L’Essentiel : La S.A.R.L. CHABNAM a donné en bail commercial à la S.A.R.L. AU BON PRIX un local pour 9 ans, avec un loyer annuel de 15.000 euros. En septembre 2019, CHABNAM a signifié un congé pour mars 2020, tout en proposant un renouvellement à 24.000 euros. Face à un désaccord sur le loyer, CHABNAM a demandé une fixation à 30.000 euros, entraînant une assignation devant le juge en novembre 2023. L’audience a eu lieu le 7 octobre 2024, et le juge a ordonné une expertise pour déterminer la valeur locative, tout en prévoyant une médiation entre les parties.
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Contexte du Bail CommercialLa S.A.R.L. CHABNAM a donné à bail commercial à la S.A.R.L. AU BON PRIX un local pour une durée de 9 ans, débutant le 1er janvier 2009 et se terminant le 31 décembre 2017, avec un loyer annuel de 15.000 euros. Ce bail était destiné à l’exploitation d’une activité de commerce d’alimentation générale. Congé et Offre de RenouvellementLe 27 septembre 2019, la S.A.R.L. CHABNAM a signifié un congé à la S.A.R.L. AU BON PRIX pour le 31 mars 2020, tout en proposant un renouvellement du bail pour 9 années supplémentaires à partir du 1er avril 2020, avec un loyer annuel proposé de 24.000 euros. Litige sur le Montant du LoyerFace à l’absence d’accord sur le montant du loyer, la S.A.R.L. CHABNAM a notifié un mémoire préalable le 30 mars 2022, demandant une fixation du loyer à 30.000 euros. Elle a ensuite assigné la S.A.R.L. AU BON PRIX devant le juge des loyers commerciaux en novembre 2023. Demandes des PartiesLa S.A.R.L. CHABNAM a demandé au juge de fixer le loyer à 30.000 euros, de déclarer la S.A.R.L. AU BON PRIX irrecevable dans ses demandes, et de condamner cette dernière à payer des rappels de loyers avec intérêts. En revanche, la S.A.R.L. AU BON PRIX a demandé le maintien du loyer à 17.217,39 euros, en se basant sur les règles de plafonnement. Audience et DécisionL’affaire a été entendue le 7 octobre 2024, avec une décision mise en délibéré pour le 13 janvier 2025. Le juge a constaté le principe du renouvellement du bail pour 9 ans à partir du 1er avril 2020. Fixation du LoyerLe juge a décidé que le loyer du bail renouvelé doit être fixé à la valeur locative, écartant ainsi la demande de plafonnement de la S.A.R.L. AU BON PRIX. Une mesure d’expertise judiciaire a été ordonnée pour déterminer cette valeur locative. Mesures Accessoires et MédiationLe juge a également prévu une médiation entre les parties pour tenter de parvenir à un accord, tout en réservant les demandes relatives aux dépens et aux frais irrépétibles. La décision a été assortie de l’exécution provisoire. |
Q/R juridiques soulevées :
Quel est le principe du renouvellement du contrat de bail commercial ?Le principe du renouvellement du contrat de bail commercial est établi par l’article L. 145-9 du Code de commerce, qui stipule que : « Par dérogation aux articles 1736 et 1737 du code civil, les baux de locaux soumis au présent chapitre ne cessent que par l’effet d’un congé donné six mois à l’avance ou d’une demande de renouvellement. » Cela signifie qu’un bail commercial ne peut être résilié que par un congé donné dans un délai de six mois ou par une demande de renouvellement. En outre, l’article L. 145-11 précise que : « Le bailleur qui, sans être opposé au principe du renouvellement, désire obtenir une modification du prix du bail doit, dans le congé prévu à l’article L. 145-9 ou dans la réponse à la demande de renouvellement prévue à l’article L. 145-10, faire connaître le loyer qu’il propose, faute de quoi le nouveau prix n’est dû qu’à compter de la demande qui en est faite ultérieurement suivant des modalités définies par décret en Conseil d’État. » Ainsi, le bailleur doit indiquer le loyer proposé lors de la notification du congé, sinon le loyer ne pourra être modifié qu’à une date ultérieure. Comment est déterminé le montant du loyer du bail renouvelé ?Le montant du loyer du bail renouvelé est régi par l’article L. 145-34 du Code de commerce, qui stipule que : « À moins d’une modification notable des éléments mentionnés aux 1° à 4° de l’article L. 145-33, le taux de variation du loyer applicable lors de la prise d’effet du bail à renouveler, si sa durée n’est pas supérieure à neuf ans, ne peut excéder la variation, intervenue depuis la fixation initiale du loyer du bail expiré, de l’indice trimestriel des loyers commerciaux ou de l’indice