Cour d’appel de Versailles, 9 janvier 2025, RG n° 23/03132
Cour d’appel de Versailles, 9 janvier 2025, RG n° 23/03132

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Versailles

Thématique : Conflit sur la régularité du recouvrement d’allocations indûment perçues et ses implications sur la prescription des actions.

Résumé

Contexte de l’affaire

Mme [W] [L], traductrice-interprète pour l’État, bénéficie depuis 2013 d’une allocation de logement sociale. Cette allocation est versée par la caisse d’allocations familiales des [Localité 3], qui a appliqué la règle de neutralisation de ses ressources en raison de l’absence de chômage indemnisé.

Contrôle et indus

Suite à un contrôle, la caisse a identifié plusieurs indus et a émis une contrainte le 16 juillet 2019, réclamant un montant total de 5.450,32 euros. Mme [L] a formé opposition à cette contrainte, entraînant une procédure judiciaire.

Jugement du tribunal judiciaire

Le tribunal judiciaire de Nanterre a rendu un jugement le 18 octobre 2023, écartant l’irrégularité de la contrainte, déclarant l’action en paiement prescrite, annulant la contrainte, et déboutant les deux parties de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile. La caisse a été condamnée aux dépens.

Appel de la caisse d’allocations familiales

La caisse a interjeté appel le 3 novembre 2023, demandant la confirmation de certaines décisions du jugement tout en contestant la prescription de l’action en paiement et en sollicitant le rejet de l’opposition de Mme [L].

Arguments de Mme [L]

Mme [L] a également formulé des demandes en appel, cherchant à infirmer le jugement sur plusieurs points, notamment l’irrégularité de la contrainte et la demande de restitution du trop-perçu. Elle a soutenu que la contrainte était invalide en raison de l’absence de pouvoir du directeur de la caisse.

Régularité de la procédure

Mme [L] a contesté la possibilité d’émettre une contrainte pour le recouvrement de l’allocation de logement sociale, tandis que la caisse a défendu la légitimité de son action. Le tribunal a conclu que l’allocation de logement social ne pouvait pas être recouvrée par voie de contrainte.

Demande de restitution de l’indu

La caisse a poursuivi la restitution de l’indu, mais Mme [L] a contesté la recevabilité de cette demande, arguant que la procédure d’opposition à contrainte ne permettait pas de statuer selon le droit commun. Le tribunal a jugé que la demande de la caisse était recevable.

Prescription de l’action

Le tribunal a examiné la question de la prescription, notant que la caisse avait notifié les indus à Mme [L] à plusieurs reprises. Il a conclu que l’action n’était pas prescrite, car les notifications avaient interrompu le délai de prescription.

Sur le mérite de l’action

Concernant l’irrégularité de la procédure de recouvrement, Mme [L] a contesté la notification de l’indu, mais le tribunal a jugé que les mentions requises n’étaient pas applicables dans ce cas. La caisse a prouvé l’existence de l’indu par des calculs basés sur les revenus déclarés de Mme [L].

Décision finale de la cour

La cour a infirmé le jugement initial dans toutes ses dispositions, annulé la contrainte, déclaré recevable l’action en répétition de l’indu, et condamné Mme [L] à restituer la somme de 4.710,52 euros à la caisse, ainsi qu’à payer des frais supplémentaires.

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 88B

Chambre sociale 4-6

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 09 JANVIER 2025

N° RG 23/03132 – N° Portalis DBV3-V-B7H-WFSC

AFFAIRE :

CAISSE D’ALLOCATIONS FAMILIALES DES [Localité 3]

C/

[W] [L]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 18 Octobre 2023 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de Nanterre

N° RG : 19/01694

Copies exécutoires délivrées à :

Me Florence CHARLUET-MARAIS

Me Guillaume PERRIER de la SELARL GP AVOCAT

Copies certifiées conformes délivrées à :

CAISSE D’ALLOCATIONS FAMILIALES DES [Localité 3]

[W] [L]

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE NEUF JANVIER DEUX MILLE VINGT CINQ,

La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

CAISSE D’ALLOCATIONS FAMILIALES DES [Localité 3]

[Adresse 1],

[Adresse 1]

Représentée par Me Florence CHARLUET-MARAIS de la SELARL GP AVOCAT avocat au barreau de PARIS vestiaire D1721

