L’Essentiel : Le 21 novembre 2021, Monsieur [P] a signé un contrat avec la société World of Cars pour la vente d’un véhicule MG, fixé à 38.000 €. Le 17 septembre 2022, un constat a révélé que le véhicule n’avait pas été vendu et nécessitait des réparations. Malgré un engagement de la société pour effectuer les travaux, Monsieur [P] a mis en demeure la société le 29 décembre 2022 pour un montant de 10.525,60 €, resté impayé. En réponse, la société a contesté les demandes, mais le tribunal a retenu sa responsabilité, condamnant la société à verser 10.150 € à Monsieur [P].
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Contexte de l’affaireLe 21 novembre 2021, Monsieur [P] a signé un contrat de mandat de dépôt et de vente avec la société World of Cars pour un véhicule MG immatriculé GA-468-NM, avec un prix de vente fixé à 38.000 €. Le contrat avait une durée initiale de deux mois et le véhicule a été remis à la société pour stockage. Constats et engagementsLe 17 septembre 2022, Monsieur [P], accompagné d’un huissier, a constaté que le véhicule n’avait pas été vendu et que des travaux étaient nécessaires. La société World of Cars s’est engagée à effectuer plusieurs réparations et un nettoyage complet avant le 1er octobre. Un second constat a eu lieu le 19 novembre 2022, lors duquel Monsieur [P] a récupéré son véhicule. Demande de paiementLe 29 décembre 2022, Monsieur [P] a mis en demeure la société World of Cars de lui verser 10.525,60 €, somme qui n’a pas été réglée. En conséquence, il a assigné la société en justice le 17 février 2023, demandant des dommages et intérêts de 14.500 €, ainsi que d’autres compensations. Réponse de la société World of CarsLa société World of Cars a contesté les demandes de Monsieur [P], arguant qu’un accord avait été conclu le 17 septembre 2022, ce qui aurait entraîné une renonciation de sa part à toute réclamation concernant l’état du véhicule. Elle a également demandé le paiement de 14.950 € pour des frais de gardiennage. Arguments de Monsieur [P]Monsieur [P] a soutenu que la société World of Cars, en tant que dépositaire, était responsable des dégradations survenues au véhicule. Il a affirmé que la société n’avait pas respecté ses obligations contractuelles et a chiffré son préjudice à 14.500 €, en raison de la différence entre le prix de vente initial et le prix de vente final de 23.500 €. Arguments de la société World of CarsLa société a affirmé qu’elle avait respecté ses engagements et que le contrat avait pris fin le 22 janvier 2022, sans reconduction tacite. Elle a également contesté le montant du préjudice allégué par Monsieur [P], soutenant qu’il n’avait pas prouvé ses frais. Décision du tribunalLe tribunal a retenu la responsabilité contractuelle de la société World of Cars pour les dégradations du véhicule, condamnant la société à verser 10.150 € à Monsieur [P]. La demande de la société concernant les frais de gardiennage a été rejetée, et la société a été condamnée aux dépens et à verser 1.500 € pour les frais irrépétibles. L’exécution provisoire a été prononcée. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la nature de la responsabilité de la société World of Cars dans le cadre du contrat de dépôt et de vente ?La responsabilité de la société World of Cars est de nature contractuelle, régie par les articles 1214 et 1215 du Code civil. Selon l’article 1214, « le contrat à durée déterminée peut être renouvelé par l’effet de la loi ou par l’accord des parties ». L’article 1215 précise que « lorsqu’à l’expiration du terme d’un contrat conclu à durée déterminée, les contractants continuent d’en exécuter les obligations, il y a tacite reconduction ». Dans ce cas, bien que la société World of Cars soutienne que le contrat a pris fin le 22 janvier 2022, il est établi que des obligations contractuelles ont continué d’exister, notamment en ce qui concerne la restitution du véhicule dans l’état où il a été remis. Ainsi, la société World of Cars est tenue de prouver qu’elle n’est pas responsable des détériorations survenues pendant la période de garde du véhicule, conformément à l’article 1933 du Code civil, qui stipule que « le dépositaire n’est tenu de rendre la chose déposée que dans l’état où elle se trouve au moment de la restitution ». En l’espèce, la société n’a pas démontré qu’elle avait apporté les soins nécessaires à la garde du véhicule, ce qui engage sa responsabilité contractuelle. Quels sont les droits de Monsieur [P] en tant que déposant concernant l’état du véhicule ?Monsieur [P], en tant que déposant, a