trimestriel des loyers des activités tertiaires mentionnés aux premier et deuxième alinéas de l’article L. 112-2 du code monétaire et financier, publiés par l’Institut national de la statistique et des études économiques. » Cela signifie que, en l’absence de modifications notables, le loyer ne peut augmenter que dans la limite de l’évolution de l’indice des loyers commerciaux. Cependant, si les parties ont convenu d’une clause spécifique dans le contrat de bail, comme le stipule l’article 1134 du Code civil : « Les conventions tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi. » Dans ce cas, les parties peuvent convenir que le loyer sera fixé à la valeur locative, ce qui permettrait d’écarter le plafonnement prévu par la loi. Quelles sont les conséquences de la demande de déplafonnement du loyer ?La demande de déplafonnement du loyer est soumise aux dispositions de l’article L. 145-34 du Code de commerce, qui précise que : « À moins d’une modification notable des éléments mentionnés aux 1° à 4° de l’article L. 145-33, le taux de variation du loyer applicable lors de la prise d’effet du bail à renouveler, si sa durée n’est pas supérieure à neuf ans, ne peut excéder la variation, intervenue depuis la fixation initiale du loyer du bail expiré… » Si le bailleur souhaite un loyer supérieur à celui fixé par le plafonnement, il doit prouver qu’il existe des modifications notables des facteurs locaux de commercialité. En l’absence de telles modifications, le juge peut débouter la demande de déplafonnement, comme cela a été le cas dans l’affaire en question, où la S.A.R.L. AU BON PRIX a été déboutée de sa demande de plafonnement du loyer. Quelles sont les mesures accessoires prévues par le juge ?Les mesures accessoires sont régies par l’article 696 du Code de procédure civile, qui stipule que : « La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie. » De plus, l’article 700 du même code précise que : « Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer : 1°) à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. » Dans le cas présent, le juge a réservé les demandes formées au titre des frais irrépétibles et des dépens, ce qui signifie que ces questions seront tranchées ultérieurement, après le dépôt du rapport d’expertise. Le juge a également ordonné une mesure d’expertise judiciaire pour déterminer la valeur locative, ce qui est une pratique courante dans les litiges relatifs aux baux commerciaux. |
JUDICIAIRE
DE PARIS
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Loyers commerciaux
N° RG 24/05413
N° Portalis 352J-W-B7I-C4WV6
N° MINUTE : 1
Assignation du :
26 Mars 2024
Jugement avant dire droit
[1]
[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :
Expert : [Z] [B][2]
[2]
[Adresse 5]
[Localité 9]
JUGEMENT
rendu le 13 Janvier 2025
DEMANDERESSE
S.A.R.L. CHABNAM
[Adresse 3]
[Localité 8]
représentée par Maître Régis HALLARD, avocat au barreau des HAUTS-DE-SEINE, avocat plaidant, vestiaire #NAN702
DEFENDERESSE
S.A.R.L. AU BON PRIX
[Adresse 4]
[Localité 10]
représentée par Maître Ahmed MAALEJ, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #C0984
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Sandra PERALTA, Vice-Présidente, Juge des loyers commerciaux
Siégeant en remplacement de Monsieur le Président du Tribunal judiciaire de Paris, conformément aux dispositions de l’article R.145-23 du code de commerce ;
assistée de Camille BERGER, Greffière
DEBATS
A l’audience du 07 Octobre 2024 tenue publiquement
JUGEMENT
Rendu publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort
Par acte sous signature privée en date du 30 avril 2009, la S.A.R.L. CHABNAM, a donné à bail commercial renouvelé à la S.A.R.L. AU BON PRIX, un local, sis [Adresse 4] à [Localité 10] pour une durée de 9 ans à compter du 1er janvier 2009 pour se terminer le 31 décembre 2017, moyennant un loyer principal annuel de 15.000 euros, aux fins d’y exploiter une activité de “COMMERCE D’ALIMENTATION GENERALE ET TOUT COMMERCE LIE A CETTE ACTIVITE-ÉPICERIE FINE, BOISSON ET VENTE A EMPORTER”.
Par acte d’huissier en date du 27 septembre 2019, la S.A.R.L. CHABNAM a fait signifier à la S.A.R.L. AU BON PRIX un congé pour le 31 mars 2020 portant offre de renouvellement du contrat de bail commercial pour une durée de 9 années à compter du 1er avril 2020, en proposant que le prix du bail renouvelé soit fixé à la somme annuelle de 24.000 euros hors taxes et hors charges.
