Caducité de la déclaration d’appel : obligations de signification et indivisibilité du litige

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Caducité de la déclaration d’appel : obligations de signification et indivisibilité du litige

L’Essentiel : Le litige oppose la SA DOMINFRANCE à un jugement du tribunal judiciaire de Moulins, déclaré caduque par la cour d’appel de Riom. En réponse, la SA a formé un déféré pour contester cette caducité, sollicitant la recevabilité de son appel. Les intimés ont demandé la confirmation de l’ordonnance et une indemnité. La cour a statué sur la recevabilité de la requête, confirmant que la déclaration d’appel n’avait pas respecté les formalités légales, entraînant ainsi la caducité totale de l’appel. La cour a rejeté les demandes de la SA DOMINFRANCE et l’a condamnée aux dépens.

Contexte de l’affaire

Le litige concerne une déclaration d’appel formée par la SA DOMINFRANCE à l’encontre d’un jugement rendu le 24 février 2023 par le tribunal judiciaire de Moulins. Cette déclaration a été effectuée le 17 avril 2023, mais a été déclarée caduque par le Conseiller de la mise en état de la cour d’appel de Riom le 16 mai 2024, entraînant l’extinction de l’instance et la condamnation de la SA DOMINFRANCE aux dépens.

Déféré et demandes de la SA DOMINFRANCE

Suite à la caducité de sa déclaration d’appel, la SA DOMINFRANCE a formé un déféré le 28 mai 2024, demandant l’infirmation de l’ordonnance du 16 mai 2024. Elle a sollicité la recevabilité de sa déclaration d’appel, la constatation de la poursuite de l’instance, et a demandé que la procédure soit renvoyée à une prochaine audience de mise en état.

Réponse des intimés

Les conseils de Mme [V] [F] et M. [R] [I] ont réagi par conclusions le 4 juin 2024, demandant la confirmation de l’ordonnance déférée et la condamnation de la SA DOMINFRANCE à verser une indemnité de 2.000,00 € ainsi qu’aux dépens.

Décision de la cour

La cour a examiné la recevabilité de la requête en déféré et a confirmé que la déclaration d’appel de la SA DOMINFRANCE n’avait pas respecté les formalités requises par le code de procédure civile, notamment en ce qui concerne la signification à la SAS GROUPE BEAUMET. La cour a également souligné que la caducité de l’appel était totale en raison de l’indivisibilité du litige.

Conséquences de la décision

En conséquence, la cour a confirmé l’ordonnance du 16 mai 2024 dans son intégralité, rejetant les demandes supplémentaires des parties et condamnant la SA DOMINFRANCE à supporter l’intégralité des dépens de l’instance.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la portée de l’article 902 du code de procédure civile dans le cadre d’une déclaration d’appel ?

L’article 902 du code de procédure civile précise les diligences à accomplir après une déclaration d’appel. Il stipule que :

« Le greffier adresse aussitôt à chacun des intimés, par lettre simple, un exemplaire de la déclaration avec l’indication de l’obligation de constituer avocat.

En cas de retour au greffe de la lettre de notification ou lorsque l’intimé n’a pas constitué avocat dans un délai d’un mois à compter de l’envoi de la lettre de notification, le greffier en avise l’avocat de l’appelant afin que celui-ci procède par voie de signification de la déclaration d’appel.

À peine de caducité de la déclaration d’appel relevée d’office, la signification doit être effectuée dans le mois de l’avis adressé par le greffe ; cependant, si, entre-temps, l’intimé a constitué avocat avant la signification de la déclaration d’appel, il est procédé par voie de notification à son avocat.

À peine de nullité, l’acte de signification indique à l’intimé que, faute pour lui de constituer avocat dans un délai de quinze jours à compter de celle-ci, il s’expose à ce qu’un arrêt soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire et que, faute de conclure dans le délai mentionné à l’article 909, il s’expose à ce que ses écritures soient déclarées d’office irrecevables. »

Ainsi, la déclaration d’appel doit être accompagnée de la signification à tous les intimés, sous peine de caducité. Dans le cas présent, la société DOMINFRANCE n’a pas respecté cette obligation, ce qui a conduit à la caducité de son appel.

Quelles sont les conséquences de la caducité d’une déclaration d’appel ?