des droits spécifiques en vertu des articles 1927 et 1933 du Code civil. L’article 1927 stipule que « le dépositaire doit apporter, dans la garde de la chose déposée, les mêmes soins qu’il apporte dans la garde des choses qui lui appartiennent ». De plus, l’article 1933 précise que « le dépositaire n’est tenu de rendre la chose déposée que dans l’état où elle se trouve au moment de la restitution ». Cela signifie que Monsieur [P] a le droit de recevoir son véhicule dans l’état dans lequel il a été remis, et que toute détérioration survenue pendant la garde de la société World of Cars engage sa responsabilité. Monsieur [P] doit prouver que des dégradations ont eu lieu, ce qu’il a fait par le biais de constats d’huissier, et la société World of Cars doit prouver qu’elle n’est pas responsable de ces dégradations. En l’espèce, les constats établis montrent des altérations significatives du véhicule, ce qui engage la responsabilité de la société World of Cars. Comment se justifie le montant des dommages et intérêts réclamés par Monsieur [P] ?Monsieur [P] réclame des dommages et intérêts à hauteur de 10.150 € en raison de la dévaluation de son véhicule, en se basant sur l’article 1231-1 du Code civil. Cet article stipule que « le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure ». Monsieur [P] a démontré que la valeur initiale de son véhicule était de 38.000 €, mais qu’il n’a pu le vendre qu’à 23.500 € en raison des dégradations imputables à la société World of Cars. Il a donc subi une perte de chance, évaluée à 14.500 €, mais le tribunal a retenu une perte de chance de 70 %, soit 10.150 €, en raison de l’absence de preuve que le véhicule aurait pu être vendu au prix initial. Ainsi, le montant des dommages et intérêts est justifié par la différence entre la valeur de vente initiale et le prix de vente final, tenant compte de la dévaluation causée par les dégradations. Quelles sont les implications de la demande reconventionnelle de la société World of Cars concernant les frais de gardiennage ?La demande reconventionnelle de la société World of Cars pour le paiement de frais de gardiennage repose sur l’article 6 du contrat de dépôt-vente, qui stipule que des frais peuvent être facturés en cas de résolution unilatérale du contrat par le mandant. Cependant, il est important de noter que l’article 7 du contrat impose au mandataire de restituer immédiatement le véhicule à l’expiration du contrat. La société World of Cars n’a pas restitué le véhicule immédiatement après la fin du contrat, ce qui constitue une violation de ses obligations contractuelles. De plus, le tribunal a constaté qu’aucun accord n’avait été établi entre les parties pour justifier la facturation de frais de gardiennage après l’expiration du contrat. Ainsi, la société World of Cars a été déboutée de sa demande de 14.950 € au titre des frais de gardiennage, car elle n’a pas démontré l’existence d’une obligation contractuelle de la part de Monsieur [P] de payer ces frais après la fin du contrat. En conséquence, la demande reconventionnelle de la société World of Cars a été rejetée, soulignant l’importance de respecter les obligations contractuelles en matière de restitution des biens. |
CINQUIÈME CHAMBRE
CIVILE
SUR LE FOND
56C
N° RG 23/01564 – N° Portalis DBX6-W-B7H-XQ4G
Minute n° 2024/00
AFFAIRE :
[H] [P]
C/
S.A.S. WORLD OF CARS
Grosses délivrées
le
à
Avocats : la SELARL EMMANUEL LAVAUD
Me Sandrine MAS-BLANCHOT
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
CINQUIÈME CHAMBRE CIVILE
JUGEMENT DU 14 JANVIER 2025
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Lors des débats et du délibéré
Madame Mariette DUMAS, Vice-Présidente,
Statuant à Juge Unique
Isabelle SANCHEZ Greffier, lors des débats et du prononcé
A l’audience publique du 12 Novembre 2024
JUGEMENT
Contradictoire
En premier ressort
Par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de procédure civile
DEMANDEUR
Monsieur [H] [P]
27 route de Villeneuve
33121 CARCANS, FRANCE
représenté par Maître Emmanuel LAVAUD de la SELARL EMMANUEL LAVAUD, avocats au barreau de BORDEAUX
DÉFENDERESSE
S.A.S. WORLD OF CARS
277 RUE DU CAMP DE SOUGE
33127 SAINT-JEAN-D’ILLAC , FRANCE
représentée par Me Sandrine MAS-BLANCHOT, avocat au barreau de BORDEAUX
N° RG 23/01564 – N° Portalis DBX6-W-B7H-XQ4G
Le 21 novembre 2021, Monsieur [P] a conclu, avec la société World of Cars, un contrat de mandat de dépôt et de vente de véhicule d’occasion, concernant un véhicule MG immatriculé GA-468-NM. Ce contrat était conclu pour une durée initiale de 2 mois.