À défaut d’accord sur le montant des loyers, la S.A.R.L. CHABNAM a par acte d’huissier en date du 30 mars 2022 notifié à la S.A.R.L. AU BON PRIX un mémoire préalable comportant demande de fixation du prix du bail renouvelé à la somme annuelle de 30.000 euros hors taxes et hors charges, puis l’a, par exploit d’huissier en date du 7 novembre 2023, fait assigner devant le juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire de Paris.
Par exploit d’huissier en date du 26 mars 2024, la S.A.R.L. CHABNAM a fait assigner la S.A.R.L. AU BON PRIX devant le juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire de Paris.
Aux termes de son dernier mémoire, dont la notification par lettre recommandée n’est pas contestée et remis au greffe par RPVA le 4 octobre 2024, la S.A.R.L. CHABNAM demande au juge des loyers commerciaux, au visa des articles L. 145-33 et L. 145-34 du code de commerce de :
– juger que le loyer du bail en renouvellement au 1er avril 2020 doit être fixé à la valeur locative,
– juger la S.A.R.L. AU BON PRIX irrecevable et en tout état de cause mal fondée en l’ensemble de ses demandes et l’en débouter,
– fixer à 30.000 euros par an en principal le loyer dû par la S.A.R.L. AU BON PRIX à la S.A.R.L. CHABNAM pour le renouvellement du bail portant sur les locaux sis [Adresse 4] à [Localité 10] à compter du 1er avril 2020,
– juger que la S.A.R.L. AU BON PRIX devra régler les rappels de loyers depuis le 1er avril 2020, avec intérêts au taux légal à compter du 1er avril 2020 puis à compter de chaque échéance trimestrielle, et capitalisation des intérêts échus depuis plus d’un an,
– subsidiairement, désigner tel expert qu’il plaira à Madame ou Monsieur le Président avec pour mission de donner son avis sur la valeur locative,
– dans ce cas, fixer à titre provisionnel le loyer dû par la S.A.R.L. AU BON PRIX pendant toute la durée de la procédure à la somme annuelle de 30.000 euros hors taxes et hors charges, et subsidiairement à celle de 17.217,39 euros hors charges et hors taxes,
– condamner la S.A.R.L. AU BON PRIX au paiement d’une somme de 10.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– la condamner aux entiers dépens.
Aux termes de son dernier mémoire dont la notification par lettre recommandée n’est pas contestée, la S.A.R.L. AU BON PRIX sollicite du juge des loyers commerciaux, sur le fondement des articles L. 145-33 et L.145-34 du code de commerce, de :
– débouter la S.A.R.L. CHABNAM de sa demande de déplafonnement du loyer du bail renouvelé à compter du 1er avril 2020,
– fixer le loyer des locaux loués sis [Adresse 4] à [Localité 10] à la somme de 17.217,39 euros par an en principal en application des règles du plafonnement instituées par les articles L. 145-34 du code de commerce et ce, pour un renouvellement de bail d’une durée de neuf années à compter du 1er avril 2020, les autres clauses et conditions du bail expiré demeurant inchangées, à l’exception de l’application de plein droit des dispositions d’ordre public instaurées depuis la prise d’effet du bail expiré,
A titre subsidiaire et dans l’hypothèse où le tribunal ne pourrait statuer de plano et qu’une mesure d’instruction doit être ordonnée,
-fixer le loyer provisionnel pendant la durée de l’instance à la somme de 17.217,39 euros par an et en principal.
L’affaire a été retenue à l’audience de plaidoirie du 7 octobre 2024, et la décision a été mise en délibéré au 13 janvier 2025, les parties en ayant été avisées.
Sur l’action en fixation du loyer du bail renouvelé
Sur le principe du renouvellement du contrat de bail commercial
Aux termes des dispositions du premier alinéa de l’article L. 145-9 du code de commerce, par dérogation aux articles 1736 et 1737 du code civil, les baux de locaux soumis au présent chapitre ne cessent que par l’effet d’un congé donné six mois à l’avance ou d’une demande de renouvellement.
En outre, en application des dispositions de l’article L. 145-11 du même code, le bailleur qui, sans être opposé au principe du renouvellement, désire obtenir une modification du prix du bail doit, dans le congé prévu à l’article L. 145-9 ou dans la réponse à la demande de renouvellement prévue à l’article L.145-10, faire connaître le loyer qu’il propose, faute de quoi le nouveau prix n’est dû qu’à compter de la demande qui en est faite ultérieurement suivant des modalités définies par décret en Conseil d’État.