La caducité d’une déclaration d’appel entraîne l’extinction de l’instance. Cela signifie que l’appel n’est plus recevable et que la décision de première instance demeure définitive.

L’article 902, en précisant les formalités à respecter, souligne que la non-signification à un intimé peut entraîner cette caducité. En effet, la jurisprudence a établi que :

« La caducité de la déclaration d’appel a pour effet d’éteindre l’instance. »

Dans le cas de la SA DOMINFRANCE, le non-respect des formalités de signification a conduit à la confirmation de la caducité de son appel, ce qui a été validé par la cour d’appel.

Comment le principe de proportionnalité et le droit à un procès équitable sont-ils appliqués dans cette affaire ?

Le principe de proportionnalité et le droit à un procès équitable, tels que garantis par l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, doivent être respectés dans toutes les procédures judiciaires.

Dans cette affaire, la cour a considéré que la liberté d’intimer implique de respecter toutes les diligences et formalités prévues par la loi.

La cour a affirmé que :

« La liberté d’intimer a pour corollaire d’accomplir exhaustivement toutes les diligences et formalités par la loi à l’égard de la totalité des intimés. »

Ainsi, le non-respect des formalités de signification ne constitue pas une violation du droit à un procès équitable, car il est essentiel de garantir que tous les intimés soient informés et puissent se défendre.

La cour a donc jugé que la caducité de l’appel ne contrevenait pas aux droits de la défense, car la société DOMINFRANCE avait l’obligation de respecter les règles de procédure.

Quelles sont les implications de la liquidation judiciaire sur la capacité d’ester en justice ?

La liquidation judiciaire n’entraîne pas nécessairement la perte totale de la capacité d’ester en justice. En effet, une personne physique ou morale en liquidation peut conserver certains droits.

La cour a précisé que :

« Une personne physique ou morale en liquidation judiciaire peut ne pas perdre totalement sa capacité d’ester en justice dans la mesure où elle demeure toujours susceptible de conserver un certain nombre de droits propres. »

Dans le cas présent, la société DOMINFRANCE a intimé la SAS GROUPE BEAUMET, qui était en liquidation judiciaire, mais a omis de respecter les formalités de signification.

Cela a conduit à la caducité de son appel, car la société n’a pas pu se dispenser des obligations procédurales, même si la SAS GROUPE BEAUMET était en liquidation.

Quelles sont les conséquences financières pour la société DOMINFRANCE suite à cette décision ?

La société DOMINFRANCE, ayant succombé dans l’instance, est condamnée aux dépens.

L’article 696 du code de procédure civile stipule que :

« La partie qui succombe est condamnée aux dépens. »

Dans cette affaire, la cour a confirmé que la société DOMINFRANCE supportera les entiers dépens de l’instance, ce qui inclut tous les frais engagés par les parties dans le cadre de la procédure.

De plus, la demande d’indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile a été rejetée, car l’incident avait été soulevé à l’initiative du greffe.

Ainsi, la société DOMINFRANCE se retrouve non seulement avec un appel caduc, mais également avec des conséquences financières significatives.

COUR D’APPEL

DE RIOM

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

Du 14 janvier 2025

N° RG 24/00854 – N° Portalis DBVU-V-B7I-GF27

-PV- Arrêt n°

S.A. DOMOFINANCE / [V] [F], [R] [I], S.A.S. GROUPE BEAUMET ENERGIES, S.E.L.A.R.L. BRMJ en qualité de liquidateur judiciaire de la SAS GROUPE BEAUMET ENERGIE

déféré d’une ordonnance numéro 235 rendue le 16 mai 2024 par le conseiller de la mise en état de la troisième chambre civile de la cour d’appel de Riom (RG 23/00653)

(Jugement Au fond, origine Juge des contentieux de la protection de MOULINS, décision attaquée en date du 24 Février 2023, enregistrée sous le n° 11-20-0183)

Arrêt rendu le MARDI QUATORZE JANVIER DEUX MILLE VINGT CINQ

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

M. Philippe VALLEIX, Président

Mme Laurence BEDOS, Conseiller

Mme Clémence CIROTTE,

En présence de :

Mme Marlène BERTHET, greffier lors de l’appel des causes et du prononcé

ENTRE :