Le prix de vente net vendeur était fixé à 38.000 €.
Le véhicule était ainsi remis et stocké dans les locaux de la société World of Cars.
Le véhicule n’était finalement pas vendu par la société World of Cars.
Le 17 septembre 2022, Monsieur [P] se rendait dans les locaux de la société World of Cars en compagnie de Maître [R], huissier de justice. Ce dernier dressait alors un procès verbal de constat. La société World of Cars s’engageait alors à réaliser un certain nombre de travaux sur le véhicule, à savoir : un nettoyage complet du véhicule, la reprise de la portière avant gauche, la réalisation d’un polissage sur la carrosserie du capot moteur, la reprise de la capote avec produits d’entretien et de nettoyage, ainsi que l’imperméabilisation, les travaux devant être réalisés avant le premier octobre ; il était prévu en outre la réalisation de travaux nécessaires à remédier à un dysfonctionnement de la valve du pneu avant gauche.
Le 19 novembre 2022, Monsieur [P] se présentait de nouveau dans la société World of Cars, avec Maître [R], qui dressait un nouveau procès verbal de constat.
Monsieur [P] récupérait alors son véhicule.
Le 29 décembre 2022, Monsieur [P], par l’intermédiaire de son conseil, mettait en demeure la société World of Cars de lui payer la somme de 10.525,60€, laquelle n’y a pas procédé.
Par acte en date du 17 février 2023, Monsieur [P] a assigné la société World of Cars devant la présente juridiction.
Par dernières écritures signfiées par RPVA le 05 janvier 2024, Monsieur [P] sollicite :
– la condamnation de la SAS Wolrd of Cars à lui verser la somme de 14.500€ à titre de dommage et intérêts,
– que la société World of Cars soit déboutée de sa demande à titre reconventionnel ou, si il y était fait droit, que soit prononcée la compensation des dettes de chacune des parties,
– la condamnation de la SAS World of Cars à lui verser la somme de 4.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens,
– à titre infiniment subsidiaire, si le tribunal faisait droit aux demandes de la société World of Cars, que soit écartée l’exécution provisoire.
Par dernières écritures signifiées par RPVA le 06 mars 2024, la société World of Cars sollicite :
– que Monsieur [P] soit débouté de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
– que Monsieur [P] soit condamné au paiement de la somme de 14.950 euros au titre des frais de gardiennage de son véhicule,
– que Monsieur [P] soit condamné au paiement d’une indemnite de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.
Au soutien de ses demandes, Monsieur [P] fait valoir, au soutien des articles 1927 et suivants du Code civil, que la société World of Cars, dépositaire, était tenue de lui remettre le véhicule dans l’état dans lequel il lui avait été remis. Il indique que la société engage dès lors sa responsabilité contractuelle pour les dégradations intervenues avant la restitution. Il ajoute qu’il appartient au dépositaire de démontrer, en cas de détérioration, qu’il est étranger à cette détérioration.
Ainsi, se prévalant de désordres constatés au sein des procès verbaux des 17 septembre 2022 et 19 novembre 2022, il soutient que la responsabilité contractuelle de la société World of Cars est engagée, rappelant que les mentions figurant au contrat de dépôt et de vente établissaient que le véhicule avait été initialement remis dans un excellent état. Il indique ainsi que la société World of Cars a manqué à ses obligations contractuelles, résultant de son statut de dépositaire, n’ayant ni gardé le véhicule avec soin, ni assuré l’entretien minimum de ce dernier tel que cela le lui incombait.