Enfin, en vertu des dispositions des premier et troisième alinéas de l’article L.145-12 dudit code, la durée du bail renouvelé est de neuf ans sauf accord des parties pour une durée plus longue. Le nouveau bail prend effet à compter de l’expiration du bail précédent, ou, le cas échéant, de sa prolongation, cette dernière date étant soit celle pour laquelle le congé a été donné, soit, si une demande de renouvellement a été faite, le premier jour du trimestre civil qui suit cette demande.
En l’espèce, il est établi que le contrat de bail commercial liant les parties a été renouvelé à compter du 1er avril 2020, à la suite du congé pour le 30 mars 2020 signifié par la S.A.R.L. CHABNAM à la S.A.R.L. AU BON PRIX par acte d’huissier en date du 27 septembre 2019 portant offre de renouvellement du bail, ce qui n’est pas contesté.
En conséquence, il convient de constater le principe du renouvellement du contrat de bail commercial pour une nouvelle durée de neuf années à compter du 1er avril 2020.
Sur le montant du loyer du contrat de bail renouvelé
La S.A.R.L. CHABNAM soutient que la règle du plafonnement doit être écartée en raison des clauses du bail en ce qu’elles prévoient que le loyer de renouvellement doit être fixé à la valeur locative ; que la locataire a attendu près de deux ans avant de contester le sens et l’application de la clause du bail; que cette clause n’est sujette à aucune interprétation puisque la valeur à laquelle elle renvoie est nécessairement la valeur locative ; que les parties n’auraient pas pris le soin d’introduire le paragraphe concerné à la clause du loyer si ce n’était pour déroger aux dispositions légales régissant la fixation du loyer de renouvellement d’un bail commercial, qui ne sont pas d’ordre public ; que les dispositions de l’article 1162 du code civil ne sont pas applicables ; qu’en tant que besoin la modification notable des facteurs de commercialité intervenue au cours du bail expiré justifie de plus fort que la règle du plafonnement soit écartée. Elle sollicite la fixation du loyer du bail renouvelé à la somme de 30.000 euros par an hors taxes et hors charges et à titre subsidiaire la désignation d’un expert. Dans cette hypothèse, elle sollicite que le loyer dû à titre provisionnel soit fixé à la somme de 30.000 euros par an hors taxes et hors charges.
La S.A.R.L. AU BON PRIX soutient que le contrat de bail ne stipule pas expressément que le loyer de renouvellement sera fixé à la valeur locative ; qu’en application de l’article 1162 du code civil, dans la mesure où l’interprétation de la bailleresse lui est défavorable, il conviendra de considérer que cette clause litigieuse n’emporte pas dérogation expresse et non-équivoque au principe de plafonnement ; qu’elle conteste la modification notable des facteurs locaux de commercialité ; qu’elle sollicite que le loyer du bail renouvelé soit fixé à la somme de 17.217,39 euros par an hors taxes et hors charges ; qu’à titre subsidiaire si le tribunal ordonnait une mesure d’expertise judiciaire, elle sollicite que le loyer provisionnel soit fixé pendant la durée de l’instance à la somme de 17.217,39 euros par an hors taxes et hors charges.
L’article L. 145-34 du code de commerce précise qu’à moins d’une modification notable des éléments mentionnés aux 1° à 4° de l’article L. 145-33, le taux de variation du loyer applicable lors de la prise d’effet du bail à renouveler, si sa durée n’est pas supérieure à neuf ans, ne peut excéder la variation, intervenue depuis la fixation initiale du loyer du bail expiré, de l’indice trimestriel des loyers commerciaux ou de l’indice trimestriel des loyers des activités tertiaires mentionnés aux premier et deuxième alinéas de l’article L. 112-2 du code monétaire et financier, publiés par l’Institut national de la statistique et des études économiques. A défaut de clause contractuelle fixant le trimestre de référence de cet indice, il y a lieu de prendre en compte la variation de l’indice trimestriel des loyers commerciaux ou de l’indice trimestriel des loyers des activités tertiaires, calculée sur la période de neuf ans antérieure au dernier indice publié.
L’article 1134 du code civil, dans sa rédaction applicable au litige antérieure au 1er octobre 2016, dispose que les conventions tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.