S.A. DOMOFINANCE

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentée par Me Jean-Michel DE ROCQUIGNY de la SCP COLLET DE ROCQUIGNY CHANTELOT BRODIEZ GOURDOU & ASSOCIES, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

et par Me Bernard BOULLOUD, avocat au barreau de GRENOBLE

APPELANTE et défenderesse au déféré

ET :

Mme [V] [F]

[Adresse 8]

[Localité 1]

et

M. [R] [I]

[Adresse 8]

[Localité 1]

Représentés par Me Angeline TOTARO, avocat au barreau de MOULINS

INTIMES et demandeurs au déféré

S.A.S. GROUPE BEAUMET ENERGIES

[Adresse 3]

[Localité 5]

non représentée

S.E.L.A.R.L. BRMJ en qualité de liquidateur judiciaire de la SAS GROUPE BEAUMET ENERGIE

[Adresse 7]

[Localité 4]

non représentée

INTIMES

DÉBATS :

L’affaire a été débattue à l’audience publique du 04 novembre 2024, en application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. VALLEIX et Mme BEDOS, rapporteurs.

ARRÊT : PAR DEFAUT

Prononcé publiquement le 14 janvier 2025 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par M. VALLEIX, président et par Mme BERTHET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

Suivant une ordonnance n° RG-23/00653 rendue le 16 mai 2024 au visa de l’article 902 du code de procédure civile, le Conseiller de la mise en état de la 3ème Chambre civile et commerciale de la cour d’appel de Riom a prononcé la caducité d’une déclaration d’appel formalisé par le RPVA le 17 avril 2023 par le conseil de la SA DOMINFRANCE à l’encontre d’un jugement rendu le 24 février 2023 par le Juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Moulins dans une instance opposant Mme [V] [F] et M. [R] [I] à l’encontre de la SA DOMOFINANCE et de la SAS GROUPE BEAUMET ainsi que de la SELARL BMRJ. Cette même décision a rappelé que la caducité de la déclaration d’appel avait pour effet d’éteindre l’instance et dit que la SA DOMINFRANCE supportera les dépens de l’instance.

Suivant une requête communiquée par le RPVA le 28 mai 2024, le conseil de la SA DOMINFRANCE a formé un déféré à l’encontre de cette ordonnance du 16 mai 2024, demandant de :

– au visa de l’article 6 de la Commission européenne des droits de l’homme et du principe de proportionnalité garantie par la Commission européenne des droits de l’homme ;

– déclarer sa requête recevable et fondée ;

– infirmer cette ordonnance du 16 mai 2024 en toutes ses dispositions et statuant de nouveau ;

– [à titre principal], déclarer recevable sa déclaration d’appel à l’encontre du jugement rendu le 24 février 2023 par le Juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Moulins ;

– à titre subsidiaire, constatait la poursuite de l’instance égard du liquidateur de la société GROUPE BEAUMET ÉNERGIE, seul en capacité de représenter juridiquement le vendeur dépourvu de toute capacité d’ester en justice ;

– en tout état de cause, renvoyer la procédure à la prochaine audience de mise en état et statuer ce que de droit sur les dépens.

– statuer ce que de droit sur les dépens.

Par conclusions communiquées par le RPVA le 4 juin 2024, le conseil de Mme [V] [F] et M. [R] [I] a demandé de :

– au visa de l’article 902 du code de procédure civile ;

– confirmer l’ordonnance déférée du Conseiller de la mise en état ;

– condamner la société DOMINFRANCE à leur payer une indemnité de 2.000,00 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamner la société DOMINFRANCE aux dépens.

Après évocation de cette affaire et clôture des débats lors de l’audience civile collégiale en bi-rapporteur du 4 novembre 2024 à 14h00, au cours de laquelle chacun des conseils des parties a réitéré ses précédentes écritures, la décision suivante a été mise en délibéré au 14 janvier 2025.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Le décret n° 2023-1391 du 29 décembre 2023 portant simplification de la procédure d’appel en matière civile est en vigueur depuis le 1er septembre 2024 pour les instances d’appel introduites à compter de cette dernière date. Compte tenu de la date précitée de la déclaration d’appel, les anciennes dispositions du code de procédure civile demeurent applicables.