Concernant le montant de son préjudice, il le chiffre à hauteur de 14.500 €, faisant valoir que la valeur initiale du véhicule était de 38.000 €, mais qu’il n’a pu le vendre qu’au prix de 23.500 €, en raison des dégradations imputables au défendeur.
Concernant la nature contractuelle de la responsabilité de la société World of Cars dont il se prévaut, il expose, au visa notamment des articles 1214 et 1215 du Code civil, que si le terme du contrat initialement conclu avait expiré, pour autant, ce contrat avait été reconduit de par la volonté commune des parties ; dès lors, le contrat avait perduré postérieurement à la date du 22 janvier 2022. Il ajoute qu’en tout état de cause, la responsabilité contractuelle de la sociétéWorld of Cars est enagée, le manquement soulevé ayant pour origine l’exécution du contrat. Il précise ainsi que faute pour le dépositaire de prouver qu’il est étranger à la dégradation du véhicule, la société World of Cars ne peut échapper à sa responsabilité contractuelle.
A titre subsidiaire, Monsieur [P] fait valoir que la société World of Cars peut également être condamnée au versement des sommes sollicitées au titre de sa responsabilité déclictuelle. Il indique en effet qu’il existe une faute de la société, puisque des désordres sont apparus sur le véhicule, désordres qui n’existaient pas au 22 novembre 2021, lorsqu’il avait déposé ledit véhicule.
Concernant l’argumentation de la société World of Cars se prévalant d’une renonciation de sa part à ester en justice concernant l’état du véhicule, qui aurait été constaté par Me [R] au sein du procès verbal du 17 septembre 2022, il fait valoir qu’un tel engagement ne ressort aucunement des éléments versés aux débats. Il ajoute qu’en tout état de cause, si l’existence d’un accord devait être retenue, il ne s’agirait que d’un contrat unilatéral au profit de Monsieur [P]. Il souligne enfin que la société World of Cars ne peut en aucun cas se prévaloir d’un accord, puisque n’ayant en tout état de cause pas respecté les engagements qui lui incombaient alors, n’ayant pas réalisé les travaux auxquels elle s’était engagée.
Enfin, concernant la demande reconventionnelle formée par la société World of Cars au titre des frais de gardiennage, il rappelle d’une part que le contrat de dépôt vente avait été reconduit, et souligne d’autre part que ces frais ne sont contractuellement prévus que dans le cas où le mandant procèderait à la résolution unilatérale du contrat. Il précise que la société World of Cars ne lui a jamais indiqué souhaiter mettre un terme au contrat en cours et ne lui a pas demandé de venir récupérer son véhicule.
Pour s’opposer aux demandes de Monsieur [P], la société World of Cars fait valoir que ce dernier ne disposait plus du droit à agir, puisqu’un accord était intervenu entre les parties, tel que constaté par l’huissier de justice dans son procès verbal du 17 septembre 2022. Elle indique en effet avoir pris des engagements concernant une remise en état de certains éléments du véhicule, ainsi que son nettoyage, et qu’en contrepartie, Monsieur [P] a renoncé à toute réclamation concernant l’état du véhicule.
Elle fait valoir, au visa de l’article 1103 du Code civil, que cet accord constaté par Me [R] le 17 septembre 2022 s’analyse comme un contrat légalement formé qui tient lieu de loi aux parties. La société World of Cars soutient qu’il ne s’agit aucunement d’un contrat unilatéral au profit de Monsieur [P], les deux parties ayant pris des engaements. Elle souligne également avoir effectué la remise en état telle qu’elle était convenue, et que Monsieur [P] a ainsi repris son véhicule dûment remis en état le 17 septembre 2022, sans que Me [R] ne note dans son procès verbal de constat une quelconque remarque de ce dernier.
La société World of Cars s’explique sur chacune des reprises et remise en état effectuée, exposant les avoir intégralement réalisées, sauf concernant la reprise de la capote ; sur ce point, elle précise toutefois avoir remis à Monsieur [P] un kit de rénovation, tel que cela a été constaté dans le procès verbal de constat du 19 novembre 2022.