En l’espèce, le contrat de renouvellement du bail, datant du 30 avril 2009, contient une clause insérée à l’article intitulé “LOYER” stipulant que “les loyers de renouvellements successifs seront, de convention expresse entre les parties, fixés à la valeur à la date du renouvellement”.
Il est admis que les dispositions du code de commerce relatives à la détermination du loyer du bail renouvelé ne sont pas d’ordre public. Ainsi, les parties à un bail commercial peuvent, dès sa conclusion, convenir de stipulations particulières régissant la détermination du loyer au moment du renouvellement. Il s’ensuit que les parties peuvent librement convenir de déroger aux dispositions de l’article L 145-34 afin de fixer à la valeur locative le loyer du renouvellement éventuel et des renouvellements successifs.
Les parties en prévoyant, dans le contrat de bail, que la détermination du prix du loyer renouvelé sera fixée à la “valeur à la date du renouvellement” en utilisant le terme “valeur” ont nécessairement voulu exclure que le loyer puisse être plafonné, puisque en ce cas, ce serait le loyer indiciaire plafonné qui pourrait trouver à s’appliquer, sauf motifs de déplafonnement.
Dès lors, le montant du loyer du bail renouvelé doit être fixé à la valeur locative.
En l’état des moyens exposés et des pièces produites par les parties, il convient de rechercher et rassembler les éléments d’appréciation des faits invoqués par celles-ci. Ces éléments ne peuvent résulter des vérifications personnelles du juge ou d’un constat. Il est de ce fait nécessaire de recourir à une mesure d’expertise en application de l’article R.145-30 du code de commerce, aux frais avancés de la S.A.R.L. CHABNAM, demanderesse à l’augmentation du loyer, dans les termes du présent dispositif.
Au regard de la nature du litige il est de l’intérêt des parties de recourir, dans le cadre de l’expertise, à une mesure qui leur offre la possibilité de parvenir à une solution rapide et négociée par la médiation. Il convient en conséquence de la leur proposer. Afin que les parties bénéficient des explications nécessaires à une décision éclairée sur l’acceptation d’une telle mesure, un médiateur sera commis pour recueillir leur avis, selon les modalités prévues au présent dispositif.
Il convient de fixer le loyer provisionnel dû par la S.A.R.L. AU BON PRIX pour la durée de l’instance à la somme de 17.217,39 euros en principal conformément à la demande de cette dernière, outre les charges et taxes locatives.
Sur les mesures accessoires
Selon les dispositions du premier alinéa de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.
En outre, en vertu des dispositions des deux premiers alinéas de l’article 700 du même code, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer : 1°) à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
En l’espèce, il y a lieu de rappeler que la présente décision ne met pas fin à l’instance, laquelle a vocation à se poursuivre postérieurement au dépôt du rapport d’expertise judiciaire, en application des dispositions du premier alinéa de l’article R. 145-31 du code de commerce selon lesquelles dès le dépôt du constat ou du rapport, le greffe avise les parties par lettre recommandée avec demande d’avis de réception de la date à laquelle l’affaire sera reprise et de celle à laquelle les mémoires faits après l’exécution de la mesure d’instruction devront être échangés.
En conséquence, les demandes formées au titre des frais irrépétibles et les dépens seront réservés.
Il convient de rappeler que la présente décision est assortie de l’exécution provisoire de droit, conformément aux dispositions de l’article 514 du code de procédure civile, étant observé qu’aucune des parties ne sollicite que cette dernière soit écartée sur le fondement des dispositions de l’article 514-1 de ce code.
