Désistement partiel et compétences procédurales en matière d’appel

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Désistement partiel et compétences procédurales en matière d’appel

L’Essentiel : La SCI du Martroy a décidé de se désister de son action contre la SCP Mandron-Maillard-Bellet, entraînant l’extinction de l’instance. La société Service B a soulevé des fins de non-recevoir, arguant de l’irrecevabilité des demandes de la SCI et de la prescription de l’action. Le conseiller de la mise en état est compétent pour statuer sur ces questions, bien que certaines relèvent de la cour. Par ailleurs, la SCI n’a pas justifié l’utilité de sa demande d’expertise, entraînant son déboutement. Enfin, la SCI est condamnée à supporter les dépens liés à sa demande d’incident.

Sur le désistement partiel d’instance

La SCI du Martroy a décidé de se désister de son action contre la SCP Mandron-Maillard-Bellet, qui a accepté ce désistement. En conséquence, le désistement partiel d’appel de la SCI du Martroy est constaté comme parfait, entraînant l’extinction de l’instance et le dessaisissement de la cour concernant ce litige.

Sur les fins de non-recevoir soulevées par la société Service B

La société Service B a soulevé deux fins de non-recevoir, arguant de l’irrecevabilité des demandes de la SCI du Martroy, considérées comme nouvelles, et de la prescription de l’action. Selon le code de procédure civile, le conseiller de la mise en état est seul compétent pour statuer sur ces fins de non-recevoir. Toutefois, certaines fins de non-recevoir, comme celles touchant à la prescription, relèvent de la compétence de la cour.

Sur la demande d’expertise

Le conseiller de la mise en état a la possibilité d’ordonner une expertise, mais la partie demandant cette mesure doit justifier de son utilité. Dans ce cas, la SCI du Martroy n’a fourni aucune pièce justificative pour sa demande d’expertise, ce qui a conduit à son déboutement.

Sur les frais de procédure et les dépens d’incident

La SCI du Martroy, ayant échoué dans sa demande d’incident, est condamnée à supporter les dépens associés. De plus, la demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile a été rejetée, conformément à l’équité.

Q/R juridiques soulevées :

Sur le désistement partiel d’instance

Le désistement partiel d’instance est régi par l’article 400 du Code de procédure civile, qui stipule que « le désistement de l’appel ou de l’opposition est admis en toutes matières, sauf dispositions contraires ».

Dans le cas présent, la SCI du Martroy a décidé de se désister de son action contre la SCP Mandron-Maillard-Bellet, et cette dernière a accepté ce désistement.

Il est donc nécessaire de constater que le désistement partiel d’appel de la SCI du Martroy est parfait, entraînant l’extinction de l’instance et le dessaisissement de la cour concernant le litige opposant les deux parties.

Sur les fins de non-recevoir soulevées par la société Service B

La société Service B soulève deux fins de non-recevoir, en se basant sur l’article 564 du Code de procédure civile, qui précise que « les demandes nouvelles sont irrecevables en appel ».

Elle considère que les demandes de la SCI du Martroy sont nouvelles et, par conséquent, irrecevables.

De plus, la société Service B évoque la prescription de l’action de la SCI du Martroy. Selon l’article 907 du Code de procédure civile, le conseiller de la mise en état est seul compétent pour statuer sur les fins de non-recevoir, à l’exclusion de toute autre formation.

Il est établi que le conseiller de la mise en état ne peut pas connaître des fins de non-recevoir déjà tranchées par le juge de la mise en état ou par le tribunal.

Dans cette affaire, la fin de non-recevoir relative à la prescription de l’action de la SCI du Martroy doit être examinée par la cour, car elle relève de l’appel.

L’irrecevabilité des demandes fondées sur la responsabilité contractuelle doit également être examinée par la cour, car cela implique un examen de l’effet dévolutif, qui n’appartient pas au conseiller de la mise en état.

Sur la demande d’expertise

Le conseiller de la mise en état a la compétence d’ordonner une expertise, mais il incombe à la partie qui en fait la demande de justifier de son utilité.