Concernant le fondement des demandes formées par Monsieur [P], la société World of Cars conteste tout engagement de sa responsabilité contractuelle, d’une part en l’absence de manquement à ses obligations contractuelles, mais également et surtout arguant du fait que le contrat était arrivé à son terme le 22 janvier 2022 ; la société précise en effet qu’aucun nouveau contrat n’a été conclu alors que le contrat du 22 novembre 2021 excluait toute tacite reconduction. La société World of Cars souligne ainsi que les demandes de Monsieur [P] doivent s’analyser par le prisme de la responsabilité délictuelle, soit au visa des articles 1240 et suivants du Code civil, de sorte qu’il incombait au demandeur de rapporter la preuve d’une faute, d’un préjudice et d’un lien de causalité, ce qu’il ne fait pas.
Enfin, et en tout état de cause, concernant le préjudice allégué par Monsieur [P], il le conteste. Il fait valoir que les travaux figurant au devis produit ne peuvent être imputés à des détériorations survenues lors de la garde du véhicule par la société World of Cars, et souligne qu’aucun justificatif ne vient étayer la demande de Monsieur [P] au titre de la capote. Enfin, la société World of Cars souligne que Monsieur [P] a immédiatement remis le véhicule en vente par l’intermédiaire d’une autre société, au prix de 36.000 € ; elle précise que si la vente s’est déroulée à un prix bien inférieur, elle est en réalité intervenue de nombreux mois après la repise du véhicule par Monsieur [P], la société ne pouvant ainsi être tenue responsable du prix de cession.
Reconventionnellement, la société World of Cars sollicite la condamnation de Monsieur [P] à lui verser des frais de gardiennage correspondant à l’occupation d’une place au sein su showroom de la société à l’expiration du contrat, se prévalant de l’article 6 du contrat de dépôt vente sur ce point.
La cloture des débats a été fixée au 02 octobre 2024 et l’affaire fixée à l’audience du 12 novembre 2024.
L’affaire a été mise en délibéré au 13 janvier 2025.
In limine litis, il faut relever que la société World of Cars se prévaut d’une renonciation par Monsieur [P] de son droit d’agir au titre de l’état du véhicule ; elle précise que cette renonciation résulterait de leur accord figurant au sein du constat d’huissier du 17 septembre 2022.
Suivant les dispositions de l’article 2044 du Code civil, la transaction est un contrat par lequel les parties terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître. Ce contrat doit être rédigé par écrit.
A la lecture dudit procès verbal, si un accord des parties est mentionné, quant à la réalisation de travaux sur le véhicule, il n’apparaît aucune mention d’une renonciation à son action de la part de Monsieur [P]. Dès lors, l’argumentation de la société World of Cars sur l’existence d’un accord portant renonciation de Monsieur [P] à son droit d’agir quant à l’état du véhicule n’est pas fondée. Au surplus, il sera rappelé qu’une telle argumentation constitue une fin de non recevoir qui aurait dû être soulevée devant le juge de la mise en état.
Sur la responsabilité contractuelle
Suivant l’article 1214 du Code civil, le contrat à durée déterminée peut être renouvelé par l’effet de la loi ou par l’accord des parties. Le renouvellement donne naissance à un nouveau contrat dont le contenu est identique au précédent mais dont la durée est indéterminée.
Selon les dispositions de l’article 1215 du Code civil, lorsqu’à l’expiration du terme d’un contrat conclu à durée déterminée, les contractants continuent d’en exécuter les obligations, il y a tacite reconduction. Celle-ci produit les mêmes effets que le renouvellement du contrat.
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Le contrat initialement conclu était un contrat de mandat de dépôt et de vente.
Ce contrat, conclu le 22 novembre 2021, mentionnait en son article 4 qu’il prenait effet à la date de signature, pour une durée de deux mois. Il mentionnait également au sein du même article : “Le présent contrat ne pourra en aucun cas être reconduit tacitement. En conséquence, les parties seront libres, à l’expiration de la durée initiale, de renégocier un nouveau contrat, si elles le souhaitent. Les parties devront alors faire connaître leur intention de renégociation d’un nouveau contrat quinze (15) jours au moins avant l’arrivée du terme initial”.