APPELANTE

****************

Madame [W] [L]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Guillaume PERRIER de la SELARL GP AVOCAT, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 761

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

L’affaire a été débattue le 22 Octobre 2024, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Nathalie COURTOIS, Présidente,

Madame Véronique PITE, Conseillère,

Madame Odile CRIQ, Conseillère,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Isabelle FIORE

FAITS ET PROCEDURE

Mme [W] [L], qui est traductrice-interprète pour l’Etat sous le statut de collaborateur occasionnel du service public, reçoit versement depuis 2013 de l’allocation de logement sociale servie par la caisse d’allocations familiales des [Localité 3], au bénéfice de la règle de neutralisation de ses ressources faute d’un chômage indemnisé.

Après contrôle, la caisse a calculé divers indus, pour lesquels, suite à mises en demeure des 2 octobre 2018 et 4 mars 2019, elle a décerné une contrainte le 16 juillet 2019, portant sur la somme de 5.450,32 euros.

Mme [L] ayant formé opposition, le tribunal judiciaire de Nanterre, par jugement du 18 octobre 2023, a :

Ecarté le moyen tiré de l’irrégularité de la contrainte eu égard à la nature de la dette

Déclaré prescrite l’action en paiement pour cause de forclusion,

Déclaré irrecevable la demande reconventionnelle en paiement pour cause de forclusion,

Annulé la contrainte en litige,

Débouté les deux parties de leur demande présentée au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamné la caisse d’allocations familiales des [Localité 3] aux dépens.

La caisse en a relevé appel, par déclaration du 3 novembre suivant formée par voie électronique.

L’affaire a été appelée à l’audience du 22 octobre 2024, à laquelle les parties étaient régulièrement convoquées.

Aux termes de ses écritures soutenues oralement, la caisse d’allocations familiales demande à la cour de :

Confirmer le jugement en ce qu’il a écarté le moyen tiré de l’irrégularité de la contrainte eu égard à la nature de la dette

L’infirmer en ce qu’il a déclaré prescrite l’action en paiement pour cause de forclusion et a ainsi annulé la contrainte

Statuant à nouveau,

Rejeter l’opposition formée par Mme [L],

La débouter de l’ensemble de ses demandes,

Valider la contrainte émise par ses soins, sinon condamner Mme [L] au paiement de la somme de 4.710,52 euros,

Condamner Mme [L] aux entiers dépens et à lui payer 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par ses écritures soutenues oralement, Mme [L] demande à la cour de :

Infirmer le jugement en ce qu’il a écarté le moyen tiré de l’irrégularité de la contrainte eu égard à la nature de la dette

Statuant à nouveau, 

Annuler la contrainte du 16 juillet 2019 en raison de l’absence de pouvoir du directeur de la caisse d’allocations familiales de délivrer une contrainte pour le recouvrement d’indu d’allocations de logement sociales

Juger irrecevable la demande subsidiaire adverse en restitution du trop-perçu,

En tout état de cause,

Confirmer le jugement en ce qu’il a déclaré prescrite l’action en paiement pour cause de forclusion et a ainsi annulé la contrainte

Annuler la contrainte du 16 juillet 2019 en raison de l’irrégularité de la procédure préalable de recouvrement de l’indu

Annuler la contrainte du 16 juillet 2019 en raison de l’absence de justification des sommes réclamées

Débouter la caisse d’allocations familiales de l’ensemble de ses demandes,

La condamner à lui verser 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter la charge des dépens.

Pour plus ample exposé des moyens des parties, il est expressément renvoyé, par application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, aux écritures susvisées et à la note d’audience.

PAR CES MOTIFS

La COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement dans toutes ses dispositions ;

Annule la contrainte décernée le 16 juillet 2019 par la caisse d’allocations familiales des [Localité 3] ;

Dit recevable l’action en répétition de l’indu ;

Condamne Mme [L] à restituer à la caisse d’allocations familiales des [Localité 3] la somme de 4.710,52 euros arrêtée à ce jour, en quittances et deniers ;

La condamne à payer à la caisse d’allocations familiales des [Localité 3] la somme de 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

La condamne aux entiers dépens.

Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Nathalie COURTOIS, Présidente, et par Madame Isabelle FIORE, Greffière, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.

La Greffière La Présidente

 


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