Dans cette affaire, la SCI du Martroy n’a pas produit de pièces pour soutenir sa demande d’expertise.

Il est donc de bonne administration de la justice que la cour procède à une expertise si elle l’estime utile, mais cela doit être fait après avoir tranché les fins de non-recevoir soulevées par la société Service B.

En l’absence de justification de l’utilité de l’expertise, la SCI du Martroy est déboutée de sa demande.

Sur les frais de procédure et les dépens d’incident

La SCI du Martroy, qui succombe dans sa demande d’incident, doit supporter les dépens de celui-ci.

L’article 700 du Code de procédure civile prévoit que « la partie qui perd peut être condamnée à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés ».

Cependant, dans le cadre de cet incident, l’équité commande de ne pas appliquer les dispositions de cet article, et la demande fondée sur ce dernier est rejetée.

Ainsi, la SCI du Martroy est condamnée aux dépens de l’incident, sans possibilité de récupération des frais engagés.

COUR D’APPEL

DE [Localité 6]

CHAMBRE CIVILE

ET

COMMERCIALE

N° RG 24/00968 – N° Portalis DBVQ-V-B7I-FQF7-11

La société SCI DU MARTROY, société civile immobilière au capital de 1.000 euros ayant son siège social [Adresse 2], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de SENS sous le n°532.862.547, prise en la personne de son gérant, domicilié de droit audit siège,

Représentant : Me Matthieu CIUTTI de la SELARL PERSEE, avocat au barreau de REIMS

APPELANTE AU PRINCIPAL

DEMANDERESSE A L’INCIDENT

La société SERVICES B, société à responsabilité limitée au capital de 7.622,45 euros ayant son siège social [Adresse 3], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Troyes sous le n°407.900.216, agissant poursuite et diligences de sa gérante, domiciliée de droit audit siège,

Représentant : Me Olivier PINCON, avocat au barreau de REIMS

INTIMEE AU PRINCIPAL

DEFENDERESSE A L’INCIDENT

La SCP MANDRON-MAILLARD-BELLET, société civile professionnelle titulaire d’un office notarial, ayant son siège social [Adresse 1], prise en la personne de son représentant légal,

Représentant : Me Xavier COLOMES de la SCP X.COLOMES S.COLOMES-MATHIEU-ZANCHI-THIBAULT, avocat au barreau de L’AUBE

INTIMEE AU PRINCIPAL

ORDONNANCE D’INCIDENT

DU : 14 janvier 2025

Christina DIAS DA SILVA, présidente de chambre, conseillère de la mise en état, assistée de Yelena MOHAMED-DALLAS, greffière ;

Après débats à l’audience du 10 décembre 2024, a rendu par mise à disposition au greffe, l’ordonnance contradictoire suivante :

Par jugement du 26 avril 2024, le tribunal judiciaire de Troyes a :

– déclaré irrecevable la SARL Services B en sa demande d’irrecevabilité,

– débouté la SCI du Martroy de l’ensemble de ses demandes,

– débouté la société Services B de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

– condamné la SCI du Martroy aux dépens et à payer la somme de 2 500 euros à la société Services B et celle de 2 500 euros à la SCP Mandron-Maillard-Bellet au titre de l’article de l’article 700 du code de procédure civile,

– rejeté les demandes de la SCP Mandron-Maillard-Bellet relative à l’exécution provisoire.

Par déclaration du 17 juin 2024, la SCI du Martroy a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions d’incident notifiées par voie électronique le 21 octobre 2024, la SCI du [Adresse 5] demande au conseiller de la mise en état de :

– prendre acte de son désistement d’action à l’encontre de la SCP Mandron-Maillard-Bellet,

– ordonner une mesure d’instruction prenant la forme d’une expertise judiciaire et donner à l’expert judiciaire la mission suivante :

– se rendre dans l’ensemble immobilier de la SCI du Martroy situé [Adresse 4],

– se faire communiquer tous documents utiles à l’accomplissement de sa mission,

– visiter les lieux,

– examiner les désordres allégués par la SCI du Martroy,

– rechercher l’origine des désordres,

– donner son avis sur l’impact des éventuels désordres invoqués sur la solidité de l’ouvrage et sur sa destination,