Si Monsieur [P] se prévaut d’une tacite reconduction du contrat, et évoque des échanges de SMS de nature à démontrer la poursuite, par les co-contractants, de leurs obligations contractuelles bien au delà du terme du contrat initial, force est de constater qu’il ne verse pas aux débats les SMS dont il fait état. Or, la société World of Cars conteste l’existence d’une reconduction du contrat, laquelle n’est pas démontrée par des éléments suffisants au dossier.
Dès lors, il faut constater que le contrat a pris fin le 22 janvier 2022.
Toutefois, ledit contrat prévoyait, au sein de son article 7, que “le mandataire restituera immédiatement […] le véhicule déposé dans l’état où il se trouve au moment de la restitution. Les détériorations qui ne sont pas survenues par son fait, resteront à la charge du mandant.”
Dès lors, au terme du contrat échu, la société World of Cars devait restituer le véhicule . Le fait que la restitution, qui lui incombait, n’est intervenue que tardivement, n’enlève en rien la nature contractuelle de l’obligation qui lui incombait. La société World of Cars ne peut à la fois soutenir que le contrat n’a pas été reconduit et se démettre dans le même temps de l’obligation de restitution qui découlait de la cessation des relations contractuelles.
La société World of Cars avait dès lors l’obligation contractuelle de restituer le véhicule, peu importe qu’elle n’ait exécuté son obligation de restitution que tardivement, étant précisé qu’elle était tenue des détériorations survenues de son fait.
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Suivant les dispositions de l’article 1231-1 du Code civil, le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure.
Par ailleurs, selon les dispositions de l’article 1927 du Code civil, le dépositaire doit apporter, dans la garde de la chose déposée, les mêmes soins qu’il apporte dans la garde des choses qui lui appartiennent.
Suivant les dispositions de l’article 1933 du Code civil, le dépositaire n’est tenu de rendre la chose déposée que dans l’état où elle se trouve au moment de la restitution. Les détériorations qui ne sont pas survenues par son fait sont à la charge du déposant.
Il sera rappelé qu’il incombe au déposant de prouver que les choses restituées ont été altérées. Le dépositaire a quant à lui la charge de prouver qu’il est étranger à la détérioration de la chose qu’il a reçue en dépôt, soit en établissant qu’il a donné à cette chose les mêmes soins qu’à la garde des choses lui appartenant, soit en démontrant la survenance d’un accident de force majeure.
Il faut constater que le contrat de dépôt et vente du véhicule portait sur le véhicule de marque MG immatriculé GA-468-NM de 1959, affichant un kilométrage de 80.000.
Le prix net vendeur prévu dans le cadre de ce contrat était de 38.000 €.
Les mentions suivantes étaient portées : “Peinture RAS” “nettoyage”.
Monsieur [P] produit des photoraphies du véhicule avant la mise en dépôt sur lesquelles on peut notamment constater que la capote n’était pas blanchie.
Il faut constater que le procès verbal de constat établi par Me [R], commissaire de justice, en date du 17 septembre 2022, à la demande de Monsieur [P], mentionne, concernant le véhicule qui se trouvait au sein des locaux de la société World of Cars à Martignas-Sur-Jalle plusieurs désordes, notamment :
– en périphérie du capot moteur, une peinture orangée bordant des reprises d’éléments de couleur rouge ;
– porte de conducteur présentant des micro-impacts blanchis en angle inférieur droit de porte ;
– partie recouverte d’une couleur rouge associée à des équipements d’éclairage présentant un carrossage orangé avec en périphérie de ces équipement déclairage, des joints grisonnants tâchés par un voile verdâtre ;
– la partie avant, la partie centrale et la partie arrière présenent un détonement orangé entre la porte passager et l’aide arrière ;
– capote manuelle blanchie en mauvais état d’entretien ;
– siège conducteur à cannelures verticales et liserés périphériques colorés en état d’usage ;
– siège passager à cannelures verticales et liserés périphériques colorés : assise et dosseret tachetés par points de moisissure en continuité ;
– accoudoir composé d’un coussin tacheté par points de moisissure en partie centrale ;
– habillage de porte passager présentant un défaut d’affleure ventré en tête ;
– moteur : au niveau de la rigole périphérique intérieure existe un détonement avec les éléments de carrosserie extérieure : la rigole est de couleur rouge et la carrosserie extérieure est de couleur orangée.
