

Laissons les dépens à la charge du Trésor public.

Prononcé par mise à disposition de notre ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées selon les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Le greffier, Le président,


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