– fournir tous éléments techniques et de fait de nature à permettre à la juridiction saisie de déterminer les responsabilités encourues et d’évaluer les préjudices subis,

– indiquer et évaluer les travaux nécessaires à la réfection et chiffrer le coût des remises en état à l’aide de devis,

– ordonner que l’expertise sera mise en oeuvre et que l’expert accomplira sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile,

– fixer la provision à consigner au greffe, à titre d’avance sur les honoraires de l’expert dans le délai qui sera imparti pour ce faire,

– surseoir à statuer jusqu’au dépôt du rapport d’expertise,

– débouter la société Services B de l’ensemble de ses demandes,

– réserver les dépens.

Elle fait valoir que ses demandes tirées de la responsabilité de la société Services B ne sont pas nouvelles mais constituent des moyens nouveaux tendant aux mêmes fins que les demandes indemnitaires de première instance et ne sont affectées ni de forclusion ni de prescription.

Elle ajoute que le litige porte sur les conséquences indemnitaires de désordres compromettant la solidité de l’ouvrage ou le rendant impropre à sa destination ; que sa demande d’expertise avant dire droit est nécessaire pour trancher le fond du litige.

Aux termes de ses dernières conclusions d’incident notifiées par voie électronique le 31 octobre 2024, la société Services B demande au conseiller de la mise en état de :

– débouter la société du Martroy de sa demande d’expertise judiciaire,

– la dire recevable en son incident reconventionnel,

– déclarer prescrite la SCI du Martroy au titre de ses demandes développées tant au titre de la responsabilité contractuelle de droit commun qu’au titre de la garantie constructeur,

– déclarer irrecevable comme nouvelle en appel l’action de la SCI du Martroy fondée sur la responsabilité contractuelle de droit commun de la société Services B pour inexécution contractuelle, les premiers juges n’ayant été saisis que d’actions en annulation et en garanties pour vices du consentement et vices cachés, en application de l’article 654 du code de procédure civile,

– à titre subsidiaire,

– préciser la mission de l’expert judiciaire lequel devra donner son avis sur l’impact des éventuels désordres invoqués sur la solidité de l’ouvrage et sa destination,

– dans tous les cas,

– condamner la SCI du Martroy à lui payer la somme de 3 600 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens sous le bénéfice de la distraction.

Elle fait valoir que l’appelante, qui sollicite une mesure d’expertise judiciaire, ne produit aucune pièce justifiant de la réalité des désordres invoqués et de leur persistance.

Elle ajoute que les demandes de la SCI du Martroy, au titre de la responsabilité contractuelle, sont prescrites ; que la vente immobilière, sur le fondement de laquelle la responsabilité contractuelle est intentée, date du 13 août 2014 alors que l’assignation n’a été délivrée que le 8 juin 2022 ; qu’il en est de même s’agissant des demandes au titre de la garantie des constructeurs ; que les désordres invoqués ne compromettent pas la solidité de l’ouvrage et ne le rendent pas impropre à sa destination.

Enfin, elle explique qu’en première instance, la SCI du Martroy a demandé l’annulation de la vente pour vice du consentement et subsidiairement au titre de la garantie des vices cachés alors que devant la cour, elle agit en responsabilité contractuelle ; qu’il s’agit donc de demandes nouvelles irrecevables en appel.

Par conclusions notifiées le 30 septembre 2024, la SCP Mandron-Maillard-Bellet a accepté le désistement d’action à son égard.

Lors de l’audience, le conseiller de la mise en état a soulevé la question de sa compétence pour trancher les fins de non recevoir soulevés.

SUR CE,

– Sur le désistement partiel d’instance

Il résulte de l’article 400 du code de procédure civile que le désistement de l’appel ou de l’opposition est admis en toutes matières, sauf dispositions contraires.

La SCI du Martroy déclare se désister de son action dirigée à l’encontre de la SCP Mandron-Maillard-Bellet et cette dernière accepte ce désistement.

