Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Paris
Thématique : Inadéquation des critères d’évaluation de l’invalidité et de l’accès aux prestations sociales.
→ RésuméExposé du litigeM. [L] [J], né le 18 septembre 1954, a subi une transplantation hépatique totale le 7 juillet 2000 en raison d’une hépatite B et d’une cirrhose du foie. Il a été reconnu invalide par la COTOREP du Val-de-Marne le 10 septembre 2002, avec un taux d’incapacité permanente partielle de 80%. Sa carte d’invalidité a été renouvelée en 2004 et en 2009, où il a également obtenu l’allocation pour adulte handicapé (AAH) pour dix ans. Demande d’AAH et refusAprès avoir déménagé dans l’Essonne, M. [J] a demandé l’AAH et un complément de ressources en mars 2019. La CDAPH 91 a refusé sa demande le 3 décembre 2019, considérant que son taux de handicap était entre 50 et 79% et que la restriction à l’accès à l’emploi n’était pas établie. M. [J] a alors formé un recours administratif préalable, qui a également été rejeté en mars 2020. Recours contentieux et jugementM. [J] a introduit un recours contentieux, qui a été examiné par le tribunal d’Evry. Par jugement du 6 janvier 2022, le tribunal a déclaré recevable le recours mais a débouté M. [J] de ses demandes, le condamnant aux dépens. M. [J] a interjeté appel de ce jugement le 18 février 2022. Prétentions des partiesLors de l’audience du 5 juillet 2024, M. [J] a demandé à la cour d’infirmer le jugement de première instance, d’annuler la décision de rejet de son RAPO, et de lui ouvrir ses droits aux avantages sociaux refusés. La MDPH 91 était absente à l’audience, ce qui a conduit la cour à statuer sur la base des éléments fournis par M. [J]. Motifs de la courLa cour a jugé que la MDPH 91 n’avait pas correctement instruit le dossier de M. [J] et n’avait pas démontré que son état de santé s’était amélioré. Elle a souligné que M. [J] avait bénéficié d’un taux d’incapacité de 80% pendant de nombreuses années et que la MDPH devait prouver qu’il ne remplissait plus les conditions pour bénéficier de l’AAH. La décision de la CDAPH 91 a été jugée non motivée et donc nulle. Décision de la courLa cour a infirmé le jugement du tribunal d’Evry, a reconnu que le taux d’incapacité de M. [J] était supérieur ou égal à 80% à compter du 24 octobre 2019, et a ordonné à la MDPH 91 de réexaminer sa situation en conséquence. La MDPH a été condamnée à payer les dépens et une indemnité de 1 000 euros à M. [J] au titre de l’article 700 du code de procédure civile. |
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 12
ARRÊT DU 10 janvier 2025
(n° , 12 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : S N° RG 22/02940 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CFJSL
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 06 Janvier 2022 par le Pole social du TJ d’EVRY RG n° 20/00498
APPELANT
Monsieur [L] [R] [J]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représenté par Me Jacques DELACHARLERIE, avocat au barreau d’ESSONNE
INTIME
MAISON DEPARTEMENTALE DES PERSONNES HANDICAPEES DE L’ESSONNE
[Adresse 4]
[Localité 2]
non comparante, non représentée
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 05 Juillet 2024, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Marie-Odile DEVILLERS, Présidente de chambre, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Marie-Odile DEVILLERS, Présidente de chambre
Monsieur Gilles BUFFET, Conseiller
Monsieur Christophe LATIL, Conseiller
Greffier : Madame Agnès ALLARDI, lors des débats
ARRET :
– RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE
– prononcé
par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, initialement prévu le 27 septembre 2024, prorogé au 20 décembre 2024 et au 10 janvier 2025, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
-signé par Madame Marie-Odile DEVILLERS, Présidente de chambre et par Madame Agnès IKLOUFI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
M. [L] [J] est né le 18 septembre 1954.
Le 7 juillet 2000, il a bénéficié d’une transplantation hépatique totale, suite à une hépatite B et à une cirrhose du foie.
Il a été reconnu invalide le 10 septembre 2002 par la COTOREP du Val-de-Marne, avec un taux d’incapacité permanente partielle (‘IPP’) de 80%. Une carte d’invalidité avec mention station debout pénible lui a également été délivrée pour deux ans.
Le 6 octobre 2004, ces avantages ont été reconduits pour une période de deux ans.
