L’Essentiel : Monsieur [B] [W], de nationalité tunisienne, a été placé en rétention administrative le 3 janvier 2025, suite à un arrêté de refus de séjour. Le tribunal judiciaire de Meaux a déclaré irrecevable la demande de prolongation de la préfecture, introduite hors délai. Le préfet a interjeté appel, mais la cour a confirmé l’ordonnance initiale, soulignant que la saisine du magistrat devait intervenir dans les quatre jours suivant la notification. En conséquence, la cour a ordonné la remise de l’ordonnance au procureur général, précisant qu’un pourvoi en cassation pouvait être formé dans un délai de deux mois.
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Contexte de l’affaireMonsieur [B] [W], de nationalité tunisienne, a été placé en rétention administrative par un arrêté préfectoral notifié le 3 janvier 2025. Cette décision était fondée sur un arrêté de refus de séjour (OQTF) daté du 1er août 2024. La préfecture de la Seine-Saint-Denis a ensuite demandé une prolongation de cette rétention. Décision du tribunalLe 8 janvier 2025, le tribunal judiciaire de Meaux a déclaré la requête de prolongation de la préfecture irrecevable, considérant qu’elle avait été introduite hors délai. En conséquence, le tribunal a également déclaré irrecevable le recours de Monsieur [B] [W] et a décidé qu’il n’y avait pas lieu de statuer sur les autres moyens soulevés. Appel du préfetLe préfet de la Seine-Saint-Denis a interjeté appel de cette décision le 9 janvier 2025. L’audience a été convoquée et l’avocat de Monsieur [B] [W] a demandé la confirmation de l’ordonnance initiale, tandis que le conseil du préfet a plaidé pour son infirmation. Analyse des délais de rétentionLa cour a examiné les dispositions du code de l’entrée et du séjour des étrangers, précisant que la rétention ne peut excéder quatre jours sans autorisation du magistrat. En l’espèce, le placement en rétention ayant été notifié le 3 janvier, le délai pour saisir le magistrat expirait le 6 janvier à minuit. Or, la saisine a eu lieu le 7 janvier, ce qui a conduit à l’irrecevabilité de la requête de prolongation. Conclusion de la courLa cour a confirmé l’ordonnance du tribunal de Meaux, en raison du non-respect des délais de saisine. Elle a ordonné la remise immédiate de l’ordonnance au procureur général, précisant que cette décision n’était pas susceptible d’opposition et qu’un pourvoi en cassation pouvait être formé dans un délai de deux mois. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la base légale pour le placement en rétention administrative d’un étranger ?Le placement en rétention administrative d’un étranger est régi par l’article L.741-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA). Cet article stipule que : « L’autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quatre jours, l’étranger qui se trouve dans l’un des cas prévus à l’article L. 731-1 lorsqu’il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l’exécution de la décision d’éloignement et qu’aucune autre mesure n’apparaît suffisante à garantir efficacement l’exécution effective de cette décision. » Il est important de noter que le risque de soustraction est apprécié selon les critères de l’article L. 612-3, qui évalue la menace pour l’ordre public que représente l’étranger. En résumé, le placement en rétention est justifié par l’absence de garanties de représentation et la nécessité de prévenir un risque d’évasion. Quelles sont les conditions pour prolonger la rétention au-delà de quatre jours ?La prolongation de la rétention administrative au-delà de quatre jours est encadrée par l’article L.742-1 du CESEDA, qui précise que : « Le maintien en rétention au-delà de quatre jours à compter de la notification de la décision de placement initiale peut être autorisé, dans les conditions prévues au présent titre, par le magistrat du siège saisi à cette fin par l’autorité administrative. » Cela signifie que l’autorité administrative doit saisir le magistrat du siège pour obtenir une prolongation, et cette demande doit être faite dans les délais impartis. De plus, l’article L.743-4 stipule que : « Le magistrat du siège statue, par ordonnance, dans les quarante-huit heures suivant l’expiration du délai fixé au premier alinéa de l’article L. 741-10 ou sa saisine en application des articles L. 742-1 et L. 742-4 à L. 742-7. » Ainsi, la prolongation de la rétention nécessite une décision judiciaire dans un délai précis, garantissant ainsi le contrôle de la légalité de la mesure. Comment se calcule le délai de rétention administrative ?Le calcul du délai de rétention administrative est précisé par l’avis rendu par la 1ère chambre civile de la Cour de cassation le 07 janvier 2025. Selon cet avis : « D’une part, que, conformément aux articles L. 742-1 et R. 742-1 du CESEDA et les articles 641 et 642 du code de procédure civile n’étant pas applicables, le délai de rétention de quatre jours court à compter de la notification du placement en rétention, de sorte que le premier jour doit être décompté. » Il est également précisé que : « Exprimé en jours, ce délai expire le dernier jour à vingt-quatre heures, sans que ne soit applicable la prolongation du délai expirant un dimanche ou un jour férié. » Ainsi, pour un placement en rétention notifié le 1er janvier à 15h, le délai de quatre jours s’achève le 4 janvier à 24h. Cela signifie que le respect des délais est crucial pour la légalité de la rétention. Quelles sont les conséquences d’une saisine tardive du magistrat du siège ?La saisine tardive du magistrat du siège a des conséquences directes sur la validité de la prolongation de la rétention. Dans l’affaire en question, le magistrat a été saisi le 07 janvier 2025, soit après l’expiration du délai de quatre jours, ce qui a conduit à la déclaration d’irrecevabilité de la requête. En effet, l’article L.743-4 stipule que : « Le magistrat du siège statue, par ordonnance, dans les quarante-huit heures suivant l’expiration du délai fixé au premier alinéa de l’article L. 741-10 ou sa saisine en application des articles L. 742-1 et L. 742-4 à L. 742-7. » Dans ce cas, la saisine tardive a entraîné l’irrecevabilité de la demande de prolongation, confirmant ainsi l’ordonnance initiale qui déclarait la requête de la préfecture irrecevable. Cela souligne l’importance de respecter les délais légaux pour garantir la légalité des mesures de rétention. |
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
L. 552-1 et suivants du Code de l’entrée et du séjour
des étrangers et du droit d’asile
ORDONNANCE DU 11 janvier 2025
(1 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général et de décision : B N° RG 25/00139 – N° Portalis 35L7-V-B7J-CKS7T
Décision déférée : ordonnance rendue le 08 janvier 2025, à 19h54, par le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Meaux
Nous, Elise Thevenin-Scott, conseillère à la cour d’appel de Paris, agissant par délégation du premier président de cette cour, assistée de Camille Besson, greffière aux débats et au prononcé de l’ordonnance,
LE PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS
représenté par Me Nicolas Suarez Pedroza, du cabinet Actis, avocat au barreau de Val-de-Marne
INTIMÉ
M. [B] [W]
né le 09 juin 1995 à [Localité 2], de nationalité tunisienne
demeurant Chez Mme [N] [K] – [Adresse 1]
représenté par Me Ruben Garcia,avocats au barreau de Paris, avocat choisi
LIBRE, non comparant, représenté, convoqué par le commissariat territorialement à l’adresse ci-dessus indiquée ;
MINISTÈRE PUBLIC, avisé de la date et de l’heure de l’audience,
ORDONNANCE :
– contradictoire,
– prononcée en audience publique,
– Vu l’ordonnance du 08 janvier 2025 du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Meaux ordonnant la jonction de la procédure introduite par le recours de M. [B] [W] enregistré sous le n° RG 25/00086 et celle introduite par la requête du préfet de la Seine-Saint-Denis enregistrée sous le n° RG 25/00073, déclarant le recours de M. [B] [W] irrecevable, disant n’y avoir lieu à statuer sur la requête de M. [B] [W], déclarant irrecevable la requête du préfet de la Seine-Saint-Denis, disant n’y avoir lieu à statuer sur les moyens d’irrégularité soulevés par M. [B] [W] et disant n’y avoir lieu à statuer sur la prolongation de la rétention administrative de M. [B] [W] ;
– Vu l’appel motivé interjeté le 09 janvier 2025, à 17h06, par le conseil du préfet de la Seine-Saint-Denis ;
– Vu l’avis d’audience donné le 10 janvier 2025 à 11h16, à Me Ruben Garcia, avocats au barreau de Paris conseil choisi de M. [B] [W], qui ne se présente pas ;
– Vu les conclusions de Me Garcia du 10 janvier 2025 à 14h06 ;
– Après avoir entendu les observations du conseil du préfet de la Seine-Saint-Denis tendant à l’infirmation de l’ordonnance ;
– Vu les observations de M. [B] [W] assisté de son avocat, qui demande la confirmation de l’ordonnance ;
Monsieur [C] [I] [W], né le 09 juin 1995 à [Localité 2] (Tunisie), a été placé en rétention administrative par arrêté préfectoral notifié le 03 janvier 2025 à 15h56 sur la base d’un arrêté préfectoral portant OQTF du 1er août 2024.