Il convient de constater le désistement partiel d’appel de la SCI du Martroy, de le dire parfait, de constater l’extinction de l’instance et le dessaisissement de la cour s’agissant du litige opposant la SCI du Martroy à la SCP Mandron-Maillard-Bellet.

– Sur les fins de non recevoir soulevées par la société Service B

La société service B soulève deux fins de non- recevoir. Elle invoque d’une part, l’irrecevabilité des demandes de la société du Martroy au visa de l’article 564 du code de procédure civile considérant qu’il s’agit de demandes nouvelles et d’autre part, la prescription de l’action de cette dernière.

Par application de l’article 907 du code de procédure civile renvoyant aux articles 780 à 807 dans leur version applicable à la cause, le conseiller de la mise en état est depuis sa désignation et jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation, pour statuer sur les fins de non-recevoir (article 789 6°).

Il est désormais de principe que le conseiller de la mise en état ne peut connaître ni des fins de non-recevoir qui ont été tranchées par le juge de la mise en état, ou par le tribunal, ni de celles qui, bien que n’ayant pas été tranchées en première instance, auraient pour conséquence, si elles étaient accueillies, de remettre en cause ce qui a été jugé au fond par le premier juge.

Le périmètre de compétence sur les fins de non-recevoir est réparti comme suit : la cour est compétente pour statuer sur les fins de non-recevoir relevant de l’appel et le conseiller de la mise en état est compétent pour celles touchant à la procédure d’appel.

En l’espèce, l’intimée soulève une fin de non-recevoir tenant à la prescription de l’action engagée par la SCI du Martroy tant sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun qu’au titre de la garantie constructeur. Cette fin de non- recevoir relève de l’appel et ne peut donc être examinée que par la cour.

La société Servies B invoque encore l’irrecevabilité des demandes de la SCI du Martroy fondées sur la responsabilité contractuelle et pour inexécution contractuelle en application de l’article 564 du code de procédure civile. L’examen des demandes des parties pour déterminer si elles relèvent ou non de la prohibition des demandes nouvelles en appel implique un examen de l’effet dévolutif, examen qui n’appartient lui aussi qu’à la cour et non au conseiller de la mise en état.

Il en résulte que le conseiller de la mise en état n’a pas le pouvoir juridictionnel de se prononcer sur ces fins de non- recevoir qui devront être soulevées devant la cour.

– Sur la demande d’expertise

Le conseiller de la mise en état a certes compétence pour ordonner une expertise. Il appartient cependant à celui qui demande une telle mesure d’instruction de justifier de son utilité d’y procéder.

En l’espèce, il est de bonne administration de la justice que la cour, si elle l’estime utile à la solution du litige, y procède au besoins d’office mais il est nécessaire de trancher auparavant les fins de non- recevoir soulevées par la société Services B.

Au demeurant, force est de constater que la SCI du Martroy ne produit aucune pièce à l’appui de sa demande d’expertise.

Dès lors la, SCI du Martroy est déboutée de sa demande d’expertise.

– Sur les frais de procédure et les dépens d’incident

La SCI du Martroy qui succombe principalement en sa demande d’incident, doit supporter les dépens de celui-ci.

L’équité commande de ne pas faire application dans le cadre du présent incident des dispositions prévues par l’article 700 du code de procédure, la demande sur ce fondement étant rejetée.

PAR CES MOTIFS,

Statuant par mise à disposition au greffe par ordonnance contradictoire,

Constate l’extinction de l’instance et le dessaisissement de la cour par l’effet du désistement partiel d’appel du litige opposant la SCI du Martroy à la SCP Mandron-Maillard-Bellet ;

Dit que le conseiller de la mise en état n’a pas le pouvoir de se prononcer sur les fins de non- recevoir soulevées par la société Services B ;

Déboute la SCI du Martroy de sa demande d’expertise ;

Condamne la SCI du Martroy aux dépens de l’incident ;

Rejette la demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.

Le greffier La présidente de chambre,

conseillère de la mise en état


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