Il faut constater que le commissaire de justice a relevé que la société World of Cars a proposé de réaliser un nettoyage complet, la reprise de la portière avant gauche, la réalisation d’un polissage sur la carrosserie du capot moteur, la reprise de la capote avec produits d’entretien et de nettoyage, ainsi que l’imperméabilisation, les travaux devant être réalisés avant le premier octobre ; elle s’est engagée à réaliser en outre des travaux nécessaires à remédier à un dysfonctionnement de la valve du pneu avant gauche.
Le procès verbal de constat dressé le 19 novembre 2022 toujours à la demande de Monsieur [P], concernant le véhicule encore situé dans les locaux de la société World of Cars à Saint-Jean-d’Illac, mentionne notamment :
– que le capot présente un cerclage de capot moteur orangé et une surface de capot rougé,
– que la porte conducteur présente des rayures périhériques inférieures droites et que la planéité de la porte présente de multiples micro-impacts en partie centrale droite,
– que la malle de coffre est recouverte d’une peinture rouge micro pelée au droit de la jonction avec la plaque arrière, et que l’arrière est équipé de supports à feux orangés intégrés dans des ailes de couleur rougeur,
– que le phare arrière présente un bi-élément, l’élément supérieur présentant un cerclage chromé, déposé,
– que la porte passager et l’aile avant droite présentent une teinte tirant sur l’orangé et que l’aile arrière droite tend vers une couleur rouge,
– que la capote est blanchie (la société World of Cars déclarant remettre à Monsieur [P] un kit de rénovation, rappelant que leur préparateur a refusé de procéder à la restauration de cette capote), et qu’elle présente un peluchage,
– que la jante arrière gauche présente des têtes piquées de rouille en continuité,
– que la roue de secours présente un pneumatique à plat et une valve en mauvais état, hors d’usage,
– que le siège conducteur en cuir à cannelures verticales, en état d’usage, présente un liseré périphérique de couleur rouge, de même que le siège passager, qui présente un liseré rougé en périphérie, les accoudoirs présentant une périphérie bordée, rougée en bon état,
– le moteur est fonctionnant ; au niveau de la cannelure de réception du capot moteur, se trouve une peinture de couleur rouge détonante avec la périphérie extérieure.
Dès lors, les constats effectués par le commissaire de justice mettent en exergue, entre autres, l’altération de la tolerie et de la peinture du véhicule, de même que celle de la capote du véhicule.
Il faut au surplus rappeler que la société World of Cars s’était engagée le 17 septembre 2022 à la remise en état de certains éléments du véhicule, ce qui n’apparaît pas compatible avec ses déclarations contestant désormais toute responsabilité.
Monsieur [P] démontre ainsi que le véhicule restitué a été altéré. La société World of Cars, dépositaire, ne démontre pas quant à elle qu’elle serait étrangère à la détérioration du véhicule.
Par suite, la responsabilité contractuelle de la société World of Cars doit être retenue concernant l’altération du véhicule.
Sur le préjudice
Monsieur [P] produit un devis de remise en état notamment concernant la tolerie et la peinture à hauteur de 5.925,60 € TTC en date du 22 décembre 2022, et mentionne, sans en justifier, que la reprise de la capote s’élèverait à la somme de 4.600 € TTC. La SAS World of Cars verse aux débats au contraire une annonce faisant état d’un prix de 595 € pour une capote pour cabriolet MG A, et conteste en tout état de cause le préjudice allégué par Monsieur [P].
Monsieur [P] verse des justificatifs ne justifiant que partiellement des sommes alléguées ; par ailleurs et surtout, il ne démontre pas avoir réellement exposé ces frais.
Il faut constater qu’il a finalement vendu le véhicule le 26 septembre 2023 pour une somme de 23.500 € TTC. Monsieur [P] invoque un préjudice de 14.500 €, puisque le contrat de dépôt et de vente du véhicule d’occasion du 22 novembre 2021 retenait un prix net vendeur de 38.000 €.