La requête en référé apparaît normalement recevable, ce qui n’est au demeurant pas contesté par les défendeurs au déféré

Dès lors que la déclaration d’appel est effectuée dans les conditions prévues à l’article 901 du code de procédure civile, l’article 902 du même code prévoit les diligences suivantes :

« Le greffier adresse aussitôt à chacun des intimés, par lettre simple, un exemplaire de la déclaration avec l’indication de l’obligation de constituer avocat.

En cas de retour au greffe de la lettre de notification ou lorsque l’intimé n’a pas constitué avocat dans un délai d’un mois à compter de l’envoi de la lettre de notification, le greffier en avise l’avocat de l’appelant afin que celui-ci procède par voie de signification de la déclaration d’appel.

À peine de caducité de la déclaration d’appel relevée d’office, la signification doit être effectuée dans le mois de l’avis adressé par le greffe ; cependant, si, entre-temps, l’intimé a constitué avocat avant la signification de la déclaration d’appel, il est procédé par voie de notification à son avocat.

À peine de nullité, l’acte de signification indique à l’intimé que, faute pour lui de constituer avocat dans un délai de quinze jours à compter de celle-ci, il s’expose à ce qu’un arrêt soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire et que, faute de conclure dans le délai mentionné à l’article 909, il s’expose à ce que ses écritures soient déclarées d’office irrecevables. »

En application des dispositions processuelles qui précèdent, suite à la déclaration d’appel du 17 avril 2023 de la société DOMINFRANCE, le greffe de la 3ème Chambre civile commerciale a adressé à cette dernière le 2 mai 2023 un avis d’avoir à signifier la déclaration d’appel à la SAS GROUPE BEAUMET. Or, la société DOMINFRANCE n’a pas satisfait à cette obligation, n’ayant diligenté cette signification qu’au liquidateur de la SAS GROUPE BEAUMET alors qu’elle avait également intimé cette dernière dans sa déclaration d’appel.

La société DOMINFRANCE confirme cette carence, indiquant que le commissaire de justice qu’elle a mandaté n’a pas jugé utile de signifier à la SAS GROUPE BEAUMET la déclaration d’appel en raison de sa situation de liquidation judiciaire. Elle estime en tout état de cause suffisante la signification faite au liquidateur judiciaire de la SAS GROUPE BEAUMET.

En l’occurrence, dès lors que la société DOMINFRANCE a décidé d’intimer la société DOMINFRANCE dans sa déclaration d’appel aux côtés de Mme [V] [F], de M. [R] [I] et de la SELARL BRMJ en qualité de liquidateur judiciaire de la SAS GROUPE BEAUMET, elle ne pouvait aucunement se dispenser des formalités prévues à l’article 902 du code de procédure civile à l’égard de cette dernière qui n’avait pas constitué avocat. De plus, une personne physique ou morale en liquidation judiciaire peut ne pas perdre totalement sa capacité d’ester en justice dans la mesure où elle demeure toujours susceptible de conserver un certain nombre de droits propres.

Par ailleurs, la liberté d’intimer a pour corollaire d’accomplir exhaustivement toutes les diligences et formalités par la loi à l’égard de la totalité des intimés, ce qui n’apparaît en conséquence pas contraire en matière de droit d’appel à l’article 6 sur le procès équitable et au principe de proportionnalité de la Convention européenne des droits de l’homme.

Enfin, l’indivisibilité du litige s’oppose à ce que la procédure d’appel se poursuive à l’égard du seul liquidateur judiciaire de la SAS GROUPE BEAUME, la caducité d’appel devant dès lors être totale.

L’ordonnance de mise en état déférée sera en conséquence confirmée en toutes ses dispositions.

L’incident ayant été soulevé à l’initiative du Greffe, il n’y a pas lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code procédure civile à l’égard de Mme [V] [F] et M. [R] [I]. Leur demande de défraiement formé sur ce chef sera en conséquence rejetée.

Succombant à l’instance, la société DOMINFRANCE en supportera les entiers dépens.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

STATUANT PAR DEFAUT,

DÉCLARE RECEVABLE la requête en déféré formé par la SAS DOMINFRANCE.

CONFIRME en toutes ses dispositions l’ordonnance n° RG-23/00653 rendue le 16 mai 2024 par le Conseiller de la mise en état de la 3ème Chambre civile et commerciale de la cour d’appel de Riom.

REJETTE le surplus des demandes des parties.

CONDAMNE la SAS DOMINFRANCE aux entiers dépens de l’instance.

Le greffier Le président


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