Le juge des loyers commerciaux, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire rendu en premier ressort,
CONSTATE le principe du renouvellement du contrat de bail commercial liant la S.A.R.L. CHABNAM à la S.A.R.L. AU BON PRIX, et portant sur les locaux sis [Adresse 4] à [Localité 10], pour une durée de neuf années à compter du 1er avril 2020,
DEBOUTE la S.A.R.L. AU BON PRIX de sa demande de plafonnement du loyer du bail renouvelé ;
DIT que le loyer du bail renouvelé doit être fixé à la valeur locative;
ORDONNE une mesure d’expertise judiciaire,
DÉSIGNE, pour y procéder, l’expert judiciaire suivant, inscrit sur la liste établie pour le ressort de la cour d’appel de Paris :
Monsieur [Z] [B]
[Adresse 5] – [Localité 9]
[Courriel 11] – [XXXXXXXX01]
avec mission de :
– convoquer les parties, et, dans le respect du principe du contradictoire,
– se faire communiquer tous documents et pièces nécessaires à l’accomplissement de sa mission,
– visiter les locaux litigieux et les décrire,
– entendre les parties en leurs dires et explications,
– déterminer la surface à prendre en compte, en donnant toutes explications à cet égard, du point de vue des pondérations à effectuer, étant entendu qu’en cas de besoin, l’expert pourra faire appel à l’assistance d’un sapiteur géomètre de son choix
– procéder à l’examen des faits qu’allèguent les parties et notamment en ce qui concerne la réalisation de travaux d’amélioration réalisés par le locataire au cours du bail précédemment expiré, la modification des caractéristiques des locaux loués, la modification des facteurs locaux de commercialité,
– rechercher la valeur locative à la date du 1er avril 2020 des lieux loués au regard des caractéristiques du local, de la destination des lieux, des obligations respectives des parties, des facteurs locaux de commercialité, des prix couramment pratiqués dans le voisinage, en retenant tant les valeurs de marché que les valeurs fixées judiciairement, en application des dispositions des articles L. 145-33 et R 145-3 à R 145-8 du code de commerce,
– donner son avis sur le loyer plafonné à la date du 1er avril 2020 suivant les indices applicables en précisant les modalités de calcul,
– rendre compte du tout et donner son avis motivé,
– dresser un rapport de ses constatations et conclusions.
DIT que l’expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile et qu’il déposera l’original de son rapport au greffe de la juridiction avant le 15 janvier 2026 ;
FIXE à la somme de 4.000 euros la provision à valoir sur la rémunération de l’expert, somme qui devra être consignée par la SA.R.L CHABNAM à la régie du tribunal judiciaire de Paris (Paris 17ème, Parvis du tribunal, atrium sud, 1er étage à droite) au plus tard le 13 mars 2025, avec une copie de la présente décision ;
DIT que l’affaire sera rappelée à l’audience du 29 avril 2025 à 09h30 pour vérification du versement de la consignation ;
DIT que, faute de consignation de la provision dans ce délai, la désignation de l’expert sera caduque et privée de tout effet ;
DESIGNE le juge des loyers commerciaux aux fins de contrôler le suivi des opérations d’expertise ;
DONNE injonction aux parties de rencontrer un médiateur, en la personne de :
Monsieur [F] [N]
[Adresse 6] – [Localité 7]
[XXXXXXXX02] – [Courriel 12]
DIT que le médiateur n’interviendra pour satisfaire à l’injonction ainsi ordonnée qu’après que l’expert l’aura informé qu’il a adressé aux parties sa note de synthèse,
DIT qu’après avoir apporté cette information au médiateur, et en attendant que celui-ci ait mené à bien sa mission, l’expert suspendra ses opérations d’expertise,
DIT que le médiateur ainsi informé par l’expert aura pour mission :
– d’expliquer aux parties le principe, le but et les modalités d’une mesure de médiation,
– de recueillir leur consentement ou leur refus de cette mesure,
DIT qu’à l’issue de ce premier rendez-vous d’information, dans l’hypothèse où au moins l’une des parties refuserait le principe de la médiation, ou à défaut de réponse d’au moins l’une des parties dans le délai fixé par le médiateur, ce dernier en avisera l’expert et le juge chargé du contrôle des expertises ; le médiateur cessera alors ses opérations, sans défraiement, et l’expert reprendra le cours de sa mission,
DIT que dans l’hypothèse où les parties donneraient leur accord à la médiation :
– le médiateur pourra commencer immédiatement les opérations de médiation,
– le médiateur en informera l’expert, et le cours de l’expertise demeurera suspendu, sauf si des investigations complémentaires sont nécessaires à la solution du litige.
DIT qu’au terme de la médiation, le médiateur informera l’expert et le juge chargé du contrôle des expertises, soit que les parties sont parvenues à un accord, soit qu’elles n’y sont pas parvenues,
DIT que si les parties sont parvenues à un accord, l’expert déposera son rapport en l’état de la dernière note aux parties qu’il aura établie, et pourra solliciter la taxation de ses honoraires correspondants,
DIT que si les parties ne sont pas parvenues à un accord, les opérations d’expertise reprendront,
FIXE le loyer provisionnel pour la durée de l’instance à la somme de 17.217,39 euros en principal, outre les charges et taxes locatives,
RÉSERVE les dépens et les demandes présentées sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
REJETTE toutes les autres demandes des parties,
RAPPELLE que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire.
Fait et jugé à PARIS, le 13 janvier 2025.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE
C. BERGER S. PERALTA
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