Si la société World of Cars démontre que le véhicule a été remis en vente pour un montant de 35.990 € par la société BVM Motors, et fait ainsi valoir que Monsieur [P] aurait pu en tirer un prix plus conséquent, pour autant, force est de constater que ce dernier n’est parvenu à vendre ce véhicule qu’au prix de 23.500 € ; rien ne démontre que la vente de ce véhicule aurait pu aboutir au prix affiché.
S’il est acquis que l’altération du véhicule a nécessairement impacté son prix de vente, pour autant, il n’est pas acquis que Monsieur [P] serait parvenu à défaut à en tirer un prix de 38.000 € net vendeur. Seule une perte de chance peut être retenue, qui sera évaluée à hauteur de 70 % soit à hauteur de 10.150 €.
Sur la demande reconventionnelle de la société World of Cars au titre des frais de gardiennage
Il faut constater que la clause contractuelle dont se prévaut la société World of Cars, relative à des frais de gardiennage, est incluse au sein d’un article 6 relatif à la résolution du contrat, dans une sous partie intitulée “6.2 Pénalités contractuelles en cas de résolution unilatérale du contrat par le mandant”, prévoyant, dans l’hypothèse d’une rupture anticipée du contrat, que des frais de gardiennage à hauteur de 50 € parjour seront facturés, correspondant à l’occupation d’une place au sein du showroom d’exposition du mandataire sans contrepartie.
Dès lors, il faut constater que le contrat ne prévoyait pas de frais de gardiennage à l’issue du contrat, mais uniquement dans l’hypothèse d’une résolution unilatérale du contrat par le mandant.
Par ailleurs, s’agissant de l’expiration du contrat, le mandataire avait, conformément à l’article 7 du contrat du 22 novembre 2021, l’obligation de restituter immédiatement ledit véhicule.
Or, la société World of Cars, qui n’a pas restitué immédiatement ledit véhicule, ne démontre pas qu’un accord quelconque avait conclu entre les parties afin qu’elle conserve le véhicule en contrepartie de frais de gardiennage ; elle ne justifie pas non plus d’une faute de Monsieur [P] ayant fait obstacle à la restitution de son véhicule.
La société World of Cars ne démontrant pas l’existence d’une obligation pour le mandant de verser des frais de gardiennage entre le délai séparant la fin du contrat (22 janvier 2022) et la restitution effective du véhicule (19 novembre 2022), elle sera déboutée de sa demande tendant à la condamnation de Monsieur [P] au paiement de la somme de 14.950 euros au titre des frais de gardiennage de son véhicule.
***
– Les dépens :
L’article 696 du code de procédure civile prévoit que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.
En l’espèce, il y a lieu de condamner la société World of Cars aux entiers dépens.
– Les frais irrépétibles non compris dans les dépens :
Aux termes de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, et le cas échéant, à l’avocat du bénéficiaire de l’aide juridictionnelle partielle ou totale une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l’aide aurait exposés s’il n’avait pas eu cette aide. Dans ce cas, il est procédé comme il est dit aux alinéas 3 et 4 de l’article 37 de la loi no 91-647 du 10 juillet 1991.
Au cas présent, il convient de condamner la société World of Cars à indemniser Monsieur [H] [P] à hauteur de 1 500 euros.
– L’exécution provisoire :
Il convient de rappeler que la présente instance est soumise aux dispositions de l’article 514 du code de procédure civile aux termes duquel les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire.
En l’espèce, il convient de prononcer l’exécution provisoire.
Le Tribunal,
CONDAMNE la SAS World of Cars à payer la somme de 10.150 € à Monsieur [H] [P] à titre de dommage intérêts au titre de sa responsabilité contractuelle,
DEBOUTE la SAS World of Cars de sa demande tendant à la condamnation de Monsieur [H] [P] au paiement de la somme de 14.950 euros au titre des frais de gardiennage de son véhicule,
CONDAMNE la SAS World of Cars aux entiers dépens,
CONDAMNE la SAS World of Cars à payer à Monsieur [H] [P] la somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
RAPPELLE que l’exécution provisoire de droit.
La présente décision est signée par Madame Mariette DUMAS , Vice-Présidente, et Madame Isabelle SANCHEZ Greffier.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
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