Le 18 octobre 2009, la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées de la MDPH 94 (ci-après, la ‘CDAPH 94’) a reconnu à M. [J] un taux d’invalidité égal ou supérieur à 80% et lui a attribué l’allocation pour adulte handicapé (‘AAH’) pour une période de dix ans. Sa carte d’invalidité a été renouvelée pour la même durée.
M. [J] a déménagé dans l’Essonne.
La MDPH 94 a transféré à la MDPH de l’Essonne (‘MDPH 91’), l’ensemble des documents constitutifs de son dossier.
Le 12 mars 2019, M. [J] a formé une demande d’AAH et de complément de ressources, dont il a été accusé réception le 4 avril 2019.
Par décision du 3 décembre 2019, la CDAPH 91 a refusé à M. [J] le bénéfice de l’AAH, ramenant le taux de son handicap entre 50 et 79%, considérant que la restriction substantielle et durable pour l’accès à un emploi n’était pas établie. Le complément de ressources lui était refusé en raison du taux de handicap retenu.
M. [J] a formé un recours administratif préalable (‘RAPO’), dont il a été accusé réception le 14 janvier 2020.
Le 19 mars 2020, la CDAPH 91 a confirmé son refus de faire droit aux demandes d’AAH et a accordé à M. [J] une carte mobilité inclusion (‘CMI’) pour cause de station debout pénible.
Le 28 mai 2020, M. [J] a sollicité de son médecin traitant un certificat médical, faisant état d’une aggravation de l’état de santé, suite à un adénome de la prostate ayant nécessité une intervention chirurgicale.
Le 29 mai 2020, le greffe du tribunal d’Evry accusait réception du recours contentieux de M. [J].
Par jugement en date du 6 janvier 2022, ce tribunal a notamment :
– déclaré recevable le recours de M. [J] en contestation des décisions de refus de bénéfice de l’allocation adulte handicapé, du complément de ressources et de la carte mobilités inclusions mention invalidité ;
– débouté M. [J] de l’ensemble de ses demandes ;
– condamné M. [J] aux dépens.
Ce jugement a été notifié par lettre recommandée, accusé de réception signé par M. [J] le 20 janvier 2022.
Par acte du 18 février 2022, M. [J] a relevé appel de ce jugement.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
A l’audience du 5 juillet 2024, seul M. [J] était représentée par son conseil, lequel a déposé des conclusions visées par le greffe et présenté oralement ses observations.
La MDPH 91 était absence à l’audience, bien qu’elle ait été convoquée (AR signé le 13 mai 2024).
Par dernières conclusions déposées le 5 juillet 2024 et soutenues à l’audience, M. [J] demande à la cour de :
– dire régulier en la forme, recevable et bien-fondé son appel ;
– y faisant droit, infirmer le jugement dont appel sauf en ce qu’il a reconnu la recevabilité tant du RAPO de l’appelant que de celle de son recours contentieux ;
Statuant à nouveau,
– annuler la décision du 2 avril 2020 par laquelle le président du conseil départemental de l’Essonne a rejeté son RAPO ;
– lui ouvrir ses droits aux différents avantages sociaux qui lui ont été refusés ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant publiquement par arrêt réputé contradictoire,
INFIRME le jugement du tribunal judiciaire d’Evry en date du 6 janvier 2022 (RG 20/00498) en toutes ses dispositions ;
STATUANT à nouveau et y ajoutant,
DÉCIDE que le taux d’incapacité dont souffrait M. [L] [J] à la date de sa demande d’allocation adulte handicapée auprès de la maison départementale des personnes handicapées l’Essonne est supérieur ou égal à 80% ;
DÉCIDE que ce taux d’incapacité supérieur ou égal à 80% est applicable à la situation de M. [J] à compter du 24 octobre 2019 ;
ORDONNE à la maison départementale des personnes handicapées de l’Essonne de procéder au réexamen de la situation de M. [L] [J] sur la base de ce taux d’incapacité supérieur ou égal à 80% à compter du 24 octobre 2019 et d’en tirer toutes les conséquences, notamment sur le plan pécuniaire et y compris en ce qui concerne l’attribution d’une carte de mobilité inclusion avec les mentions appropriées ;
CONDAMNE la maison départementale des personnes handicapées de l’Essonne aux entiers dépens ;
CONDAMNE la maison départementale des personnes handicapées de l’Essonne à payer à M. [L] [J] une indemnité d’un montant de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
DÉBOUTE M. [J] de toute demande autre, plus ample ou contraire.
Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
La greffière La présidente
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