La requête de la préfecture de Seine-Saint-Denis aux fins de première prolongation a été déclarée irrecevable comme étant hors délai par ordonnance du magistrat du siège en charge du contrôle des mesures restrictives et privatives de liberté de Meaux en date du 08 janvier 2025.
La préfecture a interjeté appel.
Réponse de la cour :
Il ressort de la lecture de l’article L.741-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile que l’autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quatre jours, l’étranger qui se trouve dans l’un des cas prévus à l’article L. 731-1 lorsqu’il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l’exécution de la décision d’éloignement et qu’aucune autre mesure n’apparaît suffisante à garantir efficacement l’exécution effective de cette décision.
Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l’article L. 612-3 ou au regard de la menace pour l’ordre public que l’étranger représente.
L’article L.742-1 du même code ajoute que le maintien en rétention au-delà de quatre jours à compter de la notification de la décision de placement initiale peut être autorisé, dans les conditions prévues au présent titre, par le magistrat du siège saisi à cette fin par l’autorité administrative.
L’article L.743-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile énonce, enfin, que le magistrat du siège statue, par ordonnance, dans les quarante-huit heures suivant l’expiration du délai fixé au premier alinéa de l’article L. 741-10 ou sa saisine en application des articles L. 742-1 et L. 742-4 à L. 742-7.
Le 07 janvier 2025, la 1ère chambre civile de la Cour de cassation a rendu l’avis suivant sur la computation des délais en matière de rétention administrative et de saisine du magistrat du siège en charge du contrôle des mesures restrictives et privatives de liberté aux fins de prolongation :
« – d’une part, que, conformément aux articles L. 742-1 et R. 742-1 du CESEDA et les articles 641 et 642 du code de procédure civile n’étant pas applicables, le délai de rétention de quatre jours court à compter de la notification du placement en rétention, de sorte que le premier jour doit être décompté;
– d’autre part, qu’exprimé en jours, ce délai expire le dernier jour à vingt-quatre heures, sans que ne soit applicable la prolongation du délai expirant un dimanche ou un jour férié.
Ainsi, pour un placement en rétention notifié le 1er janvier à quinze heures, le délai de quatre jours s’achèvera le 4 janvier à vingt-quatre heures. »
En l’espèce, l’arrêté de placement en rétention concernant Monsieur [C] [I] [W] a été notifié le 03 janvier 2025 à 15h56. Le délai de saisine du magistrat du siège en charge du contrôle des mesures restrictives et privatives de liberté expirait donc le 06 janvier à 24h00.
Or, le magistrat du siège a été saisi le 07 janvier 2025 à 10h47, au-delà du délai de quatre jours. La requête est donc irrecevable et la décision sera confirmée.
CONFIRMONS l’ordonnance
ORDONNONS la remise immédiate au procureur général d’une expédition de la présente ordonnance.
Fait à Paris le 11 janvier 2025 à
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
REÇU NOTIFICATION DE L’ORDONNANCE ET DE L’EXERCICE DES VOIES DE RECOURS:
Pour information:
L’ordonnance n’est pas susceptible d’opposition.
Le pourvoi en cassation est ouvert à l’étranger, à l’autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d’attente ou la rétention et au ministère public.
Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.
Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l’avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.
Le préfet ou son représentant L’avocat de l’intéressé
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